Author: Delachet A.   Queysanne M.  

Tags: mathematiques   algèbre  

ISBN: 2-13-036622-8

Year: 1955

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MICHEL QUEYSANNE
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PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE


QUE SAIS-JE? L'algèbre ntoderne MICHEL QUEYSANNE Ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure Agrégé de Mathématiques Maître-Assistant à la Faculté des Sciences de Paris ANDRÉ DELACHET Anoien élève de l'Eoole Normale Supérieure Agrégé de Mathématiques Professeur de Mathématiques spéciales au Lycée Descartes (Tours) Neuvième édition 76 e mille 
AUTRES OUVRAGES DES AUTEURS André DELACHET dans la collection c Que sais-je? . L'analyse mathématique, no 378. La géométrie contemporaine, n o 401. Calcul vectoriel, no 418. Calcul différentiel et intégral, no 466. La balistique, nO 470 (en collaboration avec J. TAILLÉ). La géométrie descriptive et ses applications, nO 521 (en collaboration avec J. MOREAU). La résistance des matériaux, nO 599. Les logarithmes et leurs applications, nO 850. La géométrie analytique, n o 1047. La géométrie projective, n O 1103. La géométrie différentielle, nO 1104. L'algèbre élémentaire, no 1163. La géométrie élémentaire, nO 1211. Michel QUEYSANNE Algèbre (M.G.P. et Spéciale A), c coll. U ., Paris, Armand Colin, 1964. ISBN 2 13 036622 8 g e édition : 2 e trimestre 1981 @ Presses Universitaires de France, 1955 108, Bd Saint-Germain, 75006 Paris 
INTRODUCTION « L'Algèbre est, à proprement parler,!' Analyse des équations», déclare J.-A. Serret dans l'Introduction de son Cours d'algèbre supérieure, paru dans la deuxième moitié du XIXe siècle. TI est en effet vrai que, jusqu'à une époque récente, l'Algèbre a été essentiellement l'étude des opérations classiques - addi- tion, multiplication, etc. - portant sur des nombres et la résolution d'équations algébriques, obtenues en égalant à zéro un polynôme entier par rapport à la variable qui s'appelle alors l'inconnue. Si les frontières de cette Algèbre classique sont assez bien marquées avec l'Arithmétique élémentaire du fait que celle-là ne considère plus exclusivement comme celle-ci le calcul sur des nombres entiers, elles le sont moins avec l'Ana- lyse maints manuels d'Algèbre élémentaire comprennent encore la théorie des limites et de la continuité et certains théorèmes d'Algèbre supérieure sont encore démontrés en faisant appel aux plus hautes théories de l'Analyse. TI n'en est pas moins vrai que l'une des caractéristiques de cette Algèbre classique est qu'elle C?alcule uniquement sur des nombres : nombres réels positifs et négatifs dont la notion intuitive s'est peu à peu dégagée de l'Antiquité au Moyen Age et nombres complexes inventés par les algébristes italiens de la Renais- sance; mais la caractéristique essentielle est que ce calcul s'effectue non - pas sur des valeurs numériques, mais sur des lettres, progrès de portée considérable dû à Viète et Descartes, en grande partie, et qui, au calcul numérique inéfiniment à recommencer pour chaque problème pratique, substitue l'em- ploi de la formule, qui donne non pas la solution d'un problème particulier, mais la solution de toute une famille de problèms semblables. Des considérations appartenant aussi bien à l'Algèbre clas- sique (théorie des équations) qu'extérieures à elle (relations logiques, transformations géométriques, compositions des forces et des vitesses, etc.) et aussi des notions forgées de toutes pièces par leurs inventeurs vont, au cours du XIXe siècle, considérablement élargir le champ du concept d'opération. Enfin, à l'aube du xx e siècle, dans un dernier effort d'abs- traction, l'Algèbre moderne va se construire - réalisation du vieux rêve de « Caractéristique universelle» - comme théorie 3 
des opérations sur des objets abstraits, objets appelés souvent êtres mathématiques, pour que soit souligné le caractère non contradictoire de leur définition, cette dernière ainsi que celle des opérations effectuées sur eux étant constituée par un ensemble de propriétés posées a priori et appelées axiomes. Naturellement, ces propriétés sont choisies de manière à retrouver les théories classiques comme cas particulier; mais, du fait que ces propriétés classiques n'ont pas été posées comme fondements, cette méthode axiomatique, qui est d'ailleurs, depuis Hilbert, celle de toute la mathématique moderne, va se révéler extrêmement féconde, par les champs nouveaux qu'elle ouvre à la recherche, mais aussi par la facilité qu'elle apporte, du fait de son abstraction même, de jeter des ponts entre des domaines jusqu'alors séparés: c'est peut-être dans ce pouvoir de synthèse que réside l'aspect le plus immédiatement utile de cette méthode axiomatique. Notre plan est alors tout tracé: dans une Première Partie mi-historique, mi-technique - mais de style classique - nous initierons le lecteur à un certain nombre de notions nouvelles. L'exposition systématique de ces notions et de leurs propriétés sera faite dans la Seconde Partie; la référence constante aux exemples concrets donnés dans la Première Partie atténuera le caractère forcément dogmatique de cet exposé. Enfin, dans une Troisième Partie, pour montrer que les définitions données ne sont pas entièrement gratuites, nous retrouverons, en les généralisan t, quelques propriétés classiques peut-être connues du lecteur. Mais alors que dans la Deuxième Partie nous démontrons tous les résultats fondamentaux que nous avan- çons, dans cette Troisième Partie, nous nous contenterons souvent d'ouvertures sur quelques théories captivantes de l'Algèbre moderne pour inciter certains lecteurs - et ce serait le signe de notre réussite - à étudier l'un des ouvrages fonda- mentaux indiqués dans la bibliographie. N. B. - En plus des symboles de l'algèbre classique, nous n'em- ploierons que quatre symboles nouveaux - ceux d'appartenance, d'inclusion, de réunion et d-intersection (cf.  17 et 18). Les en- sembles d'éléments seront représentés par des caractères gras, les lettres gothiques étant réservées aux idéaux, Avec N. Bourbaki (cf.  8, note (1», nous représenterons par N, Z, Q, R, C respective- ment, les ensembles des nombres naturels (entiers positifs ou nuls), des entiers rationnels (entiers positifs, négatifs ou nuls), des nombres rationnels, des nombres réels et des nombres complexes. RI, Ra et Rn désigneront les espaces euclidiens réels, respectivement à 2, 3 et n dimensions. Les références, sauf pour la table des matières seront faites par paragraphe, de même les notes seront numérotées par paragraphe. 4. 
PREMIÈRE PARTIE INTRODUCTION HISTORIQUE CHAPITRE" PREMIER ANTIQUITÉ ET MOYEN AGE 1. Nous n'avons point l'intention de retracer pas à pas toutes les démarches de l'esprit humain élaborant les théories de l'algèbre classique et moderne : plusieurs volumes de la taille de celui-ci n'y suffiraient pas et surtout notre compétence se trouverait en défaut. Nous nous contenterons, d'une part, de renvoyer, surtout pour toute l'histoire antérieure au XIXe siècle, aux excellents exposés de Marcel Boll (1) et de R. Taton (2), d'autre part de choisir, parmi la multitude des faits, ceux qui nous ont paru les plus caractéristiques dans l'élaboration des notions fondamentales de l'algèbre moderne; chaque fois que cela sera possible, nous montrerons, au besoin par des calculs empruntés aux mathématiques classiques, le mécanisme de ces découvertes; naturellement, il nous sera impossible de ne pas modifier la teneur de ces apports, en les simplifiant pour les rendre accessibles; nous tâcherons cependant de ne pas en altérer l'esprit. Nous ne nous dissimulons pas les inconvénients de cette méthode qui, partant de l'algèbre actuelle, tâche de retrouver les courants qui l'ont faite telle qu'elle est - tout au moins dans ses éléments. Néanmoins elle permettra, nous l'espérons, de comprendre le sens et la portée de l'exposé dogmatique de ces éléments dans les chapitres ultérieurs, et surtout de préparer le lecteur à des phénomèes algébriques qui lui sembleraient peut-être, sans cette introduction, étranges (1) Coll. c Que sais-je? t, no 42, Les étapes des mathématiques, passim, et en particulier chap. l, II et VII. (2) Coll. c Que sais-je? t, nO 198, Histoire du calcul, passim, et en particulier chap. l, II et IV. 5 
sinon absurdes: nombres à carré négatif, produit nul aucun des facteurs ne l'étant, multiplication non commutative, etc., qui se rencontrent fréquemment dans l'algèbre moderne. 2. Les idées algébriques dans l'Antiquité. - Deux courants vont s'opposer pendant toute cette période, comme d'ailleurs dans toute l'histoire des mathématiques, d'une part le courant empiriste, d'autre part le courant rationaliste. Le premier, représenté par les Sumériens et les Egyptiens, nous a doté en gros des nombres entiers, des nombres ration- nels, puis irrationnels et des opérations élémentaires sur ces nombres ; le second, représenté presque uniquement par les Grecs, nous présente d'une part, sur les entiers et les nombres rationnels, tout un ensemble de démonstrations théoriques pré- sageant les exposés axiomatiques de la fin du XIXe siècle, d'au- tre part toute une théorie des grandeurs, en fait des longueurs, qui peut être considérée comme l'équivalent de ce que l'on appellera, au XIXe siècle, la théorie du corps des nombres réels. Mais en Grèce, parallèlement à ce courant théorique, jalonné des noms de Pythagore, Platon, Eudoxe, Euclide, Archimède, existait certainement un courant pratique prolongeant l'arith- métique et l'algèbre des Sumériens et des Egyptiens pour les nécessités de la vie courante : enseignement élémentaire, mesure du temps, commerce, etc. Aucun ouvrage de cette sorte n'a subsisté, mais Diophante apparaît quelques siècles plus tard, tel une butte-témoin de terrains disparns, continuant et amplifiant singulièrement les traditions des calculateurs sumé- riens et égyptiens. Nous trouvons chez lui toutes les règles de calcul classique, aucune réticence sur l'emploi des irrationnels comme nombres, et même un symbole littéral pour représenter l'inconnue d'un problème, premier pas vers le symbolisme de l'algèbre: l'une des caractéristiques essentielles et de l'algèbre classique et de l'algèbre moderne. Et, faut-il l'avouer, si l'algébriste contemporain est heureux de trouver dans Euclide des idées très modernes, mais qui mettront plu de vingt siècles à germer (telle la relation d'équi- valence ad = bc (cf.  12, p. 24 et  33, p. 77) de toutes les représentations d'un même nombre rationnel i = J)' c'est au- humbles calculateurs, dont Diophante est l'héritier, qui n'ont pas hésité à calculer sur les nombres irrationnels, à considérer des produits de plus de trois nombres bien que l'interprétation géométrique par une aire ou un volume fasse défaut, que nous devons des pas décisifs dans la voie du progrès mathématique. Le bilan de ces deux millénaires peut paraître mince : les quatre opérations sur les nombres uniquement positifs, la règle de trois, la résolution de problèmes du premier degré par 6 
une quatrième proportionnelle ou la méthode de fausse posi- tion, la résolution d'équations du second degré numériquement ou géométriquement (une seule racine étant considérée); mais ces apports hérités ou retrouvés et amplifiés par les Hindous et les Arabes vont nous permettre de faire un nouveau pas en avant. 3. Les idées algébriques au Moyen Age. - Tandis que les vestiges de la science grecque allaient s'enfermer dans les couvents byzantins et que le haut Moyen Age occidental s'efforçait de comprendre les rndiments de la science gréco- romaine qu'il pouvait trouver dans les compilateurs Boèce, Cassiodore ou autres, les mathématiques allaient faire un nouveau progrès en Orient. Les Hindous, poursuivant la tradition pratique, inventent le zéro, les nombres négatifs, distinguent les deux racines d'une équa tion du second degré entre le v e et le VIle siècle. Quelques siècles plus tard, les Arabes font la synthèse des apports grecs et hindous et, apportant même une contribution personnelle non négligeable, publient dans le courant du IXe siècle de véri- tables traités d'arithmétique et d'algèbre. Ces traités, diffusés au cours des siècles suivants dans le bassin méditerranéen, vont enrichir l'Occident chrétien d'une synthèse des sciences grecque, hindoue et arabe: témoins de ce rôle joué par les Arabes, deux des mots de la langue mathématique actuelle : algorithme (1) et algèbre (2). Ces notions pénétreront en Occident au cours des multiples contacts qu'auront musulmans et chrétiens en Espagne, en Sicile et en Orient pendant les Croisades. Mais avec Euclide, Ptolémée et les auteurs arabes, Aristote va s'introduire en Occi- dent et les milieux intellectuels vont s'intéresser beaucoup plus à la logique, à la philosophie et la théologie (dont le renouveau est lié à cette redécouverte d'Aristote) qu'à la science; aussi bien malgré la floraison, après la découverte de l'imprimerie, de multiples traités de calcul utilisés presque exclusivement pour les besoins pratiques, le Moyen Age retentira-t-il surtout de discussions philosophiques et théolo- giques. Cependant, comme l'a noté J. Pérès (3), cette activité (1) Le substantif algorithme vient du nom propre Muhammed ibn Mùsd al-Khawàri%mi, auteur d'un traité d'Arithmétique (825), nom propre latinisé dans la traduction de cet ouvrage paru au XIIe siècle sous le titre Algorithmi de numero lndorum. (2) Le mot algèbre vient du titre d.un autre ouvrage de AI- Khawàrizmi : Hisab al-jabr wal-muquàbaJa ; hisab signifiant science, al-jabr contrainte, réduction, et al-muquàbala balance, comparaison: le titre évoquerait les opérations élémentaires du calcul des équations (cf. Aldo MICLI, La science arabe, Leiden, 1938. p. 83-84). (3) J. PÉRÈs, Les sciences e:mctes, Paris, 1930, p. 53. 7 
des universités naissantes dévolue en grande partie à la logique n'a certainement pas été étrangère aux progrès scientifiques des siècles futurs xv e et xvn e : les savants de ces époques, rompus aux disciplines scolastiques, pourront appliquer leur prodigieuse faculté de raisonnement aux rudiments de science qui se sont modestement développés pour les besoins pratiques (commerce, astronomie, navigation, etc.). Une fois de plus, nous vérifions que les époques les plus brillantes du point de vue scientifique ont été celles où s'est opérée la synthèse des deux courants empiriste et rationaliste que nous avons évoqués au début du chapitre. Avant de passer à l'évocation de ces siècles glorieux, qu'il nous soit permis de citer le nom de Raymond Lulle (XUIe siècle) qui nous apparaît dans son Grand Art comme l'un des plus lointains précurseurs des algébristes contemporains : « Le fameux Art de Lulle, nous dit E. Gilson (1), consiste essentielle- ment en tables sur lesquelles sont inscrits les concepts fonda- mentaux, de telle manière qu'en combinant les diverses positions possibles de ces tables les unes par rapport aux autres, on puisse obtenir mécaniquement toutes les relations de concepts correspondant aux vérités essentielles de la religion. » (1) E. GILSON, La philosophie au Moyen Age, Paris, 1947, p. 462. 8 
CHAPITRE II LE DÉVELOPPEMENT DE L'ALGÈBRE CLASSIQUE 4. L'algèbre en Italie au XVIe siècle. - C'est en Italie, au début du XVIe siècle, que deux pas essentiels allaient être franchis : d'une part, la résolution des équations du troisième et du quatrième degré, d'autre part, l'inven tion des nombres complexes. On sait que le carré de tout nombre positif ou négatif est positif; donc, la racine carrée d'un nombre négatif n'existe pas. Il peut sembler bizarre à notre esprit, coutumier des généralisations les plus hasardeuses, que l'on n'ait pas considéré a priori des entités comme V=I : c'est qu'il faut nous défaire des habitudes que nous a données la méthode axiomatique systématiquement employée et songer que les nombres négatifs, par exemple, ont été introduits comme solutions de problèmes concrets: n'est-ce pas journellement que se pose un problème tel que celui-ci: « Un homme ayant 100 francs, combien lui en reste-t-il s'il dépense 120 francs?» et un père âgé de soixante ans ne se demande-t-il jamais dans combien de temps il aura l'âge double de celui de son fils âgé actuellement de trente-cinq ans? Dans ces problèmes qualifiés de faux, ou tout au moins de mal posés, à cette époque, les nombres négatifs s'imposent comme dette ou comme date et les Hindous n'ont pas manqué de les interpréter ainsi, puis, la confiance aidan t, ils on t pu les traiter comme les « vrais nombres» (c'est-à-dire les nombres positifs) et, finalement, ne plus faire aucune différence en tre les nombres positifs et les nombres négatifs. Mais il faudra attendre le XIXe siècle pour avoir une théorie logique de leur existence: ainsi Descartes donnait encore aux racines négatives des équations le nom de « fausses racines». Aucune interprétation physique n'apparaissant pour l'équa- tion x 2 + 3 = 0 par exemple, on la disait alors « impossible», tout simplement; par contre, l'équation du troisième degré devait fournir l'occasion de considérer des nombres tels que V -3 . 9 
L'équation du troisième degré : z,3 + ax = b, fut résolue par Scipion dei Ferro (1526). Ce dernier remarqua que si l'on pose : x=u+v on a ou : (u + V)3 + a (u + v) = b u 3 + v 3 + (3 uv + a) (u + v) = b si bien que si l'on pose: uv = -i, on a : uS + V S = b, donc u 3 et v 3 sont solution de l'équation du second degré: X2- bX- (if = 0 d'où b + .J b 2 + 4 (if 2 b- J b 2 +4(if V S = 2 uS = soit : (1) x = u + v = J b 2/ ( b ) 2 ( a ) S :; b 2/ ( b ) 1 ( a ) 3 = 2+,.j 2 + 3 + 2-,.j 2 + 3 Cette forlnule est appelée formule de Cardan, car c'est ce der- nier qui l'a publiée le premier dans son Ars Magna (1545), après de multiples controverses avec son contemporain Tartaglia. Cette méthode très satisfaisante si () 2 + (i) 2 > 0, cas où l'on démontre qu'il n'y a qu'une racine réelle donnée précisément par la formule (1), aboutit à une impasse si l'expression précédente est négative. Ce dernier cas fut appelé « irréductible» par Tartaglia, bien que les savants italiens eussent fort bien vu que ce cas correspondait à l'existence de trois racines réelles pour l'équation du troisième degré: c'est ainsi que Bombelli, appliquant la formule de Cardan à l'équa- tion : x3 - 15 x = 4, dont 4 est évide mment racine, trouva: x= {/ 2 + {/ -121 + {/2-{l -121 Opérant alors sur ces « nombres» qu'il qualifiait de « sophis- tiques » comme sur des nombres réels, seuls nombres sur 10 
lesquels il concevait les opérations classiques, il montra que : et {/ 2+{!-121 =2+y -l {/2- {l-121 = 2-y -l et retrouva ainsi la racine initiale: x = 4. 5. Bombelli alla beaucoup plus loin : il considéra ces nombres « sophistiques» comme des combinaisons linéaires à coefficients positifs de + l, - l, + V=-ï , - vi - 1 , les deux premiers ne s'additionnant pas avec les deux autres, si bien qu'il put donner des règles très voisines de celles que nous enseignons actuellement, soit en désignant y -1 par i (nota- tion due à Euler) : (a + bi) + (a' + b' i) = (a + a') + (b + b') i (a + bi) (a' + b' i) = aa' - bb' + (ab' + a' b) i pour l'addition et la multiplication, formules obtenues en effectuant le calcul comme s'il s'agissait de polynômes en i et en remplaçant i 2 par .- 1. Ces nombres « sophistiques » (appelés depuis Gauss les nombres complexes) se présentent donc comme un ensemble d'éléments vérifiant les propriétés suivantes: (1) (a + b) + c = a + (b + c) Associativité de l'addi- tion. Existence d'un 0 unique. Existence d'un symé- trique unique a' pour tout a. Commutativité de l'ad- di tion. 1 (2) a + 0 = 0 + a = a (3) a + a' = a' + a = 0 (4) a + b = b + a (1) (ab) c = a (bc) (2) a.l = 1. a = a II (3) aa' = a' a = 1 (4) ab = ba Associativité de la mul- tiplication. Existence d'un nombre unité unique. Existence d'un inverse a' unique pour tout a =F o. Commutativité de la multiplication. Distributivité de la mul- tiplication par rap- port à l'addition. III  (1) a (b + c) = ab + ac  (2) (b + c) a = ba + ca Il 
Naturellement, ces propriétés couramment employées ne sont pas explicitées au X VIe siècle et encore moins leur comidération globale. Elles formeront plus tard les axiomes de ce que l'on appellera un corps commutatif(fin du XIXe siècle). Nous ne les donnons que parce que le lecteur s'apercevra que les nombres rationnels positifs et négatifs d'une part et les nombres réels positifs et négatifs d'autre part les vérifient aussi: les nombres rationnels forment donc un corps, de même les nombres réels. Par ailleurs, si la généralisation de Bombelli a pu être légitimée par la suite, c'est précisément parce qu'il a appliqué aux nombres complexes, nalvement peut-on dire, les règles cou- rantes pour les nombres réels, c'est-à-dire les règles 1, II, III, alors que les nombres réels ne sont pas les plus généraux. aux.- quels ces règles s'appliquent. Mais c'était une chance, car on ne peut aller plus loin dans cette voie : Weierstrass a en effet démontré en 1863 que les nombres les plus généraux. (formés comme expressions linéaires à coefficients réels avec de nou- velles entités tenes que i) vérifiant les règles l, II, III sont les nombres complexes. Nous voilà très loin du XVIe siècle; pour nous y replonger, notons que toutes ces études : résolution de l' équa tion du troisième degré, puis du quatrième (par Ferrari, élève de Cardan), calcul sur les nombres complexes, sont exécutées numériquement et non sur des symboles littéraux.; aussi bien, les formules sont remplacées par de longues périphrases et la formule de Cardan est exposée par Tartaglia en vingt-cinq vers (1). 6. La période française : Viète et Descartes. - C'est à un Français de la fin du XVIe siècle, Viète, que revient l'honneur de la création du symbolisme littéral qui sera encore perfec- tionné par Descartes, dont les notations, de ce point de vue, sont à peu près semblables aux nôtres. Au calcul numérique à refaire dans chaque cas, s'est donc substitué un calcul littéral valable dans tous les cas. Le résultat d'une question dont les données s'expriment par des lettres va devenir une formule valable pour tous les problèmes ana- logues : à l'artisanat du calcul numérique succède l'industrie du calcul algébrique; c'est là que réside l'essence de l'algèbre classique. C'était un premier pas dans la réalisation de cette méthode universelle que tant de philosophes, depuis Raymond Lulle, rêvaient de constituer. Certains, tel Leibniz, voyaient plus loin. Ce dernier fut en effet hanté toute sa vie par le rêve d'une (1) La Storia della Matematica neUa unilJersità de Bologna, Nicola Zanichelli editore (Bologna, 1947), p. 50 et 51. 12 
caractéristique universelle, d'un art combinatoire, d'un langage symbolique : « On n'a plus », nous dit Couturat (1), « à faire attention au contenu réel des idées et propositions; il suffit de les combiner et de les transformer suivan t les règles algé- briques ». Malheureusement, ces idées étaient trop en avance sur leur temps, et surtout sur la technique mathématique de l'époque : elles germeront petit à petit au cours du XIXe siècle pour éclore à l'aube du xx e dans le grand mouvement axiomatique sym- bolisé par le mathématicien allemand Hilbert. 7. L'algèbre au xvm e siècle. - A cette époque, les préoc- cupations dominantes des savants vont être la géométrie analytique inventée simultanément par Descartes (1637) et Fermat, et surtout le calcul infinitésimal inventé par Newton et Leibniz (1684), les premiers pas ayant été effectués par Barrow, Cavalieri, Fermat, Galilée, Pascal, etc. (2). L'application de l'analyse et plus particulièrement des équations différentielles, de la théorie des séries, des équations aux dérivées partielles à des problèmes de géométrie, de mécanique et d'astronomie domine tout le XVIIIe siècle, œuvre de mathématiciens illustres : les Bernoulli, Euler, d'Alembert, Lagrange, Laplace (2). Cependant, un problème capital de calcul intégral: l'intégration des fractions rationnelles (3), va donner une actualité nouvelle à un problème d'algèbre : la résolution des équations algébriques, c'est-à-dire la recherche des nombres x tels que : aoxn + tlt xn - 1 + ... + a n - l x + an = 0 les coefficients a o , al' .. ., an étant réels ou complexes. En tenant compte de l'ordre de multiplicité des racines (4), on savait que lorsque le degré n de l'équation était inférieur ou égal à quatre, cette équation avait toujours un nombre de racines égal à son degré. Par une intuition hardie, un Français, Girard, énonça au début du xvn e siècle ce théorème général : « Une équation de degré n a exactement n racines réelles ou imaginaires, distinctes ou confondues. » Ce théorème, appelé (1) La logique de Leibniz, p. 101. (BOUTROUX, Les principes de l'analyse mathématique, 1, p. 282.) (2) Cf. DELACHET, L'analyse mathématique, coll. « Que sais-je? t, no 378, chap. II et III. (3) L'intégration d'une fraction rationnelle P (x)/Q (x), P et Q étant des polynômes entiers, requiert sa mise sous la forme d'une somme d'un polynôme entier E (x) - sa partie entière - et « d'élé- ments simples. de la forme AIx - a, où A est une constante et a une racine de l'équation: Q (x) = 0, donc nécessite la résolutton de cette dernière. (4) Par exemple, l'équation: x. - 4 Xl + 5 x - 2 - 0 qui s'écrit (x -1)1 (x - 2) :::a 0 a une racine double 1 et une racine iimple 2. 13 
quelquefois théorème de d'Alembert, en hommage aux. tentatives de démonstration de ce dernier, ne fut complètement démontré que par Gauss ; comme il domina toute l'algèbre classique on l'appelle aussi théorème fondamental de l'algèbre (cf.  58, p.122). Mais, malgré tous les efforts des mathématiciens du xvn 8 et du XVUIe siècle, personne n'avait encore trouvé le moyen d'exprimer les racines d'une équation quelconque de degré supérieur à quatre à l'aide de radicaux; on commençait même à douter, vers la fin du siècle, de cette possibilité: les réflexions de Lagrange sur ce sujet allaient ouvrir la voie à Abel et à Galois. Mais nous arrivons là au seuil de la théorie des groupes, l'une des pierres angulaires de l'algèbre moderne. TI est d'ailleurs assez piquant de voir Lagrange déclarer dans une lettre à d'Alembert en 1781 (1) : « ... je commence à sentir que ma force d'inertie augmente peu à peu, et je ne réponds pas que je fasse encore de la géométrie dans dix ans d'ici. Il me semble aussi que la mine est presque déjà trop profonde, et qu'à moins qu'on ne découvre de nouveaux. filons, il faudra tôt ou tard l'abandonner. La Physique et la Chimie offrent mainte- nant des richesses plus brillantes et d'une exploitation plus facile; aussi le goût du siècle paraît-il entièrement tourné de ce côté-là et il n'est pas impossible que les places de Géométrie dans les Académies ne deviennent un jour ce que sont actuel- lemen t les chaires d'arabe dans les Universités ». En effet, Lagrange, grand analyste, immortel auteur de la Mécanique analytique, sommet de la science du XVIIIe siècle, ne pouvait deviner que ses réflexions sur les équations algé- briques et certaines de ses autres études qu'il jugeait probable- ment mineures (comme celles sur les formes quadratiques) allaient se révéler entre les mains d'Abel, Galois, Gauss, Cauchy et d'autres comme les « nouveaux filons» dont nous allons maintenant esquisser le développement. (1) BOUTROUX, L'idéal scientifique des mathématiciens, p. 154, d'après PELSENEER, Esquisse du progrès de la pensée mathématique, Des Primitifs au IX e Congrès international des Mathématiciens, Hermann, 1935, p. 119 et 120. 14 
CHAPITRE III LA GENÈSE DE L'ALGÈBRE MODERNE 8. Les algébristes contemporains s'accordent pour situer la date de naissance de l'algèbre moderne en 1910, avec le mémoire de Steinitz sur la Théorie algébrique des corps: c'est la première fois que se trouve abordée systématiquement l'étude d'opérations portant sur des êtres essentiellement abstraits, c'est-à-dire qui ne sont plus les objets, nombres ou figures de l'arithmétique, de l'algèbre ou de la géométrie classiques. Mais cette naissance a été précédée d'une période de gestation de plus d'un siècle. Pour clarifier l'exposé de cette genèse, nous allons, à la suite de N. Bourbaki (1), Y distinguer (peut-être un peu arbitrairement car ces courants s'inter- pénètrent (2» trois ordres d'idées: I O Le courant algébrique - au sens classique - issu des études de Lagrange, Vandermonde et Gauss sur les équations qui, avec Abel, Cauchy et surtout Galois, allait s'épanouir dans la théorie des groupes de substitutions illustré dans la seconde paxtie du XIXe siècle par Serret et Jordan. 2° Le courant géométrique. - D'abord la représentation géomé.. trique des nombres complexes aperçue au début du XIXe siècle, simultanément par Argand, Wessel, Cauchy et Gauss, allait attirer l'attention sur les vecteurs. Cette étude devait s'épanouir dans ce que l'on appelle l'algèbre linéaire surtout illustrée par les Anglais Hamilton, Cayley, Sylvester et par les Allemands Mobius et Grassmann. Puis, un renouveau des études purement géométriques (3), (1) N. BOURBAKI, Elémenls de mathématiques. Exposés historiques annexés aux différents chapitres du Livre II : Algèbre. N. Bourbaki est le nom collectif qu'a choisi un groupe de mathématiciens français fondé entre les deux guerres par des normaliens des promotions 1924 et environnantes, en vue de publier un grand Traité de mathématiques conforme aux desiderata de l'école axiomatique de Hilbert. L'in- lluence de ce groupe est considérable en France et à l'étranger, tant par la personnalité de ses membres que par les discussions, quelque- fois passionnées, soulevées par les idées du groupe (cf. n. 1, p. 63 et n. 3, p. 107). (2) Peu au début du XIX., davantage après 1850 et de plus en Plus lorsqu'on approche du XX.. (3) Mouvement dont les lointains précurseurs étaient Pascal et Desargues. 15 
illustrées par les Français Monge, Poncelet, Chasles, Brianchon, et les Allemands von Staudt et Steiner, allait conduire à l'étude de nombreuses transformations géométriques et surtout de leurs compositions. Enfin, l'invention des géométries non euclidiennes par le Hongrois Bolai (1833), le Russe Lobatchewsky (1829) et l'Alle- mand Riemann (1854) devait permettre la découverte de la relation interne existant entre une géométrie et un groupe de transformations. Ce point de vue, systématisé par Klein dans le célèbre programme d'Erlangen en 1872, s'épanouira à la fin du XIXe siècle et au xx e siècle dans les travaux de Sophüs Lie, H. Poincaré et Elie Cartan (1). 3° Le courant arithmétique. - TI appartenait à l'Allemand Gauss de faire faire à l'algèbre un pas décisif en considérant, pour la première fois semble-t-il, des opérations sur des élé- ments nouveaux qui n'étaient ni des nombres ordinaires, ni des transformations géométriques. Soit dans ses Disquisitiones Arithmeticae de 1801, soit dans les mémoires publiés de son vivant (démonstrations du théorème fondamental de l'algèbre, études sur les congrnences biquadratiques, etc.), Gauss eut une idée très claire de maintes notions qui, systématisées plus tard, devaient constituer le fondement de l'algèbre moderne: telles les relations d'équivalence, la strncture ds groupes com- mutatifs finis, la notion d'extension, etc. (2), sans parler de toutes les études non publiées de son vivant et où il devançait quelquefois de plusieurs décades ses successeurs : géométries non euclidiennes, quaternions (2), etc. Ces études arithmétiques furent le chef-d'œuvre de l'école allemande du XIXe siècle : Dirichlet, Kümmer, Kronecker, Dedekind, Hilbert devaient élaborer les notions de corps, d'idéal (2), approfondir l'étude des nombres algébriques et permettre finalement à Steinitz de présenter, dès 1910, une synthèse abstraite qui constitue, nous l'avons dit, la première manifestation de l'algèbre moderne. A cet admirable concert où chaque nation est venue apporter sa note personnelle nous devons ajouter la remarquable contri- bution des Américains B. et C. S. Pierce et Dickson vers la fin du XIXe siècle et au début du xx e . Enfin, pour couronner le tout, non pas définitivement, mais marquant une étape entre la jeunesse et le développement foisonnant de l'algèbre à notre époque,« le traité de Van der Waerden (publié en 1930) a réuni pour la première fois ces travaux en un exposé d'en- semble, ouvrant la voie et servant de guide aux. multiples (1) Pour ce point de vue géométrique, voir DELACHET, coll. « Que sais-je? », no 401, La géométrie contemporaine, Int. bist., et lIe Partie. (2) Cf. lIe Partie pour les définitions de ces notions. 16 
recherches d'algèbre abstraite de ces dernières années» (1). Il n'est pas question pour nous de retracer dans les quelques pages qui suivent même l'essentiel de ces théories, mais, par un ensemble d'exemples simples, nous voudrions préparer le lecteur à l'exposé forcément aride et dogmatique de la Seconde Partie de ce petit livre: présenter en style classique d'algèbre, d'arith- métique et de géométrie quelques notions parfois étranges d'algèbre moderne, tel est le but des paragraphes suivants. 9. Représentation géométrique des nombres complexes. - A la charnière du XVIIIe et du XIXe siècle, plusieurs mathéma- ticiens eurent simultanément l'idée de représenter géométri- quement les nombres complexes: ce sont, nous l'avons dit: un Danois Wessel (1797), un Suisse ATgand (1806), ainsi que Gauss et Cauchy. Un point du plan M (fig. 1) de coordonnées cartésiennes: - - --+ OH = a, OK = b, ou polaires (Ox, OM) = a + 2 lm (argu- ment), OM = T (module), représentera un être nouveau (a, b) appelé nombTe complexe: M est l'image de ce nombre (a, b); (a, b) est l'affixe de M.  L'addition correspondra à l'addition des vecteurs OM et -+ OM' (fig. 2) :    OM + OM' = OS d'où: (a, b) + (a', b') = (a + a', b + b') et la multiplication par (a, b) à une similitude de centre 0, d'angle a et de rapport r ; si bien que (fig. 3) les coordonnées polaires du point P représentant le produit seront: a + a' + 2 k1r et rT' et ses coordonnées cartésiennes : TT' cos (a + a') = TT' (cos a cos a' - sin a sin a') = aa' - bb' rr' sin (a + a') = TT' (sin a cos a' + sin a' cos a) = ab' + ba' Fixons notre attention sur le nombre i représenté par le point V de Oy (fig. 1) tel que OV = 1, d'argument  et de module 1. Multiplier par i un nombre d'image M revient donc à faire subir au vecteur oM une rotation ( 0,;) et par consé- quent . .. 10 2 = .  = -1 Voilà donc l'explication concrète de ce résultat étrange l'existence d'un« nombre» de carré négatif. (1) N. BOURBAKI, notice historique du livre 1 de son Algêbre. 17 
" :y V (+ i) K db> 3t -..... +- " 2 --------- , o U (+J) Hea) X Fig. 1 y S(Z+Z') o x Fig. 2 18 
JI P( ZZ') o u C+ 1) .x Fig. 3 Moyennant l'addition, tout nombre (a, b) peut s'écrire : (a, b) = (a, 0) + (0, b) (a, 0) est un nombre réel a (1) d'image H sur l'axe Ox (fig. 1) et (0, b) d'image K sur Oy peut s'écrire ib, produit du nombre réel b d'image K, point de Ox par i (opérateur de rotation de +  autour de 0 ), donc : (a, b) = (a, 0) + (0, b) = a + ib = r (cos 6 + i sin 6) Nous retrouvons ainsi avec une interprétation géométrique concrète, les relations données au  5, p. Il. Donnons, pour terminer, un exemple plus compliqué qui nous sera utile au paragraphe suivant: soit à trouver les nombres on a : z = r (cos 6 + i sin 6) z3=1 z3 = r 3 (cos 3 6 + i sin 3 6) { 36=2k1t r=1 tels que : donc : (1) Ou plus exactement l'ensemble des nombres (a, 0) est iso- morphe à l'ensemble des nombres réels. Cf. g 45, p. 104. 19 
on trouve donc trois nombres (au lieu d'un seul dans le domaine réel) ; ce sont le nombre réell et les deux. nombres complexes : 21t + . . 21t -1 + iV3 cos- sm- = 332 41t + ..41t -1-iV3 cos- sm- = 332 Le lecteur pourra vérifier par le calcul algébrique que le cube de chacun de ces nombres est bien égal à ], et que si l'on désigne le premier par j (1) le second est égal à j2 (2). 10. La résolution des équations par radicaux. - Devant les échecs rencontrés dans les tentatives de résolution des équa- tions générales de degré supérieur à quatre par radicaux., Lagrange étudia les raisons probables du succès de la résolu- tion des équations des quatre premiers degrés. Pour l'équation x 2 + px + q = 0, de racines x', x", il remarque d'abord que l'on connaît en fonction des coefficients, et la somme des racines : X'+X"=_p et le carré de la différence des racines : (x' - X")2 = (x' + X")2 - 4 x' x" = p2 - 4 q d'où la résolution à l'aide de radicaux. du second degré:  x' + x" = - p l :ri - x" = ::!: V p 2 - 4 q x' = -p + Vp2-4q ! x" = _p_p2-4q TI remarque ensuite que pour l'équation: x3 + px + q = 0, de racines x', x", X"I, l'expression : (x' + jx" + j2 X"/)3 (1) lorsqu'on permute x', x", x''', de toutes les manières possibles, ne prend que deux valeurs. En effet, il y a six permutations (1) Notons que les ouvrages d'électricité qui utilisent les nombres complexes représentent i (racine carrée de - 1) par j pour ne pas entraîner de confusion avec l'intensité de courant : il ne s'agit naturellement pas du nombre j que nous venons de définir. (2) Ces deux nombres complexes d'expression a + bi et a - bi et d.ïmages symétriques par rapport à 0% sont dits conjugués. Le conjugué de :z se note z. 20 
possibles pour les trois nombres x', x", x'" ; elles se classent en deux catégories (voir  Il) : (x', x", X"/); (x", X"', x'); (x''', x', x") (x', X"', x"); (x''', x", x'); (x", x', X"/) dans l'une ou l'autre de ces catégories, chacune de ces permu- tations peut se déduire de la précédente en faisant avancer d'un cran chaque lettre, la première devenant la dernière, ou encore par ce qu'on appelle une substitution circulaire (cf.  Il, p. 22). Comme j3 = (j2)3 = 1, on voit que les trois permutations d'une même catégorie donneront la même valeur à l'expres- sion (1). On obtient donc ainsi deux valeurs A et B. Un simple exercice de pur calcul montre alors que ces deux valeurs sont racines d'une équation du second degré dont les coefficients sont rationnels en p et q. La résolution de l'équation du troisième degré est donc ramenée à la résolution d'une équation du second degré, à la recherche de deux racines cubiques, et enfin à la résolution d'un système du premier degré (1) : j x' + x" + x'" = 0 x' + jx" + j2 x'" = {! A x' + j2 x" + jx'" = {I B et l'on montrerait facilement, tout au moins lorsque pet q sont réels, que la racine x' est celle dont l'expression a été donnée par la formule de Cardan (p. 10) en posant: p = a et q = - b. Lagrange fit la même étude pour l'équation du quatrième degré en montrant que l'expression (x' x" + X'II x"") ne prend que trois valeurs lorsque l'on permute les lettres de toutes les manières possibles (alors qu'il y a 4! permutations (2) de quatre objets). Bien que ses recherches n'aient pas abouti pour les équations de degré supérieur à quatre, Lagrange eut déjà nettement conscience que la solution du problème résidait dans l'étude des expressions des racines invariantes lorsque l'on effectue certaines permutations sur l'ordre de ces racines. TI appar- tenait à Abel de démontrer, vers 1824, qu'il était impossible de résoudre par radicaux une équation du cinquième degré et à Galois, en 1831, de donner les conditions nécessaires et suffisantes pour qu'une équation soit résoluble par radicaux. Nous ne po":!vons dans cet ouvrage, simple introduction à (1) On sait, en effet, que l'équation étant sous forme réduite (pas de terme en Xl), ses racines ont une somme nulle. (2) Rappelons que l'on note le produit des n premiers entiers naturels: 1, 2, 3 .. . (n -1).n = n ! que l'on énonce c factorielle nt, avec la convention supplémentaire O! = 1. 21 
l'algèbre moderne, donner même un aperçu sur cette délicate théorie de Galois. Nous nous contenterons d'indiquer quelques notions relatives aux. groupes de substitutions. Il. Groupes de substitutions. - Etant donnés trois objets distincts a, b, c, passer de cet ensemble a, b, c à l'ensemble b, c, a en changeant a en b, b en c, c en a, c'est effectuer une substi- tution (1) de ces trois objets; il Y a donc six substitutions de trois objets a, b, c en y comprenant la substitution identique conservant chaque objet, que nous noterons symboliquement: u = (a, b, c) v = (b, c, a) w = (c, a, b) x = (a, c, b) y = (c, b, a) z = (b, a, c) w, par exemple, change a en c, b en a, c en b ; x conserve a, change b en c, c en b, etc. Faire le produit, de deux substitutions S et S' que l'on note S' S (2), c'est effectuer sur les objets a, b, c, la substi- tution S d'abord, S'ensuite; par exemple yx = (t;, b, a) (a, c, b) = (c, a, b) = w Si nous représentons le tableau des trente-six produits de ces six substitutions deux à deux :  "1 vi wlxlyl z - u u v w x y z - - - - - - - v v w u y z x - - - - - - - w w u v z x y - - - x x z y u w v - - - - - - - y y x  v u w - - - - - - - z z y x w v u Nous constatons : I O Le produit de deux substitutiom est une substitution. Ce produit est a$sociatif comme le produit de plusieurs nom- (1) Pour plus de détails, cf. DELACBET, La géométrie contemporaine, c Que sais-je? t, nO 401, p. 21 à 28. (2) Dans le présent ouvrage, le produit de deux transformations, T d-abord, T' ensuite, sera noté T' T; cf. Notions d'application composée, S 19, p. 42. 22 
bres : propriété évidente du produit de plusieurs transfor- mations (1). 20 TI existe une substitution appelée substitution identique u telle que quelle que soit la substitution S : Su = uS = S. Elle joue le rôle du nombre 1 dans le produit de deux nombres. 30 A chaque substitution correspond son inverse. Par exemple à v qui change (J en b, b en c, c en a correspond w qui change (J en c, b en a et c en b. Par contre, ces produits ne sont pas nécessairement commu- tatift, car si wu = vw = u, on a w = yx #: xy = v. Un tel ensemble de substitutions s'appelle un groupe depuis Cau- chy (1815) ; mais Gauss avait, avant 1801, une idée très claire des propriétés de tableaux tels que le précédent. D'autre part, on constate que le tableau des produits deux à deux des trois substitutions u, v, w possède les trois propriétés précédentes: donc ces trois substitutions forment un groupe que l'on appelle un sous-groupe du groupe précédent, notion féconde qui jouera un rôle important dans les recherches de Galois. Les substitutions x, y, z, échangent entre elles deux objets et conservent le troisième; on les appelle des transpositions; u, v, w sont équivalentes au produit d'un nombre pair de transpositions (0 pour u, 2 pour v et w) : on conçoit que les produits deux à deux de u, v, w donneront toujours des substi- tutions équivalentes au produit d'un nombre pair de transpo- sitions, donc qu'elles formeront un groupe que l'on appelle le groupe alterné As de trois objets, sous-groupe du groupe des substitutions u, v, w, x, y, z, appelé groupe symétrique Sa de trois objets. Enfin, les substitutions v, w sont appelées circulaires pour rappeler qu'on peut leur faire correspondre les rotations superposant un triangle équilatéral ABC de centre 0 sur lui- même; avec u, elles correspondent respectivement aux rota- tions Rk ( 0, k 2 3 TC ) , k = 0, 1, 2, tandis qu'à une transposition x, y ou z correspond une symétrie par rapport à une médiatrice d'un côté. Toutes ces considérations s'étendent aux substitutions por- tant sur n objets: il yen an! formant le groupe symétrique Sn; chacune d'elles est équivalente au produit de p < n transpo- (1) Evidence matérialisée par le schéma suivant: S'S . S S' + ) . ) . , S" ) . t S" S' d'ob S" (S' S) -= (S" S') s. 23 
litions. Lorsque pest 0 ou un nombre pair, elles forment le roupe alterné An sous-groupe de Sn. Par exemple, pour n = 4, on obtient 4 ! = 24 substitutions èle quatre objets formant S4 : elles correspondent aux déplace- ments et antédiplacements superposant sur lui-même un tétraèdre régulier ABCD, une transposition correspondant à la symétrie par rapport au plan médiateur d'une arête, les deux autres sommets étant conservés. Le groupe alterné A4 comprend la substitution identique u (0 transposition), les substitutions équivalentes aux produits de deux transpositions admettant un élément invariant commun, par exemple (X = (a, d, c, b) (a, c, b, d) = (a, c, d, b) elles correspondent aux rotations autour d'une hauteur du tétraèdre (conservant un sommet et permutant circulairement les trois autres) ; il Y en a donc huit (deux par sommet) ; elles comprennent enfin les substitutions équivalentes aux produits de deux transpositions n'ayant aucun élément commun, par exemple À = (a, b, d, c) (b, a, c, d) = (b, a, d, c) chacune d'elles correspond au produit de deux symétries par rapport à des plans médiateurs de deux arêtes opposées, c'est-à- dire à une rotation d'angle 1t autour de la perpendiculaire com- mune à un couple d'arêtes opposées; il yen a donc trois, À,, v: donc A4 comprend 1 + 8 + 3 = 12 substitutions. Parmi celles-ci, on verra que u, À, , v forment un groupe appelé groupe de Klein V 4 . L'existence de ce dernier entraîne le fait que pour une équation du quatrième degré de racines x', x", x''', x"", l'expression x' x" + x'" x"" ne prend que trois valeurs lors- qu'on permute ces racines de toutes les manières possibles (cf.  10). Enfin, u et À (ou , ou v) forment un groupe à deux éléments G 2 . Nous avons donc une suite de groupes 8 4 , A 4 , V 4 , G 2 , comprenant respectivement vingt-quatre, douze, quatre et deux substitutions dont chacun est un sous-groupe du groupe précédent: nous pouvons seulement signaler au lecteur que ce phénomène est capital dans la théorie de Galois. 12. Classes résiduelles modulo B. - Si les considérations précédentes se sont introduites naturellement pour étudier la résolubilité des équations algébriques entières par radicaux, les études suivantes, encore plus abstraites, sont dues au génie :créateur de Gauss. A côté de l'égalité des nombres entiers rationnels (positifs, négatifs et zéro), Gauss imagine une notion nouvelle généra- lisant l'égalité, notion contenant en germe l'un des outils les plus éconds de l'algèbre moderne : la notion de congruence 24 
modulo un entier naturel non nul n. Avec lui nous dirons, a et b étant des entiers rationnels, que a est congru à b modulo un entier naturel, n #= 0 si (a - b) est divisible par n et nous écrirons : a = b (mod. n) Cette relation est réflexive (a est congru à lui-même modulo n) symétrique (6 est congm à a) et transitive:  a = b (mod. n) entraîne a = c (mod. n)  6 = c (mod. n) On appellera plus tard relation d'équivalence toute relation possédant ces trois propriétés (cf. 9 33, p. 83). Cette notion de congru en ce va nous conduire à une partition extrêmement féconde de l'ensemble Z des entiers rationnels. En effet, si l'on considère la suite : (1) ... - (k + 1) n, - kn, ..., - 2 n, - n, 0, n, 2 n, . . ., kn, (k + 1) n, . . . tout nombre de Z appartient à (1) ou est compris entre deux termes consécutifs de (1), et par suite il existe un entier ration- nel h et un entier naturel r (appelé reste de la division de p par n) tel que : p=hn+r Or<n Tous les entiers rationnels p conduisant au même reste r sont congms modulo n ; nous désignerons leur ensemble par T. Tous les entiers rationnels se rangent en n classes: les nombres p = hn p=hn+ 1 (h entier rationnel) désignés par o i ........................................................... . p=hn+n-l (n 1) Deux nombres de la même classe sont congrus modulo n, deux nombres de deux classes différentes ne l'étant pas. Ces classes s'appellent les cl!JSses de congruence modulo n ; on note leur ensemble (Zln). TI est clair que la somme et le produit de deux nombres des classes T et T' sont des nombres qui appartiennent aux classes contenant respectivement r + r' et rr'. On peut donc définir une addition et une multiplication pour les classes de congmence modulo n, par exemple, pour n = 3 les tables d'addition et de multiplication des trois éléments 0, i, 2, s'écrivent: 25 
ô . 2 + 1 - - - - Ô Ô i 2 - - - - i . 2 Ô 1 - - - - . 2 Ô i 2 ô . 2 x 1 - - - - Ô Ô Ô Ô - - - - i Ô i 2 - - - - 2 Ô 2 i On peut voir dans ces tableaux. que l'addition est associative, commutative et qu'il existe un élément Ô tel que : +Ô=Ô+= et que tout élément a a un symétrique a', tel que :  + , = Ô Ces propriétés sont vraies pour n quelconque; nous dirons donc que les congruences modulo n forment un groupe relative- ment à l'addition. Pour la multiplication, dans le cas n = 3 pour lequel nous avons écrit la table (ci-dessus à droite), on voit qu'elle est associative, commutative, distributive à gauche et à droite par rapport à l'addition, c'est-à-dire que :  (b +) = ab +  et (,; + ) d = b +  qu'il existe une classe i telle que : i=i= et de plus que tout élémen t  a un inverse I tel que '='=i Mais cette dernière propriété n'est vraie que si n est un nombre premier; par exemple, pour n = 6, la table de multi- plication révèle que, 2, 3, 4 n'ont pas d'inverse, puisque i ne se trouve pas dans leur colonne ou dans leur ligne. Par consé- quent, cet ensemble (Z/n) n'a pas toutes les propriétés d'un corps commutatif énoncé au  5, mais on peut définir sur lui une addition ayant les propriétés « énoncées dans ce para- graphe et une multiplication associative et distributive par rapport à l'addition : on dit qu'il constitue un anneau (1) commutatif possédant un élémet unité (cf.  28, p. 64). (1) Cf. lIe Partie. Cette notion et certaines des suivantes sont bien postérieures à Gauss. Nous profitons de la notion de congruence pour mettre en évidence certains phénomènes algébriques intéressants et peut-être nouveaux pour le lecteur. 26 
Ô i 2 . . 5 x 3 4 - - - - - - - . Ô Ô Ô Ô Ô Ô 0 - - - - - - - i Ô i 2 . . 5 3 4 - - - - - - - 2 . 2 . Ô . . 0 4 2 4 - - - - - - - . Ô . Ô . Ô . 3 3 3 3 - - - - - - - . Ô 4 2 Ô . 2 4 4 - - - - - - - . Ô 5 4 . 2 i 5 3 L'addition des classes de congmences modulo 11 a une interprétation géométrique remarquable mise à profit par Gauss dans l'étude des racines n-ièmes de l'unité (cf. p. 22 l'exemple des racines cubiques). Si l'on considère les rotations planes Rk de centre 0 et d'angle k. 2 Tt/n (k entier rationnel) il y en a 11 distinctes Ro, RI' . . ., Rn-l (y compris la rotation nulle); elles correspondent aux classes Ô, i, . . ., (n  1) et le lecteur verra sans peine que l'addition des classes de congmences modulo n correspond au produit des rotations d'angles k.2 Tt/1I : Rk  k R k ,  k' Rk.R k ,  (k + k') Nous avons encore là un exemple remarquable d'une corres- pondance que nous appellerons un isomorphisme (1). Enfin, les classes modulo UD nombre composé tel 6 vont nous réserver des surprises plus grandes. On sait que, pour que le produit de deux nombres (entier naturel ou rationnel, rationnel, réel ou complexe) soit nul, il faut que l'un des deux facteurs le soit: il n'en est plus ainsi ici puisque: 2.3 = Ô et 3.4 = Ô Nous dirons que 2 et 3 sont de véritables diviseurs de Ô. TI en résulte, en particulier, que le degré du produit de deux polynômes (cf. 9 46) dont les coefficients sont pris dans (Z/n) peut être inférieur à la somme des degrés des polynômes fac- teurs; par exemp]e, les coefficients appartenant à (Z/6) (2 x + 5) (3 x 2 + 1 x + 4) = 5 x 2 + i x + 2 TI en résulte une modification profonde de la théorie des polynômes et des équations entières lorsque les coefficients (1) Voir note page précédente. 27 
sont pris dans (Z/n). Les résultats classiques de l'algèbre élémentaire qui sont considérés comme « allant de soi» (com- mutativité du produit, nullité du produit entraînant celle de l'un des facteurs) ne sont donc pas dans la « nature des choses», mais proviennent des propriétés du corps des réels ou des complexes et peuvent être profondément modifiés si l'on se trouve dans un autre domaine. 13. Congruences de polynômes. - Nous avons déjà dit combien la représentation géométrique des nombres complexes avait hanté les mathématiciens à l'aube du XIXe siècle. Cette représentation, devenue entièrement claire chez Gauss vers 1831, n'était en effet pas absolument satisfaisante, car elle légitimait l'emploi de nombres à carré négatif par des consi- dérations purement géométriques. Cauchy parvint vers 1847 à rattacher l'algèbre des nombres complexes à celle des nombres réels par l'intermédiaire des congruences de polynômes. Etant donnés deux polynômes (1) A et B entiers en x, on sait qu'il existe un seul couple de polynômes entiers en x, Q et R, appelés respectivement quotient et reste de la division de A par B ordonnés suivant les puissances décroissantes de x et vérifiant les conditions: A = BQ + R degré R < degréB Nous dirons que deux polynômes Al et A 2 sont congrus modulo B s'ils ont même reste de division par B et nous écrirons: Al = A 2 (mod. B) On voit tout de suite que cette relation entre Al et A 2 est une relation d'équivalence et qu'elle est identique à la suivante: la différence Al - A 2 est divisible par B. On voit ensuite que si RI et R 2 sont les restes de la division par B de Al et A 2 : Al + A 2 = RI + R 2 (mod. B) Al A 2 = RI R 2 (mod. B) Cauchy considéra les congmences modulo le polynôme (x 2 + 1) : les restes de la division des deux polynômes à coef- ficients réels f (x) et g (x) par ce polynôme du second degré seront de degré inférieur à celui du diviseur, donc du premier degré; on aura donc (a, b, c, d, étant des nombres réels) f (x) = a + bx (mod. x 2 + 1) g (x) = c + dx (mod. x 2 + 1) (1) Anticipant sur la définition moderne des polynômes (cf.  46), nous désignons par le symbole = ce que l'on appelle l'identité des polynômes en algèbre élémentaire (c'est-à-dire le fait, une fois réduits, d-avoïr les mêmes coefficients pour les mêmes puissances de la va- riable), réservant le symbole = pour les congruences de polynômes. 28 
d'où : f(x) + g (x) == (a + c) + (6 + d) x (mod.,, + 1) f(x) g (x) == (a + bx) (c + th) (mod. z,2 + 1) soit : -' (x) g (x) = ac + (ad + bc) x + bdx 2 = = ac + (ad + bc) x + bd (x 2 + 1) - bd = = (ac - bd) + (ad + bc) x (mod. x 2 + 1) Donc, a, b, c, d étant réels, nous avons: (a + bx) + (c + dx) = (a + c) + (b + d)x (a + bx) (c + dx) = (ac - bd) + (ad + bc) x (mod. x 2 + 1) (mod. x 2 + 1) Ces formules, démontrées entièrement dans le domaine réel, montrent la légitimité des formules posées audacieusement par Bombelli (cf. 9 5), interprétées géométriquement par Gauss (cf. 9 9) et ses émules, pour les nombres complexes: le calcul sur les nombres complexes se ramène à celui des congruences de polynômes à coefficients réels modulo x 2 + 1. Ce calcul des congmences de polynômes allait dans la suite (comme pour les congmences de nombres entiers) se montrer extrêmement fécond. Considérons, par exemple, des polynômes entiers en x, f (x) et g (x) ; substituons à x la variable (x + y), y étant une variable auxiliaire : nous pouvons considérer f(x + y) et g (x + y) comme des polynômes en y, les coeffi- cients devenant des polynômes en x. Etudions sur ces poly- nômes les congmences modulo y2 ; nous avons : d'où : f (x + y) = f (x) + yf' (x) g (x + y) = g (x) + yg' (x) (mod. y2) (mod. y2) f(x + y) + g (x + y) = f(x) + g (x) + + y (f' (x) + g' (x)]  (x + y).g (x + y) = f(x).g (x) + v + y (f(x).g' (x) + f' ().g (x)] (mod. y2) (mod. y2) si nous appliquons ces résultats au polynôme x n (n entier naturel), nous aurons : (x + y)n = x n + nx n - 1 y (mod. r) Le lecteur qui voudra faire le calcul sur un polynôme f(x) quelconque, ax 2 + bx + c par exemple, reconnaîtra sans peine que f' (x), g' (x) et nx n - 1 (c'est-à-dire le coefficient de y dans f (x + y), g (x + y), (x + y)n) ne sont autres que les dérivées ds polyn6mes f(x), g () et Z,n, les deux formules données 29 
indiquant les dérivées d'une somme et d'un produit de poly- nômes. Par conséquent, sans aucune référence à des considé- rations infinitésimales, nous avons défini le polynôme dérivé d'un polynôme grâce à la notion de congmence. 14. Quaternions. - Vers 1812, sous l'impulsion d'un groupe de mathématiciens de Cambridge (l'Analytical Society), la mathématique anglaise va sortir de l'isolement et de la léthargie où l'avait plongée un respect scmpuleux et exclusif des notations de Newton. Mais ce n'est que dans les générations suivantes que les contacts avec le continent vont porter leurs fruits; d'ailleurs, les savants anglais sauront toujours garder une très grande originalité, ce qui, dans un domaine en pleine gestation comme celui qui nous occupe, présente un intérêt de premier plan. Les nombres complexes sont encore à l'origine des recherches d'Hamilton (1805-1865) : ce dernier, ayant considéré les nom- bres complexes d'une façon toute moderne, c'est-à-dire comme couples de nombres réels (a, b) rangés dans un certain ordre, essaya d'étendre ce procédé à des {( nombres » formés de n > 2 nombres réels rangés dans un certain ordre. C'est au cours de ces recherches qu'il introduisit la notion de vecteur (1). L'obstacle essentiel était que si l'on voulait établir une corres- pondance entre les produits de ces nombres, pour n = 3, et les rotations de l'espace autour d'axes passant par un point fixe 0, il fallait abandonner la commutativité de la multiplication. C'est ce que fit Hamilton après plusieurs années d'efforts et avec une hardiesse que nous pouvons à peine concevoir de nos jours : il créa ainsi les quaternions (1843). Un quaternion q se présente comme une expression linéaire et homogène à coefficients réels par rapport à quatre sym- boles u, i, j, k. Deux quaternions: q = su + ai + bj + ck et q' = s' u + a' i + b' j + c' k sont dits égaux (q = q') si : s = s', a = a', b = b', c = c' L'addition et la multiplication de deux quaternions q et q' se font en opérant comme si u, i, j, k étaient des variables indépendantes dont la table de multiplication est indiquée ci-après. Le quaternion : su+Oi+Oj+Ok (1) Cf. DELACHET, Calcul DectorieZ, coll. « Que sais-je? ., no 418, Introduction. 30 
est identifié avec le nombre réel s, le symbole u étant identifié avec l'unité des nombres réels. On notera de même que le symbole i des quaternions peut être identifié au symbole ides nombres complexes pour le quaternion: su + ai + 0 j + 0 k (1). i . k u } . . k u u  } ---  Zr -u k -j --- } j -k -u Zr --- k k j - -u On obtient  q + q' = (s + s') + (a + a') i + (b + b')j + (c + c') k (1) qq' = (ss' - aa' - bb' - cc/) + (bc' - cb/) i + + (ca/ - ac/)j + (ab' - ba') k On voit que le produit est en général non commutatif. -+-  On peut noter un quaternion (s, v) en désignant par v le vecteur de composantes a, b, c sur un trièdre trirectangle auxiliaire. On a alors: (2)    -+- (s, v) + (s/, v') = (s + s', v + v')     (s, v) (s/, v') = (8S' - vv/, sv' + s' v + v 1\ v') la non-commutativité du produit est ainsi rattachée à celle du produit vectoriel (1). On voit sans peine que l'addition est associative, commutative, que le quaternion 0 + 0 i + 0 j + 0 k identifié au zéro des nombres réels en joue le rôle et que q a un opposé unique : -q = -s-ai- bj-ck (1) Ces identifications sont justifiées par les règles d'addition et de multiplication (1) données plus loin. Dans un but de simplification d'écriture, nous omettrons le symbole u et écrirons un quaternion: q - s + ai + bj + ck. 31 
On montre, ce qui est plus délicat, que la multiplication est associative, qu'il existe un quaternion unique 1 + 0 i + + 0 j + 0 k identifié au nombre réel 1 qui joue le même rôle que lui : q.l=l.q=q On verra enfin que la multiplication est distributive par rapport à l'addition (à droite et à gauche) : cela résulte (par les formules (2» de la distributivité de la multiplication d'un vecteur par un nombre réel par rapport à la somme géomé- trique et de la distributivité des produits scalaires et vectoriels par rapport à la somme géométrique (1). Bien que la multiplication ne soit généralement pas commu- tative, tout quaternion q  0 a un inverse unique q' vérifiant: qq'=q'q=l On verra que : , s - ai - hj - ck q = S2 + a 2 + b 2 + c2 Cet ensemble possède donc toutes les propriétés l, II, III du  5 sauf II (4) : on dit que c'est un corps non commutatif. Cette suppression de la commutativité du produit entraîne des propriétés fort curieuses: par exemple, il y a deux quotients d'un quaternion ql par un quaternion q2  0, l'un dit quotient à gauche q' tel que : , qq2=ql l'autre dit quotient à droite q" tel que : " q2 q = ql Les racines n-ièmes nous réserveront aussi des surprises; par exemple, comme : i 2 = j2 = k 2 = - 1 on voit que :1:: i, :1:: j, :1:: k sont des racines carrées de - 1 ; on démontre qu'il yen a une infinité: le lecteur pourra vérifier que quels que soient a, b, c, tels que : a 2 +b 2 +c z =1 on a (ai + bj + Ck)2 = - 1 TI faut prendre garde aussi que certaines formules de l'al- gèbre classique ne sont plus vraies, par exemple: (q + q') (q _ q') = q2 + q' q _ qq' _ q'2  q2 _ q'i car, en général : qq'  q'q (1) Cf. DELACHET, Calcul vectoriel, coll. « Que sais-Je? t, no 418, Ire Partie, chap. 1. 32 
Après ces quelques aperçus sur l'originalité des quaternions, on mesure mieux la hardiesse et le courage qu'il a fallu à Hamilton pour oser présenter un tel système de nombres où chaque fois que l'on écrit une formule il faut, non pas se laisser guider par son analogue en nombres réels ou complexes, mais revenir aux fondements, c'est-à-dire aux formules (1) ou (2). 15. Matrices. - Quelques années plus tard, Sylvester (1814-1897) inventa des êtres nouveaux : les matrices dont Cayley (1821-1895) développa le calcul. Dans le même esprit que ce dernier, considérons une substi- tution linéaire et homogène à coefficients réels portant sur deux variables réelles (1)  x' = a 1 1 .:t + a 2 1 y  y' = a 1 2 x + a 2 2 y que l'on peut interpréter comme la transformation géométrique faisant correspondre au point M (x, y) du plan rapporté à un -+  repère (Ox, Oy) - ou au vecteur libre V = OM - le point M' -+ --+ (x', y') de ce plan - ou le vecteur libre V' = OM / ; nous écri- -+ -+ rons symboliquement: M' = AM ou V' = AV, A = ( a 1 1 a21 ) a 1 2 a 2 2 étant un C?pérateur appelé matrice carrée d'ordre 2 (1) d'élément général a1i (où i indique la ligne et j la colonne de A). Deux matrices A et B seront dites égales si, appliquées à un même vecteur arbitraire du plan, elles conduisent au même résultat. Nous. appellerons somme de deux matrices A et B, -+ une matrice S, notée A + B, qui à un vecteur V arbitraire du -+ plan fait correspondre la somme des vecteurs transformés de V par A et par B. Par suite, cette addition est commutative et associative; elle admet un zéro, noté 0, qui à tout vecteur du plan fait correspondre le vecteur nul et dont chaque élément est donc nécessairement nul. On peut définir également le produit des matrices : la ma- -+ -+-+ trice A faisant correspondre au vecteur V le vecteur V = AV, (1) Toutes les notions que nous allons développer sur l'exemple des matrices carrées d"ordre 2 se généralisent aux matrices carrées d"ordre n, mais nécessitent la notion d"espace à n dimensions, espace dont Cayley a eu le premier une idée nette, le concevant comme l'ensemble des suites de n nombres ordonnés (x u Xu . . ., Xn), chaque suite pouvant être considérée comme un point M de cet espace de -+ coordonnés (Xl' Xu ..., xn) ou encore comme un vecteur libre V de mêmes composantes scalaires. Cf. DELACHET, La géométrie contem- poraine, coll. c Que sais-je? ., nO 401 9 p. 54 et 57, et BOUTBLOUP 9 Calcul matriciel élémentaire, même coll., n O 927, 1 5. M. QUEYSANNE ET A. DELACBET 33 2 
   transformons V' en V" = BY' au moyen de l'opérateur matri- ciel B d'élément général b 1 i , c'est-à-dire par les formules:  x" = b\ x' + b 2 1 y' (II) 1 y" = b 1 2 x' + b 2 2 y'   Nous pouvons avoir V" directement à partir de V par les formules:  x" = (b\ ail + b 2 1 a12) x + (b 1 1 a 2 1 + b 2 1 a22) y  y" = (b 1 2 a 1 2 + b 2 2 a 1 2 ) x + (b 1 2 a 2 1 + b 2 2 a 2 2 ) y mettant en évidence la matrice: C = ( b\ a\ + b 2 1 a 1 2 b 1 2 a 1 2 + b 2 2 a 1 2 Or de : (III) b\ £:21 + b 2 1 a 2 2 ) b 1 a 2 + b2 a 2 2 1 2 2   V' = A V   V" = BV'   V" = ev on tire symboliquement:    V" = B (AV) = (BA) V de sorte que nous sommes amenés à dire que C est le-- produit des matrices A et B, produit que nous noterons: C=BA Remarquons que la formation de C se retient facilement grâce au schéma suivant ligne i Colonnej ,. COlonneJ. . B A c ou, plus simplement, grâce à l'onomatopée LICO : on obtient l'élément de la ligne i et de la colonne j de C en multipliant termes à termes les éléments de la ligne i de B et de la co- lonne j de A et en faisant la somme de ces produits. La multiplication des matrices est évidemment associative puisqu'elle traduit un produit de transformations (cf. n. 1, p. 23). On montre facilement qu'elle est distributive à droite et à gauche par rapport à l'addition. Mais l'analogie qui existe entre les opérations sur les matrices et sur les nombres réels ou complexes s'arrête là. Le produit de deux matrices n'est 34 
pas toujours commutatif: par exemple, les axes Ox, Oy étant rectangulaires, une symétrie par rapport à Ox et une symétrie par rapport à la bissectrice de ces axes d'équation x = y sont représentées respectivemcnt par: X== ( 1 0 ) o --1 et B=( ) Le produit BX = ( - ) représente la rotation de cen- tre 0 et d'angle + 11:/2, tandis que le produit XB = ( 0 1) représente la rotation de centre 0 et d'angle - 1t/2. - 1 0 Deux matrices dont le produit est commutatif sont dites commutables. Certaines matrices sont commutables avec une matrice arbitraire; l'une d'elles joue un rôle essentiel, la matrice unité : TI = ( ) telle que, quelle que soit A : AU = UA = A. L'ensemble des matrices carrées d'ordre 2 possède une infinité de diviseurs de zéro (cf.  12, p. 27); par exemple, quels que soient a et b : ( 2 6 ) ( 3a -9b ) = ( 6a-6a -18b+18b ) = ( 0 0 ) 13 -a 3b 3a-3a-9b+9b 00 Nous voyons donc que l'ensemble des matrices carrées d'ordre 2, sur lequel on peut définir une addition et une multi- plication vérifiant les propriétés énoncées au  5 (sauf II (3) et II (4», constitue un anneau non commutatif possédant une infinité d'éléments, une infinité de diviseurs de zéro et un élément unité (cf.  28, p. 64). 16. Entiers algébriques. - Deux problèmes d'arithmétique sont à l'origine de la théorie des corps de nombres algébriques due surtout à la mathématique allemande de la seconde moitié du XlX e siècle: le« Grand Théorème de Fermat» (impossibilité de résoudre en nombres entiers l'équation x n + yn = zn pour n > 2) et la théorie des résidus biquadratiques de Gauss (1). On appelle nombre algébrique d'ordre n toute racine d'une équation algébrique à coefficients entiers .: (1) an x n + + lit X + a o = 0 (1) L'étude des congruences quadratiques, c'est-à-dire la résolu- tion en nOlnbres entiers de la congruence Xl = q (mod. p), occupe une grande partie des Disquisitiones (1801). En 1825, Gauss s'est attaqué aux congruences biquadratiques : x == q (mod. p). 35 
qui n'est pas racine d'une telle équation de degré inférieur à n. Les nombres algébriques d'ordre 1 constituent l'ensemble des nombres rationnels Q; on montre que les nombres algé- briques forment un corps commutatif ( 5) dont Q est un sous- corps. Si dans (1), an = 1, on dit qu'une racine de (1) est un entier algébrique; les entiers algébriques d'ordre 1 sont les entiers rationnels dont l'ensemble est représenté par Z; les nombres a + bi (a et b entiers rationnels), appelés entiers de Gauss, les nombres de la forme a + ib VD (a et b entiers rationnels et D entier naturel  1 et n'admettant pas de divi- seur carré parfait) sont des entiers algébriques d'ordre 2. Ces derniers nombres (D étant fixé) comme les entiers de Gauss et les entiers rationnels vérifient toutes les règles 1, II, III du  5, sauf II (3), on dit qu'ils forment un anneau commutatif à élé- ment-unité 1. Mais leurs propriétés peuvent être très diffé- rentes de celles de l'anneau Z ; par exemple dans l'anneau des nombres a + ib ys dont nous parlerons  54, on peut définir des nombres premiers, mais contrairement à ce qui se passe dans l'anneau Z, un nombre peut admettre plusieurs décompo- sitions distinctes en facteurs premiers. C'est en utilisant indû- ment ce théorème de l'unicité de la décomposition en facteurs premiers, dans un domaine où il n'était pas vrai, que Kummer crut, en 1845, avoir démontré le« Grand Théorème de Fermat»; Dirichlet lui montra son erreur. Pour restaurer cette unicité, Kummer inventa en 1847 des êtres nouveaux, les idéaux; Dedekind les définit en 1871 sous une forme plus générale que nous donnerons au  29. Les mathématiciens admettent que cette découverte a une valeur supérieure à celle qu'aurait eue la démonstration du théorème de Fermat: bel exemple de fécondité d'un résultat négatif! Après Dedekind vient Hilbert avec sa théorie des corps de nombres algébriques (1897), puis le mémoire déjà cité où Steinitz (9 8), abandonnant l'étude de corps particuliers, expose les propriétés d'éléments abstraits déduites de propriétés de base prises a priori comme axiomes. C'est à l'exposé des plus simples de ces notions et de leurs propriétés que nous allons nous consacrer maintenant. 36 
DEUXIÈME PARTIE NOTIONS FONDAMENT ALES D'ALGÈBRE MODERNE CHAPITRE PREMIER LOIS DE COMPOSITION 1. - La théorie des ensembles 17. La notion d'ensemble. - Avant de reprendre systéma- tiquement et de compléter les notions algébriques que nous avons rencontrées dans la Première Partie, nous devons donner quelques définitions relatives aux ensembles d'éléments. Il n'est pas dans notre propos de soulever les difficultés qui se présentent dans une théorie logique des ensembles. Nous considérerons la notion d'ensemble comme une notion première et dirons avec N. Bourbaki: « Un ensemble est formé d'éléments susceptibles de posséder certaines propriétés et d'avoir entre eux ou avec des éléments d'autres ensembles, certaines relations» (1). Nous considérerons comme parfaitement clairs les concepts d'ensemble formés d'un nombre fini ou infini d'éléments. Nous dirons que l'on conçoit un ensemble E d'êtres, d'objets représentés par des lettres a, b, c, si, étant donné un objet déterminé m, nous pouvons décider s'il fait partie ou non de la collection E ; nous écrirons : mEE qui se lit « m appartient à l'ensemble E » ; m, bien déterminé, est un élément particulier de E ; au contraire, nous appellerons élément générique de E un élément x arbitraire de cet ensemble, (1) Cf. N. BOURBAKI, Théorie des ensembles, fascicule de résultats. Le lecteur trouvera dans le Uv. l, Paris, 1954, tous renseignelnents sur les idées les plus moemes concernant le concept d'ensemble. 37 
c'est-à-dire dont on ne suppose rien d'autre que d'appartenir à E. Un ensemble pourra être défini de deux manières : 1 0 Par la connaissance individuelle de chaque élément parti- culier, soit par énumération si l'ensemble est fini, soit par corres- pondance avec un ensemble déjà connu (1); 2 0 Par l'énoncé de propriété3 restrictives caractérisant l'élément générique de E au sein d'un ensemble plus vaste R. Le premier mode est utilisé lorsqu'on fait l'appel des élèves d'une classe, le second lorsqu'on convoque pour le conseil de révision tous les Français du sexe masculin nés entre le 1 er janvier 1934 et le 1 er janvier 1935. En considérant R plus vaste que E, nous venons de ren- contrer incidemment la notion d'inclusion: si tout élément a d'en ensemble A appartient à un ensemble B, on dira que « A est contenu dans B » et que « B contient A» et on écrira : ACB ou B)A On dit aussi que A est une partie de B, ou encore un sous- ensemble de B. .. Le lecteur ayant des notions de logique formelle recon- naîtra dans la notion d'inclusion la notion d'extension (2) : en effet, si A et B sont deux sous-ensembles de R et si les éléments de A sont caractérisés dans R par une propriété PA et ceux de B par une propriété PB' énoncer A C B revient à dire PA entraîne PB. Si l'on a à la fois A C B et BeA, les ensembles A et B sont identiques et les propriétés PA et PB équivalentes, c'est-à-dire que chacune entraîne l'autre, ou encore que chacune est une conséquence de l'autre. Ceci nous ramène à nos deux procédés de définition des ensembles : si, parmi les éléments de R, nous prélevons par énumération ou par correspondance avec un ensemble déjà connu tous les éléments particuliers de E, nous serons amenés à chercher et à énoncer les propriétés caracténsant l'élément générique de E au sein de R, c'est-à-dire à énoncer des théo- rèmes; au contraire, dans le second mode de définition de l'ensemble E, nous ne connaissons que les propriétés qui (1) Cf.  19, p. 42, pour la notion de correspondance. Pour les exem- ples destinés à illustrer cette lIe Partie, nous supposerons connus: l'ensemble N des nombres entiers naturels (positifs et 0), l'ensemble % des entiers rationnels (positifs et négatifs ainsi que 0). l'ensemble Q des nombres rationnels. R des nombres réels et C des nombres complexes; dans la Ille Partie, nous montrerons comment, à partir de N et des théories de l'algèbre exposées dans la lIe Partie, on peut définir %, Q, R et C, avec d'ailleurs une restriction pour R ( 43, p.101 et 45, p. 104). (2) Cf. Marcel BOLL et Jacques REINHART, Les étapes de la logique, chap. II, c Que sais-je? ., no 225. 38 
caractérisent l'élément générique de E au sein de R : nous serons amenés à trouver individuellement chaque élément particulier de E : nous dirons, si nous avons pu le faire, que nous avons résolu un problème. On dit quelquefois que l'on a paramétré l'ensemble E. On peut enfin dire que le premier , " , , '\. / 1 \ 1 \ M (X,y) , \ , U,(O,] ) ,)( \ 1 \ \ 1 '\. / , / , .. .- Fig. 4 procédé est un procédé de définition analytique de l'ensemble E tandis que le second est un procédé synthétique. C'est ainsi que (fig. 4), la circonférence (C) de centre 0 et de rayon unité d'un certain plan P peut être définie de deux façons comme l'ensemble de ses points M : 1° Si, choisissant deux axes rectangulaires Ox, Oy dans P, on établit une correspondance entre le sous-ensemble de R (0  t < 2 'Tt) et les coordonnées OH = x et OI( = Y de M en posant : x=cost y = sin t il est manifeste que cette correspondance définit individuelle- ment chaque point particulier de (C) et les définit tous; nous avons ainsi défini (C) par un procédé analytique. 2° Si nous caractérisons le point générique de (C) au sein des points de P en énonçant: « (C) est l'ensemble des points de P situés à la distance unité de son centre 0», ou, ce qui revient au même, en écrivant l'équation cartésienne de cette cir- conférence : x2+y2=1 39 
c'est le second mode de définition d'un ensemble que nous utilisons : c'est un procédé de définition synthétique. Lorsque, partant de la première définition, nous constatons que la relation bien connue : COS 2 t + sin 2 t = 1 entraîne: OM=l et que nous énonçons: « (C) est l'ensemble des points de P situés à la distance unité de son centre 0 », nous énonçons un théorème. Si, au contraire, partant du second mode de définition, nous remarquons que l'on peut définir chaque point particulier de (C), individuellement, en établissant la correspondance (0  t < 2 1t)  (x = cos t, y = sin t) nous paramétrons la circonférence (C), nous avons résolu un problème. Remarquons enfin que pour démontrer qu'une propriété PA est vraie pour tous les éléments de A, il faudrait la démontrer successivement pour chaque élément particulier de A, ce qui est souvent difficile si l'ensemble est fini et même impossible si l'ensemble est infini; mais il suffira de la démontrer pour l'élément générique de A, comme nous l'avons fait dans l'exemple précédent. Au contraire, pour démontrer qu'une propriété PB est fausse sur B, il suffit de démontrer qu'elle est fausse pour un élément particulier de B : par exemple, si B est l'ensemble de toutes les équations du second degré à coefficients réels, et PB :« toute équation du second degré a deux racines réelles et distinctes », nous pouvons affirmer que PB est fausse en ne considérant que l'équation du second degré particulière: x2+x+l=O don t les racines j et j2 sont complexes, ou l' équation : x2-2x+l=O dont les racines x' = x/' = 1 sont confondues. Cette der- nière méthode que l'on peut appeler « méthode du contre- exemple» est très fmctueuse en mathématique, mais il faut bien prendre garde de l'appliquer à bon escient, c'est-à-dire pour démontrer la fausseté d'une propriété et non sa vérité. On conçoit donc que les mathématiques ayant à trouver des objets jouissant de telle ou telle propriété (propriété posée a priori ou découlant de problèmes concrets) l'une de leurs activités maîtresses est de chercher de nouveaux ensembles et de découvrir leurs propriétés. 40 
18. Opérations formelles sur les ensembles. - Trois de ces procédés sont encore communs aux mathématiques et à la logique: on appellera intersection des ensembles A et B (A (1 B) l'ensemble des éléments communs à A et B, ou encore, l'en- semble des éléments de R ayant la propriété PA et la pro- priété PB ; on appellera réunion de A et B (A u B) l'ensemble des éléments communs et non communs à A et B ou encore l'ensemble des éléments de R ayant la propriété PA ou la propriété PB l'intersection des ensembles correspond à la conjection des propriétés, leur réunion à l'alternative. Enfin, si dans R nous considérons l'ensemble des éléments qui n'ont pas la propriété PA' nous définissons le complémentaire de A par rapport à R (que l'on note CA) ; il est essentiel de remarquer que la définition de CA est relative à un ensemble référen- tiel R : ainsi A étant l'ensemble des couleurs rouge, jaune, bleu, CA sera l'ensemble des couleurs orangé, vert, indigo, violet si R est l'ensemble de toutes les couleurs du spectre, ce sera au contraire l'ensemble des couleurs orangé et vert si R ne contient que les couleurs du spectre qui se succèdent du rouge au bleu. Pour éviter toute confusion, chaque fois qu'il y aura ambiguïté, nous noterons l'ensemble complé- mentaire de A par rapport à R : R - A. Considérant toujours les ensembles comme sous-ensembles d'un référentiel plus vaste R, l'ensemble ne contenant aucun élément de R ou ensemble vide est noté 0, de sorte que, si A et B sont disjoints, c'est-à-dire sans éléments communs: A n B = 0, c'est-à-dire, dans R, les propriétés PA et PB sont incompatibles. Notons que: A (1 CA = 0, de même: A u CA = R. Tous ces ensembles que nous venons d'envisager comprennent des éléments qui appartiennent à un ensemble universel R ; nous dirons que ces ensembles appartiennent à un nouvel ensemble que l'on appelle l'ensemble des parties de R : P (R) ; notons que tout élément a de R peut être considéré comme un élément de P (R), c'est-à-dire comme un ensemble à un seul élément que l'on écrit alors: {a} ; de même 0 et R sont des éléments de P (R). Considérons enfin une nouvelle méthode de formation d'ensembles: la méthode des couples. Soient deux ensembles R et S qui peuvent avoir ou non des éléments communs et même être confondus ou formés d'éléments de natures essentiellement diverses. Soit x E X, X E P (R) et y E Y, Y E P (8); consi- dérant tous les couples (x, y) dans cet ordre, nous dirons qu'ils forment un ensemble nouveau noté X X Y que nous appelle- rons ensemble produit des ensembles X et Y. Par exemple, X pourra être l'ensemble R des nombres réels et Y le même ensemble: si l'on représente les éléments de X par les points d'un axe Ox (axe des abscisses) et ceux de Y par les points 41 
d'un axe sécant Oy (axe des ordonnées), nous savons que le eouple (x, y) représente un point M quelconque du plan; nom dirons: l'ensemble-produit de l'ensemble des « points de OX» et de l'ensemble des « points de Oy» est l'ensemble des points du plan noté R X R = R2. De même si Y est l'ensemble des nombres réels k et X l'ensemble des points 0 de l'espace, l'ensemble-produit des ensembles X et Y sera l'ensemble des couples (0, k) que l'on pourra interpréter de diverses manières, par exemple comme l'ensemble des homothéties de centre 0 et rapport k. La généralisation de la notion d'ensemble-produit à plus de deux ensembles est immédiate : par exemple, l'ensemble des quaternions peut être considéré comme l'ensemble-produit R X R X R X R = R'. 19. Correspondances entre ensembles. - A l'élé- ment générique x d'un ensemble X, faisons corres- pondre un élément et un seul y d'un ensemble ¥ y est dit image de l'argument x. Deux cas peuvent se produire : 1 0 Tout élément de ¥ est image d'un élément ou de plusieurs éléments de X : on dit que la correspondance est une application de X sur ¥. Par exemple, la correspondance: x  y = = 2 x + 5 entre nombres réels est une application de R sur R ; 2 0 Seuls certains éléments de Y sont les images d'un élément ou de plusieurs éléments de X : on dit alors que la correspondance est une application de X dans ¥. Par exemple, la correspondance x  y = x 2 est une application de R dans R, car les nombres réels négatifs ne sont pas images de nombres réels par cette correspondance. On peut représenter cette notion par le symbole : x  y = f (x), qui rappelle la notation utilisée pour une fonction (1) d'une variable, notion qui n'est d'ailleurs qu'un cas très particulier de la notion d'application d'un ensemble sur ou dans un autre. Mais il ne faut pas perdre de vue que lorsqu'on dit : considérons l'application y = f(x), on commet un (1) Cf. DELACIIET, Calcul diff. el int., « Que sais-je? ., nO 466, p.22 et 59.. 42 
abus de langage et de notation: Ja fonction ou l'appli- cation devant être notée f, ou mieux, pour mettre la correspondance en évidence x --7 f(x), tandis quef(x) représente seulement l'image de l'élément x ou, comme on dit encore en généralisant la termi- nologie relative aux fonctions de variables réelles, la valeur de la variable y pour la valeur de la variable x. Etant donnés deux ensembles X et Y, il se peut qu'on ne puisse faire correspondre certains éléments de Y qu'à certains éléments de X par une appli- cation f. Ces éléments x formeront un sous-en- semble A de X appelé ensemble de définition de f. Si x décrit ou parcourt A, alors y = f (x) décrira une partie B de Y; naturellement, l'application f est une application de A sur B. Un cas particulièrement important est celui où un élément y de B ne corres- pond qu'à un élément x de A : cette correspon- dance y  x est alors appelée application réci- proque (1) de x --7 y = f(x) et notée: y  x = f-l (y) On dira alors que l'application est biunivoque et l'on notera: xy =f(x) Par exemple, si X est l'ensemble des nombres réels R et Y, l'ensemble des nombres réels posi- tifs R+, l'application: x  y = IOx est biunivoque,_ car à tout y E R+ correspondra x = loglO Y (2) L'application réciproque de : x  y = IOx sera : y  x = logloY. (1) On dit aussi application inverse. (2) Rappelons qu'on note ainsi le logarithme vulgaire (à base 10) de y. 43 
Considérons maintenant une homothétie H (0, k), c'est-à-dire la transformation géométrique ponc- tuelle qui, au point M de l'espace euclidien ordinaire, fait correspondre le point M' du même espace tel que   OM' = kOM --+ --+  La correspondance : OM  OM' = kOM est une application biunivoque ponctuelle de l'espace sur lui-même, car on peut définir son application réci- --+ --+--+ proque : OM' --7 IjkOM' = OM, qui est encore une homothétie de même centre 0 et de rapport k' = IJk. On aura donc [H (0, k)]-l = H [0, k- 1 ] Si l'on ne considère qu'une partie A' de A, par l'application f, on obtiendra un ensemble B' C B que l'on appellera l'image de A' par f. L'application ainsi définie de A' sur B' sera une application x --7 f' (x) dont l'ensemble de définition est A' : cette application f' sera appelée la restriction de f à A'. Inversement, si l'applicationf' de A' sur B' peut être considérée comme restriction de f à A' C A, on dira que f est un prolongement de f' à A. Mais si f' est bien déterminée par la connaissance de A, A' et f définie sur A, il n'en est pas de même de la réciproque : par exemple, une symétrie par rapport à un point 0 dans un plan P peut être considé- rée comme la restriction au plan P d'une infinité de transformations de l'espace en lui-même par exemple, d'une symétrie par rapport à une droite perpendiculaire en 0 à P ou d'une symétrie de l'espace par rapport à O. La notion de correspondance biunivoque permet d'envisager un mode de formation des ensembles particulièrement instructif: la génération par corres- pondance biunivoque avec un autre ensemble (cf.  17). Ce dernier procédé conduit à la notion de puissance 44 
d'un ensemble : rappelons que deux ensembles sont dits équipotents (1) si leurs éléments peuvent être mis en correspondance biunivoque; en particulier, si les éléments d'un ensemble E correspondent biunivoquement aux entiers naturels, E équipotent à N est dit dénombrable; si les éléments x de E correspondent biunivoquement à R ou à une partie de R, c'est-à-dire par exemple s'il existe une appli- cation biunivoque f de (0  t  1) sur E t  x = f (t) on dit que E a la puissance du continu. Considérons enfin trois ensembles A, B, C d'élé- ments génériques a, b, c. S'il existe une application! définie sur A' C A à image B' C B : aEA', bEB' ab=f(a) et une application g définie sur B' à image C' CC: c E C' b = f(a)  c = g (b) la correspondance ainsi établie entre a et c est une application de A' sur C' appelée application composée de f et g ou produit des applications f et g que l'on note g 0 f, ou mieux : a  c = g [f(a)] (2) Les notions de fonction de fonction, de fonction composée et de produit de transformations (3) sont des cas particuliers de la notion générale d'appli- cation composée que nous venons de définir. Espérant que le lecteur nous aura suivi dans l'exposé de toutes ces définitions abstraites, rela- tives aux ensembles, malheureusement indispen- (1) Cf. DELACHET, L'analyse mathématique, p. 65 à 76, « Que sais- Je? t, no 378, et Calcul diff. et int., no 466. p. 19. . (2) On notera que si l'application f est efIectuée antérieurement à g, nous noterons leur produit g. f (cf. SS 11, p. 22 et 15, p. 33). (3) Cf. DELACHET, Calcul di//. et int., p. 26-27, et La géom.contemp., no 401, chap. II. 45 
sables à la compréhension de la suite, nous allons exposer maintenant les notions proprement algé- briques, c'est-à-dire le concept de loi de composition. II. - Lois de composition interne 20. Loi interne définie dans un ensemble E. Etant donné un ensemble E d'éléments a, b, c, ..., nous dirons que nous définissons une loi de compo- sition interne dans E notée L si à tout couple (a, b) dans cet ordre nous faisons correspondre un élé- ment c de E noté : c = aLb Une telle loi est donc une application de l'en- semble-produit E X E dans E. Lorsque l'on compose deux éléments particuliers a et b par une telle loi, on dit aussi qu'on effectue sur ces éléments l'opéra- tion définie par cette loi. L'addition, la multiplication sont des lois de compositions internes définies dans l'ensemble R des nombres réels et dans l'ensemble C des nombres complexes; si a et b sont des entiers naturels, l'expo- nentiation (opération ab) est une loi de composition interne dans N, car c = ab est aussi un nombre naturel. L'opération « produit vectoriel » qui au -+ -+ couple V, V' de deux vecteurs de l'espace euclidien à trois dimensions R3 fait correspondre le vec- -+ -+-+ teur W = V A V' du même espace est une loi de composition interne partout définie dans R3 (1); -+ -+ par contre, l'opération « produit scalaire» V. V' (1) n'est pas une loi de composition interne, car au  -+ couple (V, V') de l'ensemble produit R3 X R3, cette opération fait correspondre un nombre réel de l'ensemble R et non un vecteur de R3. (1) Cf. DELACHET, Calcul vectoriel, (1 Q. S.-J. ? ., nO 418, p. 23 et c).. ... . 46 
Plus généralement, si E est l'ensemble des applica- tions f, g, h, . . ., d'un ensemble A sur lui-même (par exemple, l'ensemble des fonctions de variables réelles ou l'ensemble des transformations géomé- triques ponctuelles de l'espace en lui-même) l'opé- ration produit qui, au couple (f, g) fait correspondre l'application composée de f et g : h = g.f, est une loi de composition interne dans E. Ce calcul que nous abordons est donc singulièrement plus général que le calcul sur les nombres : nous en avons vu de multiples exemples dans les  Il à 16. Toutes les lois ne sont pas partout définies dans E : par exemple, la soustraction dans l'ensemble des nombres réels positifs R+ qui compose le couple (a, b) pour donner le nombre (a - b) n'est définie que pour a > b ; de même, dans l'ensemble des entiers naturels N la divisior.. (a, b)  ajb, n'est définie que si a est divisible par b. Ayant défini sur E une loi interne composant deux éléments de E, pour continuer, il nous faudra définir le composé de plus de deux éléments ; mais alors une difficulté surgit: soient par exemple trois éléments a, b, c, pris dans cet ordre; nous pouvons d'abord « effectuer » aLb, puis (aLb) Lc (1) ou bien « effectuer» d'abord bLc, puis aL (bLc) Si nous avons : (aLb) Lc = aL (bLc) quels que soient a, b, c, nous dirons que la loi est associative. On peut alors définir d'une manière (1) En représentant suivant la coutume de l'algèbre classique Je résultat de L'opération effectuée (a, b)  aLb par (aLb). 47 
unique le composé de al' a 2 , ..., an dans cet ordre par la relation de récurrence : (al La 2 L . . · La n ) = (al La 2 L · · · La n - l ) La n de sorte qu'il en résulte, plus généralement, que (al La 2 L ... La p ) L (a p + I La p + 2 L ... La p + q ) = = (al La 2 L . .. La p + q ) L'addition, la multiplication des nombres de N, Z, Q, R, C sont associatives; le produit des trans- formations ponctuelles, des substitutions est par essence même associatif (cf.  Il, p. 22). L'addition et la multiplication des classes rési- duelles modulo n ( 12), des quaternions ( 14), des matrices (9 15) sont aussi des lois internes asso- ciatives. Le passage du couple (a, b) de deux entiers naturels non nuls à leur P.G.C.D. noté D (a, b) est encore une loi associative, car : D [D (a, b), c] = D [a, D (b, c)] ce nombre est appelé le P.G.C.D. des trois nombres a, b, c : D (a, b, c). Par contre, si nous considé- rons la loi : (a, b)  ab définie dans N, il est clair qu'elle n'est pas associa- tive; par exemple 2(3 2 ) = 2 9 = 512 (23)2 = 8 2 = 64 Le lecteur initié au calcul vectoriel notera de même que le produit vectoriel dans R3 n'est pas associatif (1). Les lois non associatives ayant infiniment moins d'applications que les lois associatives, nous suppo- serons que dans toute la suite de ce livre (première initiation à l'algèbre moderne) les lois internes consi- (1) Cf. DELACHET, Calcul vectoriel, p. 32, « Q.S.-J. ? ., no 418. 48 
dérées sont associatives sans que nons ayons besoin de le répéter. Nous appellerons élément neutre d'une loi interne tout élément e de E (s'il existe) tel que, x étant l'élément générique d E : xLe = eLx = x Cet élément s'il existe est unique, car, s'il y en avait un second e', on aurait eLe' = e = e'. Par exemple, pour l'addition des nombres de N, Z, Q, R, C : e = 0 ; pour la multiplication de ces nombres : e = 1 (cf.  5). Pour le produit de deux transfor- mations ponctuelles ou de deux substitutions, cet élément neutre est la transformation ou substitu- tion identique (cf.  Il). Nous en avons vu d'autres exemples  12, 14 et 15. Il peut ne pas exister: par exemple dans l'ensemble des nombres pairs, il n'y a pas d'élément neutre pour la multiplication. Lorsque x = x', on a évidemment : aLx = aLx' et xLa = x' La Réciproquement, si : aLx = aLx' entraîne x = x' quel que soit x, nous dirons que a est régulier à gauche pour la loi L et qu'on peut simplifier par a une égalité telle que : aLx = aLx' ; nous définirons de même un élément régulier à droite. Si a est régulier à droite et à gauche pour la loi L, nous dirons qu'il est régulier pour la loi L; l'élément neutre d'une loi, s'il existe; est régulier pour cette loi. Par exemple pour la multiplication dans N, Z, Q, R ou C, zéro n'est pas régulier: les élèves apprennent à leurs dépens que l'on n'a pas le droit de diviser les deux membres d'une égalité par 0, car on a bien : o X 2 = 0 X 3, mais 2 i= 3. De même pour la mul- tiplication dans les classes résiduelles Zj6 (cf.  12), le véritable diviseur de zéro 3 n'est pas régulier, car on ne peut simplifier l'égalité : 2.3 = 4.3 par 3 ; 49 
par contre 5 est régulier, puisque de l'égalité 5. = 5.', on peut déduire  = '. Etant donnés deux éléments a et b de E, nous pouvons nous demander si a peut être le composé de deux éléments de E dont l'un b est donné, c'est-à-dire s'il existe x et y tels que bLx = a ou yLb = a On sait que ce n'est pas toujours possible: par exemple pour l'addition dans R+, x tel que : b + x = a n'existe que si a > b ; par contre, x existe toujours si E est confondu avec R. De même, si la loi de composition est la multiplication et E l'en- semble des classes résiduelles Zj6 (cf. 912), il n'existe aucune classe ; telle que 2 .; = 3 ou . 2 = 3, puisque 3 ne figure ni dans la ligne, ni dans la colonne de 2 dans la table de multiplication de Z/6 ; par contre, quel que soit â, il existe toujours un x et un seul tel que 5.  = . 5 = d. Remarquons enfin que, la loi de composition et l'ensemble étant quelconques, la recherche de x ou y pose générale- ment deux problèmes distincts : nous avons vu (9 14) qu'un quaternion admet généralement un quotient à gauche et un quotient à droite distincts. Nous simplifierons ce problème en supposant que la loi de composition envisagée a un élément neutre unique (1) e et en cherchant d'abord b' et b" tels que : bLb' = e et b" Lb = e 1° Si b est régulier et si b' existe, cet élément b ' est unique. En effet : bLb' 1 = bLb ' 2 entraîne alors b / 1 = b' 2 ; 2 0 Si b' est régulier, l'élément b" existe, est unique et égal à b'. En effet : bLb' = e entraîne b' L (bLb') = b' Le = eLb', soit: (b ' Lb) Lb' = eLb' (1) Ce qui est le cas des lois déjà rencontrées dans la Ire Partie. 50 
d'où: b ' Lb = e, puisque b ' est régulier. Comme b" est unique (même démonstration que 1°): b " = b ' (l). Si cet élément b ' tel que bLb ' = b ' Lb = e, existe, nous rappellerons le symétrique de b par la loi considérée et nous dirons que b est symétrisable. Dans l'addition des nombres réels ou complexes, tout élément b est symétrisable, le symétrique b ' de b étant son opposé. Dans la multiplication des élé- ments de N, seul 1 a un symétrique : lui-même; dans celle des éléments de Q, R, C ou de l'ensemble K des quaternions, tout élément b, sauf 0, est symé- trisable : le symétrique b ' de b étant son inverse. Dans le produit des substitutions (cf. 9 Il), tout élément a un symétrique : la substitution réciproque (ou inverse) de la substitution considérée. Dans la multiplication des éléments de ZJn (cf. 9 12) ou de l'ensemble des matrices carrées d'ordre n (cf. 9 15), seuls les véritables diviseurs de zéro ne sont pas symétrisables. Nous sommes maintenant en mesure de résoudre le problème que nous nous étions posé : trouver x tel que bLx = a, tout au moins en supposant b symétrisable (2). En effet, b étant régulier, x est unique et si b ' est le symétrique de b : b ' L (bLx) = (b ' Lb) Lx = eLx = x Donc x = b ' La Dans les mêmes hypothèses, on verrait que y tel que yLb = a est unique et égal à (aLb / ). Une question a dû naître dans l'esprit du lecteur, surtout dans les derniers paragraphs : quel rapport (1) Nous ne cherchons pas, dans ce premier calcul d'algèbre abs- traite, à trouver les conditions minimum assurant l'existence, l'unicité et l'égalité de b' et b", mais à donner un exemple de calcul sur des éléments abstraits. Voir DUBREIL, Algèbre, chap. II, Paris, 1946. (2) Si b est symétrisable, il est régulier, soit b' le symétrique de b bLx = bLy entraîne (b' Lb) Lx = (b' Lb) Ly, d'où eLx = eLy et % = y; de même xLb = yLb entratne xL (bLb') = yL (bLb') d'ob x :c: u. Enfin, ce symétrique est unique car bLb' s:: bLb" entratne b' = b " puisque b symétrisable est régu1ier. 51 
ont les composés (aLb) et (bLa) ? Si, quels que soient a et b aLb = bLa on dira que la loi est commutative; sinon qu'elle est non commutative. Si nous avons repoussé jusqu'à maintenant cette définition, c'est que les définitions précédentes : élément neutre, élément régulier, élément symétrisable, etc., sont valables aussi bien pour des lois commutatives que pour des lois non commu- tatives : nous en avons vu de multiples exemples dans la Première Partie. 21. Notations additive et multiplicative pour une loi interne. - Nous n'avons introduit le symbole L que pour bien rappeler au lecteur qu'il s'agissait d'une loi quelconque L opérant sur des éléments quelconques d'un ensemble E. Maintenant que nous avons attiré l'attention du débutant sur les analogies et les différences qui peuvent exister entre le produit de deux nombres réels, le produit de deux transfor- mations géométriques et, plus généralement, le composé de deux éléments d'un ensemble, il n'y a plus, pensons-nous, d'inconvénient à appeler le composé de deux éléments a et b d'un ensemble E produit des deux éléments (a, b) et à le noter c = ab : on dit alors qu'on emploie la notation multiplicative pour la loi considérée; on pourrait également le nommer somme et l'écrire: c = a + b ; on dit alors qu'on emploie la notation additive. Comme nous l'avons fait dans les exemples de la Première Partie, nous réserverons la notation addi- tive pour les lois commutatives, ce qui ne veut pas dire qu'une loi notée multiplicativement est essen- tiellement non commutative (cf. 9 12), mais qu'une loi notée additivement est toujours commutative. Naturellement, si l'ensemble E est N, Z, Q, R, C ou diverses généralisations de ces ensembles dont noua 52 
avons pu ou pourrons parler, l'addition (toujours commutative) se notera additivement et la multi- plication (qui pourra être exceptionnellement non commutative, comme dans l'ensemble des quater- nions) multiplicativement. Si nous avons à composer des vecteurs de l'espace R3, il ne s'agira que de l'addition des vecteurs qui est commutative, comme on le sait (1), et que nous noterons naturellement additivement. L'associativité d'une loi se notera donc: a + (b + c) = (a + b) + c ou lf(bc) = (ab) c ou plus généralement (2) : h=v k=v+q Z-v+q  ah +  ak =  az h=l k=v+1 1=1 ou ( h=V ) ( k=V+q ) Z=v+q II ah II ak = II a z h=l k=v+l Zl Un élément neutre e sera tel que : a + e = e + a = a ou ae = ea = a pour la notation additive, s'il n'y a aucune ambi- guïté à craindre, on le notera 0 (zéro); pour la notation multiplicative, 1 (un) (cf. 99 12, 14, 15). Si la loi admet un élément neutre e et si a admet un symétrique a' vérifiant : a + a' = a' + a = e ou aa' = a' a = e on le notera - a dans la notation additive et a- 1 dans la notation multiplicative. (1) Nous ne parlerons plus de l'opération c produit vectoriel t que nous n'avons citée que comme exemple d'opération non associative. (2) En utilisant les notations classiques: h-n al + a 2 + ... + an =  ah et h-l 11.... ta al as . . . an =- II ah 11-1 53 
Si la loi admet un élément neutre e et si b est symétrisahle, pour une loi commutative : x + b = a entraîne b + x = a on notera x = a + (- b) = a - b appelé diffé- rence de a et de b. Dans les mêmes conditions, pour une loi notée multiplic ative ment xb = a entraîne x = ab- 1 appelé quotient de a par b à droite, et : by = a entraîne y = b- 1 a appelé quotient de a par b à gauche (cf. 9 14), les deux quotients étant en général distincts si la loi est non commutative. Nous pouvons définir le composé de a et de a lui-même que l'on notera additive ment a + a, ou encore 2 a et multiplicativement a. a, ou encore a 2 ; plus généralement, nous poserons (1) a + a + + a = na a.a ... a = an n termes n facteurs et par définition (si a est symétrisable) : (- na) = n (- a) et a- n = (a- 1 )n. nEN Nous poserons enfin: O.a = e ou a O = e, de sorte que le lecteur pourra vérifier sans peine les règles « d'exposant » suivantes 1 (m+ n)a = ma+ na m et nEZ m(na) = (mn) a  a m + n = am. an ( (am)n = a mn Par contre, si pour une loi commutative on a bien: m (a + b) = ma + mb (1) Notons que si E est aussi muni d'une loi multiplicative, ce symbole na = a + ... + a ne représente pas nécessairement le produit de deux éléments de E (cf. fi 28, p. 64). S4 
pour une loi non commutative, (ab)m et am b m sont en général distincts : par exemple, (ab)2 = abab et on n'a pas le droit de changer cette écriture, car ba ¥= ab. Dans un même ordre d'idées, si on définit sur E une loi non commutative où tout élément est symétrisable, l'inverse unique (cf. 9 20, note 6) de (ab) est (b- 1 a- 1 ), car x étant cet inverse xab = e entraîne xabb- 1 = eb- 1 d'où xa = b- 1 et xaa- 1 = = b- 1 a- 1 d'où x = b- 1 a-l, c'est bien le produit des inverses de a et de b, mais dans l'ordre opposé, généralement distinct de (a- 1 b- 1 ). On voit donc que, si l'on peut se laisser guider par les règles de calcul sur les nombres réels, ce n'est qu'avec une extrême prudence: il convient, chaque fois que l'on applique une règle, de bien vérifier qu'elle est valable dans l'ensemble étudié et pour la loi considérée. 22. Ensembles munis de deux lois de composition internes. - Nous supposerons que dans un en- semble E sont définies deux lois de composition, l'une associative et commutative que nous noterons additivement (a, b)  a + b l'autre supposée seulement associative que nous noterons multiplicativement (a, b)  ab Nous dirons que la loi multiplicative est distri- butive à gauche par rapport à la loi additive si a (b + c) = ab + ac et distributive à droite si : (b + c) a = ba + ca Si ces deux propriétés sont simultanément véri- fiées, on dit que la loi multiplicative est distributive 
par rapport à la loi additive; on peut alors écrire (1) ( h:D ah ) ( kfJ.bk ) = h:D ki:.fJ.ah h= k=l h=l k=l Nous avo.ns dit (9 5) que la multiplication des nombres appartenant à N, Z, Q, R, C est distributive par rapport à l'addition de ces nombres. Nous avons vu (99 12, 13, 14, 15) des exemples plus abstraits. Voici enfin un exemple plus abstrait encore soient A, B, etc., des sous-ensembles ou parties de R, c'est-à-dire des éléments de P (R) : la réunion et l'intersection de ces ensembles (9 18) sont deux lois associatives et commutatives; on peut voir qu'elles sont distributives l'une par rapport à l'autre: A () (B u C) = (A () B) u (A () C) c'est-à-dire que les éléments communs à A et à (B ou C) sont l'ensemble des éléments communs à A et B et des éléments communs à A et C ; on peut dire aussi : les éléments de R ayant la propriété PA d'une part et une ou deux des propriétés PB et Po d'autre part, sont les éléments ayant les propriétés PA et PB ou les éléments ayant les propriétés PA et Po. De même : A u (B () C) = (A u B) () (A u C). III. - Lois de composition externes 9 23. Lois de composition externes. - Soit un ensemble n d'éléments que nous appellerons des opérateurs et que nous désignerons par des lettres grecques: rt, , y, . . ., et un ensemble E d'éléments a, b, c, d, . . . Nous dirons qu'on définit entre éléments de n et éléments de E une loi de composition externe, (1) En posant h-p k==q   ah bIc = al b l + ... + al b'l + ... + ap b l + ... + ap b h-l k-l S6 
si, à tout couple formé d'un élément rf.- de n et d'un élément a de E, on fait correspondre un élément de E que l'on notera en général rxa. Cette loi n'est autre chose qu'une application de l'ensemble-produit n X E dans l'ensemble E. Par exemple, si n est l'ensemble des nombres réels R et E, l'ensemble des vecteurs de R3, au -+ -+ couple (rt, V) on fait correspondre le vecteur rtV, la loi étant la multiplication d'un vecteur par un scalaire. De même, supposons que E soit l'ensemble des fonctions dérivables f, g, h, ..., de n variables réelles Xl' x 2 , ..., X n , les opérateurs (éléments de n) étant les dérivations partielles (1) par rapport aux · ahl ô ô ô 1 1 . van es , - ô ,..., - ô ; a 01 externe sera ôX I X 2 X n donnée par : ( f )  ôf ôx a ' ôXh Supposons qu'il existe dans n une loi interne associative (que nous noterons multiplicative ment) ; nous dirons que la loi externe est associative par rapport à la loi interne de n si : rt (x) = (rx) X [1] Supposons qu'il existe dans E une loi interne commutative (que nous noterons additivement); nous dirons que la loi externe est distributive par rapport à la loi interne de E si : rt (x + y) = ax + rty [2] Par exemple, dans le dernier exemple choisi précédemment, on peut définir comme loi interne sur E l'addition des fonctions et comme loi interne n 1 1 . d ' fini ô ô ô 2 L 1 . sur c. a 01 e e par : - ô · _ ô = Ô Ô · a 01 Xh Xk Xh Xk (1) Cf. Q. 8.-.1. ?, nO 466, Calcul différentiel et intégral, chap. II. 57 
externe est associative par rapport à la loi interne de n car [  (  f ) ]   ( Ôf ) _ ô 2 f ÔXh' ôXk ' ôXh, ôXk - ôXh ôXk et (1) ( Ô2 ) Ô2 f f -)- ôXh ÔXk' ôXh ÔXk De même, la loi externe est distributive par rapport à la loi interne de E, car : [ , (f + (7 )] -+ a (f + g) = af + ag ôx 0 ÔX ÔX ÔX et ( :x ,f) + ( :x ,g) -+ Z + : Supposons enfin qu'il existe dans n une loi interne commutative (notée additivement), ainsi que dans E ; nous dirons que cette loi interne de n est distributive par rapport à l'ensemble des deux lois, loi externe et loi interne de E, si : (ot + ) x = (XX + x [3] Le lecteur verra sans peine que les propriétés [1], [2], [3] sont vérifiées pour le premier exemple donné plus haut, les lois internes de n étant la multi- plication et l'addition des nombres réels et la loi interne de E l'addition des vecteurs. IV. - Structures algébriques 24. Notion de structure algébrique. - Après avoir étudié diverses lois de composition définies sur un ensemble, nous allons étudier des ensembles munis de certaines lois de composition. (1) En supposant naturellement que les fonctions considérées sont dérivables deux fois. 58 
Nous poserons comme axiomes les propriétés de ces lois ; les ensembles ainsi caractérisés (les axiomes étant compatibles) appartiendront à une structure algébrique dont ces axiomes constituent la défi- nition. Deux de ces ensembles pourront être très différents par leurs éléments, par les propriétés des opérations qui y sont définies, mais ces opérations auront en commun les propriétés fondamentales posées comme axiomes qui en assureront le lien, qui feront qu'elles appartiennent au même type de structure et qui nous permettront par-delà la diver- sité de leurs natures et des éléments sur lesquels elles portent d'en dégager toutes les propriétés communes. Aussi bien, lorsque nous aurons vérifié qu'un ensemble présente une structure d'un certain type, nous serons sûrs qu'il possède toutes les propriétés de la structure du type envisagé. C'est grâce à cette notion de structure, due à l'Ecole Bourbaki, qui s'applique d'ailleurs à toutes les branches des mathématiques, que l'esprit abstrait de l'algèbre moderne a été vraiment concrétisé (1). (1) Cf. N. BOURBAKI, L'architecture des mathématiques, dans Les grands courants de la pensée mathématique, Les Cahiers du Sud, Paris, 1948. 59 
CHAPITRE II GROUPES, ANNEAUX, CORPS 1. - Groupes et sous-groupes 25. Groupes. - On dit qu'un ensemble G pré- sente une structure de groupe s'il existe une loi de composition interne partout définie dans G possé- dant les trois propriétés suivantes (1) : 1. - Associativité : (1) (ab) c = a (bc) (l') (a + b) + c = a + (b + c) II. - Existence d'un élément neutre unique e : (2) ea = ae = a (2') e + a = a + e = a III. - Existence d'un symétrique unique pour chaque élément a : (3) a- 1 a = aa- 1 = e (3') (- a) + a = a + (- a) = e Si nous employons la notation multiplicative - (1), (2), (3) - nous dirons que nous avons affaire à un groupe multiplicatif; si nous employons la notation additive - (l'), (2'), (3') - nous dirons que le groupe est additif (2). Lorsqu'un groupe comprend un nombre fini d'éléments n, on dit qu'il est d'ordre n : on le définit par une table de multiplication (ou d'addition) analogue à la table de Pythagore (cf. par exemple  Il, 12, 14). Dans le cas contraire, il est dit infini. Lorsque la loi de composition est de plus commu- tative (c'est-à-dire si ab = ba quels que soient a et b), (1) Nous ne cherchons pas, dans cette introduction à l'algèbre moderne, les conditions minimum pour qu'un ensemble soit un groupe, c'est-à-dire l'indépendance des axiomes 1, II, III, ni leur compatibilité que nous admettons. Pour ces questions, voir DUBREIL, loc. cit., p. 48 et 79. (2) Cette distinction n'est pas intrinsèque: eIIe est essentiellement relative au mode de notation de l'opération; toutefois, rappelons qu'une loi notée additivement est commutative par convention. 60 
le groupe est dit commutatif ou encore abélien ; s'il est fini, sa table de multiplication (ou d'addition) est symétrique par rapport à la diagonale principale (celle qui passe par e). Un groupe abélien noté addi- tivement est quelquefois appelé un module, son élément neutre est appelé élément zéro et noté 0 s'il n'y a aucune confusion à craindre avec le 0 de N et l'élément - a est dit l'opposé de a. Des axiomes 1, II, III résultent les deux propriétés suivantes : 1 0 Tout élément est régulier (cf.  20) ; en effet : ab = ab' entraîne a- 1 ab = a- 1 ab' donc b = b', et ba = b' a baa- 1 = b' aa- 1 - b = b'. 2 0 Pour tout couple (a, b), il existe un quotient à gauche unique tel que : xa = b, soit: x = ba- 1 et un quotient à droite unique tel que ay = b, soit : y = a- 1 b. Nous avons déjà rencontré de nombreux groupes: Z forme un groupe pour l'opération classique appelée addition; Q ou R moins le zéro forment chacun un groupe pour la multiplication : ce sont des groupes d'ordre infini. Le groupe additif ZJn (cf.  12) est un groupe d'ordre n. 26. Groupes de transformations ou de substitu- tions. - Considérons un ensemble auxiliaire E d'éléments x et une famille de transformations hiunivoques f définies sur E ; nous savons que l'opé- ration produit de deux applicatios est associa- tive, donc cette famille constituera un groupe si, et seulement si, le produit de deux transforma- tions, la transformation identique et la transfor- mation inverse f-1 de chaque transformation f, appartient à la famille. Lorsque l'ensemble sup- port E a un nombre fini d'éléments, un groupe de transformations s'appelle un groupe de substitu- tions. L'ensemble de toutes les substitutions de n 61 
éléments forme le groupe symétrique Sn (cf. 9 Il). L'importance de la notion de groupe de transfor- mations vient du rôle que jouent ces groupes en mathématiques (par exemple dans les géométries au sens de Klein (cf. 9 8, 20) (1), dans les équations algébriques (99 10 et Il), dans les équations diffé- rentielles, etc.), en mécanique et en physique mo- derne. Laissons la parole à Elie Cartan (2) : « La définition précédente de la notion de groupe ne fait pas pressentir le rôle joué par cette notion. Ce rôle tient, dans de nombreuses applications, à ce qu'un groupe peut être considéré comme formé de toutes les opérations d'une nature donnée qui conser- vent certaines propriétés des objets auxquels elles sont appliquées, ou certaines relations entre ces objets. « On peut être tenté de donner à cet énoncé la valeur d'un principe... La validité de ce principe est évidente dans beaucoup de cas, mais on peut indiquer des cas où le principe est faux. » En reprenant un exemple de E. Cartan, tandis que « l'ensemble des transformations ponctuelles de l'espace qui conserve les distances mutuelles des points de l'espace forme un groupe» (2), par contre, « la famille des transformations ponctuelles de l'espace qui conserve la distance de deux points particuliers A et B ne forme pas un groupe » (3). « Cependant, les deux exemples examinés rentrent l'un et l'autre dans l'énoncé général du principe. » Nous préciserons ce principe qui rend de grands services dans de nom- breux cas en disant: l'ensemble des transformations biunivoques conservant une certaine propriété de tout couple (x, y) de l'ensemble E constitue un groupe. (1) Cf. DELACHET, La géométrie contemporaine,  Que sais-je? t, nO 401, Ire Partie, chap. II, Ire et lIe Partie, chap. I. (2) E. Cartan, La théorie des groupes, Conférence du Palais de la Découverte, Paris, 1944, p. 7. (3) Car, par une première transformation Tl de la famille, A et B deviennent Al BI avec AB == Al BI et, par une deuxième T s, At Bs et comme AB = Al BI #- A 2 BI (en général) T:a Tl n'appartient pas à la famille. 62 
27. Sous-groupes. - Etant donné un groupe G, il peut arriver qu'une partie g de G constitue un groupe : on dit alors que g est un sous-groupe de G. Si une partie g de G contient le produit (1) ab de deux quelconques de ses éléme"nts (a et b), et si elle contient l'inverse a- 1 de son élément générique, elle contiendra aa- 1 = e, donc tous les sous-groupes non vides de G, s'il en existe, contiennent l'élément neutre de G. { e } constitue, par exemple, un sous- groupe de G. Donc, pour qu'une partie non vide g de G soit un sous-groupe de G, il faut et il suffit que 1 0 a E g et b E g entraînent ab E g ; 2 0 a E g entraîne a- 1 E g. Par suite : g, partie non vide de G, constitue un sous-groupe de G si, et seulement si : a E g et b E g entraînent ab- 1 E g (ou bien a- 1 b E g) En effet : la condition est évidemment nécessaire ; elle est suffisante, car elle est réalisée: a E g entraîne aa- 1 = e E g, donc ea- 1 = = a- 1 E g et enfin a (b-1)-1 = ab E g Nous avons rencontré de nombreux sous-groupes: Z est un sous-groupe additif de Q lui-même de R, lui-même de C; le groupe des translations de l'espace euclidien est un sous-groupe des déplacements de cet espace. U est sous-groupe de G 2 , lui-même de V 4 , lui-même de A 4 , lui-même de S4 (cf.  Il). Plus généralement, G étant un groupe multi- plicatif et a un élément particulier de G distinct de e, l'ensemble des puissances a P (p E Z) (cf.  21) constitue un sous-groupe g de G que l'on appelle groupe cyclique. Ce groupe g est abélien car : al' a q = aP+ q = a q + p (1) La loi interne sur 9 étant la restriction à 9 de la loi interne sur o. 63 
Deux éventualités peuvent se produire 1 0 Tous les aP sont distincts ; le groupe est alors formé d'une infinité d'éléments: a - P a -(p-l) a -l a o e a l a (p-l) .....'D ..., ..., -, ,..., ,,... 2 0 Il existe h < k E Z tels que : ah = a k . Donc : a k - h = e ; il Y a donc des puissances posi- tives de a égales à e. Soit n le plus petit entier positif tel que : an = e. Il est alors clair que g est un groupe fini d'ordre n dont les éléments sont: e, a, . . ., a n - l (cf. 9 12). Par exemple, les entiers rationnels (-1)1' forment un groupe cyclique à deux éléments 1 et - 1 ; les rotations de même centre 0 et d'angle p 2 7t forment n un groupe cyclique d'ordre n ; par contre, les rota- tions de centre 0 et d'angle pa, a étant la mesure d'un angle en radian incommensurable avec 7t, forment un groupe cyclique infini. II. - Anneaux et idéaux 28. Anneaux. - Nous appellerons anneau A un ensemble où sont définies deux lois de composition internes : l'addition (notée additivement) et la multi- plication (notée multiplicativement), satisfaisant aux trois axiomes suivants 1. - A est un groupe abélien relatif à l'addition. II. - La multiplication dans A est associative. III. -La multiplication est distributive par rapport à l'addition. Le groupe relatif à l'addition est appelé groupe additif de l'anneau; l'élément neutre de ce groupe est appelé élément zéro de l'anneau et noté O. Si la multiplication est de plus commutative, l'anneau est appelé anneau commutatif ou anneau abélien. Il résulte des axiomes que l'on peut définir dans A 64 
l'opération inverse de l'addition, la soustraction ( 21), par rapport à laquelle la multiplication est distributive, et que ( 22, p. 55) ( hf> ah ) ( k(\. ) = hf> kq ah b k lp=l k-=l h=l k=l Enfin, dans un anneau abélien, la formule du binôme de Newton est exacte : (a + b)n = an + Cl n a n - l b + ... + + CP n a n - p bp + + cn-ln ab n - l + b n n entier positif,  = n! _ n(n-l) ... (n-p+l) n p!(n-p)! 1.2...p Nous avons déjà rencontré des anneaux: Z, ZJn (cf.  12) sont es anneaux abéliens ; les marices carrées d'ordre n ( 15) constituent un anneau non commutatif. Dans un anneau quelconque, on a : a (b - b) = = ab - ab, donc a. 0 = 0, autrement dit : le pro- duit de l'élément générique par l'élément zéro est toujours zéro. La réciproque est inexacte : il peut exister dans un anneau des éléments non nuls a', b ' , tels que : a' . b ' = o. On dit que ces éléments sont de véritables diviseurs de zéro. Nous avons vu, par exemple, que dans Zj6 ( 12) : 2 .3 = 0, et nous avons formé une infinité de diviseurs de zéro dans l'en- semble des matrices carrées d'ordre 2 ( 15, p. 33). On sait, au contraire, qu'en arithmétique et en algèbre classique le produit de deux nombres de R ou C n'est nul que si l'un ou l'autre de ses facteurs l'est. Ce théorème, fondement de la théorie des équa- tions, peut donc être faux pour un anneau quelconque: nous sommes donc amenés à définir deux catégories d'anneaux, ceux sans diviseurs de zéro et ceux avec diviseurs de zéro. Un anneau commutatif sans diviseur de zéro M. QUEYSANNE ET A. DELACHET 65 3 
s'appelle un anneau d'intégrité (1). Ainsi Z est un anneau d'intégrité; Zjn en est un si, et seulement si, n est premier: en effet, si n est premier: d. b = 0, c'est-à-dire ab = 0 (0  a < n, 0  b < n; a et bEN) entraîne: a = 0 ou b = 0 ; si n n'est pas pre- mier, on a n = pq (1 < p < n, 1 < q < n ; p et q EN), donc pet q sont de véritables diviseurs de zéro. Dans le cas général, nous ne supposons rien d'autre pour la multiplication que l'associativité; elle peut avoir ou non un élément neutre e. Dans le cas où elle en admet un, on l'appelle l'élément unité de l'anneau et les notations se simplifient. En effet, dans le groupe additif, on peut écrire (cf.  21) : na = a + a X + a = ea + ea + ... + ea = = (e + e + + e) a = (ne) a et si l'on identifie ne E A avec nEZ on voit que n E A. Il n'y a par conséquent aucun inconvé- nient, si l'anneau contient un élément unité e, à l'identifier à l'élément unité 1 E Z avec cette convention, si A est à élément unité, A. :) Z. C'est le cas de Zjn ( 12) et des matrices carrées d'ordre n (9 15). Par contre, si l'anneau est sans élément unité, na appartient bien à l'anneau, mais il ne peut pas être considéré comme le produit de deux éléments de A, car n n'est pas nécessairement un élément de A : ainsi, l'ensemble de tous les entiers rationnels pairs est un anneau sans élément unité; il ne contient évidemment pas Z (2). Supposons que, quel que soit a "# 0, le groupe ad- ditif cyclique d'élément générique pa (p E Z) soit d'ordre n, c'est-à-dire qu'il existe un entier positif minimum n i= 0 tel que : na = 0, on dit que l'an- neau est de caractéristique non nulle n. Si le groupe (1) On dit quelquefois un domaine d'intégrité. (2) Ren1arquons toutefois, que si A est sans élément unité :. .l E A, x E A, nEZ -> x (na) = x (a + a + + a) CI: xa + + xa + + xa = n (xa). 66 
additif est d'ordre infini (n = 0), on dit que l'anneau est de caractéristique nulle. Par exemple, l'anneau Z est de caractéristique nulle; au contraire, l'an- neau Z/n (n premier) est de caractéristique n. Les formules de l'algèbre classique, en particulier la formule du binôme de Newton, prend, dans les anneaux commutatifs de caractéristique un nombre non nul premier n, une forme inhabituelle ; en effet le nombre entier positif Cp = n (n - 1) ... (n - p + 1) n pI est égal à 1 pour p = n et p = 0 (cf.  10, n. 2) ; si n est premier, p ! divisant le numérateur sans pou- voir diviser n divise (n - 1) ... (n - p + 1), donc: cP n = n.q (q EN, P i= 0, p i= n, n premier) donc dans l'anneau considéré à élément unité e cP n = n (qe) = 0 (p i= 0, p i= n, n premier) d'où (a+b)n=an+b n d'où (remplaçant a par a - b) : (a - b)n = an - b n , et, par recurrence : (al + a 2 + . . . + ap)n = an l + an 2 + ... + a n p Appliquons, à titre d'exercice, les formules pré- cédentes dans l'anneau Zjn (n premier) de caracté- ristique n pour : . al = a 2 = ... = a p = e = 1 on a: (e + e + ... + e)n = (pe)n = =en+e n + +en=e+e+ +e=pe soit : pn = p (mod. n) pour tout pEN et tout entier premier n : c'est l'un des théorèmes de Fermat. Notons enfin, pour achever d'illustrer la richesse de la structure d'anneau, qu'on appelle anneau euclidien un anneau d'intégrité A où, à chaque élé- ment a "# 0, on fait correspondre g (a) E N tel que: 1° ab =f:. 0 entraîne g (ab)  g (a) ; 67 
2 0 A tout couple (a, b) de A corresponde au moins un couple (q, r) de A tel que: b = aq + r avec r = 0 ou g (r) < g (a) Ainsi, Z est muni d'une structure d'anneau eucli- dien avec, si a E Z, g (a) = 1 a 1 qui représente, comme on le sait, la valeur absolue de a. 29. Idéaux dans un anneau commutatif (1). - Nous dirons qu'un sous-ensemble m d'un anneau commutatif A constitue un idéal si : 1 0 m est un sous-groupe du groupe additif de l'anneau A, c'est-à-dire (cf.  27), si a Emet b E m entraînent a - b E m ; 2 0 a Emet x E A entraînent ax E m, c'est-à-dire si (2) mx = m, quel que soit x E A. L'élément 0 de l'anneau constitue un idéal que l'on appelle idéal zéro et que l'on note (0). L'an- neau A est un idéal de A. Soit a "# 0 un élément particulier de A, x son élément générique, si a E m, nEZ, l'idéal m contient na et xa, donc: na + xa E m ; mais si l'on considère a priori les éléments na + xa, ils forment un idéal a de A, car, si x' E A et ni E Z : 1 0 (na + xa) - (ni a + x' a) = (n - ni) a + + (x - x') a ; 2 0 x' (na + xa) = x' (a + a + ... + a) + "" n termes + (x' x) a x' x E A Or (x' x) a = o. a + (x' x) a E a et x' a = O. a + x' a E a (1) On peut définir des idéaux à gauche et des idéaux à droite dans un anneau non commutatif (voir DUBREIL, loc. cit., p. 115 et sq.). Nous nous limiterons dans cet ouvrage aux idéaux dans un anneau commutatif qui nous suffiront pour les applications que nous avons en vue. (2) Etant données deux parties A et B d'un ensemble E, où est définie une loi multiplicative, on désigne par AB l'ensemble des produits ab (a E A et b E B), de même x étant un élément parti- culier de E, xA représentera l'ensemble des produits xa (a E A). Cette notation ne doit pas être confondue avec la notation A x B (cf.  18, p. 44) de l'ensemble produit. Ces notations se confondent pour A x A = AI et AA ID At, le contexte permettra d'éviter toute confusion. 68 
Donc, a étant un sous-groupe du groupe additif de A, x' (na + xa) E a. Cet idéal a s'appelle idéal engendré par a; on le note (a). En particulier, si A a un élément unité e, n == ne E A (cf.  28), donc l'élément générique de (a) est xa, x étant l'élément générique de A : les éléments de (a) sont les multiples de a. A devient dans ce cas l'idéal engendré par e, soit A == (e), d'où le nom d'idéal unité qu'on lui donne, que A ait ou non délément unité. Plus généralement, nous appellerons idéal en- gendré par al' a 2 , ..., a p ' l'ensemble des éléments: h='P  (nh ah + x h ah) h=1 ah élément particulier de A, nh E Z, Xh E A quel- conques (h == 1, 2, ..., p). Nous noterons cet idéal (al' a 2 , . . ., a p ), l'ensemble des p éléments al' a 2 , . . ., a p étant appelé base de cet idéal. Si A a un élément unité, l'élément générique de l'idéal h='P (al' a 2 , · · ., aJ') sera  Xh ah : on dit alors que l'idéal a une base ftnie. h:=l 1 L'idéal (a) s'appelle un idéal principal. Un anneau où tout idéal est principal est un anneau principal. En particulier, tout anneau euclidien est un anneau principal : en effet, soit a d'élément générique a un idéal d'un anneau euclidien A; il existe des éléments de a pour lesquels g (a) E N est minimum, soit a o l'un d'eux. On a nécessairement (cf.  28) : a = a o q + r avec r == 0 puisque g (r) < g (a o ) est impossible. Donc a C a o A or : a o A C (a o ) C a d'où: a == (a o ) == a o A et tout idéal de A est bien principal. Par exemple, Z est un anneau principal dont les seuls idéaux sont (n), nEZ. 69 
La démonstration précédente étant valable pour un idéal quelconque de l'anneau euclidien A l'est encore pour l'idéal unité A lui-même, de sorte que : A = (a o ) = a o A entraîne l'existence d'un élé- ment e EA tel que: ao=aoe et pour l'élément générique a de A, on a : a = qa o = q (a o e) = (qa o ) e = ae donc : tout anneau euclidien a un élément unité. Etant donnés deux idéaux a et b d'un même . anneau, SI : bea on dit que a est un diviseur de b ou encore que b est un multiple de a (1). On appelle somme (2) de deux idéaux a et b, l'en- semble des éléments a + b qui est évidemment un idéal noté a + b. On a : a e a + b et b e a + b d'autre part a e m et b e m entraînent a + b e m (d'après l'axiome 1°), donc a + b est un diviseur de a et de b et tout diviseur m de a et de b est un diviseur de a + b, d'où le nom de plus grand com- mun diviseur des idéaux a et b donné à la somme a + b ; on le note (a, b). Si a et b sont à base finie: a = (al' a 2 , ..., a p ) et b = (b l , b 2 , . . ., b q ) le P .G. C.D. (a, b) = (al' a 2 , . . ., a p ' b l , b 2 , . . ., b q ) est aussi à base finie. On montre que l'intersection de deux idéaux a et b, a () b, est un idéal qui n 'est jamais vide: il comprend toujours le 0 de l'anneau: ce théorème est évident (1) Ceci provient des idéaux de z: pour que l'idéal (p) soit contenu dans l'idéal (q), il faut et il suffit que les nombres entiers rationnels kp soient tous parmi les nombres hq, donc, en particulier (k = 1), il existe r E Z tel que p = rq (p est un multiple de q) ; par exemple: (6) C (2). (2) On notera que la somme de deux idéaux n'est pas identique à la réunion de ces deux idéaux, mais à l'idéal engendré par les éléments de la réunion : a + b est touj ours un diviseur de a U b, car a + b ::> a u b. 70 
pour les idéaux principaux. Les idéaux a) a n b et b:> a n b sont des diviseurs de a n b et et :> m et b :> m entraînent a n b :> m donc a n b est un diviseur de tout multiple com- mun de a et b, d'où le nom de plus petit commun multiple des idéaux a et b que l'on donne à leur intersection an b, que l'on note [a, b]. Pour les idéaux de Z, on voit que ces notions coincident avec les définitions du P.G.C.D. et du P.P.C.M. des en- tiers rationnels qui engendrent les idéaux considérés. On appelle produit (1) de deux idéaux a d'élément générique a et b d'élément générique b l'idéal engendré par les produits ab. Ce produit a. b est évidemment un multiple commun de a et de b, donc de leur P.P.C.M. [a, b]. On peut enfin définir une puissance entière et positive de l'idéal a : an. III. - Corps 30. Corps. - On appelle corps K, un anneau A tels que les éléments de A distincts du zéro de A forment un groupe relativement à la multiplication de l'anneau; l'élément neutre de l'addition et l'élé- ment neutre de la multiplication se nomment respec- tivement le zéro et l'élément-unité de K ; s'il n'y a aucun danger de confusion, on les note 0 et 1 : un corps comprend donc au moins deux éléments dis- tincts, de plus on voit que si a et b appartiennent à K, a + b, a - b, ab et, si ab,# 0, ab- 1 et ba- 1 y appartien- nent aussi. Lorsque le groupe multiplicatif du corps est abélien, le corps est dit commutatif (2). Ainsi, Q, R, C sont des corps commutatifs ; au contraire, le corps des quaternions est non commutatif (9 14). (1) On notera que le produit a. b n'est identique ni à a u b, ni à Q f'\ b et que: Q + b ) a u 0 ) Q f'\ 0 ) a. o. En effet (axiome 20) ab E Q et ab = ba E b, donc ab E a f'\ b. (2) On dit aussi quelquefois domaine de rationalité. Certains auteurs nomment corps ce que nous appelons corps commutatif et corps gauche ce que nous appelons corps non commutatif. 71 
Notons une propriété essentielle: un corps ne peut avoir de véritables diviseurs de zéro. En effet, tout élément a '# 0 ayant un inverse pour la multi- plication a- 1 ab = 0 (a '# 0) entraîne a- 1 (ab) = (a- 1 a) b = eb = b = 0 Donc : dans un corps, un produit est nul si, et seulement si, l'un des facteurs au moins est nul. Nous dirons qu'un corps K est de caractéristique n si, en qualité d'anneau, il est de caractéristique n. Ainsi, l'ensemble Z/n (n premier) est un corps com- mutatif de caractéristique n ; mais si n est un nombre composé, Z/n ne peut être un corps, car cet ensemble admet des véritables diviseurs de zéro (cf. 9 28 ce n'est même pas un anneau d'intégrité). Les corps, bien que présentant une très grande analogie, quant aux règles de calcul, avec R (surtout lorsqu'ils sont commutatifs et de caractéristique nulle), peuvent présenter des propriétés très éloi- gnées de ce corps particulier. L'existence simultanée de ces analogies et de ces différences fait le grand intérêt mathématique de la notion de corps : nous le verrons dans les appli- cations où nous chercherons à présenter les princi- pales propriétés relatives aux nombres usuels réels ou complexes, ainsi que celles des polynômes et des équations algébriques comme application des notions de groupe, d'anneau et de corps. Un grand nombre de ces propriétés que les débutants consi- dèrent comme « allant de soi » nous apparaîtront comme des conséquences des structures envisagées, conséquences qui pourront nous sembler d'autant plus étranges que nous nous éloignerons du cas très particulier des nombres réels ou complexes. Mais, avant de présenter ces applications, nous devons étudier les méthodes générales de l'algèbre moderne. 72 
CHAPITRE III LES MÉTHODES DE L'ALGÈBRE MODERNE Les méthodes de l'algèbre moderne ont pour but essentiel de permettre la résolution de nouveaux problèmes; aussi bien, l'application d'un ensemble sur un autre est un instrument de choix de ces méthodes, puisque cet instrument permet, à partir d'ensembles connus, d'engendrer d'autres ensembles qui peuvent posséder des propriétés nouvelles. Nous commencerons par étudier le cas où l'appli- cation est biunivoque; puis, nous examinerons com- ment, par une espèce de « contraction » de l'un des ensembles, on peut déduire une application biunivoque d'une application qui ne l'est pas. Enfin, par un autre procédé, l'extension, nous chercherons, étant donné un ensemble e, à former un sur-ensemble E (c'est-à-dire un ensemble E dont e soit un sous- ensemble) où les opérations sur les éléments de E seront des prolongements de celles portant sur les éléments de e, opérations pouvant avoir sur E des propriétés qu'elles n'avaient pas sur e. 1. - Isomorphisme et automorphisme 31. Isomorphisme. - Nous dirons que deux ensembles E et E' sont isomorphes si : 1. - Il existe une application biunivoque de E sur E' a E E et a' E E' a  a' II. - A chaque loi de composition interne L définie sur E correspond une loi L' sur E' telle que a  a' et b  b ' entraînent aLb  a' L' b ' III. - A chaque loi de composition externe définie sur E avec un domaine d'opérateurs Q d'éléments ex, , . . ., correspond une loi de composition externe 73 
définie sur E' avec le même domaine d'opérateurs n telle que a  a' entraîne (el, a)  (el, a') Des éléments tels que a  a', ainsi que les lois L, L', et les lois externes correspondantes seront dits homologues. Lorsque les deux ensembles sont disjoints, les lois homologues dans E et E' peuvent être notées par le même symbole ou des symboles différents, cela importe peu. Dans un but de simplification, on peut les noter par le même symbole (1). Ainsi (9 Il) les lois de composition internes homologues du groupe alterné de trois objets A3 et du groupe iso- morphe des rotations R (0, k 2 7t/3) sont notées mul- tiplicativement dans les deux groupes ; par contre (9 12), si dans le groupe additif de l'anneau Z/n la loi de composition est notée additivelnent, la loi homologue du groupe isomorphe des rotations R (0, k 2 7t/n) est notée multiplicativement. Dans le cas où E et E' ont une partie commune, ou si l'un est un sous-ensemble de l'autre, il peut y avoir intérêt à choisir des notations différentes pour les lois homologues. Par exemple, si E = R+ et E' = R, on sait que la correspondance : x x' = loglO x transforme la multiplication ordinaire dans E en l'addition ordinaire dans E' dans ce cas, il y a intérêt à adopter la notation multiplicative dans E et additive dans E'. Si E = E', l'isomorphisme est alors appelé un automorphisme; dans ce cas, il n'y a que des avan- tages à pr.endre la même notation pour les lois homologues. Ainsi, a E Q, b E Q et D '# 0 EN sans diviseur carré parfait, l'application: a + b V D  a - b VD (1) En se souvenant toutefois qu'une loi notée additivement est toujours commutative. 74 
est un automorphisme, les lois étant l'addition et la multiplication ordinaires. D'une façon générale si E et E' sont isomorphes, ces ensembles ont les mêmes propriétés algébriques : si la loi L est commutative sur E, L' le sera sur E' ; si L admet un élément neutre e, L' admettra l'élé- ment neutre e'  e ; si dans E tout élément a a un symétrique a- 1 par la loi L, dans E' tout élément homologue de a, a' aura un symétrique par L' a'-l a-l, etc. En particulier, si E est un groupe, un anneau, un anneau d'intégrité, un corps, l'en- semble isomorphe E' sera respectivement un groupe, un anneau, un anneau d'intégrité, un corps : le principe de démonstration, toujours le même, est fondé sur la biunivocité de l'application envisagée; éclairons-le par un exemple. Supposons qu'il existe dans E muni d'une loi additive d'élément neutre 0 et d'une loi multiplicative, de véritables diviseurs de 0 : a et b ab = 0 Alors, si a a', b b ' , O 0 / , comme: ab a' b ' on a a' b ' = 0 ' et a' et b ' sont de véritables diviseurs du zéro de E'. On peut donc dire que deux ensembles iso- morphes E et E' sont deux réalisations concrètes d'une même structure par exemple, le groupe additif Z/n et le groupe multiplicatif des rota- tions R (0, k 2 7t/n) sont deux réalisations concrètes de la structure de groupe cyclique d'ordre n. 32. Automorphisme des groupes. - Etant donné un ensemble E, on appelle produit de deux auto- morphismes la composition de deux applications biunivoques de E sur lui-même. Les automorphismes d'un ensemble E forment un groupe, car : 7S 
1 0 Par définition même, les produits des auto- morphismes A, B, C de E sont associatifs : (AB) C = A (BC) 2° Il existe un élément neutre U pour ce produit : l'automorphisme identique: x E E, x x; 3° Un automorphisme A de E étant une appli- cation biunivoque, à chaque automorphisme corres- pond l'application réciproque A-l qui définit l'auto- morphisme inverse de A, car: AA-l = U. En particulier, les automorphismes d'un groupe G forment un groupe. On les classe en deux catégories : 1 ° Les automorphismes internes : soit a un élément particulier de G ; l'application : x x' = axa- 1 est un automorphisme, car : a) Elle est biunivoque x = a- 1 x' a ; b) x  x' = axa- 1 et y  y' = aya- l entraînent: xy x' y' = (axa- I ) (aya- 1 ) = (ax) e (ya- 1 ) = = a (xy) a- 1 2° Tous les autres automorphismes s'il y en a : on les appelle automorphismes externes. Les automorphismes internes forment un groupe. En effet, soit A l'automorphisme x  axa- 1 et B l'auto- morphisme x bxb- 1 , l'automorphisme AB sera: x  a (bxb- 1 ) a- 1 = (ab) x (b- 1 a- 1 ) = (ab) x (ab)-l L'élément neutre U sera x exe- 1 ou x x, et l'inverse A-l de A sera x a- l xa. Une propriété essentielle de ces automorphismes internes est de transformer un sous-groupe g du groupe G en un sous-groupe g' de G. En effet, pour montrer que l'ensemble g' image de g par un auto- morphisme A (x axa- 1 ) est un sous-groupe de G, il suffit de vérifier (cf. 9 27) que si x' et y' sont les homologues de x et y E g, x' y'-l E g'. Or : y'-l = arl a- l 76 
car (aya- l ) (ar l a- l ) = ayr 1 a- 1 = aa- l = e et x' y'-l = (axa- l ) (ay-l a- l ) = a (xrl) a- l Donc, puisque xy-l E g, x' y'-l E g'. Nous représenterons ce sous-groupe g' par aga-le Une catégorie de sous-groupes joue un rôle important dans la théorie des groupes, les sous-groupes distingués qui sont tels que pour tout a E G : g = aga- l ; ces sous-groupes sont globalement invariants dans un certain automorphisme interne A (1). En particulier, si G est commutatif, tout sous-groupe de G est dis- tingué, il est même invariant élément par élément. Lorsque G est un groupe de transformations T, S, etc., la transformation STS-l est appelée trans- muée de T par S : c'est en effet ce que devient la transformation T lorsqu'on applique à la fois à l'ensemble des arguments et à celui des images la transformation S. Ainsi, si G est le groupe des déplacements, et g le groupe des translations, il est clair que g est un sous-groupe distingué de G. Avant de passer aux applications non biuni- voques, nous allons donner les définitions et les propriétés d'une catégorie de relations extrêmement importantes: les relations d'équivalence. II. - Relations d'équivalence 33. Relations d'équivalence; ensembles quotient. - Soit un ensemble E d'éléments a, b, c, . . . ; nous appellerons relation d'équivalence R entre deux éléments a, b quelconques de E une relation 1 0 Réflexive: c'est-à-dire vraie de a et de a ; 2 0 Symétrie : c'est-à-dire vraie de b et de a si elle l'est de a et de b ; (1) D'ob le nom de sous-groupes invariants qu'on leur donne parfois. 77 
3 0 Transitive c'est-à-dire vraie de a et de c si elle 1 'est à la fois de a et de b et de b et de c ; a et b seront dits équivalents modulo R et l'on écrira a = b (mod. R) Moyennant cette convention, les trois propriétés précédentes prennent la forme : 1 0 a = a (mod. R) ; 20 a = b (mod. R) entraîne b = a (mod. R) ; 3 0  a = b (mod. R)  A - ( d R) ( b = c (mod. R)  entralnent a = c mo. · L'égalité dans N, Z, Q, R, C, Z/n, dans l'anneau des matrices carrées, le corps des quaternions est une relation d'équivalence. Le parallélisme des droites dans le plan ou dans l'espace, l'équipollence des vec- teurs, l'égalité des figures en géométrie euclidienne sont des relations d'équivalence. Nous donnerons deux exemples plus abstraits : 1 er exemple : Soit g un sous-groupe du groupe G ; si a E g et b E g, la relation: b E ag ou a- 1 b E g est une relation d'équivalence car: 1 0 a E g entraîne a- l E g et a- l a E g, car a- l a = e ; 2 0 a- l E g entraîne b- l a E g car (a- l b)-l = = b- l a ; 3 0 1 a-l b E g j entraînent a- l cEg, car b- l CEg (a- l b) (b- 1 c) = a- 1 c 2 e exemple : Soit m un idéal d'un anneau commu- tatif A; si a E A et b E A, la relation : a-b Em est une relation d'équivalence car : 1 0 a E m entraîne (- a) E ln et a - a E m, car a - a = 0 ; 78 
2° a - b E m entraîne b - a E m car b - a =  - (a - b) ; 3 0  a - b E m entraînent a - C E m car a - C = l b-c Em = (a-b) + (b-c) Une relation d'équivalence permet d'effectuer dans un ensemble E une partition extrêmement précieuse. Partageons E en sous-ensembles A, B, . . . ayant les propriétés suivantes : 1 0 Aucun des A, B, .. ., n'est vide; 2 0 Si a E A et a' E A, on a : a = a' (mod. R); 3 0 Quels que soient A et B : A IÎ B = 0. Il résulte de ces définitions que chaque sous- ensemble A comprend tous les éléments de E équi- valents à l'un d'entre eux a, et ne comprend qu'eux: on dit que A, B, . . ., sont les classes d'équi- valence de E suivant R ou encore les classes résiduelles modulo R. Réciproquement soit une partition de E en sous-ensembles A, B, . . . non vides et disjoints; cette partition définit sur E une relation d'équi- valence : la relation « appartenir à un même sous- ensemble A », relation évidemment réflexive, sy- métrique et transitive. Si a est un élément parti- culier de A, classe d'équivalence modulo R de E, nous désignerons cette classe par li, l'élément parti- culier a étant appelé un représentant de la classe ; l'ensemble des classes, appelé l'ensemble-quotient de l'ensemble E par la relation R, sera noté : EjR. Ainsi (9 12) nous avons noté Zjn l'ensemble des classes résiduelles modulo n ; si E est l'ensemble des vecteurs de R3 et R l'équipollence des vecteurs, une classe d'équivalence de R3 suivant R consti- tuera ce que l'on appelle un vecteur libre: un vecteur libre n'est donc pas un vecteur, mais un ensemble de vecteurs tous équipollents ; la confusion vient de ce que l'on substitue la plupart du temps à la classe « vecteur libre» un représentant de cette classe (1). (1) En fait, il est impossible de se passer de la notion de classe d'équivalence pour définir correctement un vecteur libre. 79 
Supposons maintenant qu'une loi de composition interne, notée multipIicativement, soit définie dans E ; nous dirons qu'une relation d'équivalence R est compatible à gauche avec cettte loi si : a = a' (mod. R) et b E E entraînent ba = ba' (mod. R) Nous dirons que R est compatible à droite avec cette loi si : a = a' (mod. R) et b E E entraînent ab = a' b (mod. R) Si R est compatible avec cette loi à la fois à droite et à gauche, on dit que R est compatible avec cette loi ; il est clair qu'alors : a = a' (mod. R) et b = b' (mod. R) entraînent ab = a' b' (mod. R) en effet a = a' (mod. R) entraîne ab = a' b (mod. R) - compatibilité à droite - et b -= b' (mod. R) entraîne a' b = a' b' (mod. R) - compa- tibilité à gauche. Nous donnerons deux exemples pour illustrer cette notion 1 er exemple : Cherchons les relations d'équiva- lence R compatibles avec la loi de composition L (notée multiplicativement) d'un groupe G d'élément neutre e. Si R est compatible à gauche avec L, la relation : a E G, b E G, b = a (mod. R) ,. , eqmvaut a : a- 1 b = a- 1 a = e (mod. R) soit, si ë désigne la classe d'équivalence suivant R de l'ensemble-quotient GjR de représentant e dans (; : a- 1 b E è 80 
e est un sous-groupe de G car R étant transitive,  a E ë  c'est-à-dire  a = e (mod. R) ? b E ë   b = e (mod. R) entraînent: b = a (mod. R) ou crI b = e (mod. R) ou: a- I b E ë Réciproquement, si g est un sous-groupe de G, nous avons vu au début du paragraphe (1 er exemple) que la relation : a- I b E g est une relation d'équivalence. Cette relation est compatible à gauche avec L, car pour tout CEG : (ca)-I (cb) = a- I c- I cb = a- I b E g Donc toute relation d'équivalence compatible à gauche avec L est équivalente à une relation de la forme (1) a- I b E g (où g est un sous-groupe de G). On montrerait de même que : toute relation d'équi- valence R compatible à droite avec L est équivalente à une relation de la forme ) brlEg (où g est un sous-groupe de G). Tout sous-groupe g de G définit ainsi deux rela- tions d'équivalence dans G : (1) et (2). Les classes d'équivalence suivant ces relations sont respective- ment ag, appelées classes à gauche suivant g (ou modulo g), et ga, appelées classes à droite suivant g (ou modulo g), a étant l'élément générique de G. Toutes ces classes ont même puissance puisqu'on peut étabIirune correspondance biunivoque entre ag et bg; donc, si G est fini d'ordre P et si p désigne l'ordre, nécessairement fini dans ce cas, de g, il Y 81 
aura P/p (1) classes à gauche suivant g; donc l'ordre d'un groupe fini est toujours divisible par l'ordre de l'un quelconque de ses sous-groupes. Remarquons enfin qu'une relation d'équivalence R définie dans G est compatible avec L si, et seulement si, elle est à la fois compatible à droite et à gauche avec L, ce qui exige : ag = ga ou g = aga- 1 c'est-à-dire que le sous-groupe g qui la définit soit un sous-groupe distingué de G. Le quotient du groupe G par une telle relation d'équivalence est appelé l'ensemble-quotient de G par le sous-groupe distingué g et noté GJg (2) ; deux éléments a et b d'une même classe sont dits congrus modulo g et l'on écrit: a = b (mod. g) 2 e exemple Cherchons les relations d'équiva- lence R compatibles avec les lois de composition d'un anneau commutatif A. R étant compatible avec l'addition dans A et la compatibilité d'une relation d'équivalence avec la loi d'un groupe ne dépendant évidemment pas de la notation additive ou multiplicative de cette loi, il résulte du 1 er exem- ple que : si Ô désigne la classe d'équivalence sui- vant R de l'ensemble quotient AJR de représentant 0 dans A, R équivaut nécessairement à la relation : b-aEÔ et 0 est un sous-groupe additif du groupe additif de A. L'ensemble Ô est même un idéal de A car la compatibilité de R par rapport à la multiplication de A montre que : 'XEA  ,,  XEA j 1\  ax = O(mod.R) l . c.-a-d. entrament ( a E 0 a = 0 (mod. R) xa = 0 (mod. R) (1) Ce nombre est appelé rindice du sous-groupe 9 par rapport à Q. (2) Nous verrons au S 36, p. 94, que c'est un groupe appelé groupe quotient de Q par g. 82 
donc : . ax et xa E 0 Réciproquement, si m est un idéal quelconque de A, nous avons vu au début du paragraphe (2 e exemple) que la relation : a EA, b EA, b-a Em est une relation d'équivalence. Cette relation est compatible avec les lois de A, car: C E A et b - a E m entraîne : 1° Pour l'addition: (b + c) - (a + c) = (c + b) - (c + a) = b - a E m 2 0 Pour la multiplication cb - ca = c (b - a) E m et bc - ac = (b - a) c E m Donc : une relation d'équivalence R est compatible avec les lois d'un anneau commutatif si, et seulement si, elle est équivalente à une relation de la forme : b-a Em (où m est un idéal de A (1». A tout idéal m de A correspond ainsi une relation d'équivalence compatible avec les lois de A qui permet une partition de A en classes résiduelles que l'on appelle classes résiduelles suivant m (ou modulo m). L'ensemble AIR de ces classes constitue ce que l'on appelle l'ensemble-quotient (2) de A par l'idéal m on le note A/m. Deux éléments d'une (1) Si A n'est pas commutatif, nous avons signalé (note 1, p. 72), que l'on peut définir des idéaux à droite et à gauche de A. Si un idéal est à la fois idéal à droite et à gauche de A il est dit idéal bilatère de A (cf. N. BOURBAKI, !iv. II, Algèbre, chap. I  8 nO 5, Défi- nition 5) et (cf. Théorème 1, loc. cit.) il suffit de remplacer dans le théorème que nous venons de démontrer le mot idéal par le mot idéal bilatère. (2) Nous verrons au S 37, p. 95, que c'est un anneau appelé anneau quotient de A par m. 83 
même classe sont dits congrus modulo m et l'on écrit a = b (mod. m) On définirait de même la compatibilité d'une relation d'équivalence avec plusieurs lois internes ou externes définies sur E. Ainsi, à la loi interne L notée multiplicativement qui définit c = ab, nous pouvons faire correspondre dans l'ensemble quo- tient E/R des classes résiduelles modulo R désignées par d, b, etc., une nouvelle loi définie par  = b qui s'appellera, tout naturellement, loi quotient de la loi L par la relation d'équivalence R et que nous noterons L/R. Par exemple, à l'addition dans Z correspond l'addition dans Zin (cf. 9 12), quotient de l'addition ordinaire par la relation d'équivalence a = a' (mod. n) ; en effet, cette équi- valence étant compatible avec l'addition, le composé par addition des deux classes  et b est (a + b), a et b étant deux représentants quelconques, l'un de d, r autre de b ; on pourrait faire une remarque analogue pour la multiplication. 34. Classes d'équivalence définies par une appli- cation. - Considérons une application f d'un en- semble X sur un ensemble Y (cf. 919, 10) ; la relation définie par : - x E X, x' E X f(x) = f(x / ) est une relation d'équivalence, car évidemment ré- flexive, symétrique et transitive : les classes d'équi- valence dans X suivant cette relation d'équivalence sont formées des ensembles d'éléments de X ayant même image dans Y. Par exemple, si X = R et si Y est l'ensemble des nombres réels y du segment - 1  Y  1, consi- dérons l'application: . xy=smx 84 
Parmi les nombres réels x qui ont même sinus Yo' il y en a un et un seul, soit Xo, tel que : - 1t/2  Xo  Tt/2 tous les autres seront donnés par Xo + 2 lm et 7t - Xo + 2 k ' Tt (k et k ' E Z) : ils constitueront la classe des nombres réels équivalents à Xo suivant la relation : sin x = sin Xo. Donc, toute application f non biunivoque de X sur y permet de définir une relation d'équivalence notée Rf et une partition de X en classes d'équivalence suivant. Dans le cas particulier où l'application f est biunivoque, les classes modulo Rf sont les élé- ments de X, les congruences modulo  sont les égalités et X/Rf = X; si, au contraire, il y a une seule classe d'équivalence, tous les éléments de X sont équivalents modulo Rf et X/Rf ainsi que Y ne contiennent qu'un seul élément : on dit alors que Rf est l'équivalence absolue. Dans tous les cas, l'ensemble quotient X/Rf (d'élément générique x) est en correspondance biunivoque avec Y par f : en effet, à tous les x E X l'application f fait corres- pondre un seul y E X et un élément particulier y de Y est l'image de tous les x de x. Donc, par ce pro- cédé, nous avons déduit de l'application non biunivoque de X sur Y une application biunivoque de X/Rf sur Y. III. - Homomorphisme 35. Homomorphisme; théorème d'homomor- phie. - Nous dirons que E' d'élément génériqu a' est homomorphe à E d'élément générique a si : 1 0 Il existe une application de E sur E' : a  a' , 2 0 A chaque loi de composition interne L définie sur E correspond biunivoquement. une loi L' sur E' telle que a  a' et b  b ' entraînent aLb  a' L' b' 3 0 A chaque loi de composition externe A définie sur E avec un domaine d'opérateur n d'éléments ex, 85 
 correspond biunivoquement une loi de composition externe A' définie sur E' avec le même domaine d'opérateurs n telle que a  a' entraîne a.Aa  a.A' a' Les lois L et L', A et A' sont dites homologues; mais on remarquera que la relation entre E et E' est dissymétrique on l'appelle un homomorphisme de E sur E', E' = f (E) étant l'image homomorphe de E; on ne pourra plus parler ici (comme pour l'isomorphisme) d'éléments homologues: si a  a', nous dirons que a' est le premier itéré de a, a un antécédent de a'. Un homomorphisnle de E sur E' présente donc une seule différence (essentielle il est vrai) avec un isomorphisme de E et E' : on ne suppose plus biunivoque l'application de E sur E' : si un élément de E a bien un premier itéré unique, il peut avoir plusieurs et même une infinité d'anté- cédents. Toutefois, les remarques que nous a,,-ons faites sur la manière de noter les lois homologues dans un isomorphisme restent valables. Nous nous limiterons aux ensembles munis d'une ou deux lois de composition internes que nous noterons par le même symbole dans E et dans E'. Nous avons vu ( 34) que l'application f de E sur E' permet de définir dans E une relation d'équi- valence Rf par la condition : f(a) = f(b) Cette relation d'équivalence Rf est compatible avec toute loi de composition interne définie sur E : en effet, si al' lZ2' b 1 , b 2 appartiennent à E :  al = a 2 (mod. Rf)  , t " d .  f(a 1 ) = !(a 2 ) = a' t b 1 = b 2 (mod. Rf)  c es -a- Ire  f(b 1 ) = f(b 2 ) = b' entraînent al b 1 = a 2 b 2 (mod. Rf) car, d'après l'axiome 2 0 : !(a 1 b l ) =f(a 1 )f(b 1 ) = a'b' =f(a 2 )f(b 2 ) =f(a 2 b 2 ) 86 
Comme la correspondance entre les classes mo- dulo Rf de l'ensemble quotient EJRf et les éléments de E' est biunivoque (cf. 934), nous pouvons énoncer le théorème suivant : Théorème d'homomorphie : Si E' est l'image homomorphe de E par l'application' f, les ensembles E/Rf et E' sont isomorphes. Bien que les relations algébriques entre éléments de E traduites par les lois internes soient conservées sur E', le fait qu'un élément de E' puisse avoir plusieurs antécédents dans E peut entraîner des propriétés très différentes des lois homologues dans E et dans E'. Certaines propriétés sont conservées si une loi interne L de E est associative, commutative, possède un élément neutre e, la loi L' de E' sera associative, commutative, possédera un élément neutre e' = f (e). A tout élément symétrisable a de Epar L correspond un élément a' = f(a) symétrisable de E' par L'et (en notation multiplicative) a'-l = f(a- 1 ), car d'après l'axiome 2 0 : aa- 1 = a- 1 a = e entraîne : f(a)f(a- 1 ) = f(a- l )f(a) = f(e) Le principe de démonstration est toujours le même ; montrons, par exemple, que la distributivité est conservée s'il y a plusieurs lois : Soient a, b, c, des antécédents respectifs dans E des éléments a', b', c' particuliers de E' (il Y a au moins un antécédent pour chaque élément de E') ; les premiers itérés de a (b + c) et de ab + ac étant respectivement a' (b' + c') et a' b' + a' c' (axiome 2°) : a (b + c) = ab + ac entraîne a' (b' + c') = = a' b' + a' c' Mais, au contraire de ce qui se passe pour un isomorphisme, toutes les propriétés algébriques ne 87 
sont pas conservées par un homomorphisme, si, par exemple, E est un anneau d'intégrité, E' n'en est pas nécessairement un, car il peut admettre de véritables diviseurs de zéro en effet, pour que a' b' = 0' (0' étant généralement l'image de plusieurs éléments de E : 0, 0 1 , O 2 ), il suffit qu'il existe des antécédents non nuls al et b l de a' et b' vérifiant al b l = 0 1 i= O. Par exemple (9 12), l'anneau Z/6 qui possède de véritables diviseurs de Ô est homomorphe à l'anneau d'intégrité Z : 3.2 = Ô correspond à 3.2 = 6. En particulier, il résulte de la démonstration précé- dente que si a E E est régulier, a' = f(a) n'est pas nécessairement régulier dans E'. Cependant, les propriétés conservées montrent que les ensembles respectivement homomorphes d'un groupe, d'un anneau, d'un corps sont un groupe, un anneau, un corps (1). 36. Homomorphisme des groupes. - L'image homomorphe d'un groupe G d'élément neutre e par l'application f est donc un groupe G' = f(G) d'élément neutre e' = f(e). Soit R la relation d'équi- valence définie par f dans G. D'après le théo- rème d'homomorphie (9 35) la correspondance entre G' et l'ensemble-quotient GIRl est un isomor- phisme 1. Donc GIRl est un groupe : on l'appelle le groupe-quotient de G par Rt. Soit ë l'ensemble des antécédents de e' : ë E GIRl et, par 1, ë  e. Rf étant nécessairement compatible avec la loi de G (cf. 9 35), il résulte de l'étude des relations d'équivalence compatibles avec la loi de composition d'un groupe (cf. 9 33) que : 1 0 ê est un sous-groupe distingué de G ; (1) Avec une petite restriction pour les corps: il faut que l'en- semble K' homomorphe au corps K ne soit pas réduit à un seul élément (cf. supra,  30, p. 76, infra.  38, p. 97). 88 
2°  est équivalente à une relation de la forme a- 1 b E ë (quu équivaut ici à ba- 1 E ë) de sorte que l'on peut énoncer: Tout groupe G' homomorphe de G est isomorphe du groupe-quotient G/ê où ë est le sous-groupe dis- tingué de G, ensemble des antécédents de e'. De plus, le choix de Rf étant lié (cf.  33) à celui d'un sous-groupe distingué arbitraire de G, on peut dire qu'il existe une correspondance biunivoque entre les sous-groupes distingués g d'un groupe G et les homomorphismes de G sur un autre groupe ; d'une façon plus précise : Un groupe G' est homomorphe à un groupe G si, et seulement si, G' est isomorphe à G/g, groupe-quotient de G par un sous-groupe distingué g quelconque de G. 37. Homomorphisme des' anneaux. - L'image homomorphe A' = f(A) d'un anneau A par l'appli- cation f est, comme nous l'avons signalé au 9 35, un anneau dont le zéro est l'itéré du zéro de A : 0' = f (0), le zéro d'un anneau étant l'élément neutre de son groupe additif. Nous avons déjà remarqué (9 35) que A et A' n'ont pas nécessaire- ment les mêmes propriétés algébriques et qu'en particulier A' peut avoir de véritables diviseurs de zéro sans que A en possède. Toutefois, si A est un anneau commutatif, il en est de même de A' et si A possède un élément unité 1, A' admet aussi un élément unité l' = f(I), l'élément unité d'un anneau étant l'élément neutre de la multiplication dans cet anneau. Soit Rf la relation d'équivalence définie par f dans l'anneau commutatif A. D'après le théorème d'homomorphie (9 35), la correspondance entre A' et l'ensemble A/Rf' quotient de l'anneau A par Rf' est un isomorphisme 1. L'ensemble A/Rf est donc un anneau : on l'appelle l'anneau-quotient d A 89 
par Rf. Soit Ô l'ensemble des antécédents de 0' par f : Ô E A/Rf; par 1, Ô  0'. Rf étant néces- sairement compatible avec les lois internes de A (cf. 9 35), il résulte de l'étude des relations d'équi- valence compatibles avec les lois d'un anneau commutatif (cf. 9 33) que : 1 0 Ô est un idéal de A; 2 0 Rf est équivalente à une relation de la forme b - a E Ô, de sorte que l'on peut énoncer: Tout anneau A' homomorphe à un anneau commu- tatif A est isomorphe à l'anneau-quotient A/Ô, où Ô est l'idéal de A, ensemble des antécédents du zéro de A' (1). De plus, le choix de Rf étant lié (cf. 9 33) à celui d'un idéal m arbitraire de A, on peut dire qu'il existe une correspondance biunivoque entre les idéaux de A et les homomorphismes de A sur un autre anneau; d'une façon plus précise : Un anneau A' est homomorphe à un anneau commu- tatif A si, et seulement si, A' est isomorphe à Ajm anneau-quotient de A par un idéal m quelconque de A (1). Dans cet isomorphisme, le zéro de A' est homo- logue à la classe résiduelle rh E A/m et les éléments de A', d'une façon générale, sont homologues aux classes résiduelles modulo m. En particulier, si m = (0), la congruence modulo m est une égalité (cf. 9 34) et A et A' sont isomorphes; si m = (1) ou A, la congruence modulo m devient l'équivalence absolue: il n'y a qu'une seule classe d'équivalence dans A, A lui-même, et A' se réduit à un seul ' 1 ' 0 , e ement, . 38. Homomorphisme des corps. - Si l'image homomorphe K' = f(K) d'un corps K par l'appli- (1) Si A n'est pas commutatif, il suffit de remplacer dans ce théo- rème le mot idéal par le mot idéal bilatère (cf. note 1, p. 89). 90 
cation f (cf. 9 35) n'est pas réduite à un seul élé- ment, K' est un corps dont le zéro et l'élément unité sont respectivement les images du zéro et de l'élé- ment unité de K par f: 0' = f (0), l' = f (1). Soit R la relation d'équivalence définie par f dans K. D'après le théorème d'homomorphisme (9 35), la correspondance entre K' et KIR, est un isomor- phisme 1. Donc, KIR, est un corps on l'appelle le corps-quotient de K par R4. Soient 0 et i les ensembles des antécédents respectifs du zéro et de l'unité de K' par Rf : Ô E I(/R f , i E KIRf' et par 1 : Ô  0', i  1'. Rf étant nécessairement compatible avec les lois internes de l'anneau commutatif A du corps K, il résulte du 9 37 que : . "'- 1 0 0 est un idéal de A (on dit un idéal de K) ; 2 0  est équivalente à une relation de la forme b - a E O. De plus: si m est un idéal quelconque de K et x un élément non nul de m, comme rI E K, rI x = 1 E m; donc: m = K; si m ne comprend que l'élément 0 de K : m = (0); donc : les seuls idéaux d'un corps sont m = (0) et m = K. Il en résulte qu'il ne peut exister que deux homomorphismes d'un corps K sur un ensemble K' : 1 0 Celui qui correspond à m = (0) pour lequel R, est l'égalité: c'est donc un isomorphisme de K et de l'ensemble K' qui est alors un corps; 2 0 Celui qui correspond à m = K pour lequel R est l'équivalence absolue (cf. 9 34) : K' est alors un anneau réduit à un seul élément 0'. Donc : tout homomorphisme d'un corps K sur un corps K' est un isomorphisme. IV. - Extension 39. Partie stable; loi induite; extension. - Etant donné un ensemble E muni d'une loi interne L que nous noterons multiplicativement, on dit que A 91 
cst une partie szable de E pour la loi interne L . SI : a E A et b E A entraînent ab E A la composition des éléments de A considérés comme éléments de E se faisant par la loi L; la loi de composition interne 1 ainsi définie sur A est appelée loi induite sur A par la loi L. Par exemple, l'ensemble E' des éléments réguliers d'un ensemble E muni d'une loi associative Lest stable pour cette loi, car si a et b sont des éléments réguliers de E, ab est évidemment régulier (1). De même, pour une loi associative, l'ensemble E" des éléments symétrisables de E est stable, car si a' et b ' sont les symétriques de a et b, ab est symétrisable et a pour symétrique b- 1 a- 1 = b ' a' (2). Ainsi, un sous-groupe g d'un groupe G est une partie stable de ce groupe, mais la réciproque est fausse (cf. 9 27). On définirait de même une partie stable A de E pour un ensemble de lois externes et internes définies sl;lr E et les lois induites sur A par les lois de E. Par exemple, un idéal 111 d'un anneau A est- une partie stable de A pour les deux lois de A, mais la réciproque est fausse (cf. 929). Réciproquement, étant donné un ensemble A muni d'une loi de composition 1 s'il existe un en- semble F ::> A muni d'une loi L telle que A soit une partie stable de F pour la loi L et que 1 soit la loi induite de L sur A par L, on dit que F est une extension de A, ou encore que l'on a plongé l'en- semble A dans l'ensemble F et que la loi L est un prolongement sur E de la loi 1 définie sur A. Dans la (1) Notons que si un élément a E A partie stable de E pour Lest régulier pour L, a est régulier pour la loi 1 induite par L sur A, mais un élément de A peut être régulier dans A sans l'être dans E si A :F E' et A q: E'. (2) Notons que si a E A partie stable de E pour Lest symétrisable pour L, a est symétrisable pour la loi 1 induite par L sur A, mais si A :F E' 1 et A q: E' " un élément de A peut être symétrisable pour 1 (dans A) sans l'être pour L (dans I!). 92 
pratique, il est souvent impossible de déterminer directement F, mais on peut déterminer un en- semble E extension d'un ensemble B isomorphe à A. Dans la plupart des cas, il n'y aura que des avan- tages à identifier les éléments de A et de B, la loi 1 et la loi induite par L sur B étant homologues. D'une façon plus précise, A et B étant deux en- sembles isomorphes disjoints munis de lois homo- logues, nous fabriquerons une extension de B soit E, puis nous remplacerons B par A pour obtenir un ensemble F formé : I O Des éléments de E distincts de ceux de B; 2 0 Des éléments de A. 40. Symétrisation d'une loi associative et commu- tative. - Etant donné un ensemble A muni d'une loi l, il résulte des notes (1) et (2) du 9 39, que si 1 est associative, il n'est pas toujours possible de plonger A dans un ensemble E muni d'une loi L qui induise sur A la loi l, tout élément régulier de A étant symétrisable pour L. On montre que si 1 est commutative, le problème est possible et n'admet qu'une seule solution (à un isomorphisme près (1)). Nous nous contenterons de démontrer la possibilité du problème, c'est-à-dire d'une façon plus précise que : Etant donné un ensemble A muni d'une loi asso- ciative et commutative " on peut trouver un ensemble E muni d'une loi associative et commutative L et une partie B de E stable pour la loi L tels qu'il existe un isomorphisme f de A (muni de la loi 1) sur B (muni de la loi induite par L sur B) qui, à tout élément régulier de A, fait correspondre un élément de B symétrisable pour L dans E. Nous noterons additivement toutes ces lois qui sont commutatives. (1) Cf. N. BOURBAKI, liv. II, Algbre, chap. l, 2, no 4. 93 
Soit A' l'ensemble des élémeD;ts réguliers de A (stable pour l, cf.  39). La relation: a + b' = b + a' entre les éléments (a, a') et (b, b / ) de l'ensemble produit A X A' est une relation d'équivalence R, car cette relation est évidemment réflexive et symétrique puisqu'il en est ainsi de l'égalité et de plus transitive puisque { (a, a') = (b, b') (mod. R) } c -à-d { a + b' = b + a' (b, b') = (c, c') (mod. R) · · b + c' = c + b' entraînent a + b ' + c' = b + a' + c' = c + a' + b' ou a + c' = c + a' en vertu de la régularité de b' et de l'associativité et de la commutativité de l, soit : (a, a') = (c, c') (mod. R) Remarques : 1° Si x' E A' et y' E A' : (x', x') = = (y', y') (mod. R) et réciproquement, si (a, a') = = (x', x')) (mod. R), c'est-à-dire: a + x' = x' + a', on a : a = a', car x' est régulier. En particulier, l'élément neutre 0 de 1 sur A est régulier par défi. nition même, donc: (x', x') = (0, 0) (mod. R). 2 0 Si a E A, a' E A' : (a + a', a') = (a + b ' , b ' ) (mod. R) et réciproquement si (x, x') = (a + a', a') (mod. R), c'est-à-dire: x + a' = a + a' + x', on a : x = a + x', car a' est régulier. En particulier, 0 étant régulier (a + a', a') = = (a,O) (mod. R). On peut définir dans A X A' une loi associative et commutative par : (a, a') + (b, b') = (a + b, a' + b') La relation R est compatible avec cette loi, car : { (a, a') = (b, b/) (mod. R) } c -à-d { a + b' = b + a' (c, e') = (d, d') (mod. R) · · c + d' = d + c' 94 
entraînent : a + c + b ' + d' = b + d + a' + c' soit (a + c, a' + c') = (b + d, b ' + d') (mod. R) ou (a, a') + (c, e') = (b, b ' ) + (d, d') (mod. R) Donc (cf. 9 33) cette loi permet de définir dans l'ensemble E = (A X A')/R, quotient de A X A' par la. relation d'équivalence R, la loi quotiènt L : (a; a') + (b; b ' ) = (a + b; a' + b') évidemment associative et commutative. D'après la remarque 1 0 de ce paragraphe, l'en- semble des éléments (x', x') = (0, 0) (mod. R) où x' E A' est une classe d'équivalence suivant R que nous noterons Ô qui est évidemment l'élément neutre de E pour L, car : (, a') + (0: 0) = (a: a') D'après la remarque 2 0 de ,ce paragraphe, l'en- semble des éléments (a + a', a') = (a, 0) (mod. R), où a est un élément particulier de A et a' l'élément générique de A', est une classe d'équivalence sui- vant R que nous noterons a. Il est clair que la partie B de E d'élément générique a est stable pour L et isomorphe à A par l'isomorphisme f : a  a, les lois homologues sur A et B étant 1 et la loi induite par L sur B. Enfin, si a est régulier dans A, c'est-à-dire si a EA',]a classe a = (a + a", a'), a' étant l'élément générique de A', admet un symétrique dans E (a': a + a'), car: 1 0 a E A' , a' E A', donc a + a' E A' et a + + a' + a' E A' ; 95 
2 0 (a + a': a') + (a', a + a') = (a + a' + a', a + a' + a') = o. Nous identifierons les éléments de A et de B et, considérant l'ensemble F formé des éléments de E distincts de ceux de B et des éléments de A (cf. 9 39), nous dirons que F est le symétrisé de A pour la loi 1 et que la loi L est la loi symétrisée de 1 sur F. Application Si A = N, la loi de composition étant l'addition, par définition, l'ensemble Z symé- trisé de N s'appelle l'ensemble des entiers rationnels. La loi symétrisée de l'addition dans N s'appelle l'addition des entiers rationnels et se note additive- ment. Tout entier naturel étant régulier pour l'addition, Z est isomorphe à l'ensemble N X NjR, R étant la relation d'équivalence: a + b' = b + a' où a, a', b, b' appartiennent à N. Soit (a; b) l'une des classes d'équivalence ainsi définies si a  b, (d, b) = (a - 6, 0) peut être identifié à a-b EN; si a b, (a., b) = (0: b-a) est le symétrique de (b - a., 0) identifié à b - a EN. Donc, tout élément de Z est symétrisable et les éléments de Z se répartissent en trois catégories : a E N et x EN; 1 0 (a + x: x) = (d, 0) identifié à a EN; 2 0 (x: x) = (0: 0) identifié à 0 E N, élément neutre de l'addition qui est son propre symétrique: 0=-0; 3 0 (x: a + x) = (O., a) que l'on note - a, puisque c'est le symétrique de (a: 0) identifié à a EN. 41. Corps des fractions d'un anneau d'intégrité. - Etant donné un anneau A partie d'un corps K, cet anneau, comme le corps, est sans diviseur de zéro. En particulier : Tout anneau A partie d'un corps commutatif K est un anneau d'intégrité. 96 
Réciproquement, on montre qu'il est possible d'une seule manière (à un isomorphisme près) de plonger un anneau d'intégrité A, d'élément générique a, dans un corps commutatif (1). Nous nous contente- rons de démontrer la possibilité du problème. Eliminant le cas où A est réduit à un seul élément, soit A' (d'élément générique a') l'ensemble des éléments réguliers de A pour la multiplication, c'est-à-dire l'ensemble des éléments non nuls. La relation ab' = ba' est une relation d'équivalence R dans l'ensemble A X A' (2) que nous noterons : (a, a') = (b, b') (mod. R) On peut définir dans A X A' deux lois : 1 0 L'addition par : (a, a') + (b, b') = (ab' + ba', a' b') 2 0 La multiplication par : (a, a') . (b, b') = (ab, a' b') Le lecteur vérifiera facilement que ces lois sont associatives et commutatives et que la multipli- cation est distributive par rapport à l'addition. De plus, la relation d'équivalence R est compatible avec ces lois, car : { (a, a') = (x, x') (mod. R) } , " di { ax' = xa' (b, b'), = (y, y') (mod. R) c est-a- re by' = yb' entraînent d'une part : abx' y' = xya' b' soit (ab, a' b') = (xy, x' y') (mod. R) donc la compatibilité avec la multiplication; (1) Cf. N. BOURBAKI, loc. cit., S 9, nO 4. (2) La démonstration est la même qu'au  40 : il suffit de substituer la notation multiplicative à la notation additive. M. QUEYSANNE ET A. DELACBET 97 4 
D'autre part: (ab' + ba') x' = (ax') b' + (bx/) a' = a' (xb' + bx') et : (ab' + ba') x' y' = y' a' (xb' + bx') = = a' b' (y' x) + a' x' (by/) = a' b' (xy' + yx/) soit (ab' + ba', a' b / ) = (xy' + yx', x' y') (mod. R) donc la compatibilité avec l'addition. Par suite (cf. 9 33), cette loi permet de définir dans l'ensemble-quotient (A X A/)/R les lois quo- tient (appelées respectivement addition et multipli- cation dans E) 1 0 (a: a') + (b: b') = (ab' + ba': a' b') 2° (a: a') . (b; b ' ) = (ab; a' b') Si l'on convient de noter x/x' la classe d'équiva- lence (x,. x'), ces lois associatives et commutatives dans E prennent la forme a b ab' + ba' a' + b' = a' b' 1 0 2 0 a b ab a' · b' - a' b' la multiplication étant distributive par rapport à l'addition. L'ensemble E est un corps car, outre les propriétés précédentes de ces deux lois : 1 0 La multiplication a un élément neutre : x' / x' (x' E A') noté i, car : , a x a, .... di " " ( ' ' guli ) -; .., = -, c est-a- re aa x = aa x x re er a x a . 2 0 L'addition a un élément neutre: O/x' noté 0, car 98 
a 0 ax' a x' a, a' + x' = a' x' = a' . x' = a' De plus, tout élément a/a' a un opposé (symétrique pour l'addition) : - a/a', car: a ( - a ) 0 · -+ - ---0 a' a' - aa' - et si a =1= 0 (a E A'), a/a' a un inverse (symétrique pour la multiplication) : a' la, car : a a' aa' · -----1 a' a - aa' - L'ensemble E est donc un corps commutatif. Ce corps ne contient pas l'anneau A, mais si a est un élément particulier de A et x' l'élément générique de A', l'ensemble des éléments ax' / x' constitue une classe d'équivalence modulo R de A X A', car , b ' aa a , .... di ' b ' b " ( ' b " a' = b" c est-a- re aa = a a a et regu- liers). De plus, l'ensemble B des éléments aa' la' de E (a et a' quelconques), partie stable de E pour les lois de ce corps, est isomorphe à A, les lois homologues dans A et B étant respectivement l'addition et la multiplication dans A et les lois induites dans B par l'addition et la multiplication dans E (1). Donc, si dans E nous identifions les classes aa' la' à l'élément a E A, nous obtenons un corps commu- tatif K isomorphe à E et contenant l'anneau d'inté- grité A on l'appelle le corps des fractions de A. En particulier, si A = Z, le corps K que nous venons de définir n'est autre chose, par définition même, que le corps Q des nombres rationnels (2). (1) La vérification de la stabilité de B et de l'isomorphisme de A et B est immédiate. (2) Notons que dans ce cas particulier, Z possédant un élément unité 1, l'élément unité de Q est identifié à 1. La démonstration générale qui précède ne supposait pas nécessairement l'existence d'un élément unité pour A. 99 
TROISIÈME PARTIE APPLICATIONS CHAPITRE PREMIER GÉNÉRALISATIONS DE LA NOTION DE NOMBRE ESPACES VECTORIELS. POLYNO:MES 1. - Des entiers naturels aux nombres réels 42. Entiers naturels. - Nous définirons l'ensemble N des entiers naturels par les axiomes suivants (1) : 1. - N n'est pas vide. II. - A tout x EN est associé un élément déterminé de N noté x' : le suivant de x, x est l'antécédent de x'. III. - TI Y a dans N un élément nommé zéro et noté 0 qui n'est le suivant d'aucun x, son suivant noté 1 est appelé un. IV. - Pour tout n =1= 0 de N, il Y a un élément unique x de N tel que x' = n. V. - Principe de récurrence (2) ou d'induction complète : Si A est un sous-ensemble de N tel que : { : : } entraîne x' E A, on a A = N Le problème de la compatibilité ou de la non-contradiction de ces axiomes est un problème que nous n'aborderons pas (3). Ces axiomes permettent de définir les règles des opérations usuelles de l'arithmétique et de démontrer leurs propriétés (1) Ces axiomes sont légèrement différents de ceux donnés par Peano en 1889 (cf. DUBREIL, op. cit., p. 268). (2) Cet axiome V peut s'énoncer en termes de propriétés (cf.  17, p.40) : si une propriété étant vraie de 0 et de x l'est de x' elle est alors vraie pour tout n de N. (3) Cf. CAVAILLÈS, Thèse, Le problème du fondement, Hermann, 1938, et BETH, Les fondements logiques des mathématiques, Gauthier- Villars, 1950. L'école Bourbaki rejette ce problème dans la méta- mathématique (cf. Revue scientifique, article de Henri CARTAN, avril 1939, et DIEUDONNÉ, janvier 1943). Cf. aussi les points de vue opposés de A. DENJOY et N. BOURBAKY dans: Congrès international de Philosophie des Sciences, Actualités Sc. et Ind., no 1137, Paris, Hermann, 1951. 100 
en usant largement de l'axiome V : l'addition et la mwti- plication étant respectivement définies par : x + 1 = x' x + yi = (x + y)' x.l=x x.y'=x.y+x on vérifie qu'elles sont commutatives, associatives, que tout élément est régulier, sauf le zéro pour la multiplication, et que la multiplication est distributive par rapport à l'addition. S'il existe x de N tel que a = b + x, on dit que a est supé- rieur ou égal à b et on écrit a  b (ou b  a), ce nombre unique x noté a - b s'appelle la différence de a et b ; si x :F 0, on dit que a est supérieur à b et on écrit a > b (ou b < a) : ces relations s'appellent des inégalités, les premières sont dites larges, les secondes strictes. Toutes ces relations sont transi- tives : a  b et b  c entraînent a  c, compatibles avec l'addition a  b entraîne a + c  b + c (et réciproquement) et compatibles avec la multiplication par un élément c :F 0, a  b et c :F 0 entraînent ac  bc et c :F 0 (et réciproquement) Deux inégalités strictes opposées sont incompatibles : entre deux entiers naturels a et b, il existe toujours l'une et l'une seule des trois relations a > b, a = b, a < b. Deux inégalités larges opposées a  b, a  b entraînent a = b (1). 43. Entiers rationnels. Nombres rationnels. Nombres réels. - Nous avons vu (9 40, Application) que par symétrisation de l'addition dans N on forme le groupe additif Z des entiers rationnels. D'après les notations adoptées au 9 21, le symé- trique (on dit ici l'opposé) de x est - x, donc l'opposé de - x, soit - (- x) est x. La relation: il existe x de N tel que a = b + x est une relation d'ordre dans Z qui induit dans N l'ordre déjà défini. Les éléments de Z supérieurs à 0, c'est-à- dire les éléments de N différents de 0, sont appelés entiers positifs: on note leur ensemble N+ ; les éléments de Z infé- rieurs à zéro sont appelés entiers négatifs. La valeur absolue de x notée 1 x 1 est égale à x si x  0 et à - x si x  o. Nous définirons la mwtiplication dans Z en posant : (a eN, beN) j : t b ) b  +(--=:bf+ ... +(-b)=-(a.b) t a termes (-a) b = a(- b) = -(a.b) (- a) (- b) = a [- (- b)] = a (b) = a. b (1) Plus généralement, une relation entre deux éléments x et y d'un ensemble E notée x  y est une relation d'ordre si : 1 0 Elle est transitive x  y et y  z entraînent x  z ; et 2° Si deux relations opposées x  y et x  y entrainent x = y; 3° Elle est réflexive. Par exemple, l'inclusion des parties d'un ensemble est une relation d'ordre dans P (E) ( 17, 18). Une relation d'ordre définie dans E. définit un ordre dans une partie A de E, on dit que cet ordre est induit par la relation d'ordre de E. 101 
Cette multiplication sur Z est un prolongement de la multi- plication sur N, on vérifie qu'elle est associative, commutative et distributive par rapport à l'addition. D'autre part, cette définition montre qu'il n'y a pas dans Z de diviseur de zéro. On voit enfin qu'un produit de deux nombres de Z est négatif si, et seulement si, un seul facteur est négatif (1'autre étant #- 0) (règle des signes) et par conséquent que a 2 est toujours positif si a :F 0 ; Z est donc un anneau d'intégrité, muni d'un élément unité 1 et d'une relation d'ordre x  y. Z étant ainsi défini, les résultats du  41 nous permettent de définir le corps commutatif des fractions de l'anneau d'intégrité Z, on l'appelle le corps Q des nombres rationnels. Dans la classe d'équivalence identique au nombre rationnel T, nous pouvons toujours choisir un représentant a/b où b appar- tienne à N+; définissons une relation d'ordre entre T = a/b et s = cid (a #- 0, c #- 0, b > 0, d > 0) par ad  bc, cette relation est indépendante des représentants choisis toujours à dénominateur> 0, en effet si a'lb' = a/b et c'Id' = cId, la condition ad bc entraîne adb'd'  beb'd', d'où a' d'  b' e', car ab' = ba' :F 0 et cd' = de' :F 0 ; définissons d'autre part la relation r = alb  0 par ab  0 (b > 0), cette dernière est également indépendante du représentant choisi, dans tous les cas nous définissons ainsi dans Q une relation d'ordre r  s qui induit sur Z la relation d'ordre déjà définie sur Z (il suffit de faire b = d = 1). L'anneau Z étant de caractéristique nulle, Q est donc un corps commutatif de caractéristique nulle muni d'une relation d'ordre. Nous désignerons l'ensemble de ses éléments> 0 par Q+. La définition du corps des réels R (1) n'est pas du ressort de l'algèbre, il nous suffira de savoir que R est une extension de Q où sont définies une addition, une multiplication et une relation d'ordre qui induisent sur Q l'addition, la multipli- cation et la relation d'ordre déjà définies sur Q. L'ensemble des éléments > 0 de R sera désigné par R+ ; dans R comme d'ailleurs dans Q tout carré est> 0, donc a 2 + b 2 = 0 entraîne h=n a = b = 0 et  (ah)2 = 0 entraîne llt = = ah = h=l = ... = an = o. Seuls les éléments de R+ et zéro peuvent avoir des racines carrées, nous admettrons qu'ils en ont deux dans R et qu'elles sont opposées. (1) Cf. Calcul différentiel et intégral, coll. « Que sais-je? t, nO 466, p. 6 à 12. 102 
II. - Espaces vectoriels Nombres complexes et hypercomplexes 44. Espaces vectoriels à n dimensions (1). - Soit un corps K d'éléments a, b, ..., muni d'un élément unité e et un groupe additif V d'éléments X, Y, . . ., nous dirons que V constitue un espace vectoriel à n dimensions sur le corps K si dans V outre la loi additive vérifiant: (2) X + y = y + X (3) X + 0 = 0 + X = X (1) (X + Y) + Z = X + (Y + Z) (associativité de l'ad- dition interne); (commutativité de l'addition iD terne) ; (élément neutre uni- que de l'addition interne) ; (opposé unique de X dans l'addition in- terne ). (1) (4) X' + X = X + X' = 0 il existe une loi externe à opérateurs dans K vérifiant: (1) a (X + Y) = aX + aY (distributivité par rapport aux éléments de V) ; (II) (2) (a + b) X = aX + bX (distributivité par rapport aux éléments de K) ; (3) a (bX) = (ab) X (associativité de la multi- plica tion externe). III. - Il existe au moins un système de n éléments de V : Ul' U 2 , . . ., Un' appelé base tel que tout élément de V s'exprime d'une manière unique en fonction linéaire et homogène des éléments de cette base, les coefficients appartenant à K h=n X =  Xh U h Xh E K h=l Par exemple si K == R, l'ensemble V = R3 des vecteurs libres de l'espace euclidien à trois dimensions constitue un espace vectoriel à trois dimensions sur R. On peut généraliser cet exemple à l'espace Rn de la géométrie euclidienne à n dimensions. De cet exemple découlent les définitions adop- tées : les éléments X, Y, ..., sont appelés les vecteurs de V (1) On trouvera un exposé extrêmement clair et sans références préalables aux théories de l'algèbre moderne relatif à ces espaces dans LICHNÉROWICZ, Algèbre et analyse linéaires, Paris, Masson, 1947, et même auteur, Eléments de calcul tensoriel, Paris, Colin, 1950 . Voir aussi le très intéressant ouvrage de BOUTELOUP, L'algèbre linéaire, c Que sais-je? t, no 1251. 103 
et Xl' , ..., Xn, les coordonnées de X par rapport à la base Ut, U 2 , ..., Un. h=n Si y =  Yh U h , les propriétés 1 et II entraînent: h....1 h==n aX =  (axh) U h h=l En particulier, si e est l'élément unité de K : h....n h=n eX =  (exh) U h =  Xh U h = X h=l h=-l x + y =  (Xh + Yh) U h Donc, à un isomorphisme près faisant correspondre les bases, un espace vectoriel à n dimensions est entièrement déterminé par le corps K et sa dimension n : une base étant choisie, un élément X de cet espace V pourra être représenté par (-Xt,, . . ., x n ) les éléments de la base étant : Ut = (1, 0, . . .  0) U 2 = (0, 1, 0, . . ., 0) . . . Un = (0, 0, . . ., 1) 45. Nombres hypercomplexes. - Si K est un corps muni d'un élément unité e, nous avons vu (9 44) qu'un espace vectoriel V sur K de base U I , U 2 , ..., Un est un groupe addi- tif. Pour le transformer en un anneau, il faut définir sur lui une multiplication associative et distributive par rapport à l'addition vérifiant de plus pour la loi externe: (1) (aX) Y = X (aY) = aXY (2) (aX) (bY) = ab XY ( h=n ) ( k=n ) (3) hl ah U h kl bk Uk = h-=n k=n =   ah b" Un Uk h....1 k=l [a E K X et Y EV] [a et b E K X et Y EV] [ah et bk E K] (2) et (3) se déduisant de (1). On pourra donc calculer tous les produits XY qui, appar- tenant à V, doivent s'exprimer en fonction linéaire et homogène des éléments de la base si, et seulement si, on se donne: (4) Z=n U h U k =  ehk U z Z....l Les n 3 « constantes» C1hk E A qui déterminent la multipli- cation dans V sont appelées constantes de structure de V. Quelles que soient ces constantes, la multiplication ainsi définie sur V est distributive par rapport à l'addition d'après (3). 104 
Par contre, pour qu'elle soit associative, il faut et il suffit manifestement qu'elle le soit pour les produits U h U k U z , c'est-à-dire que pour tout ensemble h, k, 1 partie de (l, 2, ..., n) : (5) U h (U k U z ) = (U h U k ) U, Le système des relations (5) entraîne des conditions à remplir pour les constantes de structure. Si ces conditions sont remplies, les formules (1), (2), (3), (4) définissent sur V une multiplication interne associative et distributive par rapport à l'addition de cet espace vectoriel: l'anneau V est alors appelé un système hypercomplexe; ses éléments sont appelés nombres hyper- complexes. Si K est commutatif et si la multiplication des TI h est commutative, V est un anneau commutatif. Si K est muni d'un élément unité e, l'ensemble des nombres hypercomplexes ae est isomorphe au corps K : on identifie ces nombres à leurs éléments homologues a E K. Applications. 1 0 Nombres complexes: Considérons l'espace vectoriel V à deux dimensions défini sur le corps R des nombres e 1 t - e e t - - - . t t -e réels, soient e et i les éléments d'une base de V. Nous définirons la multiplication des éléments de base dans V par la table ci-contre, de sorte que la multiplication dans V est associative et commutative : V est donc un anneau commutatif muni de l'élément unité e. Si nous identifions les multiples ae dont l'ensemble est isomorphe à R aux nombres réels homologues a, tout élément de l'ensemble C isomorphe à V ainsi obtenu s'écrira a + bi au lieu de ae + bi (a et bER). De plus: (a - bi) (a + bi) = a 2 + b 2 E R+ sauf si a = b = 0 qui entraîne a 2 + b 2 = o. Donc, chaque élément a + bi de C distinct du zéro a un inverse: (a 2 + b 2 )-1 (a - bi). Ainsi C est un corps commutatif: le corps des nombres complexes (1). (1) Si on définit V relativement au corps Q (au lieu de R), on obtient le corps des fractions de l'anneau des entiers de Gauss ( 16, p. 35). 
2 0 Quaternions: Considérons l'espace vectoriel V à quatre di- mensions défini sur R. Soient e, u, j, k les éléments d'une base de V pour lesquels nous définirons la multiplication par la table ci-contre. La multiplication dans V est donc associative, mais non commutative. V est donc un anneau non commutatif, muni d'un élément unité e. La partie de V d'élément géné- rique ae + bu est évidemment isomorphe au corps C des nombres complexes; si l'on identifie les éléments ae + bu de cette partie aux éléments homologues a + bi de C, tout e u ) k 1 er f act. e e u J k u u -e k -j J J -k-e u k k J -u -e élément de l'ensemble K isomorphe à V ainsi obtenu s'écrira: a + bi + cj + dk au lieu de ae + bu + cj + dk. De plus : (a-bi-cj-dk) (a + bi + cj + dk) = a 2 + b 2 + c 2 + + d 2 E R+, sauf si a = b = c = d = 0 qui entraîne a 2 + b 2 + + c 2 + d 2 = o. Donc, chaque élément a + bi + cj + dk :F 0 de K a un inverse: (a 2 + b 2 + c 2 + d 2 )-1 (a - bi - cj - dk). Ainsi K est un corps : le corps des quaternions. III. - Anneaux de polynômes 46. Polynômes à une ou plusieurs indéterminées. - Soit A un anneau commutatif. Considérons un ensemble E  0 muni d'une loi associative notée multiplicativement possédant un élément neutre; si XE E est distinct de cet élément neutre, l'ensemble E' des puissances X n , n E N, de X est un sous-ensemble de E ; XO est l'élément neutre de la multipli- cation dans E et : XP xq = xq XP = Xp+q quels que soient p et q EN (cf. 9 21). Nous appellerons polynôme à une indéterminée X défini sur A tout vecteur d'un espace vectoriel d'ordre fini déter.. 106 
miné par A et la base constituée d'un nombre fini d'éléments de E'. Un polynôme s'écrit donc (1) : f(X) = ao XO +  Xl + + ah Xh + ... = ah Xh où seuls un nombre fini d'éléments ah E A sont non nuls. Ces éléments ah sont appelés les coefficients de f (X); l'indice le plus élevé des coefficients non nuls est appelé le degré du polynôme que nous noterons dO f (X). Ainsi, les polynômes de dO  n sont les vecteurs de l'espace vectoriel à n + 1 di- mensions déterminé par A et la base (XO, Xl, ..., Xn) : leur ensemble est donc un groupe additif muni d'une multiplication externe associative et distributive à opérateurs dans A. Nous sommes donc conduits aux définitions suivantes (compatibles avec les propriétés des polynômes de dO quelconque) : 1 0 Deux polynômes à une indéterminée X définis sur A : f (X) = ah Xli et g (X) = bh Xh sont égaux si, et seulement si : ah = b h quel que soit h EN. 2 0 On appelle somme de deux polynômes f (X) et g (X) le polynôme : f(X) + g (X) =  (ah + b h ) Xh Si l'on note 0 le polynôme dont tous les coefficients sont nuls, 0 est l'élément neutre pour cette addition qui est évidem- ment associative et commutative. De plus, tout polynôme f (X) a un polynôme opposé de coefficients opposés à ceux de f (X). 3 0 On appelle produit d'un polynôme f (X) par un élé- ment a E A, le polynôme af (X) =  (aah) Xli. Cette multi- plication extérieure est évidemment associative et distributive par rapport aux éléments de A et du groupe additif des polynômes. Pour transformer ce groupe additif en un anneau commu- tatif que nous noterons A [X], nous définirons la multiplication interne de deux polynômes par : h (X) = f (X) g (X) =  cl Xl cl =  ah b h h+k=l En effet, on vérifie facilement que cette multiplication est commutative, associative, distributive par rapport à l'addition des polynômes, qu'elle est compatible avec la multiplication dans E' (des puissances Xh), sous-ensemble de A (X), et que de plus elle possède l'élément neutre Xo. L'ensemble A [X] des polynômes à une indéterminée X définis sur A est donc un anneau commutatif muni d'un élément unité. avec (1) C'est pour marquer le caractère fini, mais indéterminé du nombre de coefficients non nuls que nous n'indiquons pas de limites à l'indice h dans le . 107 
Si le polynôme f (X) est de dO p et le polynôme g (X) de dO q, on a : Cp+q + a p b q et Ch = 0 pour h > p + q donc dO fg  dO f + dO g En particulier, si A est un anneau d'intégrité, a bq:F 0, donc: le degré du produit est égal à la somme des grés des facteurs. Dans la même hypothèse, fg = 0, si, et seulement si, f = 0 ou g = o. Donc: si A est un anneau d'intégrité, A [X] en est un aussi. Nous avons vu (9 41) qu'on peut alors former le corps des fractions de A et le corps des fractions de A [X] noté A (X) qu'on appelle corps des fractions rationnelles d'élément générique f(X)/g (X), g (X)  o. Quel que soit l'anneau commutatif A les polynômes de dO 0 forment un sous-anneau de l'anneau A [X] d'élément géné- rique a o XO isomorphe à A et dont A [X] est une extension. Nous identifierons ce sous-anneau à A (cf. 939) ; en particulier, si A est muni d'un élément unité e, il suffira d'identifier XO et e. Si y est un élément de E distinct de X, l'anneau commu- tatif A [Y] défini à l'aide de Y est évidemment isomorphe à A [X]. Polynômes à plusieurs indéterminées définis sur un anneau. - Etant donné un anneau commutatif A et deux éléments Xl et X 2 distincts de E, on peut définir l'anneau commutatif A [Xl] des polynômes à une indéterminée Xl sur A, puis l'anneau commutatif A [Xl] [X2] des polynômes à une indéterminée X 2 sur A [Xl]. Si l'on pose par définition : (ah Xh l ) Xk 2 = Xh l (ah Xk 2 ) = ah Xh l Xk 2 et si la multiplication dans E est commutative: Xh l Xk 2 = = Xk 2 Xh l , on peut écrire ces polynômes: f(X I , X 2 ) = ahlhs Xh 11 Xh t2 [et h 2 EN et ah1hs E A] seuls un nombre fini de ces derniers éléments étant non nuIs. Ces éléments ah! kt E A sont appelés les coefficients de f; la somme  + h 2 la plus élevée est appelée le degré de f. Les remarques faites sur les polynômes à une seule indéterminée s'étendent immédiatement aux polynômes à deux indéter- minées et aux polynômes à n > 2 indéterminées Xl' X 2 , · · ., x,.. qui forment un anneau d'intégrité noté A [Xl'' ..., Xn]. 47. Expressions rationnelles et entières, fonctions poly- nômes, polynômes abstraits. - Nous n'avons rien supposé sur l'indéterminée X qui nous a servi à définir la notion de poly- 108 
nôme au paragraphe précédent. Si on choisit X = x E A, le polynôme abstrait f (X) à une indéterminée X défini sur A devient l'expression rationnelle et entière f (x) à une variable x élément générique de A qui permet de définir une applica- tion x f(x) de A dans A. On voit donc que le mot polynôme désigne des notions très différentes : 1 0 En algèbre élémentaire, un polynôme f (x) à une va- riable x E A est l'ensemble des valeurs de f(x), valeurs ap- partenant à A, puisque x est l'élément générique de A (A étant généralement R ou C). On dit alors que deux polynômes sont équivalents s'ils prennent la même valeur pour chaque valeur de la variable x E A. On dit qu'ils sont identiques s'ils sont égaux au sens où nous l'avons défini au paragraphe pré- cédent. Nous dirons qu'un tel polynôme est une expression rationnelle et entière définie sur A et à valeurs dans A. L'ensemble de ces expressions rationnelles et entières sera noté A [x]. 2 0 En analyse, l'application x f (x) de A dans A est appelée polynôme. Nous appellerons leur ensemble : ensemble des applications polynômes à une variable x de A dans A. 3 0 En algèbre moderne, nous avons appelé polynômes les polynômes abstraits définis au paragraphe précédent. L'en- semble des polynômes à une indéterminée définis sur l'anneau commutatif A est l'anneau A [X], lui-même commutatif. L'application f (X)  f (x) de A [X] sur A [x] qui induit sur A [x] les lois de A [X] est un homomorphisme et ne peut être un isomorphisme que si une expression entièref(x) déter- minée ne correspond qu'à un seul polynôme abstrait f (X). Il est clair que cette condition est réalisée si, et seulement si, l'expression entière 0 et le polynôme 0 se correspondent biunivoquement : en effet, la condition est évidemment nécessaire; elle est suffisante, car si elle est réalisée, deux antécédents f (X) et g (X) de la même expression entière f (x) sont nécessairement égaux puisque l'antécédent de f(x) - f(x) = 0 estf(X)-g(X) = O. TI en résulte en particulier que si deux expressions entières sont identiques, elles sont nécessairement équivalentes, mais que la réciproque est généralement fausse. Des considérations topologiques permettent de démontrer qu'à des expressions rationnelles entières équivalentes définies sur R ou C corres- pondent des polynômes abstraits égaux (identiques avec la terminologie de l'algèbre élémentaire), mais ce fait tient au caractère particulier de R et C. Ainsi, dans le corps Z/3, ce théorème est faux, car l'expression x 3 + 2 x est nulle pour toute valeur x E Z/3 bien que le polynôme X3 + 2 X soit distinct du polynôme nul O. 48. Anneau euclidien des polynômes à une indéterminée définis sur un corps commutatif. - La structure de corps 109 
contenant celle d'anneau d'intégrité, l'anneau K [X] des polynômes à une indéterminée définis sur un corps commuta- tif K est un anneau d'intégrité (cf.  28). Soient deux poly- nômes de K [X] : A (X) = Lah Xh et B (X) = Lb h Xh de degrés respectifs n et p. Si B (X) #: 0 : On peut trouver dans K (X] deux polynômes Q (X) et R (X) appelés respectivement quotient et reste, déterminés d'une manière unique et vérifiant les conditions (appelées identité de la division euclidienne) : (1) A = BQ + R dO R < dO B ou R = 0 En effet, si Q et R existent, ils sont déterminés d'une manière unique, car si Q' et R' sont un autre système de polynômes de K [X] vérifiant les conditions (1), on a : B (Q - Q') = R' - R B (X) est non nul et ne peut être un diviseur de 0 puisque K [X] est un anneau d'intégrité. Donc, si Q i:: Q', le premier membre n'est pas nul et son degré est au moins égal à celui de B, alors que le second membre a un degré certainement inférieur à celui de B. Par conséquent, l'égalité précédente ne peut avoir lieu que si les deux membres sont nuls, c'est-à-dire si Q = Q' et R = R'. Le système unique des polynômes Q et R se détermine aJors par l'algorithme classique de la division euclidienne : si n < p, on a R = A et Q = 0; si p = 0, donc B (X) = b o i:: 0, et n quelconque, on a Q = b- l o A et R = 0 (dans ce cas, dO R = dO B = 0). Supposons n  p > O. Le polynôme : Al (X) = A (X) - an b- 1 p B (X) xn-p est de dO  < n-1. Si ni < p, on a : Q (X) = an b-1'p Xn-p et R (X) = Al (X), Si  > p, en continuant à apphquer le procédé précédent, on forme certainement au bout d'un nombre fini d'opéra tions un polynôme Q (X) E K [X] tel que la différence : A (X) - B (X) Q (X) = R (X) soit un polynôme de K [X] de dO < p. La possibilité de cette division euclidienne dans K [X] et (cf.  46) le fait que dans l'anneau d'intégrité K [X], on a : dO AB = dO A + dOB  dO A montre que l'anneau K [X] des polynômes à une indéterminée définis sur un corps commutatif K est un anneau euclidien (1). (1) Cf.  28, la fonction g (A) est ici le degré du polynôme A. 110 
CHAPITRE II DIVIsmILITÉ DANS LES ANNEAUX, Tous les anneaux considérés dans ce chapitre seront des anneaux d'intégrité A possédant un élément unité e (1). 49. Définitions et propriétés relatives aux éléments de l'anneau. - On dit que b divise a (a et b E A) s'il existe CE A tel que a = bc, b est un diviseur de a, a un multiple de b. On appelle unité tout diviseur de e; les unités sont les éléments inversibles de l'anneau; en effet, l'inverse d'une unité E existe puisque E divisant e il existe dans A E/ tel que ee' = e (2) ; les unités d'un anneau A forment donc un groupe U relativement à la multiplication de l'anneau. Ces unités divisent tous les éléments de l'anneau; en effet e:e:/ = e entraîne a = ae = ae:E/ = (as:/) E les unités de Z sont + 1 et -l, celles de l'anneau des entiers de Gauss (9 16) sont + l, - l, + i et - i; les unités de K [X] sont les éléments du corps commutatif K (cf. 9 48). Tout élément a' de A produit de a par une unité de A est dit associé à a ; deux. éléments associés se divisent mutuellement et réciproquement. Un élément i:: 0 de A qui n'est divisible que par des unités ou des éléments associés est appelé élément premier de A : on dit qu'il est sans diviseurs véritables. Etant donné deux. éléments a et b s'il existe un diviseur commun d de a et de b divisible par tout diviseur commun de a et de b, on dit que c'est un plus grand commun diviseur (P.G.C.D.) de a et de b; tout élément associé à d est aussi un P.G.C.D. et réciproquement deux P.G.C.D. de a et de b sont forcément associés. Deux. éléments i:: 0 et non associés sont dits sans diviseurs communs s'ils n'ont d'autres diviseurs communs que des unités. Deux éléments sont dits premiers entre eux s'il existe deux éléments u et v de A vérifiant la relation dite de Bezout au+bv=e (1) Naturellement certaines définitions et certains résultats sont valables dans des anneaux plus généraux. Cf. DUBREIL (op. cit. chap. VI) que nous suivons en grande partie dans ce chapitre. (2) £ est régulier car xe == 0 avec x i:: 0 entrainerait xse' = = ex = X II: O. Donc e' est unique (cf.  20, p. 49). 111 
Deux éléments premiers entre eux sont évidemment sans diviseurs communs (leurs diviseurs communs, divisant e, seraient des unités) ; la réciproque vraie dans Z et dans certains anneaux tels K [X] (cf.  51) n'est en général pas vraie, par exemple dans R [X, Y] les deux polynômes X et Y sans divi- seurs communs ne sont pas premiers entre eux, car il existerait deux polynômes U (X, Y) et V (X, Y) tels que XU + YV = 1 et, en remplaçant X par x = 0 et Y par y = 0, on serait conduit à une absurdité: Nous avons donc ici deux généralisations dis- tinctes de la notion d'entiers premiers entre eux dans Z. 50. Définitions et propriétés relatives aux idéaux de l'an- neau. - Nous avons dit (9 29) qu'un idéal a de A est un divi- seur de l'idéal b de A si b Ca; il pourrait sembler naturel d'appeler idéal premier un idéal m qui n'admet d'autres diviseurs que lui-même et l'idéal unité A; le développement de la théorie des idéaux a montré que cette définition serait trop restrictive : en effet, un tel idéal m est dit sans diviseurs propres ou encore maximal et on démontre que dans un anneau d'intégrité à élément unité un idéal m est maximal si, et seule- ment si, l'anneau quotient A/m est un corps. On réserve le nom d'idéal premier à un idéal:p qui divisant ab sans diviser a divise b et l'on montre qu'un idéal :p est premier si et seulement si l'anneau quotient Aj:p est un anneau d'intégrité. Donc, tout idéal maximal est premier, mais si la réciproque est vraie dans certains anneaux tels Z (p étant un entier naturel premier Z/p est non seulement un anneau d'intégrité, mais un corps, 99 12 et 30) et les anneaux euclidiens (cf.  51), elle n'est pas vraie en général. TI peut sembler étrange que dans certains anneaux. un idéal premier puisse avoir de véritables diviseurs : considérons par exemple l'anneau des polynômes à deux indéterminées R [X, Y] ; soit l'idéal a = (Y) engendré par le polynôme Y, il est formé de tous les polynômes Y. Q (X) ; les polynômes Pl et P 2 sont congrus, modulo (Y), si et seule- ment si leur différence est divisible par Y, c'est-à-dire si tous leurs termes ne contenant pas Y sont les mêmes: les classes rési- duelles modulo (Y) sont donc constituées par les polynômes de R [X] qui forment un anneau d'intégrité. Donc l'idéal (Y) est premier; or, ce dernier a pour véritable diviseur l'idéal (X, Y) qui le contient; celui-ci est d'ailleurs maximal, car l'anneau quotient R [X, y]/(X, Y) est le corps R. 51. Divisibilité dans un anneau principal. - Si A est un anneau d'intégrité principal à élément unité e, l'idéal engendré par deux. éléments a et b, soit (a, b), d'élément générique m + yb (x et y E A) est un idéal principal (el) engendré par 112 
l'élément unique d (cf.  29), il existe donc r et s dans A tels que (1) ra+sb=d donc tout diviseur commun à a et à b divise d, d'autre part (d) est l'idéal (a) + (b) idéal P.G.C.D. ( 29) de (a) et (b), il existe donc dans A a' et b ' tels que (2) a = a' d et b = b ' d donc tout diviseur de d divise a et b, par conséquent: Dans un anneau d'intégrité principal à élément unité, deux éléments quelconques a et b ont des P.G.C.D. qui sont les élé- ments associés à l'un des générateurs de l'idéal P.G.C.D. de (a) et de (b). Donc, si a et b sont sans diviseurs communs (a, b) = A = (e) (cf.  29), il existe u et v de A tels que (3) au + bv = e et ils sont premiers entre eux ( 49) ; réciproquement si (3) est vérifiée, a et b ne peuvent avoir pour diviseurs communs que des diviseurs de e, donc: dans un anneau d'intégrité principal à élément unité, il y a identité entre les éléments sans diviseurs communs et les éléments premiers entre eux. C'est le cas de Z et de K [X] (K corps commutatif). D'autre part, si l'idéal (a) divise l'idéal (b), c'est-à-dire si (a) ) (b), il existe x de A tel que b = xa, l'élément a divise l'élément b : c'est là l'origine de la notion de divisibilité des idéaux; la réciproque est évidente. De (1) on déduit, comme en arithmétique, que si d est un P.G.C.D. de a et de b, dc en est un de ac et bc et que d, divi- seur commun de a et de b, est un P.G.C.D. de a et b si, et seulement si, les quotients afd et b/d (appartenant dans ce cas à A) sont premiers entre eux. Donc, si c premier avec b divise ab, il divise a (multiplier le P.G.C.D. de b et c par a) d'où l'on déduit - toujours comme en arithmétique - qu'un élément séparément divisible par des éléments premiers deux à deux est divisible par leur produit. Des ces propriétés, il résulte que : Dans un anneau d'intégrité principal à élément unité, il y a identité entre les idéaux premiers, les idéaux maximaux et les idéaux engendrés par un élément premier p de l'anneau. Enfin, dans un tel anneau, on peut montrer, et nous ne le ferons pas, que tout élément est le produit d'un nombre fini d'éléments premiers Pl' P2' . . ., Pn et que cette décomposition est unique si l'on ne tient compte, ni de l'ordre des facteurs premiers, ni du remplacement de un ou plusieurs facteurs Ph par des éléments associés. Un anneau où cette propriété est vraie est dit à factorisation unique. 113 
52. Divisibilité dans un anneau euclidien. - Si de plus l'anneau A est euclidien, nous allons pouvoir non seulement prouver l'existence, mais effectivement trouver un P.G.C.D. de deux éléments. Soien t deux éléments a o et al avec g (a o ) > g (), nous aurons successivement (cf.-  28) : a o =  ql + a2 g (a 2 ) < g () a2 #; 0 ah-l = ah qn + ah+l g (ah + 1) < g (ah) ah  0 les entiers g (ah) allant en décroissant, au bout d'un nombre fini d'opérations, nous aurons un reste a n + 1 = 0, d'où a n - 1 = = an qn; or, tout diviseur commun de ah-l et ah est diviseur commun de ah et ah+1 (et réciproquement), donc an est un P.G.C.D. de Qo et al. On reconnaîtra l'algorithme d'Euclide, utilisé dans la recherche du P.G.C.D. de deux éléments de Z ou de K [X] : l'algèbre moderne nous donne ainsi la raison de la similitude, si déroutante en algèbre élémentaire, des pro- priétés de la divisibilité pour les entiers et les polynômes en X : ce sont deux anneaux ayant la même structure d'anneau euclidien. 53. Anneaux A [Xl' X 2 , ..., Xn,]. Applications géométri- ques. - Tout se complique dans les anneaux non principaux, on montre cependant que les anneaux de polynômes A [Xl' , . . ., Xn] où A est un anneau d'intégrité à élément unité et à factorisation unique sont à factorisation unique. Ces anneaux ne sont pas principaux - par exemple dans R [X, Y] l'idéal (X, Y) n'est certainement pas principal - mais ils sont à base finie (9 29). Les anneaux K [Xl. ..., Xn] où K = R ou C et leurs idéaux ont une grande importance en géométrie algébrique : certains lecteurs peuvent connaître les difficultés qu'il y a à définir correctement une courbe algé- brique gauche dans l'espace euclidien R3 lorsqu'elle n'est pas l'intersection complète de deux surfaces algébriques; par exemple, les deux surfaces d'équations cartésiennes f1 = XZ - Y2 = 0 et f2 = x 2 - y = 0 ont pour intersection complète la droite x = y = 0 et la cubique gauche de repré- sentation paramétrique x = t, Y = £2, Z = t 3 , cette dernière est également située sur la surface d'équationfs = xy - z = 0 qui ne contient pas la droite x = y = 0, nous définirons cette courbe gauche sans équivoque, non pas par les deux polynômes f1 et f2' avec des restrictions, mais par les trois polynômes f1' h, f3 ou mieux par l'idéal (f1' 12' f3) qu'ils en- gendrent. Plus généralement, si on appelle variété algébrique V de l'espace euclidien à n dimensions Rn (9 44), l'ensemble des 114 
points de coordonnées xt, %2' . . ., %n (Xh E R) qui annulent p polyn? mes f1,J;, .. .,fp?-e !:eau R [Xl' , ..., Xn], on peut f81I'e correspondre a lldeal a = (f1,f2' . . .,fp) la va- riété V; d'autres idéaux, par exemple a 2 , peuvent définir la même variété V ; par contre, à V on peut faire correspondre biunivoquement l'ensemble de tous les polynômes qui s'annulent sur V, ils forment un idéal noté b. Si une variété V 1 est un sous-ensemble d'une variété V 2 , on aura b 1 ) b 2 ; et étant données deux variétés quelconques V et V', à la réunion et à l'intersection de V et de V' correspondront respectivement l'intersection et la réunion de b et b', c'est-à-dire respective- ment l'idéal P.P.C.M. [b, b'] et l'idéal P.G.C.D. (b, b'). Une variété est dite irréductible si elle n'est pas la réunion de deux variétés; l'un des résultats essentiels de la théorie est qu'une variété V est irréductible si, et seulement si, b est premier. Cette théorie va nous donner un autre exemple d'idéal premier ayant des diviseurs ( 50) : soit dans RS, par exemple, une surface algébrique irréductible V 2 et située sur elle une courbe irréductible V 1 , b l , idéal premier est un diviseur de l'idéal premier b 2 ; de même à un point quelconque V o de VI corres- pondra un idéal b o diviseur de b 1 et de b 2 ; mais V o n'admet- tant pas de sous-variété b o sera maximal (sans diviseurs). 54. Un exemple d'anneau à factorisation non unique. - Considérons l'ensemble A des nombres % = a + ibV5 (a et b E Z); x vérifie l' équa tion : x 2 -2 ax + a 2 + 5 b 2 = 0 si b  0, x est donc un entier algébrique d'ordre 2 (cf.  16) : des calculs faciles montrent que A est un anneau commutatif à élément-unité 1. Si nous désignons par x = a - ib VS le nombre conjugué de x, on appelle norme de x et on désigne par N (x) l'entier natll,rel xx = a 2 + 5 b 2 qui possède les deux propriétés suivantes : I o N (x) = 0 si, et seulement si, x = 0 ; 2 0 N (x) N (x') = (xX) (x' x') = xx x' x' = (xx') (xx') = N (xx'). De ces deux propriétés, il résulte que A est sans diviseur de zéro, et que la norme de tout diviseur y de % doit diviser N (x). Donc, les unités ex; + i ys de A doivent diviser la norme 1 de l'élément unité 1, donc ces unités sont + 1 et - 1. Enfin, les normes d'éléments associés ( 49) sont les mêmes. L'une des propriétés essentielles d'un anneau tel que A est qu'il n'est pas àfactorisation unique (51), on a par exemple: (1) 6 = 2.3 = (1 + iVS) (1- iVS) 115 
Soit y un véritable diviseur ( 49) de x tel que x = yz, N (y) doit diviser N (x) dans N sans être égal à 1 (y serait une unité) et sans être égal à N (x) (ce qui entraînerait N (z) = 1, z serait une unité et y serait associé à x), donc les normes de 2, 3, 1 :l: iV5 étant respectivement 4, 9, 6, les normes des diviseurs doivent être : pour 2 un diviseur de 4 distinct de 4 et de 1 soit de 2 ; pour 3 un diviseur de 9 distinct de 9 et de 1 soit de 3 ; pour 1 + i VS un diviseur de 6 distinct de 6 et de 1 soit 2 ou 3. Or, les équations u 2 + 5 v 2 = 2 ou 3 sont impossibles dans Z, donc les éléments 2, 3 et 1 :l: i VS sont bien premiers dans A et l'égalité (1) nous donne donc une double décomposition de 6 en facteurs premiers dans A. On démontre, ce qui dépasse largement le cadre de cet ouvrage, que par contre, entre idéaux de A on a : (2) (6) = (2, 1 + iVS) {2, 1 + iVS} (3, 1 + iVS) {3, 1 - iVS} tous les idéaux du second membre étant premiers et une telle décomposition en produit d'idéaux premiers étant unique. Rappelons que c'est pour « restaurer» une certaine unicité dans la décomposition en « facteurs premiers» que les idéaux ont été introduits par Kummer, puis Dedekind ( 16). 116 
CHAPITRE III ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES Tous les corps considérés dans ce chapitre seront commutatifs et de caractéristique nulle. Un corps K' contenant un corps K sera appelé un sur-corps de K. 55. Propriétés des zéros d'un polynôme (1). - On appelle zéro d'un polynôme f(X) de l'anneau euclidien K [X] ( 48) tout élément du corps K ou d'un sur-corps K' de K tel que f (Xo) = 0 ; n étant le degré du polynôme f (X), on dit aussi que f (x) = 0 est une équation algébrique de degré n dont Xo est une racine. Dans K' (X], on a : f(X) =f1 (X) (X- %0) + r d'où r = f(Xo), par conséquent: Théorème 1. - Xo E K' sur-corps de K est un zéro de f (X) E K [X] si, et seulement si, f (X) est divisible par X - Xo dans K' [X]. Définition. - Un polynôme f(X) E K [X] est dit irré- ductible sur K s'il est sans diviseurs véritables dans K [X] (cf.  49), en particulier il est dépourvu de zéro dans K. Théorème II. - Deux polynômes f (X) et g (X) premiers entre eux ( 51) dans K [X] sont sans zéros communs dans tout sur-corps K' de K : en effet u (X)f(X) + v (X) g (X) = e conduirait à une absurdité en remplaçant X par un zéro commun dans K. Corollaire 1. - Deux polynômes f (X) et g (X) de K [X] ayant des zéros communs dans un sur-corps K' de K distinct de K sans (1) Le lecteur connaissant la théorie classique (cf. CAGNAC, RAMIS et COMMEAU, Traité de mathématiques spéciales, t. II, Analyse, Masson, 1967, et t. l, Algèbre, p. 210) notera les analogies et les différences entre cette dernière et la présente théorie. Dans la théorie classique, on admet (ou l'on démontre en utilisant largement l'Analyse) qu'un polynôme de degré n de C [x] a n zéros dans C (théorème de d'AJembert), dont on donne alors les propriétés. Ici, en supposant seulement l'existence de zéros dans un sur-corps K' de K, nous montrons un certain nombre de propriétés des polynômes de K[x] relativement à K : de ces propriétés et d'un recours minimum, mais indispensable, à l'Analyse découlera le théorème de d'Alembert ( 57 et 58). 117 
en avoir dans K ont un P.G.C.D. dans K [X] de degré non nul, dont les zéros dans K', sont les zéros communs de f (X) et g (X). Corollaire II. - Si f (X) irréductible sur K a des zéros com- muns dans K' sur-corps de K avec un polynôme g (X) de K [X], il divise g (X). En effet, un P.G.C.D. de f(X) et g (X) dans K [X] ne pouvant être que af(X) (a E K, cf. 9 49). Un élément Xo d'un sur-corps K' de K est appelé zéro d'ordre ex; (ex; E N) de f (X) appartenant à K [X] si dans K' [X], f(X) est divisible par (X - xo)CX sans l'être par (X - %0)CX+1. (X - xh)CXh et (X - Xk)CXk sont premiers entre eux dans K' [X] si, et seulement si, Xh #: Xk. Donc, si f (X) admet dans K', p zéros distincts deux à deux, il est divisible dans K' [X] par le produit (X - )CX1, ..., (X - xp)CXp (9 51), d'où: f(X) = (X - )IXI . . . (X - xp)rJ.p fi (X) fi (X) étant un polynôme non nul de K' [X] de degré positif ou nul, d'où: Théorème m. - Un polynôme f (X) non nul de K [X] ne peut avoir dans un sur-corps quelconque K' de K plus de n zéros distincts ou non (1). ko:::: n Si le polynôme f(X) =  ak Xk (ak E K) admet dans K' k....O sur-corps de K un zéro Xo d'ordre et, nous avons dans K' [X] : f (X) = (X - Xo)CX fi (X) et par dérivation (9 13) : f' (X) = et (X - Xo)CX-l fi (X) + (X - Xo)CX f' 1 (X) = = (X - XO)CX-1 f2 (X) par conséquent (12 (Xo) = ex;!l (Xo)  0) - la réciproque étant évidente; d'où : Théorème IV. - Un zéro est d'ordre ex; pour f (X) si, et seule- ment si, il l'est d'ordre ex; - 1 pour f' (X). Donc, si un polynôme J (X) non nul irréductible sur K avait des zéros multiples dans un sur-corps K' de K, il aurait des zéros communs avec J' (X), donc diviseraitf' (X) (Cor. II du k-n th. II), or f' (X) =  kak Xk-l de degré n - 1, donc s'il k-l était divisible par un polynôme de degré n, il serait nul et les relations non = ... = ka k = ... = 2 a 2 =  = 0 entraîne- (1) Ce théorème est faux pour les polynômes définis sur un anneau ayant des diviseurs de zéro, par exemple sur Z/6 (cf.  12, p. 24) ou sur un corps non commutatif, par exemple celui des quaternions (cf. S 14, p. 30) où le polynôme XI + 1 a une infinité de zéros, 118 
raient, le corps étant de caractéristique nulle ( 30), an = ... = = ak = ... =  = 0, donc f (X) = ao = 0 puisqu'il a des zéros; il serait un polynôme nul, d'où: Théorème V. - Un polynôme non nul irréductible sur K ne peut avoir de zéros multiples dans un sur-corps quelconque K' de K. k.... n Soit enfin, un polynôme f(X) =  ak Xk de degré nt k=O ayant n zéros distincts ou non dans un sur-corps K' de K, dans K' [X] l'égalité (X) = an (X - Xl) (X - x 2 ) . . . (X -.xn) = =a n [xn-O'l xn-l+... + (-l)kO'k xn-k +... + (-l)nO'n] entraîne 0'1 = - arl an O'k = (- l)k aklan ... O'n = (- l)n ao/an où O'k représente la somme des produits k à k des n zéros , X 2 ' . . ., Xn. Ces expressions appelées fonctions symétriques élé- mentaires des n zéros, sont donc des éléments de K même si tous les zéros n'appartiennent pas à K. Plus généralement, on appelle fonction symétrique rationnelle des n zéros de f (X), toute expression rationnelle à coefficients dans K ( 47), qui prend la même valeur lorsqu'on permute les n zéros de toutes les manières possibles et on montre (1) : Théorème VI. - Si un polynôme de degré n de K [X] a n zéros dans un sur-corps K' de K, toute fonction symétrique ratioJ1,nelle des zéros est égale à une expression rationnelle à coefficients dans K de 0'1' 0'2' .. ., O'n et donc appartient à K. 56. Adjonction. Extension algébrique simple. - Nous cher- chons à former un sur-corps de K où f (X) irréductible sur K ait un zéro, nous sommes ainsi amenés à étudier la question suivante: quel est le plus petit sur-corps de K contenant un élément 6 d'un corps  de K et étranger à K. Ce corps contien- dra au moins toutes les expressions rationnelles en 6 et à coeffi- cients dans K ( 47) c'est le corps K (6) des fractions de l'anneau d'intégrité K [6]. On dit que ce corps est obtenu par l'adjonction à K de l'élément 6 qui lui est étranger. Deux cas peuvent alors se présenter : ou bien il n'y a pas dans K [6] d'expressions rationnelles entières nulles et de degré positif, on dit alors que K (6) est une extension transcendante simple de K, (1) La démonstration est la même que dans la théorie cJassique (cf. CAGNAC, RAMIS et COMMEAU, op. cit.), avec les restrictions indiquées dans la note 1, p. 117. 119 
6 étant un élément transcendant par rapport à K (1); K (6) est alors isomorphe à K (X). Ou bien - et c'est ce que nous supposerons dans la suite - il Y a dans K [6] des expressions rationnelles entières nulles et de degré positif; soit n le degré de ces expressions de olus bas degré (n -=1= 1, car si n = 1, il Y aurait des expressions nulles de la forme  6 + a o et 6 appartiendrait à K); à un facteur - élé- ment de K - près cette expression nulle de plus bas degré k=n f (6) =  ak 6k est unique, car s'il y en avait une deuxième k=O k== n g (6) =  b k 6 k , l'expression b n f(6) - an g (6) de degré non k=O nul inférieur à n serait nulle, ce qui est impossible : on dit alors que K (6) est une extension algébrique simple d'ordre n de K k=n et que le polynôme f (X) =  ak Xk de K [X] est le polynôme k=O caractéristique de cette extension; il est évidemment irré- ductible sur K. D'autre part, l'ensemble des polynômes de l'anneau eucli- dien K [X] admettant 6 pour zéro, forme un idéal Q de K [X] distinct de l'idéal zéro - il comprend f (X) -=1= 0 - il est donc principal et contient l'idéal principal (f(X», son polynôme générateur fI (X) divise donc f(X) (cf.  51) et f(X) étant premier dans K [X], ils sont égaux à un facteur - une unité de K [X], c'est-à-dire un élément de K - près,f(X) etfl (X) sont donc associés et Q = (f(X». Considérons maintenant un élément quelconque (X de K (6), il s'écrit A (6)jB (6), A (X) et B (X) appartenant à K [X] avec B (6) -=1= 0 ; les polynômes f (X) et B (X) sont premiers entre eux, sans quoif(X) élément premier de K [X] diviserait B (X) et B (6) serait nul, il existe donc U (X) et V (X) dans K [X] tels que ( 49) : B (X) U (X) + f(X) V (X) = e d'où B (6) U (6) = e (X = A (6)jB (6) = A (6) U (6)jB (6) U (6) = = A (6) U (6)je = A (6) U (6) = C (6) C (X) appartenant à K [X] ; cherchons maintenant à quelle condition deux expressions entières de K [6] correspondent au même élément (X de K (6), la condition CI (6) = C 2 (6) ou CI (6) - C 2 (6) = 0 entraîne CI (X) - C 2 (X) E Q = (f (X», d'où CI (6) - C 2 (6) = E (6)f(6), E (X) étant un polynôme quelconque de K [X] ; donc les éléments de K (6) cOTTesponde1d (1) Par exemple, on sait que 1t et e base des logarithmes népériens sont transcendants par rapport à Q. 120 
biunivoquement aux classes modulo f (X) de l'anneau K [X] et comme cette correspondance est compatible avec l'addition et la multiplication, il y a un isomorphisme entre le corps K (6) et le quotient K [X]/(j(X» qui est donc un corps (1) ; d'autre part, il existe une seule expression Co (6) = cx de degré inférieur à n (s'il y en avait deux leur différence serait nulle et de degré inférieur à n). Notons enfin que dans cet isomorphisme chaque élément de K est invariant, car étant donnés deux éléments a et a' de K, ils appartiennent à la fois à K (6) et à K [X] et a = a' (mod.f(X» entraîne a = a'. S 7. Extension symbolique. Corps de décomposition d'un polynôme irréductible. - Inversement, nous allons montrer qu'étant donné un polynômef(X) de K [X] irréductible sur K, il existe toujours une extension algébrique simple de K où f (X) admette un zéro. D'après ce que nous venons de voir, cette extension doit être isomorphe à K [X]/(j(X». Considé- rons a priori ce quotient qui est un corps ( 56, n. (2»; la classe ci de ce quotient qui contient l'élément a de K corres- pondant biunivoquement à a, en remplaçant dans K [X]I.f(X» ci par a, nous obtenons un corps KI' sur-corps de K et isomorphe au corps-quotient (cf. 9 33) ; soit CXI' l'élément de KI qui, dans cet isomorphisme, correspond à l'élément X du corps-quotient. CXI n'appartient pas à K puisque les éléments de K se corres- pondent à eux-mêmes (fin du 9 56),f(cx l ) par cet isomorphisme correspond à f (X) élément zéro du corps-quotient, mais le zéro de KI identifié au zéro de K correspond aussi au zéro du corps-quotient, donc f(CXI) = 0 dans KI. Exemple. - Si K = R etf(X) = X2 + 1, et si l'on désigne par i l'image de X dans le corps-quotient R [X]/(X2 + 1), nous avons KI = C : c'est la définition de Cauchy des nombres complexes (cf. 9 13). Ce procédé purement algébrique de for- mation d'un sur-corps KI de K ou f (X) irréductible sur K ait au moins un zéro CXI s'appelle une adjonction symbolique, KI est une extension a]ébrique simple K (cx l ) de K. Il peut arriver que dans KI' f(X) ait d'autres zéros que CX1' on dit alors que tous ces zéros sont conjugués, par exemple dans C, X2 + 1 = =(X-i)(X+i). Si dans KI il reste des facteurs irréductibles pour f (X), on recommence pour chacun d'eux l'opération précédente et avec un nombre fini d'opérations algébriques - des extensions symboliques - nous arriverons à former un sur-corps K' de K où f(X) de degré n ait n zéros (2), sur-corps que l'on appelle (1) On peut aussi le voir directement, car f (X) est maximal dans K rXl (cf.  50. p. 112). (2 57) Nous ne nous occupons pas ici de l'unicité de K' (cf. VAN DER WAERDEN, op. cit.,  35). 121 
un corps de décomposition de f (X). Ce théorème valable pour tous les corps commutatifs de caractéristique nulle a une portée bien plus considérable que le théorème de d'Alembert, il mériterait mieux le nom de théorème fondamental (9 7). Il peut arriver que tout polynôme de K [X] ait un zéro dans K, alors tout polynôme de K [X] de degré n a n zéros dans K, ou encore dans K [X] les seuls polynômes irréductibles sont du 1 er degré. On dit alors que le corps K est algébriquement clos. 58. Théorème de d'Alembert (1). - Le corps C des nombres complexes est algébriquement clos. Lemme 1. - K étant un corps commutatif de caractéristique nulle, il .r a dans K [X] des polynômes irréductibles du 2 e degré si dans K [X] : 1 0 Tout polynôme de degré impair a au moins un zéro dans K ; 2 0 Il existe des polynômes irréductibles sur K de degré :f. 1. Soit g; la famille des polynômes P (X) irréductibles sur K de degré ¥: l, ce degré est de la forme 2P q où p est un entier  1 et où q est impair. A chaque polynôme P (X) correspond un entier p, l'ensemble de ces entiers p  1 de N admet un plus petit élément Po  1. Soit Po (X) un polynôme de g; dont le deré est no = 2Po qo et soit K' un corps de réduction de Po (X) (9 57) : désignons par xt, x 2 ' . . ., xno les zéros de Po (X) dans K' - forcément distincts, puisque Po (X) est irréductible sur K (9 55, th. V) et considérons les éléments de K' Yhk = Xh + Xk (1  h  no, 1  k  no), il y en a no (no -1)/2 - non forcément distincts - qui sont les zéros d'un polynôme F (X) de degré no (no - 1)/2 à coefficients dans K'; les fonctions symétriques élémentaires des Yhk sont des fonctions symétriques rationnelles des Xl (1  1  no) donc F (X) a ses coefficients dans K (9 55, th. VI), son degré n'o = no (no -1)/2 = = 2P o -I qo (2 Po qo -1) est de la forme n'o = 2P' q', q' impair et p' = Po - 1 < Po donc F (X) n'est pas irréductible sur K. Supposons qu'aucun de ses facteurs irréductibles sur K ne soit de degré 1, leurs degrés seraient de la forme 2Pl ql' 2P2 Q2' . · ., Pl' P2' . . .  Po et ql' q2'... impairs, donc le degré de F (X) aurait en facteur 2P" avec pli  Po' ce qui est impos- sible, donc F (X) a au moins un facteur irréductible de degré 1, c'est-à-dire F (X) a au moins un zéro a E K et il existe donc (1) Cette démon!;tration nou!; a été aimablement communiquée par M. Colmez. professeur à la Faculté des Sciences de Bordeaux, nous l'en remercions bien vivement; elle est peut-être un peu plus lone que les démonstrations classiques (cf. BOURBAKI, Algèbre, chap. VI, et Topologie générale, chap. VII, ou VAN DER WAERDEN, chap. IX), mais elle demande moins de connaissances d'algèbre moderne. 122 
deux zéros de Po (X) que nous désignerons par xt et x 2 tels que Xt+x 2 =aEK. Considérons le polynôme Po (a - X), il est de degré no et l'on a Po (a - xt) = Po (x 2 ) = 0 et Po (a - x 2 ) = Po (xt) = 0, donc Po (X) a au moins deux zéros xt et X 2 communs avec Po (a - X); comme Po (X) est irréductible sur K, il divise Po (a - X) (9 55, cor. II du th. II) ; comme ils sont de même degré, ils sont égaux à un facteur - élément de K - près, ils ont donc les mêmes zéros : à chaque zéro Xh de Po (X), on peut en faire correspondre un autre Xh', tel que Xh + Xh' = a ; cette correspondance est sans élément invariant, car Xk = Xh', entraînerait Xh = a/2 E K. Considérons les éléments de K' Zh = Xh (a - Xh), il y en a no/2 distincts, car Zh = Zk entraîne (Xh - Xk) (Xh + Xk-a) = 0, c'est-à-dire k = h', puisque Xh :f. Xk. Pour former le poly- nôme G (X) ayant pour zéros simples les éléments Zh, nous for- merons d'abord le polynôme h = no h - no H (X) = II [X - Xh (a - xk)] = II (X - aXh + X2h) h=l h=l ses coefficients, fonctions symétriques rationnelles des Xh, sont donc dans K (9 55, th. VI) ; d'autre part, ce polynôme H (X) de degré no a no/2 zéros doubles (xh et Xh', donnant le même élément Zh) : donc G (X) sera obtenu comme P.G.C.D. de H (X) et de H' (X), ses coefficients appartiennent à K, il est de degré no/2 = 2P o -l qo, il est donc réductible sur K et, à'après un raisonnement identique à celui fait sur F (X), il a au moins un zéro b dans K, soit Zo = Xo (a - xo) = b; Po (X) a donc deux zéros Xo et X'o, de somme a et de produit b, il est donc divisible par X2 - aX + b dans K [X] et, puisqu'il est irré- ductible sur K, il est égal à un facteur - un élément de K- près à X2 - aX + b, donc no = 2 et Po = 1. Il y a donc dans K [X] des polynômes irréductibles du 2 e degré. Corollaire du lemme 1. - Dans K [X] vérifiant les conditions du lemme 1 un polynôme de degré 2 q (q impair) ne peut être irréductible que si q = 1. En effet, nous venons de montrer que les polynômes irréductibles de degré 2P q (q impair) où p est minimum, c'est-à-dire le degré 2 q (q impair) sont exac- tement de degré 2. Lemme IT. - Dans le corps C des nombres complexes obtenu par l'adjonction symbolique de i, zéro du polynôme irréductible X 2 + 1 de R [X], tout polynôme de degré impair a au moins un zéro. Soit Q (X) un polynôme de degré impair q de C [X] dont les coefficients n'appartiennent pas tous à R, et soit 123 
Q (X) le polynôme conjugué (1) de Q (X). Le polynôme Q (X) Q (X) a tous ses coefficients dans R, en effet ses coeffi- cients fonctions symétriques rationnelles - et même entières- des deux zéros i et - i de X2 + 1 sont ( 55, th. VI) des expres- sions rationnelles à coefficients dans R de leur somme 0 et de leur produit -1. Or, le degré de Q (X) Q (X) est 2 q (q impair), R vérifiant les conditions du lemme 1 (2), ce polynôme est réductible sur R (cor. du lemme I). Soit S (X) un des facteurs irréductibles de Q (X) Q (X) sur R. Si Q (X) et S (X) étaient premiers entre eux dans C [X], S (X) divisant Q (X) Q (X) diviserait Q (X) ( 51) et il existerait D (X) de C [X] tel que Q (X) = S (X) D ( X ) et en passant aux polynômes conjugués Q (X) = S (X) D (X) - S (X) étant à coefficients réels est son propre conjugué - et S (X) diviserait Q (X) ce qui est contraire à notre hypothèse, donc S (X) et Q (X) ont des diviseurs communs dans C [X], donc Q (X) n'est pas irréductible sur C, soit QI (X) un de ses facteurs irréductibles, ce dernier est de degré impair ql < q. Par un nombre fini d'opérations semblables, nous obtiendrons une suite de divi- seurs de Q (X) dans C [X] de degrés impairs décroissants; nous arriverons donc à un diviseur de degré 1. Lemme m. - Dans C tout élément admet deux racines carrées et tout polynôme du second degré est réductible; a et b de R étant donnés, nous cherchons x et y de R tels que (x + iy)2 = = a + ib, nous avons { x 2 -.r=a xy = bf2 { X2 + (_y2) = a d'où x 2 (- y2) = - b 2 /4 xyb>O x2 et - y2 sont donc les zéros du polynôme X2 - aX - b 2 f4 ; si l'on admet, comme nous le faisons, que dans R tout élément positif a de ux racin es carrées opposées, nous av ons : a+v a2 + b 2 a- v a2 + b 2 r= et _y2= avec xyb > 0 2 2 (1) C'est-à-dire le polynôme obtenu en remplaçant dans tous les coefficients de Q (X) le nombre i par le nombre conjugué - i (cf.  57, p. 121). (2) Sur R, il Y a des polynômes irréductibles par exemple XI + 1, d'autre part toute fonction polynôme de degré impair à coefficients dans R est continue, elle tend vers - 00 avec la variable et vers + 00, également en même temps que la variable, donc prenant des valeurs de signe contraire, prend au moins une fois la valeur 0 (cf. DELACHET, Calcul différentiel et intégral, coll. c Que sais-je? t, no 466). 124 
d'où J v a2+b2+a , J va2+b2-a x=e y=e: 2 2 { e:2 = e:'2 = 1 avec e:e:' b > 0 il Y a donc deux solutions opposées, on en déduit comme en algèbre élémentaire que tout polynôme de C [X] du second degré a deux zéros dans C. Démonstration du théorème. - Le corps C vérifie la première hypothèse du lemme 1; s'il vérifiait la seconde, il y aurait dans C [X] des polynômes irréductibles du second degré, ce qui est faux (lemme III), donc dans C [X] les seuls polynômes irréductibles sont du premier degré et C est algébriquement clos. Ce théorème de d'Alembert est donc un théorème mixte, il est fondé sur des propriétés algébriques - que nous avons exposées au cours de ce livre, en particulier dans ce chapitre et le chapitre précédent - et sur des propriétés topologiques du corps R - tout polynôme de degré impair de R [X] a au moins un zéro dans R et tout élément positif de R a deux racines carrées dans R. 125 
CONCLUSION A l'issue de cette revue rapide de quelques applications, le lecteur aura, peut-être, été étonné de ne pas trouver ici, au moins esquissées, certaines questions dont il a pu entendre parler algèbre linéaire (théorie des matrices), théorie des groupes (groupes à opérateurs, théorie de Galois), théorie des invariants, algèbre de la logique, etc. De plus, nous n'avons fait qu'un usage très limité des relations d'ordre, alors que ces dernières jouent en algèbre un rôle de plus en plus envahissant grâce à la théorie des treillis (ou ensembles réticulés). Dans un tel livre, qui n'est qu'une modeste introduction à l'étude de l'algèbre moderne, il nous fallait choisir entre des aperçus mi- historiques, mi-techniques (comme dans notre Première Partie) sur de nombreux sujets et l'exposé suffisamment solide de quelques notions de base, que nous avons pu conduire jus- qu'aux notions délicates d'homomorphisme, de groupe et d'an- neau quotients. D'autre part, le choix d'un nombre réduit d'applications nous a permis de clarifier - nous l'espérons - certains résultats d'algèbre classique (notion de polynôme, algorithme d'Euclide pour Z et K [X], caractère mixte du théorème de d 'Alembert, etc.). Nous pouvons de plus tirer de ces exposés des conclusions de nature méthodologique: il nous apparaît que la mathématique moderne a davantage pour objet l'étude des relations des êtres mathématiques que ces êtres eux-mêmes: les notions de loi, de relation d'équivalence, de groupe, d'anneau, de corps, d'ad- jonction, etc., ont eu dans notre exposé une importance beau- coup plus considérable que celles de nombre, de figure géomé- trique ou de polynôme. D'autre part, aux caractères abstrait et axiomatique de la mathématique moderne, déj à signalés dans l'avant-propos, s'en ajoute un autre si nous consi- dérons, en effet, certaines théories classiques comme l'arithmé- tique ou la géométrie euclidiennes axiomatisées respectivement par Peano et Hilbert, nous constatons que ces théories défi- nissent, à un isomorphisme près, les ensembles auxquels elles s'appliquent, tandis que les axiomes d'un groupe, d'un anneau ou d'un corps, par exemple, s'appliquent à des ensembles qui ne sont plus isomorphes (1). Avec N. Bourbaki (cf.  17, n. (1), et 9 24, n. (1», nous dirons que l'arithmétique et la géométrie eucliàiennes sont des théories univalentes, tandis que les théories de l'algèbre moderne sont multivalentes : c'est dans cette multi- valence que réside probablement l'un des caractères spécifiques de la mathématique moderne. (1) Par exemple, la théorie des anneaux euclidiens s'applique aussi bien à Z et à R [X] qui ne sont en aucune façon isomorphes: ce sont des ensemble de puissance différente. 126 
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE Les trois ouvrages fondamentaux que nous avons largement utilisés sont : N. BOURBAKI, Eléments de mathématiques, Première Partie, livre II : Algèbre, Paris, Hermann, 1945-1953 (7 chapitres parus sur une dizaine prévus). P. DUBREIL, Algèbre, t. 1, Paris, Gauthier-Villars, 1946 (deux ou trois autres tomes à paraître). VAN DER WAERDEN, Modern algebra, Berlin, Springer, 3 e édit., en allemand, 1943 ; traduction anglaise sur la 2 e édition allemande, New York, Ungar, 1949. Ce livre était entièrement rédigé lorsqu'est paru: CUATELET, Arithmétique et algèbre modernes, t. 1, et t. II (sur trois à paraître), collection « Euclide 1), Paris, Presses Universitaires de France, 1954 et 1956. Sans donner un exposé systématique d'algèbre moderne, plusieurs ouvrages plus accessibles au débutant pourront être utilement consultés (outre les ouvrages dont les références ont été données en note). BOULIGAND, Premières leçons sur la théorie des groupes, Paris, Vuibert, 1935. - Les principes de l'analyse géométrique, t. II, fasc. A, Paris, Vuibert, 1950. BELL, Les grands mathématiciens, Paris, Payot, 1938. - La mathématique reine et servante des sciences, Paris, Payot, 1953. LITTLEWOOD, The skeleton ]cey of malhemalics, London, l-Iuchinson, 1949. VERRIEST, Les nombres et les espaces, Paris, Armand Colin, 1951. 
TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . 0 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 PREMIÈRE PARTIE INTRODUCTION mSTORIQUE CHAPITRE PREMIER. - Antiquité et Moyen Age 5 CHAPITRE II. - Le développement de l'algèbre classique 9 CHAPITRE III. - La genèse de l'algèbre moderne 15 DEUXIÈME PARTIE NOTIONS FONDAMENTALES D'ALGÈBRE MODERNE CHAPITRE PREMIER. - Lois de composition ......... 37 1. La théorie des ensembles, 37. - II. Lois de composition internes, 46. - III. Lois de composition externes, 56. - IV. Structures algébriques, 59. CHAPITRE II. - Groupes, anneaux, corps ........... 60 1. Groupes et sous-groupes, 60. - II. Anneaux et idéaux, 64. - III. Corps, 71. CHAPITRE III. - Les méthodes de l'algèbre moderne. 73 1. Isomorphisme et automorphisme, 73. - II. Relations d'équivalence, 77.. - III. Homomorphisme, 85. - IV. Ex- tension, 91. TROISIÈME PARTIE APPLICATIONS CHAPITRE PREMIER. - Généralisation de la notion de nombre. Espaces vectoriels. Polynômes ............ 100 1. Des entiers naturels aux nombres réels, 100. - II. Espaces vectoriels. Nombres complexes et hypercomplexes, 103. - III. Anneaux de polynômes, 106. CHAPITRE II. - Divisibilité dans les anneaux 111 CHAPITRE III. - Equations algébriques 117 CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 BmLIOGRAPHIE SOMMAIRE 127 Imprimé en France, à v" endôme Imprimerie des Presses Universitaires de Francp 1981 N° 27 095 
. . J J .. . COLLECTION ENCYCLOPÉDIQUE fondée par Paul Angoulvent De1.,ie1-s t.it1-es pa1.US 1883 La psychologie ergonomique 1906 Le conte populaire français (J. LEPLAT) (M. SllIONSEN) 1884 L'agro-alimentaire 1907 La formation de la langue (J. BOl\1BAL et Ph. CHALMIN) française (J. ALLIÈRES) 1885 La phonétique de l'anglais 1908 Le crédit-bail mobilier (M. VIEL) (M. BEY et Ch. GAVALDA) 1886 Histoire de l'océan Indien 1909 L'art égyptien (CI. LALouETTE) (A. TOUSSAINT) 1910 Les appareils ménagers 1887 La philosophie de l'art (A. MAURIe) (J. LACOSTE) 1911 Le marketing touristique 1888 Le parfum (Ed. ROUDNITSKA) (R. HOLLIER et R. LANQUAR) 1889 Les figures de style 1912 Le sacré (J.-J. \VUNENBURGER) (H. SUHAMY) 1913 Le Vatican (P. POUPARD) 1890 La religion romaine 1914 Le Fonds européen (Y. LEHMANN) de Développement 1891 La littérature italienne (Fr. BARON et G. VERNIER) contemporaine (A. OTTAVI) 1915 Les transferts de technologie 1892 Histoire de l'urbanisme (R.-Fr. BIZEC) (J.-L. HARouEL) 1916 Les langues véhiculaires 1893 L'enseignement à distance (L.-J. CALVET) (J.-P. LEHNISCH) 1917 La chasse photographique 1894 La littérature brésilienne (G. BETTON) (L. STEGAGNO-PIeCmo) 1918 Histoire du théâtre russe 1895 La coexistence pacifique jusqu'en 1917 (J.-Cl. ROBERTI) (CI. DELMAS) 1919 . La télédétection (A. COUZY) 1896 Le procès de Jésus (J. IMBERT) 1920 L'extradition (Y. CHAUVY) 1897 Le maniérisme italien 1921 La protection des sites (P. BARUCCO) (A. PLANEL-MARCHAND) 1898 Histoire du peuple hébreu 1922 L'Afghanistan (A. LEMAIRE) (M. et R. POULTON) 1899 Les mécanismes de défense 1923 L'informatique et le droit (A. MUCCHIELLI) (X. LINANT DE BELLEFONDS) 1900 La sécurité du citoyen 1924 Les ethnies (R. BRETON) (J. VAUJOUR) 1901 La radiothérapie (A. NAOUN) 1925 La psychosociologie de l'espace 1902 L'érosion des côtes (R. PASKOFF) (G.-N. FISCHER) 1903 L'O.P.E.P. (L. MIHAILOVITCH et 1926 La Présidence de la République J.-J. PLUCHART) (St. RIALs) 1904 Histoire de la radio-télévision 1927 La Pologne (H. SMOTKINE) (P. ALBERT et A.-J. TUDEsQ) 1928 Le système politique 1905 Le droit des assurances (R. BOUT) de la V e République (S. SUR)