Text
                    
A propos de ce livre Ceci est une copie numérique d’un ouvrage conservé depuis des générations dans les rayonnages d’une bibliothèque avant d’être numérisé avec précaution par Google dans le cadre d’un projet visant à permettre aux internautes de découvrir l’ensemble du patrimoine littéraire mondial en ligne. Ce livre étant relativement ancien, il n’est plus protégé par la loi sur les droits d’auteur et appartient à présent au domaine public. L’expression “appartenir au domaine public” signifie que le livre en question n’a jamais été soumis aux droits d’auteur ou que ses droits légaux sont arrivés à expiration. Les conditions requises pour qu’un livre tombe dans le domaine public peuvent varier d’un pays à l’autre. Les livres libres de droit sont autant de liens avec le passé. Ils sont les témoins de la richesse de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de la connaissance humaine et sont trop souvent difficilement accessibles au public. Les notes de bas de page et autres annotations en marge du texte présentes dans le volume original sont reprises dans ce fichier, comme un souvenir du long chemin parcouru par l’ouvrage depuis la maison d’édition en passant par la bibliothèque pour finalement se retrouver entre vos mains. Consignes d’utilisation Google est fier de travailler en partenariat avec des bibliothèques à la numérisation des ouvrages appartenant au domaine public et de les rendre ainsi accessibles à tous. Ces livres sont en effet la propriété de tous et de toutes et nous sommes tout simplement les gardiens de ce patrimoine. Il s’agit toutefois d’un projet coûteux. Par conséquent et en vue de poursuivre la diffusion de ces ressources inépuisables, nous avons pris les dispositions nécessaires afin de prévenir les éventuels abus auxquels pourraient se livrer des sites marchands tiers, notamment en instaurant des contraintes techniques relatives aux requêtes automatisées. Nous vous demandons également de: + Ne pas utiliser les fichiers à des fins commerciales Nous avons conçu le programme Google Recherche de Livres à l’usage des particuliers. Nous vous demandons donc d’utiliser uniquement ces fichiers à des fins personnelles. Ils ne sauraient en effet être employés dans un quelconque but commercial. + Ne pas procéder à des requêtes automatisées N’envoyez aucune requête automatisée quelle qu’elle soit au système Google. Si vous effectuez des recherches concernant les logiciels de traduction, la reconnaissance optique de caractères ou tout autre domaine nécessitant de disposer d’importantes quantités de texte, n’hésitez pas à nous contacter. Nous encourageons pour la réalisation de ce type de travaux l’utilisation des ouvrages et documents appartenant au domaine public et serions heureux de vous être utile. + Ne pas supprimer l’attribution Le filigrane Google contenu dans chaque fichier est indispensable pour informer les internautes de notre projet et leur permettre d’accéder à davantage de documents par l’intermédiaire du Programme Google Recherche de Livres. Ne le supprimez en aucun cas. + Rester dans la légalité Quelle que soit l’utilisation que vous comptez faire des fichiers, n’oubliez pas qu’il est de votre responsabilité de veiller à respecter la loi. Si un ouvrage appartient au domaine public américain, n’en déduisez pas pour autant qu’il en va de même dans les autres pays. La durée légale des droits d’auteur d’un livre varie d’un pays à l’autre. Nous ne sommes donc pas en mesure de répertorier les ouvrages dont l’utilisation est autorisée et ceux dont elle ne l’est pas. Ne croyez pas que le simple fait d’afficher un livre sur Google Recherche de Livres signifie que celui-ci peut être utilisé de quelque façon que ce soit dans le monde entier. La condamnation à laquelle vous vous exposeriez en cas de violation des droits d’auteur peut être sévère. À propos du service Google Recherche de Livres En favorisant la recherche et l’accès à un nombre croissant de livres disponibles dans de nombreuses langues, dont le frano̧ais, Google souhaite contribuer à promouvoir la diversité culturelle grâce à Google Recherche de Livres. En effet, le Programme Google Recherche de Livres permet aux internautes de découvrir le patrimoine littéraire mondial, tout en aidant les auteurs et les éditeurs à élargir leur public. Vous pouvez effectuer des recherches en ligne dans le texte intégral de cet ouvrage à l’adresse http://books.google.com

Ex Libris Petri Adamol i Regi à Consilis, àportubus pontibus, transitibus que urbis Lugdunensis ас veteris Provincia Summi 17 33 .
808766


De Verransal. In Jel· Leparfait Cocher. Jessard Sculp•
808766, ACAD . SCIENT.LIT T LE PARFAITET. ART. LUGD . COCHER OU L'Art d'entretenir , & de condui re un Equipage à Paris & en Campagne. Avec une inftruction aux Cochersfur les Chevaux de Caroffe , Et une connoiffance abrégée des prin cipales Maladies , auxquelles les Chevaux font fujets. Ouvrage utile tant aux Maîtres LAU Lqu'aux Cochers. LE DE DEL A PARIS , Chez F. G. MERIGOT , Quay des Augu ftins , près la rue Gift- le-coeur , aux Armes de France. M: DCC . XLIV . AVEC PRIVILEGE,
‫ܫܪ‬
A MONSIEUR , MONSIEUR DE LA GUE'RINIERE , ECUYER DU ROY. M ONSIEUR , Un Ouvrage , que vous avez trouvé digne d'être mis au jour a ij
EPITRE. iv tant pour l'utilité des Cochers , que pour les Maîtres même , a befoin de votre nompour paroître avec quel que confiance. Déja vosfuffrages m'ont aſſuré de ceux du Public. Qui peut en effet mieux juger de mon PAR FAIT COCHER , que vous même ? Je fur ne votre vous belle louerai pas ; ECOLE DE CAVALERIE. Vous en avez reçu les applaudiffemens que vous méritiez, Tout Paris eft té moin que vous travaillez à vous rendre de plus en plus utile à lat
EPITRE. JEUNE NOBLESSE , qui reçoit tous les jours de vous cette affurance , cette adresse & cette fierté , qui font tout enfemble l'ai mable & l'intrépide Cavalier. Ce zéle infatigable , que vous avez pour votre Profeffion , vous · la protection d'un de affure GRAND PRINCE , qui connoiffant mieux que perfonne ce dont vous êtes capable , veut que tous vos momens foient éga lement partagés entre la Cour & la Ville. Comme ces marques de diſtin Etion font une preuve de vos ta a iij
T EPITRE. vj lens elles en font l'éloge. J'en fais en mon particulier tant de cas , que je reffens une joye fé crette de pouvoir vous dire pu bliquement avec quelle eftime & quelle confidération j'ai l'honneur d'être , 1 H 1 MONSIEUR , ' A Paris , ce 2. Janvier 1744. Votre très-humble & très - obéiffant fer viteur , A. D. L. C.
‫مصلح‬ Midland ak PRE'FACE. E ne connois que quelques Auteurs , dans les Ouvrages defquels , il y a des inftruc tions pour les Cochers , fémées çà & là. Mais on ne s'eft pas encore avifé de donner au Public des chofes " bien étenduës fur cette matiére . Ce que j'ai lu dans ces Livres ne m'a pas paru fuffifant pour un jeune homme qui veut embraffer un métier auffi pénible & auffi dangereux que l'eft celui de conduire un Equipage , tant à Paris , que par tout ailleurs. Un Manufcrit compofé dès le commencement de ce fiécle par un ancien Cocher , qui en avoit fait l'exercice pendant trente a iiij ans &
viijj PREFACE. plus , m'eft tombé dans les mains. Au milieu d'une infinité de chofes étrangeres au fujet , j'y ai débrouillé des leçons très-utiles , & de ce ma nufcrit dont , tel qu'il étoit , on ne pouvoit faire uſage , j'ai tiré la quin teffence. Mais les modes comme le goût changent en tout ; & ce que ce vieux Cocher a dit fur plufieurs chofes , n'eſt plus d'ufage. Je puis même dire , que depuis vingt ou trente ans , on a perfectionné cet art. Les équipages font plus leftes , plus galans , & plus riches , qu'ils ayent jamais été , & auffi plus lé gers & plus fragiles. On mene avec plus d'adreffe & plus de grace , qu'on ne faifoit il y a quarante ans. Ainfi pour donner , fuivant mon titre , à mon Parfait Cocher toute la perfection poffible , j'ai confulté un des meilleurs Cochers qu'il y ait à la Cour & à Paris , un Cocher qui doit toute fa fcience & toute fon
PREFACE. Tx adreffe au Seigneur, qu'il a l'honneur de fervir , un Cocher qui en a for mé plufieurs autres , & qui tous les jours en forme pour des perfonnes de la premiere condition , qui n'en veulent que de fa main. C'eft l'ha bille Peretti , Cocher de M. le Duc de Nevers. Nous avons enſemble examiné eet Ouvrage , & fur ce qui regar de le panfement des chevaux , l'en tretien de l'équipage , & la manié re de mener , il a bien voulu m'in ftruire. J'ai profité de plufieurs de fes momens de loifir , pour faire les additions néceffaires , pour ré trancher de concert avec lui ce qui n'eft plus d'ufage , ou ce qui lui a paru défectueux. Cette partie eft donc plus fon ouvrage que le mien . M. de la Riviere , Sellier d'une grande réputation , & qui demeure dans le Marais , n'a point auſſi ba lancé de m'apprendre la maniere qu'un Caroffe , Berline , Berlingot ,
30 PREFACE. Vis-à- vis , Chaiſes de pofte doivent avoir de la grace. être montés pour C'eft de lui que je tiens tout ce que j'ai dit à ce fujet . Je n'ai pas trouvé les mêmes reffources chez quelques autres , qui ,, par les profeffions qu'ils exer cent, ont tous les jours affaire avec des Cochers . Il y en a qui vou loient pour quelques avis , & une confultation d'une heure au plus 9 impoſer des conditions trop dures à mon Libraire . D'autres jaloux de leur fçavoir faire , n'ont pas daigné. m'en faire part. Las de leur avoir fait des viſites inutiles , & confeillé par un habile homme , qui en m'indiquant le Nouveau Parfait Maréchal m'a fait connoître que je n'avois pas befoin d'eux , j'ai été m'inftruire dans ce Livre fur quelques articles que ces habiles , mais peu obligeans Ou vriers vouloient me faire ignorer . J'ai donné toute l'attention pof 1 1
PREFAC E. xj fible à cet Ouvrage , fi digne de celle de tous ceux qui ont équipa ge. Il n'eft pas moins utile aux Co chers , à ces Cochers fur tout , qui ne doutent de rien , & qui ne fça vent rien. Il contient trois parties. La premiere beaucoup plus éten duë traite de la maniére de mener à Paris & en Campagne , & du foin qu'on doit avoir de l'équipage & des chevaux . La feconde donne une connoif fance abrégée des chevaux de Ca roffe , françois & étrangers. La troifiéme eft une lifte des prin cipales maladies aufquelles les che vaux font fujets , & une courte in ftruction fur ce que les Cochers doivent faire , en attendant le fe cours des Maréchaux , s'ils en ont befoin. Il y a dans Paris plus de mau vais Cochers que de bons. Ceux qui fçavent lire , pourront de deffus leur fiege s'inftruire en attendant
mij PREFAC E. leurs Maîtres. Mais je plains ceux à qui des Parens dans leur enfance n'ont pas fait apprendre à lire. Le nombre en eft moins grand aujour d'hui qu'autrefois . Je confeille à ceux-ci de chercher parmi les Do meftiques du Maître qu'ils fervent , quelqu'un affez obligeant pour leur lire aux heures qu'ils ne font pas occupés , un livre uniquement com pofé pour leur inſtruction . Quoique l'invention des Caroffes ne foit pas ancienne "* & qu'ils n'euffent que le nom de la Coche du tems d'Henri IV. qui n'avoit qu'un équipage fort fimple , lequel fervoit également à la Reine fon épouſe comme à lui , la profeſſion de Cocher , j'entend celle de me ner des Chars , eft ancienne & mê me illuſtre . Ancienne , parce qn'on voit l'ufage des Chars dès l'établiſ fement des premieres Monarchies ; & Illuftre , parce que ceux à qui appartenoient ces Chars , Souve t
PREFACE. x117 rains & autres , fe faifoient un plai fir de les meher eux-mêmes . On fçait que l'Empereur Neron fut auffi bon Cocher que bon Ac teur. Par fucceffion de tems les Princes ont toujours regardé , com me un amuſement , & un plaiſir qu'ils pouvoient fe donner quelque fois , l'adreffe de mener leurs Chars. C'est ce que nous voyons encore aujourd'hui. Prefque tous les jeunes" Seigneurs , & à leur exemple une infinité de jeunes gens de condition s'appliquent à bien mener des Ca roffes , Phaetons , Caleches , Chai fes , &c. & il y en a qui s'en ac . quittent mieux que le commun des Cochers , & prefque auffi bien que les plus habiles. Par ces exemples il paroît qu'un Cocher , qui n'auroit que les rênes de fes chevaux à conduire , feroit un homme chargé d'un honorable emploi , tels que font en effet ceux , quí fervent à la Cour , & auprès des
xiv PREFACE. Grands. Mais comme par tout ail leurs un Cocher n'eft pour ainfi dire , Cocher , que quand il eft affis fur fon fiége , il ne lui refte que le chagrin de voir que ce qui eſt un exercice agréable pour d'autres , devient un état pénible pour lui , quand de l'induftrieuſe profeffion de Cocher , il eft obligé par fes engage mens de defcendre dans les baffes fonctions de Palfrenier & de Gar çon d'Ecurie. J'avoue que ces Cochers de la derniere claffe n'ont rien de flatteur que l'efpérance de trouver un jour des conditions, où ils ne faffent plus que l'office de Cocher. Celui qu'un Roi d'Eſpagne fit Grand d'Efpagne, en lui permettant de fe couvrir dans un tems de pluie ,* avoit fans doute commencé , comme tous les Co chers commencent. Si en France * A la Cour d'Eſpagne les Cochers menent le Roi la tête découverte , & il n'y a que les Grands d'Efpagne , qui ayent droit de fe couvrir devant Sa Majefté Catholique.
PREFACE. XV les Cochers ne peuvent pas afpirer à un pareil honneur , du moins ceux , qui font au fervice du Roi , de la Reine , des Princes & Prin ceffes,jouiffent- ils d'une fortune af fez riante ; & font- ils affez bien ré compenfés pour donner envie aux autres de fe rendre dignes des mê mes emplois? Mais l'émulation n'eſt pas grande parmi ces derniers. On a vu dans Paris , il y a plu fieurs années , un homme de con dition , qui faifant marcher derriere lui fon équipage , alloit à pied , afin d'examiner les Cochers , qui rou lans à vuide faifoient chevaux d'une aller leurs vîteffe extrême. Quand il en rencontroit , il les char geoit d'un billet cacheté pour leurs Maîtres , à peu près conçu dans ces termes : MONSIEUR , ce billet eft pour vous avertir que votre Cocher ne ménage ni vos chevaux , ni votre équipage. Ces billets généraux , & fans adreffe , dont il avoit toujours
1 xvj PREFACE. grande proviſion dans fa poche , & qu'il donnoit à tous les Cochers étourdis , qu'il arrêtoit fur fa route , comme s'il en eut connu les Maîtres, ne pouvoient faire qu'un bon effet. Tout le monde n'eft pas capable ' d'une pareille induftrie , & l'amour que l'on peut avoir pour fon équi page & fes chevaux ne s'étend pas toujours fur ceux des autres. Mais pour peu qu'on ait envie d'exami ner la conduite de fon Cocher Poftillon & Palfrenier , & de s'in ftruire de leurs devoirs , on n'a qu'à lire ce livre , où l'on parle de ce que les uns & les autres doivent faire. Je n'ai rien négligé pour mériter les attentions du Public. Mais fi malgré tous mes différens Maîtres > je me fuis trompé quelque part , comme je fuis toujours dans la dif pofition de profiter des avis & des inftructions , qu'on voudra me don ner , je demande • que ce Public m'excufe. TABLE 1 1
155 233 155 20 168 369 188 12k 48 ek TABLE DES ARTICLES de la premiere Partie. Ualités effentielles à un Cocher. pag. Q 1. & fuiv. Imperfections ordinaires àpluſieurs Cochers. 4. &fuiv. Main bonne d'un Cocher 7. &fuiv. Uftenciles néceffaires dans une Ecurie. 10 11 &fuiv. Heure d'entrerdans l'Ecurie. Ce qu'ilfaut faire dans l'Ecurie , avant que 13 de panferles Chevaux. Maniére d'étriller. ibid. fage de l'Epouffete , de la Broffe , & de l'Eponge. I+ Examen des pieds des Chevaux. 15 Maniére de trouffer la queuë d'un Cheval. 16 Maniére de faire le crin des Chevaux. 17 Maniére defaire croître le crin du colet & de la queue. 12
XVIII TABLE Caufe de la perte du crin des Chevaux. ibid. Maniére de faire lepoil des jambes. 20 21 Maniére de rogner la Corne. Maniére de gouverner les jambes , & les 22 pieds des Chevaux. Eau depuit bonne pour laver les jambes , & les pieds des Chevaux échauffés. Nourriture du Cheval. 23 24. Maniére de traiter les Chevaux gras. ibid. Maniére d'engraiffer un Cheval de Caroffe. 25 26 Chevaux, qui mangent lentement. ibid. Chevaux , qui mangent ensemble. Maniére de gouverner les Chevaux gour mands. 27 Maniére degouverner les Chevaux délicats. 28 Maniére degouverner des Chevaux mai 30 gres. Maniére de traiter les Chevaux , qui écra fent des araignées.. 32 Qualités des avoines , pailles , foins & fain foins. 33 &fuiv. · 39 Tems proprepour nétoyer un Caroffe. Maniére de nétoyer l'Imperiale du Caroffe. 4I Maniére de paffer la vergettefur les rangs des clous. 42 Maniére de nétoyer lesglaces & les peintu res. 43 •
TABLE XIX Maniére de nétoyer les Caroffes d'Ebene. 44 Chevaux négligés à cause du lavage des roles. 45 Maniere de bien monter un Caroffefurfon train. 46 Belle grace d'un Caroffe mis dansfon équili bre. 47 Difficulté de donner de l'air à un Berlingot, ibid. & aux autres Voitures. Différentes maniéres de monter les Chaifes de Pofte. so :Maniére d'arrêter les refforts d'un Caroffe , quand on va en Campagne. $2 Maniere de boucler les courroyes de guin ibid. dage. Paquets , qui ruinent le Caroffe. Bride de Cheval de Caroffe. 53 ibid. Ufage de la bride. Différentes embouchures . 5+ 55 Bridon , Maftigadour , Licols. 57 Maniére de brider un Cheval. 59 Maniére de brider un Cheval embouché. 60 Maniére de brider un Cheval fans bou: be. ibid. Ce qu'ilfaut faire à des Chevaux qui regar dent par-deffus leur ceillére , ou qui font 61 ombrageux. Harnois des Chevaux de Caroffe . 62 e ij
* XX TABLE Embouchures & bouffes. ༦༢ 66 Harnois à quatre & àfix Chevaux. Harnois des Chevaux de Chaife. 67 Maniére de mettre des Chevaux au Caroffe, & d'atteler un Cheval , qui s'écarte. 69 Autre maniére de mettre des Chevaux au Caroffe. 70 Maniére d'accommoder les vieux harnois. I 72 Maniére de mettre le harnois aux Chevaux. de Caroffe. 73 Maniére de mettre le harnois , pour ne point bleffer les Chevaux. 74. De quel côté on doit préfenter le harnois . ibid. Couffinets utiles en Campagne. 75 Ce qu'il fautfaire aux Chevaux , qui ont le ibid. crin trop long. 76 Attelage des Chevaux. Chevaux attelés courts à Paris . 77 Proprété de l'équipage , & du Cocher. ibid. Neceffite pour les Maîtres de donner leurs ordres. 78 Comment un Cocher doit être affis fur fon 79 Siége. Maniere de méner à la Françoife , & à P'Italienne. Se Maniére d'enrêner les Chevaux. 81 Un Cocher ne doit pas monterfur fonfiége 83 fansprendre les guides.
TABLE XXI Un Cocherfur fon fiége ne doit faluer pex 84 Sonne. Pofture dans laquelle un Cocher doit être ibid. pour bien méner. Provifion de verges defoüet , & longueur de 85 verges defoüet. Maniére de mettre une mife de foüet au bas d'une monture. 86 Maniére de donner des coups de fouet, 87 Maniére , dont un Cocher doit fortir de la 89 courdefon Maître. Retenue, que les Cochers doivent avoir dans Les chaleurs , & dans les tems de gelée. 91 ibid. Maniére de méner à Paris. Dans quel tems on doit cartayer lesruiſſeaux, & maniére d'éviter les embarras. 23 ne pas accrocher, Ce qu'il faut faire pour ne w & maniére defaire rouler un Caroffe. 94 Un Caroffe ne doit pas couper un autre Ca- . roffe ; & ce qu'il fautfaire dans une file. 9.5 96 Maniére deméner reglément. Maniére de tourner à un coin de ruë. 97 Ce qu'il fautfaire à un détour , & maniére de couper les ruiffeaux en tournant. 98 Ce qu'ilfautfaire dans un carfourpour tour ner. 99 100 Maniérede tourner en rond.. Maniére de tourner dans une ruë en mon 101 tant.
XXII TABLE Ne point tourner au milieu d'une ruecreufe. ibid. Maniéred'éviter les clous des ruës. 102 103 Maniére de réculer, & defe ranger. Empêcher que les chevaux ne voient du coin del'œil , & maniére de fe ranger pour at 104 tendrefon Maître. à mé facile auf chevaux buit de Attelage 105 ner quecelui de fix. Attelage à quatre auffifacile à méner , que celui de deux. 106 Chevaux , quijertent trop la tête en dehors. 108 Ce que doit faire un Cocher , à la rencontre ibid. d'un autre Caroffe. Conduite d'un Cocher , prudent a la rencon 109 tre d'un autre caroffe. Précautions qu'un Cocher doit avoir avant que defe mettre en Campagne , & manié 110 re de meneren Campagne. Façon defaire tirerfix Chevaux , & avan tage d'avoir un feptiéme Cheval pour le 112 befoin. Ce qui arrive , quand les Chevaux ne tirent pas également , & précaution , qu'un Co • cher doit avoir pour lesfaire tirer. 113 Les Chevaux d'un même Attelage doivent 114 être égaux. 115 Defavantage des Chevaux inégaux. Chaleurs contraires aux chevaux gras. 117 1
TABLE XXIII Maniere de monter les montagnes , & de ies 118 defcendre Attentions des Cochers à ménager les che vaux . 119 Maniére de faire boire les chevaux . ibid. Maniére de panfer les chevaux a la dinée. 120 Avantage d'arriver de bonne heure couchée. Maniére d'ôter le harnois des chevaux. Maniére d'ôter les traits. à la 122 123 124 Maniére d'arranger la petite guide. 125 Maniére de defaire les paloniéres , & les chainettes. 126 Maniére de fefervir du couteau de chaleur. ibid. Ce qu'ilfautfaire après qu'on a paſsé le cou teau de chaleur. 127 Gouvernement des chevaux de caroffe après 128 une courje. Soin des chevauxgras après une courfe. 129 Soin des chevaux de caroffe , outrés de tra vail après une longue course. 130 Autre maniére de foigner des chevaux quand ils font fatigués. 131 Confervation des pieds. 132 Heure defaire boire les chevaux. 134 135 Heure defairemanger l'avoine. Nourritures accidentelles des chevaux de caroffe & autres. 137
XXIV Son. TABLE 138 Orge , fénugrec , paille hachée , froment " feveroles , luzerne , coffas depois , lentil le, lande, vert , orge en vert. 139 & fuiv. 144 Boiffons des chevaux de caroffe. Situation des Remifes. 145 Soin qu'un Cocher doit avoir de la bride de 14G fes chevaux. Ce qu'un Cocher doit faire à des chevaux écorchés. ibid. Retour des voyages. 147 Maniére demettre & d'oter les couvertures. 149 152 Maniére defaire la litière. ibid. Ufage du bouchon. Quand un Cocher doit aller chez le Charron Bourlier , Sellier , Epronnier , & c. 153 Fers. 154 Clous. ibid. Maniére de tenirlespieds des chevaux pour les ferrer , & celle d'y pofer lefer. 155 157 Danger deferrer à chaud. Maniére qu'un fer doit être pofé. 159 Maniére d'ouvrir les talons d'un cheval.. ibid. Maniére de brocher. 160 1.6.1 Pinçons ibid. Crampons. Ferrure. 163 Premiereferrure des chevaux de caroffe. 164 Ferrure
LE PARFAIT COCHER , OU L'art d'entretenir & de conduire un Equipage à Paris & en Campagne. PREMIERE PARTIE.. Qualités effentielles à un Cocher. E métier de Cocher demande beaucoup de prudence , de con duite & d'exactitude. La vie de ceux qu'il mene eft entre fes mains. Que de malheurs , qui furviennent A 1. Partie.
LE PARFAIT par la faute d'une infinité de jeunes Co chers , ignorans , yvrognes , emportés , impatiens & jureurs ! S'ils fe trouvent dans des embarras , loin de penſer à les éviter ils veulent que rien ne leur réfifte . Cher chant à fe faire paffage , ils crient , ils ju ( rent , ils infultent , ils blafphément , & fouvent ils compromettent les Maîtres. Que le caroffe verfe , qu'un train man que , que des Chevaux , pour être mal conduits prennent le mords aux dents , la raifon manque à ces mauvais Cochers , & la fureur s'empare d'eux , delà il arrive une infinité de malheurs. Ainfi la patience , la douceur , la fo brieté , font des vertus , fans lesquelles un homme ne peut devenir un parfait Co cher. Ces qualités feules ne fuffifent pas , elles ne contribuent qu'à faire remplir exactement tous les devoirs de cette pro feffion ; mais il faut s'en inftruire , & pour y exceller , elle demande , comme plufieurs autres , un affez long apprentiffage. Je fçais qu'aujourd'hui l'on ne prend pas toutes les mesures néceffaires. Un jeune homme , qui veut être Cocher , fert quelques mois dans une Ecurie ; il ac compagne un Fiacre pendant quelque tems , il entre enfuite chez un Louieur de Caroffe , il y refte un an ou deux ; s'il fçait
COCHE R. une place bourgeoife qui vaque , il la po ftule , il ſe prefente , il eft reçu , le voilà revêtu de la qualité de Maître-Cocher : Eft-il bon Cocher ? c'est au Maître qu'il fert d'en décider. Un Garçon , fils d'un Laboureur , éle vé parmi les Chevaux , & qui en a conduit pendant dix ou douze ans , à la charruë ou autrement , en fervant fous un habile Co cher , le devient lui-même , quand il a fait les fonctions de Palfrenier & de Garçon ¿ d'attelage. Si pendant dix ans il a eu foin d'un Caroffe à deux Chevaux , & pen dant quelques années conduit un attela ge à fix , il doit mener en perfection. On doit préferer ces fortes de Cochers à ceux qui ont vêcu quinze ou vingt ans fans avoir manié de Chevaux. ir S! d La plupart des Cochers font Allemands , Flamands , Suiffes , Bretons ', Picards & Normands. L'Allemand panfe bien un cheval , mais en qualité de Cocher , il n'a pas la délicateffe d'un François. Ce n'eft pas le talent d'un Suiffe d'être ou bon Co n cher , ou bon Poftillon , mais bon Palfre ert C ue de nier. Le Flamand difpos , agiffant , d'un bon jugement , a toutes les qualités requi fes pour devenir un bon Cocher. Les Co chers Bretons font affez rares ; ils m ait nent vite , ainfi que les Picards , & ref ) A ij
LE PARFAIT 4 femblent en cela aux Anglois & aux Hol landois. Les Normands font foigneux menent bien , aiment le travail ; mais ce qu'on vient de dire ne fait pas une loi. Il y a de bons > comme de mauvais Cochers de tous les Pays. C'eſt par leur travail , leur affiduité , leur conduite qu'on les doit connoître. L'âge conve nable pour un Cocher , eft depuis vingt cinq ou trente ans juſqu'à foixante. On n'en veut point qui ne foit d'une figure très - apparente. Le fçavoir - faire , & les bonnes qualités du coeur & de l'efprit, font à préférer à un extérieur ſéduiſant & trompeur, Imperfections ordinaires à plufieurs Cochers. Suivant le nouveau Parfait Maréchal , duquel j'ai extrait cet article & le fuivant , un Cocher , peut avoir plufieurs imper fections , qui regardent la façon de me -ner , ou qui y ont rapport. L'impruden -ce ou le défaut de jugement en eft un confiderable ; car fi le jugement lui man que , il s'embarquera fouvent dans de mauvais pas , dont non-feulement il fe ti Ch. XXVII. pag. 168, & ſuiv.
COCHE K: 1 ce eur rera avec peine , mais qui cauferont quel quefois la deftruction de fon équipage , en brifant fa voiture , ou eftropiant les Chevaux , lui - même , ou fon Maître. Comme le jugement eft détruit par l'y vrognerie , ce vice fait encore commet tre des fautes plus grandes & plus dan gereuſes. Ily a des Cochers qui prennent de l'aver fron pour un cheval , alors le pauvre ani re les it, nt S mal eft fouetté & harcelé de façon , qu'on le met encore moins en état de faire ce qu'on lui demande , & il eft ufé bien plû tôt , que le cheval favori . Si celui qui me ne des bêtes vouloit bien ſe perſuader qu'il doit être plus raifonnable qu'elles , qu'ainfi tout ce qu'on demande à des che vaux , doit être dirigé par le jugement de l'homme , il ne les traiteroit pas com me fes égaux , en les taxant de lui défo béir exprès , d'être bien malins , & autres épitéhtes qu'il leur donne , pendant que c'eft fouvent fa faute , s'il n'en vient pas à bout. Car qu'un plus habile homme que lui monte fur le fiege , il fera tout ce qu'ib voudra de ce cheval , que fon prédécef feur ne pouvoit conduire. D'autres Cochers foüettent perpétuel lement leurs chevaux par mauvaiſe hu meur & férocité naturelle . On doit évi A iij
LE PARFAIT ter de fe fervir de ces gens-là ; car ou tre qu'un tel caractére répugne à l'huma nité , ces coups de foüet font jetter un cheval en avant ; l'effort fe fait fentir fur fes barres , & il eft fi harcelé , qu'il peut en tomber malade , ou du moins cela le fati gue & l'ufe extrêmement. Communément un Cocher de cette efpece eft d'ailleurs un très - mauvais ſujet. Le défaut le plus commun des Cochers eft d'avoir la main plus ou moins mau vaife ; ils font en quelque façon excuſa bles en cela , puifqu'ils ne fçavent pas, monter à cheval , & que cette fcience , en feignée par un habile homme , accoutume à ménager la bouche d'un cheval : c'eft fur cela particulierement qu'il eft difficile de donner des leçons par écrit. C'eft pourquoi quelques perfonnes curieuſes de leurs chevaux , & fûres d'un Domeſtique ,. lui font apprendre quelque tems à monter à cheval , avant que de le mettre fur le fiége. Cela eft très- rare dans ce païs-ci : les Allemands , à ce qu'on dit , pratiquent cette coutume , auffi les Cochers Alle mands paffent pour être les meilleurs . Des chevaux de caroffe , qui ont été quelque tems montés au manége , font bien plus agréables & bien plus faciles à mener en fuite.
Сосник . 7 Maniere d'avoir la main bonne. On dit que la main eft bonne quand on l'a douce & légére raiſonnablement. Pour expliquer ceci , il faut , felon l'Auteur du Livre que j'ai cité dans l'article pré cédent , comparer l'effet que le mords fait fur les barres d'un cheval à celui d'un morceau de fer , qui appuiroit fur vo tre doigt s'il y appuyoit toujours , il l'engourdiroit ; fi on le preffoit fort avec ce fer par fecouffes , ce feroit comme autant de coups , qui d'abord vous fe roient très - fenfibles , enfuite viendroit l'engourdiffement du doigt & l'infenfi bilité alors fi vous êtes plus fort que celui qui tient le fer , vous l'attirerez à vous malgré lui , s'il s'obftine à vou loir vous réfifter avec ce fer. Voilà l'ef fet de la main mauvaiſe , qui engourdit & ôte la fenfibilité aux barres : mais fi celui qui tient ce fer ne l'appuyoit que de tems en tems , la fenfibilité , qui re viendroit à votre doigt dans les interva les , feroit que vous en fentiriez tou jours l'effet , comme la premiere fois : voilà la main douce & legére , qui eft toujours sûre de fon effet. Il y a des Cochers , qui croyent avoir A iiij
LE PARFAIT la main légere , en ne tenant point du tout leurs chevaux , en les laiffant aller fur le nez & ſur les épaules , ils ne laiſſent pas de leur gâter la bouche ; car quand il faut réculer , ou tourner promptement , ils ra trapent leurs guides ; & comme le tems les preffe , ils donnent une bonne facca de à leurs chevaux , & à force de facca des pareilles , leur endurciffent les barres ; à la fin ils ne les menent plus que par fac cades , aufquelles les chevaux s'accoutu ment, Les Cochers , qui ont la main rude , en 、 viennent encore à ce point , en tenant les: guides toujours tendües , & s'ils ont endur ci les barres à leurs chevaux , ils s'en pren nent au mords , qu'ils trouvent alors être trop doux ; ils en demandent de plus forts , & à mesure que les barres s'endurciffent de plus en plus , ils augmentent la force chevaux ne des mords , jufqu'à ce qu'ils ayent fi bien ruiné les barres , que fentant pas plus ce qu'ils ont dans la bou che , que fi elle étoit de bois , alors ils vont à leur fantaiſie , & ils finiffent fou vent par prendre le mords aux dents , fe tuer , ou faire périr le Cocher , ou le Maître. Ce qui s'appelle la main légere , c'eft de rendre & de retenir la bride à fes che
COCHEK. vaux par un mouvement moelleux de la main , afin de rafraîchir les barres , & de leur y conferver la fenfibilité " cela de tems en tems , & point coup fur coup ; on feroit arrêter fes chevaux , s'ils n'ont point d'ardeur , & on donneroit plus d'en vie d'aller à ceux qui en ont " car cet te façon. d'agir les impatiente : à ceux-ci il faut la rendre , & retenir fi finement " qu'ils ne s'apperçoivent quafi pas du mou vement de la main. C'est ce moelleux de la main , qui fait réculer facilement , & c'eft principalement à cela , qu'on peut connoître fi un Co cher a la main douce ou non ; car l'un fera réculer ſes chevaux , fans preſque ſe donner de mouvement , & l'autre tirera par repriſe , ſe renverſera même fur fon fiége , & fe donnera bien de la peine. En fin c'eft ce moëlleux de la main , qu'il faut avoir naturellement. Il y a des Cochers , quelque bonne volonté qu'ils ayent , qui ont les refforts. de la main durs , & qui ne peuvent at traper ce moëlleux comme d'autres , quel ques efforts qu'ils y faffent : mais s'ils y effayent , ils en vaudront toujours beau coup mieux. Les perfonnes que cette matiere inté reffe, ou qui auront la curiofité de fça
10 LE PARFAIT voir tous les devoirs d'un Parfait Cocher vont juger par le détail où je vais entrer , qu'il n'y a qu'un homme entendu , de bonnes mœurs , & qui aime fon état , qui puiffe s'en acquitter dignement. Suivons le dans tous les differens exercices. Uftenciles néceffaires dans une Ecurie. La premiere chofe à laquelle un ha bile Cocher penfe , eft d'avoir dans fon Ecurie de bonnes étrilles ( celles d'An gleterre paffent pour les meilleures ) des brofles de poil de fanglier , des épouffétes, des peignes de corne , des éponges , un couteau de chaleur. Ces uftenciles doi vent au moins durer fix mois. Pour bien panſer un cheval , il faut que l'étrille foit bonne & bien féche , ainfi que la broffe. En hyver on doit avoir ſoin de les mettre l'une & l'autre dans un lieu fec. Une petite lime à trois quarres eft néceffai re pour limer les dents de l'étrille de tems en tems. Il faut auffi ratiffer fouvent les couteaux de ladite étrille pour en ôter la roüille , ou pour empêcher qu'il ne s'en faffe : Le fer attire l'humidité , & prend la poudre & la craffe , qui fort du poil
с OCHER. II c'est ce qui cauſe la roüille , qui s'atta che au-dedans & au-dehors de l'étrille, Les dents même s'en rempliffent , & il eſt impoffible de bien panfer un cheval : car comme on ne peut fe fervir d'un peigne plein de craffe ; il en eft de même d'une étrille roüillée & d'une broffe pleine de craffe . Les épouffétes doivent être de fil & laine , ferrées , fortes , & de demi- aul ne chacune ; il faut avoir foin qu'elles foient toujours nettes & féches. Pour les peignes de corne , l'éponge & le couteau de chaleur , un Cocher n'a pas besoin d'in ftruction ; il ne faut pas un grand diſcer nement pour faire de pareilles emplettes. Les autres uftenciles font des balets de bouillot pour l'Ecurie , outre ceux de jonc , qui fervent à laver les jambes & les pieds des chevaux des couvertures de cheval , un marteau , des pinces pour le befoin, une broüette pour ôter le fumier , & enfin tout ce qui a à du rapport avec le panſement , l'entretien , & la nourriture du cheval. Heure d'entrer dans l'Ecurie 1 Un Cocher , s'il eft feul , ou ceux qui font chargés de panſer les chevaux , com
12 LE PARFAIT 1 res & demie , à moins que quelques affai res particulieres n'y obligent. Depuis on ze heures du foir , jufqu'à cinq heures du matin , c'eft le repos du cheval , & 522 3 me les Palfreniers , doivent fe lever le plus matin qu'ils peuvent ; mais foit en été foit en hiver , il ne faut point entrer dans l'Ecurie avant cinq heures , ou cinq heu l'interrompre fouvent dans fon fommeil , ce feroit altérer fa fanté. Il y des Cochers qui font d'une lon gueur extraordinaire à panfer des chevaux. Tout bon Cocher , Palfrenier , ou Pof tillon , n'y employe qu'une demi - heure par chaque cheval. Toutes fortes d'en droits conviennent , quand ils ne font point exposés au foleil & à la pluie. On entend par panfer un cheval , l'étriller , luï qu me bea CO bo qu'un cheval eft malade , ou bleſſé , c'eſt du Maréchal. pa te Ce qu'ilfaut faire dans l'Ecurie avant que de panfer les Chevaux. La premiere choſe qu'on doit faire en entrant dans l'Ecurie , eft , s'il refte du foin de la veille , de l'òter de l'atelier , & de donner l'avoine aux chevaux . Il y a des Cochers qui ne la donnent , qu'après qu'ils 2LIRE 28 2 & SEE faire le crin , le broffer , &c. Mais lorf qu pe ret av ful ga def
lus té , ans eu Fai on ures & zil , On LUX of ure en ont On lui orf 'eſt ant COCHER. 13 les ont panfés . Pendant qu'ils la mangent, on ôte la paille la plus blanche de deffous lamangeoire , & on la garde pour faire la litiere du foir : on tire enfuite le fumier > qu'on met dans un lieu deftiné pour cela , & on balaye l'Ecurie. Il feroit cependant à propos de ne faire cet ouvrage , qu'a • près que les chevaux ont mangé leur avoi ne, parce qu'ils profitent davantage, quand onles laiffe manger tranquillement. Maniére d'étriller. Quand tout eft rangé dans l'Ecurie , & que les chevaux ne mangent plus , on leur met le bridon pour les faire fortir , s'il fait beau , finon on les laiffe dans l'Ecurie , ou on les mene dans quelque lieu couvert. On commence par les bouchonner avec un bouchon de paille > on les épouffete par tout le corps ; on prend enfui te l'étrille de la main droite , & tenant la queuë de la main gauche proche de la crou pe , on appuie l'étrille en la pouffant & la retirant toujours de même , en allant en avant jufqu'au haut de la tête. On paſſe en fuite l'étrille de la main droite à la main en oin de Hes ils gauche,pour revenir tout le long du corps, en allongeant le bras deffus & deffous , deffous & deffus , en recommençant trois ou quatre fois de la queue à la tête , & de latête à la queue des deux côtés.
LEPARFAIT 14 Manière de fe fervir de l'Epouffetes de la Broffe , & de l'Efponge. Quand le cheval eft bien étrillé , on prend l'épouffete que l'on paffe fur tout le corps du cheval depuis la tête jufqu'à la croupe. Chaque fois on doit effuyer le cheval à couche- poil, en commençant par la tête , & finiffant par la queue. Après l'épouffete on prend la broffe. La maniére de s'en fervir eft de broffer le cheval à ré broufle - poil en montant de la queuë à la tête deux ou trois fois de fuite , de chaque côté du cheval . Quand il a été bien brof fé , on paffe encore l'épouffete. Quant à l'éponge , elle doit être moüillée , on la paffe fur la criniére, la croupe, & la queuë du cheval. Mais le Cocher ou Palfrenier doit avoir d'une main l'éponge , de l'autre le peigne , pour éponger & peigner en même tems. 11 eft indifférent de quelle main on ſe ſerve de l'éponge & du peigne, on éponge en tout fens. Examen des pieds des Chevaux. En vifitant les pieds du cheval , ce n'eft pas affez de voir s'il y manque des clous , il faut encore examiner , fi les clous ont leurs rivets ; c'eft à quoi beaucoup de Co chers ne font pas d'attention. 1
COCHER. 1 S'il fe trouve de la craffe dans les paturons on l'ôte avec un bouchon de paille on graiffe la couronne du pied , avant que de laver le poil des jambes , & on le fait avec une éponge , trempée dans un ſeau d'eau claire. Pour la queue du cheval on la moüille tous les jours jufqu'à la croupe, dans un feau , de façon qu'elle trempe pour la laver. On ne doit point peigner la queue d'un cheval , ou fi on le fait , on doit s'y prendre de la façon fuivante. Maniére de peigner la queuë d'un che val. Un Cocher doit avoir un peigne à grof fes dents pour peigner la criniére du colet, & la queue , mais celle- ci feulement deux ou trois fois par mois. Pour peigner la queuë d'un cheval, fans en arracher le crin, on la prend par cordons de la main gau che , on en fait deux ou trois tours : de la droite on peigne cordon à cordon en com mençant par le petit bout , &reprenant deux ou trois fois le même cordon , en tournant toujours les crins autour de la main, autant qu'il eft poffible, pour les fer rer bien fort. Quand toute la queue eft pei gnée decordon à cordon , il la faut pren dretoute entiere , ou en deux fois , fi elle .
16 LE PARFAIT eſt trop touffu touffuë , & on finit de la pei gner , en commençant toujours par le bout. Il eft de l'honneur d'un Cocher de con ferver la queuë de ſes Chevaux , & de la maintenir belle , lorſqu'ils l'ont. S'ils n'en ont point , on tache de la leur faire venir ; ! ce qui demande beaucoup d'attention , & de fujetion. La plupart des jeunes che vaux de caroffe ont la queue belle ; mais s'ils tombent entre les mains de gens qui ne fçachent pas la leur conferver , ils l'ont bientôt perdue. On ne la doit peigner que deux ou trois fois par mois , c'eft- à- dire , tous les dix jours , & à toutes les nouvel les Lunes , on en coupe de la longueur , & de l'épaiffeur d'un pouce. Le peigne dont on fe fert , doit avoir toutes les dents, fans qu'il y en ait de fenduës , crainte d'ar racher , & de déchirer la queue des che vaux. Pour que le peigne paffe plus aifé ment dans les crins, on y met un peu d'hui le d'olive entre les dents. Maniére de trouffer la Cheval. queue d'un Il y a plufieurs manieres de trouffer la queue d'un cheval. Les uns la trouſſent avec des Trouffe-queues, d'autres à la Paï fane L
TABLE Ferrure des pieds fans défaut. Ferrure pour empêcher l'encaftelure. Ferrure des chevaux encaftelés. Ferrure des piedsplats. Ferrure despieds combles. Ferrure des chevaux , qui fe coupent. Ferrure des chevaux quiforgent. Chevaux quife déferrent. Chevaux difficiles àferrer. Ferrure contre les clous des rues > ou cots. Autres Ferrures. XXV 165 166 167 169 ibid + 171 173 174 175 chi 176 177 Ce qu'il faut faire aux chevaux , qui ont les 180 piedsmauvais. Un Cocher doit en Campagnefaire éviter autant qu'il peut le pavé àfes chevaux. 181 ibid. Défauts des petits pieds. Maniére de conferver la corne.. Maniére de couper la corne. 182 183 Maniére de dreffer les chevaux de caroffe. 184 Second , troifiéme , & quatriéme exercice. 185 Exercice du caroffe. 187 Tout dépend des commencemens pour bien ibid. dreffer des chevaux, Maniére de corriger des chevaux , qui jet 188 tent du derriere. Chevauxfaciles à dreffer. ibid.
XXVI TABLE Chevaux mal dreffés. 189 Maniere de corriger les chevaux. ibid. Maniere defaire réculer des chevaux opi niâtres. 190 Chevaux bons à mettre au caroffe aprèsfix 191 ou huit jours d'exercice. Maniere de mener des chaifes à Paris & aux environs. 192 Maniere de mener une chaife de poſte. 193 Maniere de charger & de mener une cha rette. 196 Palfreniers. 198 ibid. Devoirs des Palfreniers. Inftrumens du Palfrenier. Ecurie. Meubles d'Ecurie. 205 207 210 Proportion des places de chaque cheval dans une Ecurie. 213 Uftencilles néceffaires dans une Ecurie. 214 Dans la feconde Partie . Connoiffance des chevaux de caroffe nécef faire à un Cocber. 217 Maniere de connoître un beau cheval, 218 219 Figure des chevaux de caroffe. Maniere d'appareiller des chevaux de Ca 220 roffe. 221 Effai des chevaux de Caroffe. 222 Chevaux de Chaife.
TABLE XXVII Autres chevaux de tirage. 223 Difficulté de mener un cheval fort en bouche 6 avec un autre qui ne l'eft pas. 224 Inconvenient des chevaux qui ont la langue groffe & longue. 225 Fineffe de ceux qui contre-marquent les Che vaux. 226 Autres fineſſes. 227 Maniere d'examiner un cheval de Caroffe 1 avant que de l'acheter. 232 Mefure & taille des chevaux de Caroffe & autres . 232 Allures des chevaux de Caroffe & autres. f 234 Beaux chevaux connus à l'œil , & les bons au travail. 225 Maniere de connoître l'âge des chevaux. ibid. Maniere deconnoître des chevaux quand ils 20 21 ne marquent plus. 245 Chevaux qui marquent toute leur vie. 246 Poils. 247 Differens pails des chevaux. 248 Explication de toutes les parties extérieures du corps d'un cheval. 249 &fuiv. Maniere d'examiner les yeux des chevaux . Chevaux lunatiques. 252 ibid. Chevaux qui ont un dragon. 253 Maniere de connoître un cheval aveugle. ibid. i ij
XXVIII TABLE Chevaux qui ont des fluxions. Chevaux ombrageux. 254 ibid. Nazeaux , bouche , &c. 255 &fuiv. Défauts qui fe trouvent auxjambes des Che vaux. 260 Maniere de tâter les jambes des chevaux. 261 Differens maux qui viennent aux jambes ibid. des chevaux. Autres maux de jambes , qui rendent des 264 chevauxpeu propres au caroffe. Manierede connoître quand un cheval boite . 265 Défauts que peuvent avoir des chevaux à 266 différentes parties du corps. Défauts qui rendent la bouche d'un cheval 268 mauvaife. ' Défauts généraux qui peuventfe trouverfur toutes les parties du corps d'un cheval. 269 Marques quifont juger de la bonté des che vaux. ibid. Differentes efpéces de chevaux. Chevaux Allemans. 277 ibid. Chevaux Anglois. Chevaux Barbes. Chevaux Danois. 273 274 275 276 277 278 Chevaux d'Espagne. Chevaux de Flandres & de Frife. Chevaux Hollandois.
TABLE Chevaux Hongrois. Chevaux Napolitains. Chevaux Piedmontois . Chevaux Polonnois. XXIX ibid. 279 280 281 ibid. 282 Chevaux Rouffins. Chevaux Suiffes. Chevaux Turcs. Chevaux de France. Chevaux Bretons. Chevaux de Franche-Comté. Chevaux Gafcons. Chevaux Limofins. Chevaux Normans . Chevaux Poitvins. Chevaux Picards. Chevaux Bourguignons . 283 384 285 ibid. 286 287 288 ibid. 289 290 Endroits d'où l'on tire les chevaux de Ca roffe. 291 Dans la troifiéme Partie.. Inftructions aux Cochers fur les maladies des chevaux. 293 Abcès. 295 Arrêtes. 296 Atteintes. ibid. Avant-cœur. Avives. 297 298 299 Bleymes. Boutons fous la fole. 301 i iij
XXX . TABLE Breuvages , Armand , Gargarifme & Bil ibid. f lots. Brulure. 303 Cancer ou chancres , & cancer à l'œil. ibid. Capelet. Carie. 30 ibid. 307 Cerifes. Charges on Cataplafmes , Emmielures, Em 308 plâtres blanches ou Remolades. ibid . Clous des rues & chicots. € Cirons. 312 ibid . Conftipation. Cors. 303 Coupsfur lesyeux. Courbature. Courbe. 314 315 316 Crampe. Crapaudines. Crevaffes. Dartres. 317 318 ibid. Dégoût des chevaux. Démangeaifons. Defcente ou hernie. Deffoler. Devoyement. Diflocation . Dragon. Eaux. Eaux rouffes. Ebulition. 320 321 322 323 ibid. 324 325 326 ibid. 327 327
TABLE Ecart ou effort d'épaule. Ecorchure des harnois. Effort de reins. Encaftelure. Encheveftrure. Encloueures & Retraites. Entorfe. Epilepfie. Erefipelle. Efparvin. Etonnement defabot, Etranguillon . Faim canine. Faim-vale. Farcin. Fatigue & Fortraiture. Fife. Fievre. Fiente. Fiftule. Flux d'urine. Fluxions & enflures . Forme. Fourbure. Fracture. Fufée. Galle. XXXI 329 330 337 332 333 334 335 336 337 338 ibid. 339 340 ibid. 351 342 343 6 ibid. . 344 345 346 ibid. 347 348 349 ibid. Gangrene. Gourme. 350 351 352 Grasfondure. 353
XXXII TABLE Hemoragie. Hydrocelle. ibid. 354 255 ibid. Jardon. Javard. Jauniffe. 356 ibid. Lampas. Létargie. Morfondure. Morfures des bêtes venimeufes. Mules traverfieres. 358 ibid. Nerferrure. Palpitation de cœur. Peignes & mal d'âne. 359 361 ibid. 357 ibid. Pouffe. Retention d'urine . 362 363 364 ibid. Seime. Solbature. Suros. 365 ibid. Tayes. Teignes. 366 ibid. Tenefme. Tiq. Toux. Tranchées. 367 368 ibid. Variffe. Verrues. 369 370 ibid. DEL Vertigot Veffigons. Ulceres. Urine · Fin de la Table, 371 ibid.
COCHE K. 17 fane , ceux- ci à la Turcque , ceux- là 1 à la Cravate , & chacun enfin à fa mode. Mais là meilleure façon de trouffer les crins de la queue d'un cheval , eft celle des facs ou bourfes , qui les confervent. Les au " tres maniéres font perdre les crins de la queue des chevaux , ou du moins les rom pent . En été on met des enchapelures , ou un grand morceau de cuir deffus les grands: ardillons de reculemens du harnois , parce que les chevaux portant leur queüe à droit & à gauche , les crins s'acrochent aux ar dillons. Il faut auffi prendre garde que les ardillons des petites boucles ne de bordent les boucles à raifon des crins qui s'y accrochent.. Maniére defaire le Crin des Chevaux. Pour faire le crin aux chevaux on doit couper de près fes ongles. Il y a des chevaux qui ont l'oreille fi chatouil leuſe , & la peau fi delicate , qu'ils ne peuvent fuporter la dureté des ongles , lorfqu'on leur tient , ou qu'on leur ferre les oreilles. 11 eft difficile de faire le crin à ces fortes de chevaux , & un Co cher ne doit pas s'impatienter. On doig faire le crin tous les huit ou quinze jours I. Partie.. B.
18 LE PARFAIT un cheval en paroît d'avantage. La premiére fois qu'on fait le crin a de jeunes chevaux , qu'on les fait fer rer , qu'on leur donne le mords d'Alle magne , ou le croche-nez , fi le Cocher 2 ou le Palfrenier les brutalife , il les ren dra difficiles à manier. Il en eft des chevaux comme des hommes , il les faut traiter avec douceur dans le fervice qu'on en exige. La bonne façon de gou verner les Chevaux dépend des com mencemens. Si ceux qui les manient font doux , les Chevaux deviennent traitables. S'il y a des Chevaux furieux , & diffi ciles à dompter, c'eft que d'abord ils ont eu pour les panſer des hommes brutaux & emportés, on pourroit même dire irrai fonnables. 1'44. Maniére de faire croître le crin du Colet & de la Queüe . Pour faire croftre le crin de la queüe d'un Cheval , il y en a qui la trempent jufqu'à la croupe dans un feau plein d'eau ; mais la trop grande fraîcheur en gendre l'humidité , & l'humidité conti nuelle pourit les crins , ou les rend fi tendres , que la moindre chaleur les dé feche , & ils tombent en quantité. Si 1 "
E4 I 1 C COCHER. 19 l'on veut entretenir la criniére d'un Che val , foit du colet , ou de la queüe , on doit prendre un feau d'eau de riviere , de fontaine ou de ruiffeau , pourvû que ce foit à cent pas de la fource , & point d'eau de puift , parce qu'elle eft trop aride. On verſe cette eau dans un chaudron de fer fondu , on y met trois ou quatre poignées de feuilles de noyer , deux poi gnées de feuilles d'oignon de lys , cinq ou fix oignons blancs , & une livre de miel commun. On fait bouillir le tout jufqu'à la réduction des trois quarts , on laiffe refroidir cette lefcive. On la cou vre avec deux ou trois doubles de toile pendant l'espace d'une heure. On la verſe dans un vaiffeau de grais. On prend les crins d'une main , qu'on éleve à fa hau teur. On met dans cette lefcive le coüard de la queue , où on veut faire venir du crin. On reïtére ce rémede deux ou trois fois par ſemaine , le foir on le fait avant que de donner l'avoine au cheval. Caufes de la perte du Crin des Chevaux. Les chevaux perdent leur crin par deux cauſes , foit par la gratelle , ou pour être trop fouvent & trop mal peignés, On Bij
20 LE PARFAIT a parlé ci- deffus de la maniére de pei gner les crins des chevaux , & quand il le faut faire " c'est une chose qui ne dé pend que de la volonté d'un Palfrenier > ou d'un Cocher attentif. Pour la gratelle , qui caufe la perte du crin des chevaux je me referve à dire , ce qui la produit , & les rémedes , qu'il y faut apporter quand je parlerai en abregé des maladies des chevaux. Maniére de faire le Poil des Jambesə . Pour bien couper, & faire le poil des jam bes des chevaux , & celui du tour du pied , qui couvre le fabot , on décharge le patu ron de la trop grande quantité de poil afin qu'il n'y ait point d'amas de craffe. Il y a des chevaux qui ont le fanon fr long qu'ils en battent le pavé , on le doit auffi décharger. Il faut néceffairement décharger les 3 pieds , & les jambes des chevaux , qui font fujets a avoir beaucoup de poil : rien n'eft fi mal-propre ; pour cet effet on le coupe , ou on l'arrache. Ceux qui le coupent , le coupent à couche poil , c'eft à - dire en defcendant , ainſi qu'un Perruquier qui fait les cheveux .. On le coupe de maniére qu'il paroiffe
COCHE R. 21 ! 1 3 ' être point coupé , non plus que f c'étoit un poil naiſſant . Pour le fanon il doit être en pointe T & de la longeur du travers de quatre ou cinq doigts. Le poil de la couronne dư pied ne doit anticiper fur la corne , que d'un travers de doigt , & toujours il le faut couper en longeur , & jamais en travers. Avec ces attentions les jambes d'un cheval paroiffent belles & bonnes , ainfi que le pied , s'il eft bien ferré , quand même il feroit mauvais , car cette pro prété en cache les défauts. Maniére de rogner la Corne. Quand les crins du colet & de la queüe font bien peignés , on les lave avec une éponge trempée dans un ſeau d'eau claire , ainfi que la croupe , & tout le corps du cheval , fur lequel pour la der niére fois on pafle l'épouffete. En la vant les+9 pieds des chevaux , on regarde s'il n'y manque rien , fur tout s'il ne faut point leur rogner la corne. Lorſque la corne , ou fuperficie croît trop , & fur paffe le fer , on les doit couper avec un rogne-pied , de maniére que le fer foit découvert d'un peu plus de demi-ligne. C'est une neceffité que la corne foit cou
22 LE PARFAIT pée , à mesure qu'elle croît , pour empê cher qu'elle ne fe fende , & ne s'éclatte par morceaux , ce qui fait un très-mau vais effet. Maniére degouverner les Jambes , & les Pieds des Chevaux. Pour conferver les jambes & les pieds des chevaux , il faut , le moins qu'on peut les mener à la riviere. Cette eau n'a ni vertu ni proprieté pour les jambes , & les pieds des chevaux. Cependant ceux qui font dans le voifinage des riviéres ont la mauvaiſe habitude de les y mener deux ou trois fois par jour , quelque fois même en les ôtant du caroffe , & lorfqu'ils font encore échauffés , ce qui eft très- dangereux , puifqu'il leur en vient des tranchées , qui ſe convertiffent en tranchées rouges , & fouvent ils en meurent. En effet en menant les chevaux à la ri viére , lorfqu'ils font échauffés , l'eau qui eft froide leur glace le fang , & les nerfs , qui fe retirent , fe ruinent totalement. Le fang échauffé , qui fe congéle par la fraî cheur de l'eau , fe corromp dans la fuite; il en deſcend dans les jambes des ſero fités en forme d'eau rouffe , qui prennent
E COCHER 23 Teurs cours par les paturons des pieds.. De plus quand on mene des chevaux échauffés à la riviere , le fang qui ſe reſ fent de cette fraîcheur remonte tout à coup . Le pied, faute de chaleur, s'altére & s'éfeuille , la corne ne croît preſque point , ce qui la fait éclatter & tomber par morceaux . Eau de puift bonne pour laver les Jam bes & les Pieds des Chevaux T échauffés. ľ Lorfque des chevaux font échauffés , un Cocher entendu , avec un bouchon de paille effuie les jambes & les pieds de fes chevaux , pour ôter l'humidité qui fort par la fueur ; enfuite il fe fert d'un balet de jonc trempé dans de l'eau de puiſt. Cette eau , quoique fraîche , ne croupit point; elle ne fait que paffer & coule en bas. Il prend enfuite une éponge , dont il fe fert pour ne point laiffer d'eau ni fur le corps , ni aux jambes , ni aux paturons. Il y a deux mois dans l'année au plus , où on peut mener les chevaux à la ri viére après le foleil couché , comme pour leur faire prendre une espece de bain. Alors on les fait entrer dans l'eau , juſqu'à
24 LE PARFAIT mi-ventre. On les y laiffe l'efpace d'ur quar-d'heure fans remuer.On les réméne enfuite doucement dans l'écurie, Ces deux mois font Juillet & Août. Nourriture du Cheval La meilleure nourriture du cheval eft le foin & l'avoine. Quand il en mange plus qu'il ne faut , cette nourriture lur devient contraire. La paille de froment fraîche affermit le coeur du cheval , & le fait vivre long-tems. On lui doit diftribuer avec prudence l'avoine , & le foin & le régler & nourrir fuivant fon tempera ment , fon appetit , fa délicateffe , & le travail qu'il fait.. Maniére de traiter les Chevaux gras. ¦ Si des Chevaux gras ne travaillent point , on leur donne à manger , ou à tirer de bonne paille de froment jufqu'à dix ou onze heures , qu'on leur donne une botte de foin , pefant neuf à dix li vres. Après midi on leur donne l'ordi naire d'avoine. Il y a des Cochers qui ont l'habitude de faire boire les chevaux avant dîner ; cela eft bon quand les che yaux ont travaillé dans la matinée. Mais plu
COCHER. 25 plufieurs ont rémarqué , qu'un cheval qui ne bûvoit qu'après fon dîner , profitoit beaucoup plus que celui qui bûvoit auparavant. Manière d'engraiſſer un Cheval de Caroffe. Pour engraiffer un cheval de Caroffe ; il faut le faire boire après tous les répas. On lui doit donner l'ordinaire du foir plus forte que celle du matin. Pour cet effet on prend fur celle du matin pour le foir , & on ne touche point à celle du midy. Mais il y a du danger qu'un cheval ſoit toujours gras, il ne peut gueres travail ler. Si on le preffe c'eft un cheval perdu , & il meurt, fi on ne fçait pas le bien gou verner. Les chevaux gras ne font pas bons pour les voïages , à moins qu'ils ne foient entre les mains d'un Cocher fage & pru dent , qui fçache & les gouverner , & les nourrir comme il faut. Un cheval en、 graiffé de foin eft de mauvaiſe graiffe. Elle eft molaffe , fpongieufe , & le fond facilement au travail . Čes fortes de che vaux dans la moindre fatigue écument de füeur. Ils font fujets aux tranchées , aux avives , à la foulûre , & aux gras fondû C I. Partie.
26 LE PARFAIT parce que leur graiffe eft plus échauffée ; que celle d'avoine & de paille. La graiffe d'avoine & de paille eft ferme , rend les chevaux frais & vigoureux ; quoi qu'ils travaillent beaucoup , ils füent très peu , & n'étant pas fi fujets à des maladies , ils font toujours en haleine , & prêts â travailler. Chevaux qui mangent lentement. Il y a des chevaux qui mangent len tement , parce que leurs dents deviennent pointues , ce qui les empêche de mâcher , & les rend longs à manger. Il faut que le Maréchal caffe ces fortes de dents poin tuës avec un ferrement fait exprès , & qu'il faffe ronger au cheval une groffe lime quarrée pour achever de leur unir les dents, afin qu'elles puiffent porter les unes fur les autres , fans cela il eft impoffible qu'un cheval puiffe mâcher , ni manger prompte ment , & par cette incommodité , quand on n'y remedie pas , il y a des chevaux qui periffent. Chevaux qui mangent ensemble. Il eft de la derniére confequence de prendre garde , fi deux chevaux , qui man gent enſemble leur avoine la mangent éga
COCHER . 27 lement , c'eft- à - dire auffi vîte l'un que l'autre. Car fi l'un des deux mange plus promptement , l'un fubfiftera & l'autre périra; fi on n'y remedie , il y a des che vaux qui periffent. Maniére de gouverner les Chevaux gourmands. Un cheval gourmand doit mangerfeul , à moins qu'il n'ait un camarade auffi gour mand que lui. Les chevaux gourmands font plus gras que les autres , & s'en tretiennent toujours bien ; on les , pré fére aux autres , mais ils font fujets à devenir pouffifs. Pour l'ordinaire ils tra vaillent bien , mais ils font peu pro pres à la courfe. On les doit ménager qnant à la nourriture. Les chevaux gour mands deviennent pouffifs par plufieurs, maniéres en mangeant tant qu'ils veu lent, en travaillant au - deffus de leurs for ces : & en mangeant trop de foin , & ne faiſant point d'exercice , & par le grand âge. Un cheval bien nourri , & ménagé dans l'exercice ne devient jamais pouffif. Le trop de boiffon eft contraire aux che vaux. Les chevaux de Caroffe vont mieux & plus légérement , quand ils mangent peu de foin. Dès qu'onvoit la moindre apparence de Cij
28 LE PARFAIT pouffe dans un cheval , on doit lui re trancher le quart du foin , qu'il a coutu me de manger : fi la pouffe augmente , on en rétranche la moitié , fi elle continuë on la rétranche tout à fait. C'eſt folie de faire travailler un cheval pouffif , fouvent il ne le devient que par le trop de travail. Maniére de gouverner les Chevaux délicats, Lorfque dans une écurie on a des che vaux difficiles & délicats fur la nourri ture , on doit s'en défaire , fi ce font de mauvais chevaux. S'ils font bons , & de bonne volonté on les ménage dans le tra vail , car les chevaux délicats pour la nourriture le font auffi à l'ouvrage. On doit prendre garde fi ces fortes de che vaux n'ont point à la bouche des barbes & des furdents, Les furdents font des dents pointues , qui viennent en pointe de diamant , & qui les empêchent de man ger. Comme je viens de le dire plus haut , on les méne à la forge , pour que le Ma réchal les caffe avec une machine faite exprès. Les barbes font des fuperfluités de chair , qui croiffent fous la langue attachées aux barbouchets , ou machoire inferieure. Ces fortes de barbes font fai
COCHER : 29 tes en façon de langues de Carpes , & d'un rouge couleur de cériſe. Le Ma réchal les coupe avec des cifeaux , & leur met dans la bouche la même machine , dont il fe fert après avoir caffé les ſur dents. Les barbes empêchent les chevaux de boire , & font une marque qu'ils ont le gozier échauffé , fouvent même la poi trine & le foye. It eft à propos de leur donner alors du fon en pelotte , de leur ôter l'avoine , de leur choifir le meilleur foin , & de les faire boire à l'eau blanche. Lorfqu'on a plufieurs chevaux délicats 'dans une écurie , on les fait manger les uns avec les autres , cela excite leur ap petit. Mais pour l'ordinaire de l'avoine , chaque cheval doit féparement manger fa ſa portion. En choififfant la meilleure nour riture pour les chevaux délicats , on ne doit la leur donner qu'avec prudence . Ils fe dégoutent facilement , & il faut fou vent changer leur nourriture, c'est- à - dire, tantôt après le foin donner la paille , & tantôt après la paille donner le foin. Quand les chevaux délicats ne travail lent pas , on leur met un maftigadour pour leur donner de l'appetit , car l'agi tation de la langue autour du maftigadour leur fait diftiller des eaux du cerveau , & leur donne de l'appetit . S'ils font dé Ciij
LE PARFAIT ვი goutés , on prend un peu d'ail pillé avec du fel , du verjus , & de la fuie de che minée , environ la quantité de huit prifes de tabac , on pile le tout enfemble , on le mêle dans un linge , que l'on entortille autour du maftigadour. Cela éguiſe l'ap petit des chevaux , & les engraiffe. Maniére de gouverner les maigres. Chevaux Il y a des chevaux , qui pour peu qu'ils travaillent font toûjours maigres. Le foin ne leur eft pas contraire , & fi la paille ne les accommode pas , une bonne ordinaire d'avoine leur fait plaifir. Ils font maigres parce qu'ils font d'un temperament fec & qu'ils ont le coeur , les poulmons , la ratte , & particuliérement le foix chaud. On nourrit ces fortes de chevaux de foin de bas pré , on leur donne peu de paille , mais on leur donne une bonne ordinaire d'avoine , mêlée d'un peu de fon de fro ment , mouillés enfemble ; ce que l'on fait trois fois le jour , & fi long tems qu'on veut. " Quand des chevaux ont quelque courſe extraordinaire à faire qui les échauffe , & les fait füer , on leur donne de bon fon de froment détrempé dans de l'eau raffile,
COCHE R 3x c'est-à-dire , vieille tirée du puît , fi c'eſt en été ; en hyver, l'eau nouvellement pui L'ordinaire d'un fée eft la meilleure. cheval de Caroffe eft un boiffeau d'avoi ne , meſure de Paris , partagée en trois tiers , pour les trois répas de la journée.. Le foir l'avoine eft meilleure que le ma tin. Pour cet effet on n'en donne le matin 1 qu'une mefure raclée , à midy une me fure & demie , & le foir autant. Quand les chevaux fatiguent il n'y a point de danger à leur donner une ample meſure. Pour le foin, trois bottes par jour, pefants dix livres , fuffisent pour deux chevaux & autant de paille. La pointe des herbes au printems , la chûte des feuilles en au tomne rendent les chevaux moux . En hyver & en été ils font plus guais. Un Cocher propre avant que de donner l'a voine aux chevaux la nétoye ; fi le foin 1 eft poudreux il le délie , & le fecoüe , le rélie pour le mettre dans le ratelier , crain te qu'en le mangeant ils ne le failent tom ber deffous leurs pieds. On ménage l'a voine & le foin , mais on n'épargne pas la paille. Elle rend les chevaux legers , fermes & vigoureux , les engraiffe , & de plus elle fert à faire la litiere. C iiij
LE PARFAIT Maniére de traiter les Chevaux qui écrafent des araignées dans leur bouche , en mangeant l'avoine , le foin , ou la paille. De tems en tems on doit ôter les toi les d'araignées , qui font au deffus du ra telier , crainte que quelques araignées ne tombent dans l'avoine des chevaux , quand ils mangent , car elle eſt un demi poifon. Si par hafard les chevaux en avaloient ils tomberoient dangereuſement malade. Uu cheval qui écrafe l'avaler eft dégouté , reufe , & amére , ne manger. On lui doit une araignée fans a la bouche glai peut ni boire ni gargarifer la bou che avec du vinaigre , de l'ail ,' du fel pilé , mélé enſemble. On reïtére ce réméde deux ou trois jours foir & matin , & à midi. Pendant ces trois jours on lui don ne de bon fon de froment. " Qualités des Avoines , Pailles , Foins & Sainfoin . AVOIN E. Ce n'eft pas affez pout un Cocher de fçavoir la maniére de nourrir ſes chevaux , il eft bon qu'il fe connoiffe en avoine paille , foin & fainfoin
СоснË R : ལྟ Les avoines de Champagne font les meilleures pour la nourriture des che vaux. Celles de Picardie , du Païs-Vexin , de l'Ile de France, font encore très-bon nes. Celles de Normandie ? Beauce Brie , Bourgogne , le font beaucoup moins. L'avoine de Champagne eſt toute noire. Celles du Païs François & de Pi cardie font griſes ; c'eſt-à - dire de trois grains , il y en a un noir , & les deux autres font gris. Celles de Champagne font plus farineufes , & plus favoureu Les au goût. On ne les coupe point , qu'elles ne foient bien mûres , & on ne les réleve de terre , que quand il a plû deffus , c'eft ce qu'on appelle Javelé. Quand on les ramaffe,il y en a de germées, & elles ont jetté leur feu , avant qu'on les mette dans la grange. Quand les avoines font réfferrées , fi l'on n'a pas le foin de les rémuer de tems en tems , elles s'échauffent , perdent leur chaleur naturelle , n'ont plus de fuc , de viennent puantes & améres. Lorfque l'avoine eft échauffée , elle eſt blanche. Quand elle ne l'eft point, elle eſt noire. On connoît l'avoine échauffée par la mauvaiſe odeur , & par une certaine graine nommée vefferon. On apelle avoine faite & bien cueillie
LE PARFAIT 34 des avoines qu'on laiffe venir en parfaite maturité , & qu'on laiffe après les avoir coupées , douze ou quinze jours , cou chées fur la terre , & jufqu'à ce qu'il ait plû deffus , afin d'éteindre fon premier feu. Il y a des laboureurs , qui coupent leurs avoines avant qu'elles foient mûres , & les enferment fur le champ , mais ils ne recueillent qu'une avoine féche & éthique. PAILLE. La meilleure Paille eft celle de fro ment. Ce n'eft pas celle qui croît dans les terres graffes de fumier. Les bleds , qui viennent dans ces fortes de terres font ordinairement verfés , & la Paille n'en vaut rien pour la nourriture des che vaux . Si le froment , qui croît dans les terres fumées,ne verfoit point , la Paille en ſeroit fort bonne , mais elle cft toujours fi groffe , fi grande , que les chevaux n'en peuvent manger. La bonne Paille de froment , doit être blanche , menuë , courte , & nouvelle ment battue. Chaque brin de Paille doit porter fon épy , garni de toutes les mal filles. De pareille Paille eft bonne & croît dans une terre forte , & fans fumier. On
te -ir =; s 9 COCHE R. 35 connoît la Paille de froment , qui a cru dans des terres graffes , d'avec celle qui provient de terre maigre , en ce qu'elle eft noirâtre , grande , & qu'elle a de pe tits épys . La Paille de froment , qui croît aux. environs de Paris , n'eft pas la meilleure , à caufe des immondices 9 que l'on met dans les terres. Les meilleures viennent de Mont - rouge , Chatillon 9 Sceaux , Bourg - la - Reine , Palaiſeau , Autouy Longjumeau , Montlery , Linas , la Val lêe de Choifi , Ville-neuve- le Roi , Vi try, Nogent-fur- Marne , Bourg- de- Chel les , Chais , Dammartin , Boify & autres Villages circonvoifins. Celles de Ville Juif , Juvily , Ris , Yvry , Charenton, la Plaine de Creteil , la Plaine St. Denis ,. du Bourget , Vertus , la Villette , & Pan tin ne font pas fi bonnes. Tous les chevaux mangent de la Paille , & bien fouvent on ne leur donne pas le tems de la tirer. La Paille ragoute les chevaux de Caroffe & de courfe. Quand la botte de Paille ne feroit qu'un quart d'heure dans le ratélier , & qu'ils n'en tireroient que le quart de la botte , fi on leur donne du foin après , ils le mange ront. Un cheval qui mange beaucoup de paille , & peu de foin , eft toujours en ha
LE PARFAIT 3.6 leine. La Paille lui rend le corps ferme la chair & la graiffe dure , & fpongieufe ; & le poil luifant & court. Le moins que les chevaux de Carofle mangent de foin , c'eft le meilleur. FOIN. Les bons Foins ne croiffent pas par-tout, Toutes les meilleures eſpèces de foins , fi elles ne font coupées dans la ſaiſon , fanées & féchées , ne valent rien. Pour faire de bon foin , il faut que le crû de l'herbe en foit bon. On ne doit jamais mettre de fumier dans un pré , le foin , qu'il produiroit auroit mauvais goût , & mauvaile odeur. Si Pherbe eft coupée trop verte , ou trop mûre , fi le foin n'eft pas bien fané , & féché fur le pré , s'il a été tant foit peu mouillé " avant que d'être enlevé ; c'eft du foin qui n'eft pro pre qu'à donner aux vaches. Les Foins , qui croiffent dans les ma rais , ou dans les prés fujets aux eaux , ne valent rien pour les chevaux de Caroffe , & de courfe ; ils les font fuer , leur font venir une graiffe molle , qui fond à la moindre chaleur , qui leur arrive par le travail , & leur rend la chair fpongieufe. Les Foins de haut prés , s'ils font verts , de bon goût , & de bonne odeur , font les
} I COCHER. 37 meilleurs , parce que les prés n'ont pas ét é fumés . Le bon Foin eft de couleur grife. Les bonnes herbes à faire le foin font le tréfle blanc , rouge , jaune , gris , la terrüe l'herbe à noeuds , le petit meffis , qui ref femble au froment naiffant , le thin fau vage , le cerfeüil fauvage , le plantin long , le pied d'alouette , & une infinité d'autres herbes , dont les noms nous font incon nus , & qui font un foin d'un bon goût , & d'une bonne odeur . $ Qualité desfoins de haut-Pré. Le Foin du haut pré eft muni de fes feuilles , & de fleurs. Il eft court & menu. Il a une demi verdure , une bonne odeur , & eft bien fec. On en donne aux che vaux pendant le mois d'Octobre , No vembre , & Décembre , Janvrier , Fé vrier , Mars , Avril . Pendant les autres cinq mois , May , Juin , Juillet , Août → & Septembre on leur fait manger du foin de bas - pré , parce que dans les chaleurs les foins de haut pré font trop fecs. Les chevaux qui en font nourris ont le poil ras , court , luifant , un corps plein. & rond , une chair graffe & ferme. Les hauts - prés font fituês au milieu d'une
LE PARFAIT 38 campagne , dans de petites colines , fur des hauteurs , des coteaux , & ont au def fous quelques fontaines , ou ravines. Qualités des Foins de bas-Pré. Les bas- prés font fitués le long des grandes & des petites riviéres. Les foins qui croiffent le long des grandes riviéres font très-bons , quand les terrains font élevés. Les bas - prés fitués le long des ruiffeaux , ou petites riviéres , font ma recageux , & les foins n'en valent rien. Les foins de bas- pré font humectans , & rafraichiffans à caufe des terroirs humi des. Les chevaux qui font nourris de foin de bas - pré , font à grand poil , & très velus. SAIN - FO I N. Ily a une 3e. efpece de foin,nommé fain foin , il eft trés-bon pour les chevaux , fa qualité eft d'échauffer; les chevaux le man gent bien , il en font frians , quand il eft fait dans la bonne faifon , & coupé au point qu'il faut. Le fain-foin échauffe , & engraiffe en peu de tems les chevaux . Il leur rend le poil clair & luifant , on ne le donne que pendant trois mois , qui font les plus froids ; fçavoir, Décembre , Jan
3 COCHE R. ༡༤ ་ Février. Au mois de Mars le fain & vier foin devient fi fec , qu'on eft obligé de le moüiller pour le faire manger aux che vaux. Quand ils ſe portent bien , & qu'ils font gras , on ne leur donne point de fain- foin , Si les chevaux arrivent mai gres de la campagne , & fatigués , on les fait faigner , & purger , & pour les ré mettre , pendant trois ou quatre mois , on leur donne du fain-foin. Le fain-foin croît dans les enclos , & terres graveleufes , fifes le long de cer tains petits cotteaux : Il n'eft pas fembla ble aux autres foins , il a la tige groffe , de gros épys , la fleur rouge. On le cou pe des premiers en plaine Lune dans un tems chaud & beau , & pour qu'il foit bon, il faut qu'il foit aux trois quarts mur. Le fain-foin pour être beau , doit avoir toute la graine & fa feuille. Il faut qu'il foit fec. Qaund il ne l'eft pas , comme il eft naturellement chaud , il eft fujet à s'é chauffer. L'excès du fain-foin échauffe trop : on le doit donner aux chevaux avec difcrétion , & prudence. Tems propre pour netoyer un Caroffe. Il faut pour bien nétoyer un Caroffe choifir le tems convenable. Les tems hu
LE PARFAT 40 mides font bons pour netoyer les cuirs & les tems fecs n'y font pas propres. On ne les doit pas frotter avec de la toile neuve , mais avec un morceau d'étofe noi . re , large comme la main , imbibé de tems en tems dans de l'huile de lin , Selon que les cuirs fe trouvent fecs , & alterés. Il eft bon d'obſerver , qu'il faut l'été é poufletter tout le corps du Caroffe , avant que de le frotter , car la pouffiere entre roit dans le cuir au lieu d'en fortir. Pour nétoyer un corps de Caroffe , on doit avoir quatre torchons : deux de toile neuve , un pour ôter la groffe crotte : une éponge mouillée , preffée entre les mains peut fervir de fecond torchon. Le troi fiéme , & le quatriéme fervent à netoyer le dedans du Caroffe. Ils doivent être nets & fouples. Si le dedans du Caroffe eft de velours rouge , on a un morceau de ferge pour le décraffer , & le dépoudrer , car les ver gettes tirent la foye du velours , & n'o } tent point la craffe , & la graiffe qui pro viennent des cheveux > & des perruques poudrés ; on fe fert de ce morceau d'é tofe autant de fois qu'il eft néceffaire. C**s Maniére
n e 1 CC CHER. 41 Maniére de nétoyer l'Impériale du ' Caroffe Lorfqu'en hyver il fe trouve de la né ge fur l'Impériale du Caroffe , il ne l'y faut pas laiffer , elle brule le cuir. L'ar deur du Soleil, & la pouffiére l'endomma gent auffi beaucoup. L'un en fait fortir le fuif, l'autre s'y attachant forme une ef péce de maftic , qui y entre, & pénétre dans le cuir , ce qui le rend d'une couleur blanchâtre , & on ne peut le rémettre dans fon premier état qu'avec peine. En voici la maniére , qui cependant régarde plus le Sellier que le Cocher. On met un Čaroffe hors de deffus fon = train en le penchant fur le derriére , de façon qu'on puiffe porter les mains par 5 tout fur l'Impériale. On paffe plufieurs fois des falots de paille de fégles allumés fur le cuir. En tenant le falot d'une main , de l'autre on tire les étincelles , qui s'at tachent au cuir. A mefure que le cuir s'é chauffe , une autre perfonne avec un mor ceau d'étoffe frotte & effuie les graiffes ou craffe de l'Impériale. Lorfque les cuirs font dégraiffés , on prend de l'huile de lin , autant qu'on le juge à propos. On Y délaie du noir , on en fait une efpéce D
LE PARFAIT 42 bouillie bien claire , dont ou noircit le cuir , qu'on laiffe un ou deux jours dans cet état , felon la faifon , fans l'effuier. On ne le fait que quand il eft fec. On doit auffi effuier les clouds avec un linge blanc. Maniére de paffer la Vergette fur les rangs des clouds. A chaque fois qu'un Cocher nétoye fon Caroffe , il doit paffer la vergette fur tous les rangs des clouds en large & en travers , pour ôter toute la poudre. Il prend enfuite un torchon de toile , blanc & net pour efluier les clouds , & les pommes des Corniches , & ce torchon ne doit fervir qu'à cela. Moins on frotte des clouds dorés , plus long tems ils fe con fervent plus on les frotte , plus ils fe noirciffent. Quand ils font poudreux , on y paffe la vergette , & on les effuie 9 comme je viens de le dire. Quand ils font craffeux , on les huile avec de l'huile de lin , on les laiffe tremper une nuit. Le ma tin on les frotte doucement avec une vieille broffe , & on les effuie avec un linge bien doux .
I. 1 COCHER. 43 Maniere de nétoyer les Glaces. Il faut pour nétoyer les Glaces une ferviette , qui ne ferve qu'à cela. Quand elles fe trouvent graffes en dedans & en dehors , on prend gros comme une noi fette de blanc d'Eſpagne , mis en poudre détrempé dans de l'eau nette. On frotte légérement les glaces avec une éponge trempée dans cette eau , & on les effuic avec une ferviette nette & féche. e Maniére de netoyer les Peintures. 25 Pour nétoyer le dedans des montures de Caroffe , on prend les vergettes. Si l'on veut conferver le plafond toujours propre , on a foin de le nétoyer fouvent. Quant au bois de Caroffe , comme il eft peint , il le faut laver , & bien effuier 'S E 1 avec une éponge fine. Lorfqu'un Caroffe eft crotté , il le faut légerement laver dans les endroits crottés , afin que la boue qui s'y eft attachée ſe détrempe , & tom be d'elle - même , & pour ne pas effacer , ou rayer la peinture avec les graviers ,. qui fe trouvent dans la boue , on doit avoir des pinceaux faits exprès pour les fculptures , les moulûres , & les rênûres , Dij
44 LE PARFAIT & tenant une éponge de la main gauche , trempée dans de l'eau claire , & le pin ceau de la main droite , on fait fortir la boue qui eft reftée dans les trous des fculptures , moulures & rênûres. Lorf que le Caroffe eft ſec , fi c'eſt de la mou lure , on l'efluie avec un morceau d'é toffe , s'il eft doré ou bronzé , on ne l'eſ fuie pas. Si le Caroffe eft peint , on peut l'huiler. S'il eft d'ébene , non : je dirai plus bas , comme il faut le nétoyer. Quand la peinture des moutons , des arcs , & autres extremités eft alterée , & blanchie , on y paffe un peu d'huile ; mais dans les grandes chaleurs , & dans le tems de pouffiere , il ne faut point mettre d'huile à aucun endroit du Caroffe. Un Caroffe qui roule tous les jours , doit être graif fé toutes les femaines , & les roües tous les jours. Un Caroffe bien graiffé en eft Z plus doux. Les Chevaux en font moins fatigués , les effieux en durent plus long tems , & font préſervés du feu. Manière de nétoyer les Caroffes d'Ebenes. Il ne faut jamais de l'huile à un Ca~ roffe d'ébene , mais de l'urine , ce n'eft qu'une fois la femaine. On en moüille
COCHER he; Din la des --*ಸ ಸಿಸಿ 'e 45 ane éponge , que l'on preffe dans les mains ; on l'appuie après fur les moulu res , & rênûres de fcultures. On fe fert enfuite d'un linge blanc , qui ne foit ni vieux , ni neuf, mais un peu élimé. S'il étoit neuf , il rayeroit l'ébene ; s'il étoit vieux , il laifferoit du duvet , ce qui fe+ roit une double peine pour le reffuier. On lave rarement ces fortes de Caroffe, Frai parce qu'on ne peut les effuier , qu'ils ne foient fecs. Les Caroffes d'ébene de des & mandent une parfaite propreté , & ils ne font pas fi difficiles à entretenir que les autres peintures , mais ils demandent plus de fujetion. Quand il faut les laver , on détrempe la boue , qui y eft attachée , afin de pouvoir l'ôter fans frotter. Un if Cocher , qui fçait gouverner fon Caroffe , évite les boües , & les ruiffeaux , autant 1 qu'il le peut , & quand il le trouve dans des endroits où il y en a , s'il ne peut les éviter , il ne va que le pas , pour ne pas éclabouffer fon Caroffe. Chevaux negligés à caufe du lavage, des Roues. Il y a des Cochers qui connoiffant la délicateffe de leurs Maîtres pour la pro prieté de leur Caroffe , & fur-tout des
LE PARFAIT 46 roües , n'ont d'attention que pour elles , & negligent le panfement des chevaux . Il ne faut négliger ni l'un ni l'autre . Les bandes , qui ne portent plus à plomb fur les geantes , parce qu'elles font foulées & pourries , perdent entierement un Ca roffe. Lorfqu'il eft crotté de cette façon , il eft prefqu'impoffible de le nétoyer fans le laver avec plufieurs eaux. Il faut auffi laver les fous- pantes & les cour royes , qui font de cuir avec une épon ge , & une épouffete. Maniere de bien monter un Caroffe fur fon Train. Pour qu'un Caroffe à reffort , Ber line , Berlinguot , ou Vis à-Vis , foit bien monté fur fon train , il faut qu'il ſoit dans fon équilibre ; c'eft à-dire , qu'il ne panche ni d'un cotê , ni de l'autre . Le train doit être mis fur une platte -forme unie , & le Caroffe monté , & fufpendu par quatre foufpantes. Un Caroffe pan ché fur le derriére , donne plus de tra vail aux chevaux ; c'eft ce qu'il faut évi ter Plufieurs perfonnes veulent que leurs Caroffes foient renverfés fur le derriére pour leur commodité ; mais ils ne pen- , fent pas que les chevaux ont plus de peis
COCHER. 47 me à tirer uu flêche. Caroffe renverfé fur fa Belle grace d'un Caroffe mis dans 3 2 ・Son équilibre. Pour qu'un Caroffe foit fufpendu à l'avantage des chevaux , les roues de de vant doivent être le plus haut que faire fe peut , afin de rendre le tirage plus facile. On fufpend le corps du Caroffe de manié re , qu'il ne foit qu'à fix ou fept pouces des arcs , & que fa hauteur foit de cinq ou fix pouces au-deffus de la flêche ; la bon ne grace d'un Caroffe eft d'être toûjours droit dans fon équlibre , fans être trop panché fur le derriére , & quand il n'y auroit que deux perfonnes affifes dans le fond , ou qu'il y en auroit quatre , deux fur le devant , & deux dans le fond , il eft bon qu'il foit fi droit , & fi jufte dans fon équilibre , qu'il ne fe renverfe pas. I S Difficulté de donner de l'air à un Ber linguot & autres Voitures. C'eft une ſcience que de donner de l'air à un Berlinguot , il s'agit de le bien mon ter. Le premier agrément qu'il doit avoir , eft qu'il foit bien fait & bien proportion
3 48 LE PARFAIT né,le fecond eft la maniére de le bien po fer. Cette méthode vient du jugement du Cocher › car fouvent les Ouvriers ne font que fuivre la fantaifie des Maîtres , ou des Cochers. Cependant un bon Ou vrier doit fçavoir pofer fon ouvrage : mais un Cocher habile dans fa profeffion con noît mieux les défauts d'un caroffe , que l'Ouvrier même. Etant chargé du foin de le conduire , il en voit les défauts. En fin l'Ouvrier peut apprendre du Cocher , &.le Cocher réciproquement de l'Ou vrier. Il eft facile au Cocher de donner bon ne grace à fon Caroffe : quand il eft bien fait & bien pofé. L'agrément d'un Ber linguot, comme de tout autre Caroffe, de pend de la maniére qu'on le pofe. Mais s'il eft difficile de mettre un Berlinguot dans fon équilibre , fi l'on en voit peu de montés fur leur train , comme il faut ; il eft plus aifé de pofer un Caroffe à deux fonds , parce qu'il porte fa charge devant , comme derriére. Il doit être droit , bien fufpendû , ne jamais tomber en arriére ni devant , foit qu'il foit chargé , ou non ; les chevaux en ont plus d'avantage. Quant au Berlinguot, il faut que ce foit la caiffe , qui décide de la façon de le bien monter 2 attendu que le pied cormier de derriére
COCHER. 49 derriére doit être beaucoup plus long que celui de devant , le Brancard ceintré , de 61 façon qu'il renvoye le Berlinguot fur le devant. Il eft néceffaire auffi que la tra verfe du devant du train à laquelle font brédi les fufpentes, foient pofées plus baf a I I, fes , qu'on ne le fait ordinairement à une voiture à deux fonds , & que même leſdi tes fufpentes foient bredies à l'envers , & les cries, pofés au liſoir, ſoient éléves plus que faire fe peut , fans cependant que les fufpentes fe mangent contre les moutons , & qu'elles paffent facilement & avec jeu fous la planche , ou marche pied des La quais. S'il arrive que l'on veuille monter une demi- Berline fur quatre coins refforts , il eft néceffaire que les deux coins de derrié 1 U It re foient plus longs & plus garnis de feuil les , que ceux de devant , tant pour la dou ceur , parce qu'ils portent le poids le plus confidérable de la voiture. On trouve qu'il eft plus facile & plus commode de monter ladite voiture fur deux fufpentes feulement , lefquelles doi vent être arrêtées au reffort par une bride , qui l'affujetiffe , ou en perçant quatre trous , dans chacune defquelles on fait paffer les quatre boutons des refforts , lorsqu'on prend ce dernier parti. I. Partie. E
LE PARFAIT Fo Il faut obferver que tous les cuirs des fufpentes,avant que delesfabriquer, foient bien tendus & tirés au moulinet,afin qu'el les ne foient point fujettes à s'allonger. Malgré cette précaution il eft cependant néceffaire de mettre la voiture un peu plus fur le devant , la fufpente allongeant tou jours quelque peu , ce qui la met par la fuite à fon vrai point. On doit pofer fur les fufpentes à l'ex trêmité des quatres coins de reffort, qua tre plaques de fonte portant leurs oreilles attachées fur les fufpentes avec des viſſes à écrou , ce qui empêche que le bout de reffort ne mange la ſuſpente , & en outre 3 fait que le reffort en a beaucoup plus de mouvement , puifqu'il gliffe , car le cuivre eft onctueux par lui- même. Il faut prendre la même précaution pour monter une Ber line à deux fonds , ou un Vis-à-vis pour les refforts feulement. Différentes maniéres de monter les Chaifes de Pofte. La plus ancienne & la plus folide ſont les Chaifes, qui fontmontées avec les refforts à l'écreviffe , & deux refforts fur le de vant de la Chaife : on y ajoûte fil'on veut deux refforts fur le derriére , qu'on appel
s der oient nger dan pla tou COCHER . 51 communéme nt refforts à Apremont. Ces le derniers font, felon quelques habiles Sel liers , de peu d'utilité, d'autant plus qu'ils font un poids confidérable à la voiture, & que l'on préfume que deux Apremons de bois bien faits & bien ceintrés, de maniére qu'ils ne puiffent toucher à l'effieu , font travailler les refforts à l'écreviffe davanta l'ex ge , & rendent la voiture pluslégére. Il faut auffi que le train foit bien pro que ille ille portionné , que le Brancard ſoit d'un beau brin de frêne , ceintré par lui - mê me , rélévant du derriere , & bas au mar to tre che pied , que le Charron le travaille plat fur le deffus en forme de rame de galére , ivre & rond par-deffous. Par cette méthode le Brancard aura toujours fa force ordinaire, O ra ८ quoiqu'à l'oeil il paroîtra plus mince. Lorsqu'on monte une Chaiſe de Pofte , il faut obferver que la traverſe de devant , qui porte les fufpentes ne foient point ar rêtées à demeure , parce que par ce moyen , on la récule , ou onl'avance, ſuivant qu'il eft néceffaire , pour monter une Chaiſe , comme il faut. On monte auffi des Chaifes de Pofte avec des refforts à la Dalenne . Cette nou velle méthode eft excellente pour rouler en plat païs , mais très- dangereufe pour faire des voyages de long- cours , & dans de mauvais chemins, Eij .
52 LE PARFAIT Manière d'arrêter les refforts d'un Caroffe quand on va en Campagne. S'il n'y a point de refforts à un Caroffe 2 les faufles fufpentes doivent être aufli tenduës que les autres. Lorsqu'on va en Campagne avec un Caroffe garni de ref forts , il faut mettre des coins de bois avec des bandes de cuir clouées au Caroffe. A la Campagne les refforts fons inutiles. On court rifque de verfer dans un penchant , parce que le reffort , qui eft du côté de la pente , s'abaiffe & s'écrafe , pendant que les autres refforts , s'ouvrent , & s'élévent, ce qui rejette le Caroffe de côté. Lorf que les refforts font bridés il n'y arien à craindre , c'est même un avantage. Mais quand on eft arrivé , on peut ôter les coins de bois , & on fe trouve avec un Caroffe à reffort. Maniere de boucler les Courroyes de Guindage, Les Courroyes de Guindage du devant, & du derriére , doivent être boucléesd'une longueur proportionnée au branlementdu Carofle , & les Courroyes, de rétirage de defcus doivent être de même , afin d'em
ལུལྦའཚོབ་ == .; 3 ཐ་ 2499 COCHER 53. pêcher les fufpentes de toucher aux roues de derriére. Il y a deux courroyes deffus, ou deffous la fleche , comme le Cocher le juge à propos , elles doivent être égales aux courroyes de guindage de derriére. Les Paquets mis fur les courroyes de tele A t, que ent, traverfe de derrière ruinent le Caroffe > & fatiguent les Che vaux . C'eft une ruine pour les Caroffes , & pour les chevaux de mettre des paquets fur les courroyes de guindage de derriére. Ils caufent le renversement du Caroffe , les refforts en font fouvent écrafés , & même fort fouvent rompus , ainfi que les cour royes. Mais les paquets mis fur le devant ne font pas fi à charge aux chevaux , ils traînent mieux cent livres pefant fur le de vant , que trente fur le derriére. Le Carof fe en roule plus doucement , & les perfon nes , qui font dedans reffentent peu de fé couffes , & de cahotage . Bride de cheval de Caroffe. Le fer de la bride des chevaux de Ca rofle , eft le même que celui des chevaux de felle. Il y a feulement quelque diverſi té dans la têtiére , dont la matiére eft tou E ij
LE PARFAIT 54 jours la même , tant pour la couleur & pour les ornemens , que celle du refte du harnois. D'ailleurs les Bourreliers appel lent fous-barbe , le derriére de la mufe role , &mufeliére , au lieu de muferole , le devant qui pafle fur le nez. Ils joignent quelquefois la fous-gorge & la fous - barbe fous la ganache avec un anneau de fer : On attache des œil leres aux montans , pour empêcher que le cheval ne voie à côté de lui , afin qu'il n'ait point de peur , & ne foit point diffrait de fon travail par les objets qu'il approche. Les Bourreliers appel lent fronteau , ce qu'on appelle fron tail à un cheval de felle : On orne quel quefois le côté de l'oreille en dehors d'un noeud d'oreille , à qui on donne différen tes figures , fuivant fon idée. Ce noeud s'attache à la jonction du montant , & de la fous-gorge On y ajoûte quelquefois un gland , qui pend à côté de l'oeillere , & on orne le deffus de tête d'une aigrette, Úfage de la Bride. Toutes les piéces , qui compofent la Bride , ſe réduiſent à trois principales ; fçavoir , le mors , premierément deftiné à appuyer fur les barres de la bouche à un doigt au- deffus du crochet , & non plus
COCHER. & -da du pel le ple, Orge vec Deil que afin S'S haut : La gourmette , qui eft faite pour faire appuyer le mors par le moyen des branches & de l'oeil , qui forment une ef péce de bafcule , laquelle préfentant par dedans & pardehors la région du menton du cheval , le contraignent à caufe de la douleur plus ou moins grande, que lui caufe le Cocher , ou le Cavalier en tirant les rênes , à lui obeïr , & à agir fuivant fa volonté. Ainfi l'emploi du mors eft de porter fur les barres ; les branches & l'oeil fervent à l'y faire porter, & la gourmette à l'y faire appuyer. On el in en eud -de OIS re tte Différentes embouchures. Comme les barres des différentes bou ches font plus ou moins fenfibles , on a formé de différentes embouchures fuivant les diverſes qualités , & conformations intérieures de ces bouches. Anciennement on avoit tant d'égard aux moindres variations des levres , de la langue & même des différens dégrés de fenfibilité les plus fubtils , & jufqu'aux moindres inclinations du cheval, que pour es; chacun de ces cas on avoit imaginé un mors différent. Mais on a réconnu depuis un quelque tems cet abus, parce que ces mors. égaroient à la fin , ou endormoient la E iiij
LE PARFAIT 46 bouche du cheval , & on a vû qu'avec trois Qu quatre espéces d'embouchures, on con duifoit également un cheval , non tant par le mors , que par l'art de ménager la bou che , & que par conféquent tout ce fatras de mors étoit fuperflu. Ainfi pour toutes fortes d'embouchures, on n'a à préſent que le canon fimple brifé, & non briſé , la gor ge de pigeon briſée & non briſée , & le mors à portée & du pas d'âne, qui comme je l'ai déja dit , n'eſt en uſage que pour les chevaux de caroffe. De quelque espéce que foit le mors , il doit porter à un pouce du crochet fur les barres : il faut obferver qu'il n'excéde pas trop la bouche de chaque côté , & auffi qu'il ne foit pas trop court , de façon que les levres foient prêtes à recouvrir les bof fetes. Quand cela arrive , on dit qu'un cheval boit fa bride , ce qui eft diſgra cieux . On doit effayer plufieurs mors à un cheval , & s'en tenir à celui , qu'on fent qui lui va le mieux , & qui le maintient dans la plus belle fituation fans le gêner , quelque efpéce de bouche qu'il ait. Com me les chevaux de caroffe ont communé ment la bouche plus forte que les chevaux fins , les barres les plus charnües & moins fenfibles , à ceux- là il faut des mors , qui
COCHER . 57 fe faffent fentir , le tout en proportion de leurs bouches à celle des chevaux fins. Les T B Bridon. Le Bridon eft une espéce de petit mors fort léger , briſé au milieu , qui s'appelle Bridon Anglois, ou bien il eft compofé de trois piéces & briſé en deux endroits , ce lui-ci fe nomme Bridon François. Aux chevaux de felle feulement on met un Bri L Of k ‫ײ‬ et chevaux de tirage s'embouchent avec des mors creux de fer , ou des billots de bois. don dans la bouche. a Maftigadour. Le Maftigadour eft une efpéce d'em bouchûre, mais qui ne fert que dans l'écu rie. On met le cheval au maftigadour pour F I₁ le faire écumer , par conféquent lui dé charger le cerveau , l'empêcher de man ger , & lui donner appetit : on le tourne pour cet effet en fa place , & on lui laiffe Le maftigadour dans la bouche plus ou moins de tems felon les cas. = Licols. Il y a trois fortes de Licols , qui fer
LE PARFAIT 58 vent aux chevaux , fçavoir le licol de corde , le licol de fangle , & licol ordi naire de cuir . On ne fe fert guéres que dans un haras des deux premiers . Le troi fiéme, qui eft celui de cuir , fert aux che vaux de felle & de caroffe. Il a une ou deux longes . Il eft compofé d'une têtié re avec frontail & muferole , les montans & la muferole vont s'attacher fous la ga nache au même anneau de fer , & font joints fur le côté par deux paffans. On met une ou deux longes de cuir ou de fer à cet anneau . La longe de fer fe met lorfque le cheval ronge le cuir. Si les chevaux font fujets à fe délicoter. Le nouveau parfait Maréchal enfeigne un excellent licol , avec lequel jamais un cheval ne peut fe délicoter. Ce licol n'a point de fous - gorge , ou plûtôt il en a deux , qui vont fe croiſer , & fe rendre à deux anneaux quarrés, qui ſont au bas des montans , aufquels anneaux tiennent auffi le devant , & le derriére de la muferole , une espéce de bouton plat & lâche affem ble le milieu de cette croiſée , qui ſe trou ve au deffous des os de la ganache vers la fin du canal : quand le licol eft en place , on attache les longes aux deux anneaux quarrés.
COCHER. 59 B Maniére de brider un cheval. 1 1 Si un cheval mange , & qu'il ait la bou che pleine , on attend qu'il ait ceffé de manger pour le brider. En prenant la bri de, on met la rêne en travers ſur le bras, te nant le haut de la têtiére de la main droi > & l'embouchûre du mors de la main gauche. Il faut paffer le doigt dans la bou che du cheval , & yconduire le mors en même-tems avec la même main gauche , afin de la lui faire ouvrir pour recevoir l'embouchure du mors de la bride , qu'on lui préfente dès qu'il l'a reçû dans fa bouche , le Cocher lui doit hauffer le haut de la têtiére de la bride , qu'il tiendra de la main droite , par-deffus l'oreille droite. Il prend enfuite le toupet du crin qui eft à la hauteur du front du cheval , il le tire de deffous la têtiére de la bride , il fait en même-tems paffer le haut de la même tê tiére , par- deffus l'oreille gauche , & tire les deux oreilles par haut , & les deux cô tés de la têtiére par bas, afin qu'aucun crin n'incommode le cheval. Il met enfuite la gourmette , ou fousbarbe , qui ne doit avoir de longueur , que cinq gros mail lons , deux petits au bout pendant , & un autre petit au bout dormant. Quand le
LE PARFAIT cheval eft bridé , c'eſt au Cocher d'ajuf→ ter le mors dans la bouche , pour qu'il ne 60 porte fur le crochet ni d'en d'en bas. haut , ni Maniére de brider les chevaux em bouchés. Lorfque les chevaux font fort embou chés , on accroche la gourmette ou ſous barbe à la feconde maille. On ne le rêne qu'à fon aife ; c'eſt - à · dire , preſque point. Si le cheval a la bouche belle ; s'il eft franc de bouche , ou qu'il ait la bouche fine , on ne le gourme qu'à la fe conde maille , & à proportion , qu'on au gmente de maillon , on lui ferre la fous gorge d'autant de point. On la double felon qu'elle eft longue : un Cocher , qui en uſe ainfi fait de fes chevaux ce qu'il veut. Maniere de brider un cheval fans bouche. Il y en a quiprétendent qu'un cheval Hent entre les dents l'embouchure de fon mors de bride, lorſqu'il emporte fon hom me . Il eft vrai qu'il s'arme de fon mors , mais il appuye les branches contre fon
COCHER. 61 poitrail. Les chevaux , qui font le plus portés à ce défaut , ont le barbouchet menu , la bouche fendue , des barres dou blées c'est- à- dire des morceaux de chair deffus les barres , c'eft- ce qu'on appelle un chevalfans bouche , ou une bouche contre barrée. Ces fortes de chevaux doivent être bridés par un habile Epronnier , & menés par un Maître Cocher. Il leur faut des C mors de bride , qui ayent des embouchu res de bonne liberté , & ajuftés à leur bou che. Lescanons de la même embouchûre, qui font joints aux deux oeils des bran ches , doivent être déliés aux deux bran ches ; on fait faire les branches courtes , & très-quarrées. La gourmette doit être auffi courte. Enfin on ne rêne point ces fortes de chevaux , il faut leur donner li berté entiére, 1 Ce qu'ilfaut faire à des chevaux qui regardentpar-deffous leur aillere , $ ou quifont ombrageux. Si un cheval regarde par- deffous fon oil lere 2 on lui tient l'oeillere de la têtiére baffe. S'il eft ombrageux , quand il apper çoit le fouet , il devient plus farouche , & on a plus de peine à le réduire. Mais un Cocher avec ces fortes de chevaux ne
62 LE PARFAIT doit point faire claquer fon foüet : quand ils y font accoûtumés , ils prennent de l'ombrage de tous les coups de foüet , qu'ils entendent. Harnois des chevaux de caroffe. Les Harnois des chevaux de caroffe font de cuir blanc bordé , ou noir , ou de ma roquin , de drap de velours , de rouffi → &c. Les ornemens qu'on met aux Har nois , communément font de cuivre doré, & relévé. La chainette de Harnois , ou de timon tient au réculement d'un bout , & fon anneau pafle par le bout du timon " jufqu'au crochet , & là on arrête avec un petit cuir les chainettes des deux chevaux de timon. Le réculement va s'attacher des deux côtés à la grande boucle , qui ſou tient le porte trait. Quand le cheval récule , le réculement tire la chainette, qui fait réculer le timon: le poitrail eft large & renforcé , il va s'at tacher des deux côtés à la grande boucle de l'épaule. C'eſt à ces deux boucles , que tiennent les traits , qui paffant dans les porte-traits finiffent par un anneau , formé par une boucle fans ardillon : Ces deux anneaux fe ferrent aux deux bouts du pa lonier , & pour lors le cheval eft attelé.
Pa COCHER . 63 Le couffinet qui eft rembourré , eft ca ché par fa couverture , à laquelle font attachés deux anneaux , dans lefquels paf fent les guides , & il y a au milieu deux tde et 1 petits cuirs , qui fervent à nouer les rênes de la bride ; c'eft qui s'appelle enrêner. Ce couffinet doit fe trouver fur le garot : il Com foutient le poitrail , par le moyen de deux barres de devant , les traits , une partie du Har réculement par le moyen des deux bras de bricole; & c'eft auffi au couffinet que tient le trouffe - chainette , fait d'un petit an re C ut = : $ 3 1 333 OF The UX neau de cuir , & d'un petit bouton , qu'on paſſe dans cet anneau , quand ce petit bou ton a paffé au travers de l'anneau de la chainette de timon : On arrête là cette chainette , quand le cheval eft déharna ché. La patte d'où fort le milieu du furdos , & les furdos , part elle - même du couffi net en arriére : tous les futdos , qui fou tiennent le réculement , viennent ſe join dre au milieu du furdos , enfuite la patte fe fépare en trois parties , qui vont s'at tacher à trois boucles de l'avaloire de deffus , qui doit fe trouver au haut de la troupe , à l'endroit des roignons ; de cet te avaloire , qui eft arrêtée à la groſſe boucle , où finit le réculement , part la Croupiere qui eft double , au moyen de
64 LE PARFAIT deux petites barres. Les deux anneaux de cuir , dans lefquels on fait paſſer le bout des traits , quand le cheval eſt dé harnaché , tiennent auffi l'avaloire de def fus : les barres qui partent de cette avaloi re , foutiennent l'avaloire d'en bas , qui tourne fur la croupe du cheval , & va s'ar rêter à l'anneau des porte- traits. On au gmente tant qu'on veut les furdos & les barres : on fait auffi des harnois de timon, fans avaloires : ils en font plus légers , & moins parants. Il y a un anneau attaché au poitrail de chaque côté , qui n'eft mis en cet endroit, que pour recevoir le réculement , & le foutenir , afin qu'il ne s'évafe pas trop ; mais ces deux anneaux ſe trouvent fervir à un uſage très-utile , pour empêcher les chevaux de ruer au caroffe. C'eft une plate-longe , qui s'ajoûte aux harnois dans ce cas , & qui a un effet fûr : elle eſt compofée de deux cuirs qui fe rejoignent en un , ou d'un gros cuir fort large , qu'on paffe autour du milieu du palonier : on le boucle enfuite en- deffus avec une groffe boucle : il fe fépare en deux longes , qui ont unetraverſe , laquelle doit fe trouver fur le haut de la queue , & fous la crou piére : la feconde traverfe fe trouvera par deffus la croupiere près de l'avaloire d'en haut :
COCHER. 65 haut celle-là a une boucle pour la fer rer , ou lâcher felon le befoin. UX Voici le chemin que font les deux lon ges de cuir : elles paffent fur le culeron , fous les barres de la croupiére , fous l'a valoire de deffus , fous les furdos , fur les bas de bricole , & fe bouclent aux petits anneaux , qui foutiennent le réculement au poitrail. II n'y a point de cheval , qui puiffe ruer avec cette machine. les OD .8 Emouchoirs & Houffes. En Eré, quand on veut, on, met par- def fus les harnois des Emouchoirs à mailles, 홈 0 을 후 & en hyver on met auffi par- deffus les harnois des Houffes , dont Fobjet devroit être de garantir le dos des chevaux de la pluie , & de fe refroidir quand ils ont chaud, & qu'ils reffent long- tems arrêtés. Mais ce qui y conviendroit le mieux, n'eft pas affez beau ce feroit un cuir noir , qui ne les échaufferoit point , & qui ne ex 1:3:| perceroit pas à la pluye : au lieu de cela on les fait fuer d'abord avec des peaux d'Ours , de Tigres , &c. ou on leur met des houffes de drap rouge , qui percent 73 31 yet t ‫ܪ‬ ea à la pluye , & leur tiennent long- tems le dos mouillé. I. Partie, F
66 LE PARFAIT Harnois à quatre & à fix Chevaux. Quand on attele fix chevaux , les deux du milieu , ou les quatrième , s'attachent à une volée avec deux paloniers , cette volée fe met ou bout du timon , & y tient par le moyen d'une chainette de cuir. On attele les chevaux du milieu au pa lonier , comme ceux du timon , par deux traits pareils , qui font terminés à l'autre bout , ou du côté du poitrail par une bou cle , deftinée à boucler les traits des fixié me chevaux d'ailleurs les harnois des uns & des autres , font compofés feule ment d'un poitrail , d'un couffinet , de deux barres de devant , pour foutenir le poitrail , de deux bras de bricole , de deux furdos , qui tiennent à une barre de crou piére fimple : les traits des fixième , font foutenus par des porte-traits , qui tien nent à la barre de croupiére : quand on attele à quatre , on ne met pas communé ment de volée , & on attache les traits à ceux des chevaux de timon. Le Poftil lon eft fur une felle , compofée d'un arçon de bois à trouffequin , faite de cuir noir qui accompagne les Harnois des chevaux de Caroffe. On met des bourſes fur les quartiers pour la commodité du Poftil
COCHER 67 Y lon. Les fangles font de cuir , & la crou piére eft conforme au Harnois de Caroffe. US Harnois des Chevaux de Chaife. 215 Comme les chevaux de Chaiſe ne ſçau roient s'atteler également à une Chaiſe , parce qu'il y en a un qui eft enfermé entre & eur at ule les deux brancards , & l'autre à gauche du premier , attelé à un palonier , ayant fur lui le Poftillon , le Harnois de chacun de ces deux chevaux eft différent l'un de l'au tre voici d'abord celui du cheval de brancard. Le Harnois du cheval de brancard eft compofé d'une petite fellete , qui eft une petite felle fort courte , les bandes fort larges on la garnit de cuir noir avec du 10 CO 1er rça OLL clou doré on perce lefdites bandes , pour paffer deux courroyes à boucles qui fervent à maintenir à ſa place la dofiere de la Chaife. On percel'arçon de devan t pour y paffer une courroye, qu'on appelle la trouffure , qui ſert à nouer les rênes du cheval de brancard ; on garnit l'arçon de cinq grandes boucles : les deux de de vant prennent les barres de poitrail ; les deux de derriére prennent les petites bar res , qui foutiennent l'avaloire , & la cin quiéme tient la croupiere. Fij
68 LE PARFAIT De cette croupiere part encore une bar re d'avaloire , qui fe trouve fur la croupe; il part encore de la fellete un contre-fan glot , qui foutient le poitrail , conjointe ment avec la barre de poitrail : au bout du poitrail de chaque côté eft un gros anneau de fer , auquel tient un trait , qui va ſe boucler fous le brancard au trait de brancard , qui tient à l'effieu. Le réculement n'eft autre chofe qu'une courroye , qui tient à un gros anneau , qui eft au bout de l'avaloire d'en bas. On attache ce réculement à un crampon , qui tient au brancard , ce qui fait , que quand le cheval récule , l'avaloire tire à elle & tend ce réculement , qui fait réculer le brancard. Le cheval eft attelé , quand le trait & le réculement font bouclés , & que la doffiere eft arrêtée fur la fellete. On ajoûte quand on veut deux anneaux , aux deux côtés de la fellete , pour foute nir des guides , qui ſe bouclent dans les gargouilles de la bride , avec lefquelles celui qui eft dans la chaife , peut conduire le cheval de brancard. La longe de main du cheval de bran card eft une courroye , qui paffe dans les deux gargoüilles de la droite à la gauche & que le Poftillon tient toujours pour conduire le cheval de brancard.
COCHE R. 60 Le cheval de côté de la chaife , ou le 55 H E. 2 TAG LV noUv Į, bricolier, eft attelé à un palonier, qui tient au brancard gauche de la chaife par deux traits. Il a comme elle le cheval de bran card un poitrail , mais la barre , qui fou tient le poitrail , paſſe ſur ſa ſelle & s'ap pelle deffus de felle : le furdos , qui fup porte les deux traits paffe au travers du rédoublement de la croupiere ; c'eſt com munément unefelle à trouffequin, qui fert au Poftillon. Maniere de mettre les Chevaux au Caroffe , & d'atteler un Cheval 1 1 $ S W 3 qui s'écarte. Un Cocher , qui va mettre les Che vaux au caroffe , doit prendre garde qu'ils ne s'écartent. On doit à celui qui s'écarte mettre la chainette la derniere , & d'un point plus longue , que celle de l'autre cheval , fi la chainette étoit plus courte , le cheval en voulant s'écarter tireroit le timon du caroffe à lui , fans qu'on pût le conduire droit , ce qui feroit un très mauvais effet. Si ce cheval eft plus fort que fon camarade , s'il a le trot , & le pas plus grand , il ne faut pas que fa chainet te foit plus longue , ni miſe la derniere. On la doit mettre la premiere , fes traits
LE PARFAIT 70 doivent être auffi plus longs , parce que ce même cheval étant le plus fort s'arrête quelque fois. La guide de devant doit encore être plus courte de trois à quatre pouces , & ce cheval veut être bouclé trois ou quatre points plus que les autres boucles . Autre maniére pour mettre les che vaux au Caroffe. Pour placer les chevaux au Caroffe ; on peut commencer par mettre les chai nettes dans le bout du timon , où il y a un crochet , qui les arrête , & qui ſert · à réculer. Au bout du crocheton du crochet il doit y avoir une petite courroie de cuir , nommée grande goupille d'un pied & demi de longueur , on l'entortille une fois au bout du timon , & on la répaf fe dans le trou , ou oeil du crochet en y faifant un noeud à oeillet. On gourme enfuite les chevaux , felon la force , ou fineffe de leur bouche. Les gourmettes doivent être plus courtes qu'à l'ordinaire pour les bouches les plus fendiies. Quant aux quatre branches des guides , on les paffe un demi tour par deffus la rêne de la bride , qu'on boucle à un trou fait ex près , au bas des branches des mords de
38-8 71 bride. Quand les rênes de bride en de hors , & en dedans font arrêtées , la bran che de la grande guide du cheval de # R- deffous main , qui fe boucle à la branche du mors de bride du cheval de dehors HT 4 JV COCHER. main , & la branche de la petite guide qui vient du cheval de dehors-main , s'at tachent à la branche du mors de bride du cheval de deffous main , & ainfi elles ſe trouvent toutes croiſées , comme il faut qu'elles foient. On prend enfuite la grande guide , que l'on jette par deffus les deux chevaux , fans qu'elle touche à terre. Quand on rêne les chevaux il eft neceffaire que les mords foient droits , ni trop haut ni trop bas. L'embouchure du mors de bride doit être à un pouce au deflus des dents de maniere que la lévre du coin de la bouche y touche , fans que le cheval foit nullement gené , car il faut qu'il ait la liberté franche. Il y a beaucoup de chevaux , qui ont le barbouchet menu , d'autres qui ont la bouche petite , les naſeaux petits , de gros barbouchets ; on voit auffi des chevaux forts en bouche , qui les ont fort étroits. Quand les chevaux font rênés , les quatres branches des guides bouclées , les rênes bien trouffées , la grande guide
772 LE PARFAIT bouclée avec la petite , & jettée de tra→ vers fur la croupe du cheval de dehors main , on paffe le bout pliant en quelque endroit fous le harnois , comme fous la croupiére , de peur que les guides ne tombent à terre , & l'on met enfuite les quatre traits des deux chevaux, Maniére d'a ccommoder les vieux harnois. Si des harnois ont fervi à des chevaux plus grands , ou plus petits , un Cocher doit les faire alonger , ou racourcir felon le befoin , ainfi que les traits de la brico le ou croupiére. Il faut auffi baiffer , ou hauffer la têtiére de bride , car tous les chevaux n'ont pas la tête égale , & un cheval bridé ou trop court , ou trop long eft gêné. Pour ne point chagriner un che val au travail, on le bride , & on le har nache à ſon aiſe. Un cheval gêné à ſon har Hois , foit à la bouche , à la tête , ou aux épaules , tremble en voyant fon harnois , & s'il n'eft attaché , on ne peut le lui met tre. Il y a cependant des chevaux , qui haiffent le travail , mais il y en a plufieurs, qui appréhendent le harnois , parce qu'il les bleffe. Maniére
COCHER: ors love 75 ' Manière de mettre le Harnois aux che vaux de Caroffe. Un Cocher qui reçoit l'ordre de tenir fon Caroffe prêt pour une telle heure commence par épouffeter " ou faire 7 épouffeter les chevaux qui doivent tra vailler. Il les efluye depuis l'oreille juf qu'à la queue. Il prend enfuite le harnois COO par le réculement, il le met fur fon épaule droite. Il tient avec les deux mains le de-. vant du harnois par les deux bouts de la of bricole, qui tiennent la bricole , & le poi trail par les deux grands anneaux. Il les éléve au-deffus de fa tête , en l'élargif fant , & le préfentant à la tête du cheval , qu'il veut harnacher. Il y a peu de chevaux , s'ils ont travail lé , qui ne préfentent la tête , en même tems qu'on leur jette le harnois fur le col . Quand il y eft , on l'étend fur-tout le corps . On leur met enfuite la croupiére , en leur treffant la queuë, fi c'eft en Hyver. Pour en Eté lorsque les mouches piquent, on ne la leur trouſſe point. 1. Partie G
74 * LE PARFAIT Mariére de mettre le harnois pour në point bleffer les chevaux. Afin de ne point empêcher la refpira tion du cheval , il eft bon de tenir le har nois le plus haut qu'il eft poffible fur le poitrail. Le cheval en appuye moins , il tire plus fort , il n'eft pas fi fujet à être foulé : car quand le harnois eft bas fur le palleron des épaules , le cheval ſe bleſſe , pour peu qu'il appuye , ce qui fait qu'on voit tousles jours des chevaux eftropiés par la faute de ceux , qui les gouvernent , Un Cocher doit fçavoir qu'il faut que les rênes de bride,& les bouts des petites cour royes , nommées trouffieres foient jettées entre les deux chevaux , afin qu'il ne pa roiffe aucun bout de cuir pendant en de hors. De quel côté on doit présenter le har nois. Quand on met le harnois à un cheval , il faut le préfenter en dedans à celui de deffous la main , & à l'autre de même , pour éviter de renverser les crins du côté qu'ils ne panchent point , en prenant gar de que le poitrail du harnois , comme je
COCHER. 75 P'ai déja dit , ne porte trop bas. Il faut auffi faire attention que les couffinets ne foient pas trop avancés fur le gârot , & que la croupiére foit de façon , qu'il n'y ait point de crins enfermés deffous. 1 གཡུ་ ་ 50 Couffinets utiles en Campagne. C'eſt une proprété que les couffinets ne paroiffent point , que le harnois nefoit pas trop avancé fur le devant des chevaux. K. On doit, pour la Campagne, faire provi fion d'une demi- douzaine de couffinets , garnis de crin , longs de fix pouces , lar ges de cinq , épais d'un pouce & demi , dont on fe fert, quand les chevaux fe blef fent. Il faut de plus quatre autres petits couffinets , garnis de même , de quatre pouces de long , & trois de large, pour les placer , aux endroits , où les harnois de volée coupent le poil , & où les traits des harnois de volée touchent , comme aux cuiffes , & aux côtés du ventre. Ce qu'il faut faire aux chevaux qui ont le crin trop long. Si des chevaux ont le crin trop long , bon d'arrêter le réculement au grand eft il anneau , qui fuporte la bricole , & le poi G ij
76 LE PARFAIT trail , afin que le réculement ne furmonte pas deffous la queue. Dans la faifon , qu'on ne craint point les mouches , com me en hyver, ontrouffe la queue des che vaux. La meilleure maniére eft de les met tre dans un fac , ou bourfe de toile , ou de cuir ; ces facs confervent les crins de la queue . Attelage des chevaux. On attele les chevaux de Carofle deux à deux jufques à fix. Le Roi & les Princes en mettent jufqu'à huit. Les deux du Co cher attelés au timon , s'appellent che vaux de derriere : Les deux enfuite fe nomment chevaux de volée.; parce qu'ils font attelés à des palonniers , tenant à une volée qu'on attache au bout du timon ; Les deux autres font appellés chevaux de devant , & à huit chevaux , de fixiéme. Le Poftillon monte celui qui eft à gau che. Ceux-ci font attachés aux chevaux de volée par des traits. Le Cocher guide les chevaux du timon , auffi- bien que les che vaux de volée , au moyen d'une guide pour chaque cheval , qui paffant par un anneau coufu à la têtiere des chevaux de timon en dedans , au- deffous de l'oreille va fe rendre à la bride des chevaux de vos
COCHER: 77 fée , & vient s'attacher à la fourchette des guides des chevaux de derriere. Le Poftil I fon d'attelage , n'eft chargé que de la con duite de fes deux chevaux , conduifant P'un avec la bride , & l'autre avec la longe de main, qu'il arrête à une boucle, qui eft à la felle , ce qui eft le plus fur , ou qu'il tient à la main, ayant fon foüet de la main droite. Chevaux attelés courts à Paris.. 9-2 Il faut que des chevaux dans Paris foient attelés courts , & que les chainettes foient courtes , foit à caufe des ruiffeaux , ſoit pour paffer plus jufte entre deux Caroffes, foit pour arrêter plus promptement , & par tir de même. En Campagne c'eft le con traire à caufe des orniéres. Proprété de l'équipage & du Cocher envers lui-même. Après qu'un Cocher a attelé fes che vaux , & qu'ils font harnachés , il doit prendre l'épouffete , le peigne , & l'épon ge , pour mouiller les crins en les pei gnant. Avec l'épouffete & l'éponge , on les efluye par-tout. Si ce font des chevaux gris , ou blancs , on prend garde qu'il n'y G iij #
LE PARFAIT 478 ait quelque tache particulierement aux ja rets , où ils font fujets à la crotte. Lorſque les Chevaux & le Caroffe font en état , un Cocher fe doit mettre le plus propre qu'il peut , en linge blanc , bien coëffé , bien chauffé & ganté. Un Cocher qui aime la proprété l'eft en tout. Il n'ou blie pas que les chevaux doivent être bien ferrés , proprement harnachés , avoir le erin fait , & des mors de bride.toujours propres. On les fait rétamer tous les fix mois. On les tient fecs , & on les effuye avec un linge doux. Néceffité pour les Maîtres de donner leurs ordres. Un Maître ne fçauroit être bien fervi ; s'il ne donne fes ordres. Le foir à fon coucher , ou le matin à fon reveil , il doit faire fçavoir à fon Cocher l'heure qu'il fortira , & du moins une heure avant , afin que ce Cocher ait le tems d'épouffeter , d'effuyer fes chevaux , de leur mettre le harnois , de leur trouffer la queue , de les brider , de les rêner , de mettre les traits à leur place , de boucler les guides , de donner quelques coups de vergette aux couvertures , fi c'eft l'hyver , en été de nettoyer la dorure du harnois , d'effuyer
COCHER. 79 UTS fimperiale du Caroffe & les plafonds , d'accommoder les couffins , & de jetter ela enfin les yeux par-tout , pour voir s'il n'y a rien d'oublié. Comment un Cocher doit être affisfur C fon fiége. es: E Lorfque les Chevaux & le Caroffe font en état , le Cocher proprement habillé comme je viens de le dire, monte fur fon fiége > ne doit jamais faire attendre fon Maître , quand le Maître a donné les or dres. Il doit être affis fur fon fiége,le corps droit , la tête levée . Il ne faut pas qu'il tienne le bout de fon fouet en l'air , qu'il -ait les bras étendus & écartés l'un de l'au tre , n'y qu'il les éléve. Il doit baiffer les mains à fix pouces des cuiffes , tenir la grande guide de la main gauche , & le fouet de la main droite , tant foit peu de biais. Il eſt de mauvaiſe grace d'avoir les bras & les mains tendues en avant , comme fi elles étoient penduës aux guides. Cette fituation eft affectée: & tout air affecté eft contraint.Il ne doit point faire de contor fions fur fon fiége , L foit qu'il tourne , ou qu'il récule , ou à l'approche de quel que borne pour l'éviter , comme il y en a G iiij
80 LE PARFAIT qui fe panchent , croyant que le mouve ment de leur corps va faire obéir le Ca roffe & les Chevaux. Un bon Cocher doit fans y régarder , foit qu'il tourne , ou qu'il récule , fçavoir préciſement où fa rouë de derriere doit paffer.. Maniére de mener à la Françoife , & à l'Italienne. On appelle miner à la Françoife , quand un Cocher boucle les guides de deffus les Couffinets , qui croifent en dedans , à la branche du mord en croix , & qu'il tient les guides de la main gauche , & le foüet de la main droite. On appelle méner à Italienne quand un Cocher tient les gui des des deux mains , & ſon foüet entre fes deux guides . Pour méner à l'Italienne on met toutes les grandes guides égales. Les deux gui des du cheval de deffus la main font bou clées au même mors : ceux de dehors la main doivent être auffi égales , & bou clées au même mors. Les deux grandes guides , qui font égales de longueur , ont une boucle au milieu , qui fe boucle dans les jambes du Cocher, ce qui eft plus com mode,que de les mettre à la Française ,par ce qu'un Cocher de deffus fon fiége débou
COCHER. TO Ca C ST cle fes guides en les tenant toujours! dans fa main , & n'eft point expofé com me ceux , qui les mettant à la Françoife , -font . obligés de fe lever de deffus leurs ப். fiéges , & d'aller déboucler la guide pref que fur la croupe du cheval. Pour la maniére à l'Italienne il faut un t · ・ fquinfale à chaque cheval , qu'on ap pelle en françois un retraite. Il fe paffe avec un anneau dans la bricole , & vient -boucler dans l'oeil du mors dans un anneau =12:3 à l'Angloife. Il en faut à chaque cheval. On-le met à la bricole en dedans plus haut que faire le peut. Celui de deffous la main fe boucle à l'oeil du mors du cheval de › dehors la main. Celui de dehors la main fe boucle au mors du cheval de deffous -la main. Les deux rétraites , oufquinfales doivent être égaux en longueur. Si le cheval de dehors la main , ou deffous la main, fi l'un des deux porte en dehors , on racourcit 'le fquinfale : s'il porte en de dans , il faut l'alonger, I. Maniére d'enrêner les chevaux. Comme c'eft aujourd'hui la mode de méner à l'Italienne, la maniére auffi la plus excellente d'enrêner les chevaux , eft de les enrêner à l'italienne. Ceci eft, pour ainsi
LE PARFAIT 19 dire , une double enrênure , qui fert à les tenir toujours à la même diſtance du ti mon , & à les conduire fans communica 82 tion des branches des guides de l'un à l'au tre cheval. Chaque guide , comme on fait , fe fé pare en deux au-deſſus du dos de chaque cheval , & paffant par deux anneaux , qui font au couffinet , la branche d'en dedans va ſe boucler à l'autre cheval ; ce qui fait que quand le Cocher tire , fupofé la gui de droite , le cheval qui eft à gauche , & attiré par la branche d'en dedans de cette guide vers fon camarade , &c. L'inconvenient de ceci eft que fi un cheval a la bouche forte & l'autre légere celui - ci fe fent tiré plus fort , qu'il ne le devroit être , & on ne peut pas ainfi con duire chaque bouche fuivant ce qu'elle de mande. L'enrênure à l'Italienne remédie à cet inconvenient. Ce n'eft autre choſe qu'une courroye , qui prend de la bride de chaque cheval , & qui va s'arrêter au côté du couffinet de fon camarade. Par ce moyen chaque guide ne méne que fon cheval , & le Cocher peut ménager cha que bouche , comme il veut. Un défaut très-commun aux Cochers eft d'enrêner leurs chevaux fi courts que le bout du nez touche prefqu'au poitrail ,
COCHE R. 83 it ele afin que l'encolure paroiffe rouée : cette gêne perpetuelle fait qu'ils appuyent , fans pouvoir s'en empêcher, les barres fur le mors ,ce qui les engourdit extrêmément & leur rend la bouche dure , il vaudroit mieux les enrêner à leur aife : mais fi ab 1958 folument on veut les gêner à ce point , il dans faudra alors paffer les rênes entre le coude de la branche , & la fous-barbe ; l'effet du mors en fera moins à craindre . On a inven nica l'a té de mettre un anneau quarré àla barre du banquet , qui eft derriere la boffette , c'eft & apho le mieux qu'on puiffe faire , puifque la gourmette n'a pour lors aucun effet pour ferrer le mors fur les barres. 100 D TS e 43 10 се 00 ‫ܝܘ‬ e, Ple 3 Un Cocher ne doit point monterfurfon fiége fans prendre les guides. Un Cocher ne doit point monter ſur ſon fiége qu'il n'ait les guides en main, car fou vent il arrive que montant fans les tenir,les chevaux vont à toute bride , bleffent plu fieurs perfonnes , brifent le Caroffe , & le Cocher , rifque d'être écrasé. C'eſt auffi une fage précaution pour ceux , qui mon tent en Caroffe de ne jamais y entrer que le Cocher ne foit affis fur fon fiége , & qu'il n'ait les guides , & le foüet à la main.
84 LE PARFAIT Un Cocherfur fon fiége ne doitfaluer perfonne. . Il ne faut pas qu'un Cocher affis fur fon fiége s'avife d'ôter fon chapeau , pour fa Juer qui que ce foit. Pendant qu'il tien droit fon chapeau d'une main , les guides & le fouet de l'autre , il ne pourroit arrê ter deux ou quatre chevaux. Si dans cet moment une perſonne deſcendoit du Ca roffe , & que les chevaux au même inftant priffent ombrage , la perfonne tomberoit , le Caroffe avanceroit , la rouë de derriere lui pafleroit fur le corps , pendant que le Cocher auroit le chapeau à la main. Pofture dans laquelle un Cocher doin être pour bien méner. Pour bien méner foit à la Françoife- fort àl'Italienne , un Cocher en tenant les gui des doit avoir fes mains près la bouton niére de fa culotte , & tenir ferme les gui des , & la monture du brin du foüet , qui doit être pliant entre le deux ,troifiéme, & quatriéme doigt de la main droite , afin que quand il en veut donner un coup , il puifle laiffer tomber la monture en ouvrant les doigts
COCHER 85 Provifion de verges defo üet. Il eft bon d'avertir ici les jeunes Co chers qu'ils doivent toujours avoir qua tre fouets; deux à quatre chevaux , & deux à deux chevaux. Pour un voyage de Cam pagne ils doivent en avoir trois , deux à quatre chevaux & un à deux . Rien n'eft plus incommode que d'avoir un foüet à quatre chevaux pour en méner deux. On : } } fe doit précautionner de plufieurs foüets proportionnés aux équipages , que l'onM conduit. Il faut qu'ilsfoient bien montés, d'une bonne longueur & du meilleur bois. On les coupe dans le décours de la lune, & on les garde un an avant que de s'en fer yir. Longueur de fouet. Unbrin à quatre chevaux doit être de cinq pieds de longueur, & la monture de cinq à fix pouces , y compris l'attache au brin , & la mife de foüet de fifelle , qui fe met au bas de ladite monture. La longueur du brin à deux chevaux doit être de trois pieds , & la monture de quatre & demi tout compris. Il y a des Cochers qui ne fçavent pas mettre des mifes de foüet au bas de leur monture : d'autres ne s'en
86 LE PARFAIT fervent point , pour ne pas couper les che vaux , comme il arrive à de certains Co chers , qui en faifant de gros noeuds à la mife de leur monture de foüet , coupent les chevaux jufqu'à en tirer du fang. Ces fortes de noeuds ne font bons qu'en hyver, parce que les chevaux font chargés de poil. Les gros noeuds font encore bons pour les chevaux entiers. Il n'en faut point pour les chevaux vigoureux , & de poil ras , qui font fenfibles & craintifs. Maniere de mettre une mise defoiet au bas d'une monture. Pour bien mettre une miſe de foüet au bas d'une monture pour des chevaux vi goureux , craintifs & tendres , on choiſit du foüet le plus délié , afin que les noeuds en foient plus petits , & pour qu'ils ne foient pas durs on décorde le fouet , qu'on veut mettre au bas de la monture . On en prend environ la longueur de deux pieds fans être décordé. On l'arrête au petit brin de la monture du brin du foüet , & étant double on la décorde, juſqu'à un pouce près de la monture . On fait un noeud à la mife du fouet de tous les deux bouts en femble, qui font doublés d'égale longueur, on la récorde après , mais molement , afin 4!
COCHER . 87 que les noeuds que l'on fait de la diftance d'un pouce l'un de l'autre ne foient n'y 76 20 es S de gros , n'y durs , mais les plus ferrés qu'il eft poffible. Il faut que ces noeuds foient noüés avec un des bouts de la mife , qui doit être double , & que ces deux bouts de la mife de foüet faffent chacun leur noeud fucceffivément l'un après l'autre , pour le trouver égaux : de cette maniére on ufe moins de mife de foüet. Maniére de donner des coups de fouet aux chevaux. On ne doit jamais donner de coups de foüet au derriére du cheval , mais toujours au poitrail.Quand il faut donner des coups de fouet aux chevaux il les faut donner DI t 1 fourdement , mais jamais fans néceffité & il les faut bien appliquer. Un cheval fouffre plus d'un feul coup de foüet bien douné , que d'une douzaine de petits lé gérement appliqués. Il y a des Cochers , qui foüetent per petuellement leurs chevaux par mauvaiſe humeur & férocité naturelle. On doit évi ter de fe fervir de ces gens là : car outre qu'un tel caractére répugne à l'humanité. Cet coups de foüet font jetter les chevaux en avant. L'effort fe fait fentir fur leurs
88 LE PARFATT barres , ce qui les gâte totalement , & de plus le cheval eft fi harcelé , qu'il peut en tomber malade , ou du moins cela le fati gue , & l'ufe extrêmément. Communé ment un Cocher de cette eſpéce eft d'ail leurs un très - mauvais fujet. Il eft vrai qu'on ne peut foutenir & aider les chevaux de Caroffe , que de la main & du foüet. Mais il ne faut fe fervir du foüet que com me d'une aide , ou d'un châtiment & fur tout que ce foit à propos , comme pour foutenir un cheval , qui fe laifle aller dans un tournant , pour le rémettre fur les han ches , quand il s'abandonne trop fur les épaules , pour faire tirer égalément un cheval, qui fe néglige, & autres occafions qu'on ne faurroit d'écrire. On doit donner le coup de fouet , comme je l'ai déja dit dans le tems de la faute , afin que le cheval connoifle pourquoi on le châtie , & il ne faut point les prodiguer ,car les chevaux s'y accoutument comme aux facades. Quand on donne un coup de fouet , qu'il foit bien appliqué , & furtout à propos ; & que l'on n'imite pas ceux , qui donnent perpétuel lement de petits coups de foüet , comme s'ils vouloient careffer leurs chevaux , car ils n'en tiennent compte. Maniére
COCHER. ten 89 Manière dont un Cocher doitfortir de la Cour de fon Maître. ne Pal VIO 112 草 夏 fur DOU 1 39 Jour 2-3 2 70d UN M Quand un Cocher fort, il faut qu'il faf fe partir les deux chevaux d'un tems & également. Si les chevaux ont fait le pre mier mouvement , égal tous les deux , on leur fait faire un demi- arrêt , ou un coup de langue en même-tems , c'eft ce qui met les chevaux fur la hanche. S'ils ne lefont pas du premier demi- arrêt , on leur fait faire du fecond fans les battre. Quand ils l'ont fait , on laiffe couler les guides , & / les chevaux fe plaiſent à marcher. Un Co cher ne doit jamais les tenir par facades , c'eſt ce qui fort fouvent endurcit la bou che des chevaux. En fortant de la porte , il doit fortir doucement parce qu'il ignore fi un autre caroffe ne la barrera pas, ou fi des gens de pied ne fe trouverront pas à la tête des chevaux. Une porte auffi fe peut fermer par un coup de vent , & en fortant bruf quement on rifque , ou de briſer le carof Le contre la porte , ou de le fracaſſer con tre un autre caroffe , ou de bleffer du monde. Il n'en eft pas de même quand on revient , on peut rentrer au galop fi l'on veut , pour peu qu'on ait de la liberté , H J. Partie. 1
90 LE PARFAIT de la jufteffe , & que les chevaux obéïf fent. On ne craint pas que la porte ſe fer me , on ne peut bleffer perfonne , parce que l'on voit devant foi. Un Cocher dans fa marche doit avoir la vûë entre les deux chevaux à la tête , pour éviter les embar ras , les gens de pied , les défauts du pavé, & pour chercher les endroits , ou fes che vaux ne tombent point. Si le pavé eft bon il peut aller un trot raifonnable,& quand le pavé eft ſec il doit aller plus doucement , & foutenir bien fes chevaux. Il y a des Cochers , qui appro chent fi fort des maifons , qu'ils ne laiffent pas d'efpace aux gens de pied pour paffer, c'eft un inconvenient , qui attire quelque fois des quérelles , & que le Maître ne doit point fouffrir. Il y a encore des Co chers , qui auffi-tôt qu'ils font fur le fiége, s'imaginent être devenus gens rédoutables & confidérables, de façon que rien ne doit leur refifter. Comme les victoires , qu'ils peuvent remporter , ne font que d'écrafer quelqu'un " ou de briſer une voiture , un homme fenfé ne doit pas s'en fervir un moment. Ils trouveront condition , car les petits Maîtres s'en accommodent.
Соснек . Sefa 91 Retenue que les Cochers doivent avoir dans les chaleurs , & dans les par tems de gêlée. s de emb -per Esd unt 11& en! Il y a deux faifons ou le pavé eft ex trêmement gliffant. En hyver dans le mau vais tems , & dans l'été pendant les gran des chaleurs , où on arrofe continuelle ment les ruës.Pour l'intérêt des Maîtres les Cochers doivent dans ces tems- là pren dre garde que les chevaux ne tombent , & ne fe caffent une jambe , ce qui peut arri ver en defcendant d'une montagne , ou un pont , ou dans les rues glacées , où les tre! Esl chevaux ne peuvent tenir pied. Il y a des jeunes Maîtres , qui n'ont pas plus de re tenue, que les jeunes Cochers , qui les ménent. Ils veulent braver les dangers , & qu'on aille au grand trot au milieu des grandes chaleurs , ou dans les plus fortes 58 gêlées , que le pavé eft impraticable. Ce pendantdans ces deux faifons les Cochers, les Chartiers , les Rouliers ne peuvent avoir trop de précaution. Maniére de méner à Paris, + Les ruiffeaux , qui traverſent les ruës de Paris,donnent d'horribles fécouffes aux Hij
92 LE PARFAIT Caroffes , & à ceux qui font dedans , & font de furieux balancemens , lorsqu'un Cocher ne fçait pas les traverfer. Pour paffer les grands & les petits ruiffeaux 9 il les faut prendre un peu de biais, de ma niére que les deux roües de devant ne tom bent jamais enſemble dans le ruiſſeau, mais fucceffivément l'une après Fautre. Elles doivent ſe ſuivre de la largeur d'un pavé, & le train de derriére de même. En approchant d'un ruiffeau à la diftan ce de deux pas , un Cocher doit retenir la main à fes chevaux jufqu'à ce que fon train de derriére foit tombé dans le ruiffeau , & leur rendre auffi -tôt la main , de même que s'il étoit fur un cheval , qu'il voulut mettre du trot au pas. Aux grands ruif feaux il y a toujours une petite defcente , quand les chevaux les trouvent ; ils s'éfor cent encore plus à tirer , & fi on ne les ré tient , le Caroffe donne à plomb dans le creux , ce qui donne de grandes fécouffes. Pour le garantir des douleurs , que cau fent les fécouffes , un Cocher doit être ferme fur fon fiége , à ſon aiſe , ni trop haut , ni trop bas > & comme dans une chaife.
COCHEK. 95 Dans quel tems on doit cartayer les ruiffeaux. EU 20 5 On entend par cartayer mettre un che val d'un côté du ruiffeau , & l'autre de l'autre côté. On ne cartaye les ruiffeaux A P que lorfque le pavé eft mouillé , & quand il géle bien fort . Alors le pavé eft gliſſant , & les chevaux ont peur de tomber à cau fe du penchant du pavé. Dans les gran des chaleurs , comme dans les grandes gélées , les ruiffeaux ne doivent pas. être 封 、、、、 二 cartagés. Maniere d'éviter les embarras. Dans les tems de gélée , & à la defcen te des ponts on doit aller doucement , & ne fe pas preffer d'avancer fur un autre Ca roffe , ou voiture ; qui ſe trouve à ſa ren contre. Il eft même à propos dans quel que tems que ce foit de ne fe jamais pré cipiter dans un embarras. Afin d'éviter le réculement , & avoir le tems de fe ranger, on arrête dix ou douze pas en arrière , fi l'on eft obligé de réculer , on crie , & l'on avertit ceux qui font derriére le Caroffe. On arrête auffi pour ne pas blefler ceux , qui font devant les chevaux. Si tous les
94 LE PARFAIT Cochers vouloient s'entendre il n'y auroit jamais d'embarras , & il n'arriveroit pas tant d'accidens dans Paris. On voit tous les jours dans les rues des Cochers , qui ne fçavent ce qu'ils font , ni où ils vont. Quand ils voyent un caroffe venir à eux, ils prennent à droit & à gauche , de façon que deux caroffes fe trouvent l'un devant l'autre au milieu d'une rue , & les Cochers ne fachant point fe ranger , forment des embarras. Ce qu'il faut faire pour ne pas s'ace crocher. Quand un Cocher voit venir un carof fe , ou une autre voiture devant lui , pour éviter de s'accrocher , il doit arrêter , faire arrêter la voiture , qui vient à lui du moins crier qu'on aille doucement , pour que les effieux ne foient pas en rif que d'être rompus. Dans ces fortes de ren contre ils fouffrent beaucoup . Manière de faire rouler un Caroffe. Il faut faire rouler un caroffe autant que l'on peut au milieu des rues , toujours plus prêt des ruiffeaux , que des maiſons. Il ne faut pas que le train de derriére tom
COCHE R. U H OF 95 be dans le ruiffeau. En tems de gélée il eft difficile de l'empêcher , à moins qu'on n'aille doucement. C'eft en conduifant un caroffe au milieu des rues , plus près des ruiffeaux , que des maifons , qu'on évite les fécouffes , & le cahotage. A 25 2253 Un Caroffe ne doit pas couper un autre Caroffe. Un Cocher ne doit pas être ambitieux de couper ; c'eft-dire ,de paffer devant un autre Caroffe. Cela n'attire que de mau vaifes affaires. Si l'on fe trouve derriére 100 un Caroffe inférieur au fien , qui n'aille pas le même train , on le peut paffer s'il eft poffible ; mais fi le Cocher , Fiacre , ou Chartier , qui barre le paſſage eſt en têté , il ne le permettra pas. Un Cocher de bon fens le permet , pourvû que ce ne foit pas un défilé , & qu'il foit feul , au trement il faut attendre. 6 Ce qu'ilfaut faire dans une file. = Quand on fe trouve en file , il ne faut 15 pas fe laiffer furprendre , & couper par une feconde file. On le fait , quand c'eft un ami qu'on veut favorifer , mais il faut prendre garde , qu'il ne foit fuivi , autre
LE PARFAIT 96 ment il faudroit laiffer paffer toute la con fufion. Dans une file , s'il eft poffible , un Cocher doit avoir la précaution de n'avoir pas derrière lui une charette , parce que fi la file vient à réculer >, il feroit en dan ger derrière la charette , qui ne peut ré culer ; & le parti , qu'il auroit à prendre dans cette occafion feroit de fe jetter hors la file , s'il le pouvoit. Maniére de méner réglement . Pour méner réglement on rend la main´ aux chevaux : on les rétient aux ruiffeaux ; qui fe rencontrent , car prefque tous les chevaux ont l'habitude de faire une espéce d'élancement de même que s'ils defcen doient un foffe ; ce qui donne une furicuſe fécouffe au caroffe. Un coup de trait tiré à propos empêche un caroffe de tomber dans unprécipice , ou dans un endroit pe rilleux. Un cheval , qui lâche pied fait pe rir un caroffe. Ce font des attentions. qu'un Cocher doit avoir. Si un Cocher ne fçait monter à cheval , & le mettre au pas, ne peut méner également , ni aller d'un train réglé avec deux chevaux attelés à un caroffe , parce qu'il faut que les deux che. vaux , dont il tient les guides de la main gauche , foient ménés de même qu'un cheval
C =,= arz Maniére de tourner à un coin de ruë. QUE Ca utt ene bat Un Cocher , qui fort d'une rue pour entrer dans une autre. S'il veut tourner à droit prend le côté gauche environ vingt pas , du bout de la ruë d'où il fort , & il prend toujours plus de terrain qu'il peut , n'importe avec quel caroffe. Soit qu'il veüille aller à droit ou à gauche il ne doit pam mbr IP 0 era che Dai 2 Pla 1 95 COCHER. 97 cheval de felle , auquel on eft obligé de rendre la main pour lui régler fon pas. point tourner fur le même pavé , parce qu'il rifqueroit d'abbattre ſes chevaux , ou de renverfer fon caroffe. Il faut enfin qu'il ufe de précaution avant que de tourner le coin de la ruë. Un Cocher entendu diminuë fon train , fou tient fes chevaux , & prend fon tournant le plus grand qu'il peut pour éviter de donner dans quelque autre voiture , dont il pourroit arriver accident . Si en allant vîte on tourne trop court , il y a danger que le cheval d'en dedans ne s'abbatte , parce que l'autre le pouffe en tournant ſur lui ; s'il fe trouve dans quelque embarras, où il foit obligé de réculer , c'eſt alors qu'il doit être le Maître de la bouche de fes chevaux , pour les réculer droit ; car il eft dangereux de ſe mettre en travers dans un embarras. I. Partie: I
98 LE PARFAIT Ce qu'ilfaut faire à un détour. Si en fortant d'une rue , on rencontre un caroffe , qui y veut entrer , il y a de l'embarras , fi les deux Cochers ne pren nent tous les deux affez de terrain pour pouvoir tourner fans s'accrocher. Un Co cher prudent prend de bonne heure fon tournant , & n'eft pas furpris. Il voit ve nir un caroffe , il évite fa rencontre , & l'un & l'autre paffe fans s'accrocher. Pour éviter tout inconvenient il faut prendre la droite. Il y a des Cochers , qui de peur de falir leur carofle ne veulent prendre ni la droite ni la gauche , & par leur opiniâtré té caufent de l'embarras en embarraſſant toute une ruë. Manière de couper les coins des ruif feaux en tournant à un coin de ruë. Ce n'eft pas affez de fçavoir tourner à un coin de ruë , il faut encore fçavoir couper les coins des ruiffeaux , pour em pêcher les fécouffes , & balancement du caroffe,ce qui fatigue extrêmementles per fonnes , qui font dedans. On voit fouvent des caroffes verfer en tournant le coin d'une rue pour avoir tourné avec préci "
COCHER ARP 2: oft 09 pitation , & n'avoir pas coupé le coin du ruiffeau. En fortant d'une rue ruë pour entrer dans une autre , quand on veut tourner à droit , on fait enforte que la roue de de vnt du côté du montoir pafle fur le qua triéme , ou cinquiéme pavé , qui fait le r coin du ruiffeau de la rue , dans laquelle on veut entrer , avant que la roue de der riére du même côté tombe dans le ruiffeau de la rue , d'où l'on fort , & en rétenant la main aux chevaux , on ne fait aucun élancement. Ce qu'ilfaut faire dans un Carfour E TA an 10 Cat པ" OVE T11ea6 pour tourner. Dans un Carfour il y a quatre ruës , qui font quatre coins , & qui ont quatre ruiffeaux à leurs jonctions. Si l'on trour ne à gauche la roue de deffous la main > qui eft le côté du hors montoir, doit cou per le coin du pavé , qui donne dans le ruiffeau , joingnant les deux autres coins du pavé. La même roue doit auffi paffer entre le quatriéme & cinquiéme pavé , qui forme cette encoignure , & paffer le ruiffeau de la ruë , où elle entre , avant que la roue de derriére du même côté , tombe dans le ruiffeau de la rue , d'où l'on fort. De cette maniére enallant d'un train I ij
100 LE PARFAIT réglé le caroffe ne fait aucun balancement, non plus que fi l'on étoit dans un chemin uni , pourvû que les encoignures du pa vé foient bien coupées. Si l'on tourne à gauche au coin d'une rue , il faut que les deux chevaux tirent égalemeut , parce quefi le cheval fur lequel on tourne , lâche pied , le cheval de deffous-main , s'il n'y a que lui qui tire , rabbat tout d'un coup fur la borne du coin de la ruë , & fi l'on tourne à droit , & qu'il n'y ait que le che val de dehors la main qui tire , ce fera la même difficulté. Il eft donc néceffaire que deux chevaux tirent enſemble en tournant au coin d'une rue , pour entrer dans une autre , & traverſer les ruiffeaux, Maniére de tourner en rond. Quand il eft queftion de tourner en rond, il ne faut pas que les deux chevaux tirent, à'moins que ce ne foit dans une ruë étroites alors pour tourner , on rafe l'autre côté de la ruë " avec le bout du timon , fi la rue n'étoit pas affez large , on avance dans l'endroit le plus convenable , ou bien on met les roues vis-à-vis une porte cochére, & l'on tourne de maniére , que le derrié re du caroffe fe trouve dans la porté co chére en alongeant ; c'eft-à- dire , que le
TO FACO CHE RA bout du timon touche pour ainfi dire à la muraille de l'autre côté de la ruë. On doit prendre garde en tournant , que les roües de derrière n'attrapent quelques bornes en tournant → cela pourroit faire verfer le caroffe. e l P Maniére de tourner dans une ruë en montant. oc 02 6-29 121 CIA GE ced T dan Si parhafard on fe trouve arrêté dans une ruë , qui va en montant , ou dans une Campagne , fur le penchant d'une monta gne , il faut avoir foin que la tête des che vaux fe trouve du côté de la vallée , & qu'ils foient obligés de tourner pour ré monter la montagne. Si l'endroit eft fort penchant , on ne doit point tourner, à moins que le timonne baiffe naturellement: furtout on ne doit pas réculer. Mais le meilleur eft de faire tenir le corps du ca roffe par un homme fort & robufte du cô té du penchant , ou d'aller au pied de la montagne pour tourner fans rilque. Ne point tourner au milieu d'une ruë creuse. The Un bon Cocher ne tourne jamais dans Le milieu d'une rue creufe , lorfque les I iij
LE PARFAIT 102 roues du même côté font dans le ruiffeau les chevaux immanquablement récule roient , & le caroffe fe renverseroit fur le coté. Quand un caroffe eſt attelé de fix ou de huit chevaux , s'il eft queſtion de tourner au coin d'une rue , il ne faut point que les quatriéme , fixiéme & huitié me chevaux tirent. Dans un détour un peu étroit , ceux de derriére doivent feu lement gouverner le caroffe , c'eft ce qui fait qu'on met toujours les plus forts au timon. Manière d'éviter les clouds des ruës: Pour éviter les clouds des rues , il faut éviter les tas de boües , & les baleyeures. En paffant un ruiffeau on fait enforte que les chevaux n'y mettent pas le pied . Les chevaux ne prennent des clouds que dans les boues , dans la pouffiére , & dans les eaux bourbeuſes . On ne tourne jamais ni à droit , ni à gauche au coin d'une ruë , fans traverser le ruiffeau de la ruë > où l'on veut entrer , à moins qu'on n'y foit contraint par quelqu'autre caroffe , oa charette , qui fe rencontre au paffage. En ce cas un Cocher doit avoir de la rété nuë, tourner au petit pas , & prendre gar de à la borne. Souvent il arrive , qu'en
Соснек 103 voulant tourner fur la moitié du coin d'une ruë , fans traverfer le ruiffeau , & couper le coin du pavé pour le traverfer , il accroche la borne du coin de la rue & rifque de renverser le caroffe. Maniére de réculer , & defe ranger. A la rencontre d'un embarras , fi l'on apperçoit qu'il dure trop , on tourne s'il eft poffible, & l'on prend un autre chemin. Un Cocher doit connoître toutes les ruës de Paris , fur-tout les paffagéres. Lorf qu'il eft queftion de fe ranger , il faut avancer à droit , ou à gauche felon le befoin , & faire en forte que les chevaux réculent enſemble. On doit les manier doucement , car fouvent il arrive qu'un cheval en réculant fe donne un effort. Rien ne dérange plus un cheval que de le maltraiter en ſe rangeant , & en réculant. En tirant trop rudement la main , on rẻ cule trop , & on eft obligé d'avancer plu fieurs fois , au lieu qu'en réculant tout doucement , & droit , on eft tout d'un coup rangé. Les Cochers , qui font prompts ,, font condamnables , lorfque leur promptitude va jufqu'à la brutalité. Il faut cependant quelquefois réveiller les chevaux pour les faire tenir fur leurs gar I iiij
LE PARFAIT 104 des : mais on ne doit jamais trop les ac coûtumer aux coups de foüet. Quand on les y habituë,on a de la peine à s'en rendre maître ; ainfi quand ils manquent , com me je l'ai déja dit , il fuffit de les réveil¬ le fur le champ . Empêcher que les chevaux ne voyent du coin de l'œil. Les chevaux ne doivent pas voir le Cocher fur fon fiége. Lorfqu'il voit fon homme du coin de l'oeil , il ne fait fon devoir que quand il l'apperçoit remuer le bras , & le foüet en l'air. La maxime des Allemans eft de ne point mettre d'oeille res aux têtiéres des brides des chevaux. On n'approuve pas cette méthode en France. Un cheval fans oeilleres au mou vement du bras du Cocher ne méneroit que par élans , & il eft impoffible de con duire réglément de cette façon. Maniére de réculer un Caroffe en at tendant le Maître. Un Cocher obligé d'attendre fon Maî tre à la porte de la maifon où il l'a mis , ne doit pas refter devant la porte , mais 1
COCHER. C 105 fe ranger d'un côté ou de l'autre , & laif R fer un eſpace raiſonnable pour le paſſage d'une perfonne , entre le muraille & le $ 1 ť S caroffe.Soit qu'il méne de jour ou de nuit, il eft bon qu'il ne dorme pas fur fon fiége, & que la nuit fur- tout il prenne garde à fes couffins , il ne doit jamais defcendre de fon fiége , à moins qu'il n'ait quelqu'un à la tête de les chevaux. Attelage de huit chevaux auffifacile à méner que celui defix. Il n'eft pas plus difficile de méner un caroffe à huit chevaux qu'à fix , excepté qu'il faut prendre plus de terrain dans les tournans. On met les chevaux les plus légers , & les plus vifs , au fixiéme ; c'eſt à - dire , derriére le Poftillon , parce que ces chevaux vont fans être touchés,& que dans un tournant , ils font les feuls qui tirent. C'eft la même chofe à un caroffe à fix. Le porteur du Poftillon doit bien tro· ter , s'ils font élevés du devant ils fati guent moins fous l'homme. Si dans un at telage à fix , ou à huit on a des chevaux pareffeux,un Cocherles met fous la main de derriére & à la volée, comme il méne le ti mon. Le Poftillon doit lui être fubordonné; c'eft-à-dire , exécuter fans réplique tout
106 LE PARFAIT ce qu'il lui dit , & les fignes qu'il lui fe ra , foit pour tourner , faire tirer fes che vaux , &c. Il doit toujours avoir atten tion à fon Cocher , & faire tirer ſes che vaux droit , c'est- à- dire, ne les pas condui re à gauche , quand les chevaux de derrie re vont à droit , car cette mauvaiſe man œuvre fatigue tout l'équipage. Il doit fonger à ne pas tant faire tirer fon porteur, il eft bon qu'il prenne fon tournant de loin , fans trop faire tirer , de peur de for cer le Cocher à tirer trop court. Il faut auffi quand il s'agit de réculer qu'il main tienne ſes chevaux , de façon qu'ils ne fe mêlent pas dans leurs traits , ce qui pour I 1 roit arriver , s'ils étoient trop lâches ; c'eft pour la même raifon , que le Poftil lon doit partir le premier , quand la voi ture commence à marcher. Les chevaux de derriére doivent rétenir dans les def centes , & aux montagnes les chevaux de devant doivent tirer pour foulager ceux du Cocher. Attelage à quatre auſſi facile à mé ner que celui de deux. Il eft auffi facile de méner à quatre che-, vaux qu'à deux , il n'y a qu'aux tournans, qu'il faut plus d'efpace , pour que les deux 1 1 1
107 COCHE R. e fent iérr Les aux tirer. puif de derr chev deux grandes guides doivent être égales aux traits , mais il faut qu'elles bandent un peu moins que les traits. Il eft à pro pos qu'à l'attelage de quatre comme de fix & de huit chevaux , les têtes ſe ſuivent en droite ligne . C'eſt l'affaire du Cocher de donner la liberté aux chevaux , quand ileft obligé de cartayer de grandes or niéres. Pour cela il doit lâcher le récule ment & les guides. On fe fert d'une voiture à quatre de deux façons , fçavoir , fans Poftillon , le Cocher ménant feul les quatre chevaux , ou avec un Poftillon , qui méne les deux chevaux de devant , attachés par des traits aux harnois des chevaux du timon . Les quatre chevaux fans Poftillon ne font pas fans danger, furtout dans les deſcentes , car fi les chevaux de devant font jeunes & la bou fenfibles , ou qu'ils n'ayent pas che bonne , ils s'échaufferont peut-être la tête , & la pente les favorifant , ils pour ront bien prendre le mors aux dents " au lieu le Poftillon les rétient facile que ment. C**s
108 LE PARFAIT Chevaux qui jettent trop la tête er déhors . 4:3 La bonne grace d'un cheval eft de por ter par-tout la tête devant lui , ni en de dans , ni en dehors. Il y en a qui la por tent trop en dehors , ce font ceux qui font roides en bouche , & qui tirent trop , ou ceux, qui ont des camarades , qui ne four niffent pas autant qu'eux , parce qu'ils ne font pas gourmés au point qu'il faut , ou ceux qui ont un plus grand train que leurs camarades. On doit gourmer ces chevaux , qui avancent plus que les autres , d'une maille plus courte , & lâcher la gourmette de • ceux , qui ne fourniffent pas affez , finon on les change de main , ou on les laiffe huit à dix jours pour les redreffer ; car ce font quelquefois des habitudes , que les chevaux prennent d'eux mêmes. Ce que doit faire un Cocher à la ren contre d'un autre Caroffe. Quand deux caroffes fe rencontrent dans Paris , venant l'un à l'autre , le long d'une rue ils doivent prendre tous les deux la droite , & éviter l'embarras 2 à
COCHE R. 109 moins qu'il ne fe trouve quelqu'autre voi ture. Quand on rencontre la maiſon Royale , Prince , ou Princeffe du fang :› par refpect on doit s'arrêter , & laiffer paffer leurs épuipages . Pour les autres, Princes , Ducs , Pairs , Maréchaux de France , & Seigneurs de la Cour , par confidération on leur céde le haut du pa vé. Et pour éviter les difcuffions , & les embarras , il convient que les Cochers, tant d'une part que d'autre prennent tou jours la droite. Conduite d'un Cocher prudent à la rencontre d'un autre Caroffe. Un Cocher prudent & fage ne prend jamais le haut du pavé , fur un Caroffe in férieur au fien , par la qualité de fon Maî tre. Mais il y en a qui s'entêtent mal- à propos des honneurs qu'on rend à ceux qu'ils fervent. Ils croyent devoir fe faire diftinguer, parce que leurs Maîtres font élévés au-deffus des autres ; cela ne fert qu'à les faire méprifer. Aujourd'hui ap partenans à des Seigneurs , de main à des Bourgeois , fouvent ils font fort heureux au fortir de ces places , qu'ils perdent par leur inconduite , d'en trouver une chez un Loueur de caroffe.
110 LE PARFAIT Précautions qu'un Cocher doit avoir avant que de fe mettre en Campagne. Il faut qu'un Cocher en voyage ait fa ferriére bien garnie d'un petit marteau , & de quelques clous de fer , ce qui lui fert squ'il y ait quelques clous à rémet tre en chemin aux fers de fes chevaux ; c'eft pourquoi il eft bon qu'il fache bro cher un clou. Il faut auffi qu'il fe précau tionne d'un fer brifé , qui fert à conſerver le pied d'un cheval , qui fe déferreroit en chemin , & dont le fer feroit perdu . Il doit auffi mettre dans fa ferriére un gros marteau & de gros clous pour les roues , en cas qu'il en foit befoin , auffi-bien que des cordages , & des tenailles , pour ré médier à ce qui pourroit manquer au har nois & au refte de l'équipage. Il doit fur tout fe munir d'une bonne enrayeure pour les defcentes. Maniére de méner en Campagne. Tout le foin d'un Cocher en Campagne doit être de ménager fes chevaux , pour qu'ils puiffent aifément fournir la route fans être fatigués . Le Maître de l'équipa
COCHER . i G ར III ge ordonne ordinairement la dînée & la couchée , & c'eft au Cocher à l'y condui re fagement. Pour cet effet il doit aller tantôt le trot >, mais un trot moins foute nu que dans les Villes , & tantôt le pas plus ou moins fréquemment , felon que fes chevaux font plus ou moins en ha leine. C'eft en voyage & en beau chemin qu'il faut laiffer les guides un peu flotan tes , puifqu'on n'a rien alors à demander à fes chevaux , finon d'aller droit devant eux mais dans les mauvais chemins il faut foutenir les chevaux , de peur qu'ils ne s'abattent ; d'ailleurs cela les foulage en Campagne comme à Paris. Il faut aller doucement , & fçavoir cartayer à pro pos , c'est-à-dire mettre le timon fur l'or niére , afin que les chevaux marchent des deux côtés. Quand le chemin eft pavé , & qu'on trouve un ruiffeau de pavé un peu pro fond , un bon Cocher le paffe de biais 9 prémierément pour que la fécouffe ſoit moindre au caroffe , & fecondément pour que l'effieu en fouffre moins : car les deux roües arrivant au fond du ruiffeau en mê me tems , & rémontant fur le champ , donnent une fécouffe à l'effieu , qui pour oit le faire caffer , furtout quand on va le trot.
112 LE PARFAIT Attelage à fix chevaux , façon de les faire tirer. Six chevaux attelés enſemble ne doi vent tous tirer que dans un bourbier , en montant & lorfqu'on va le pas. Le che val du Poftillon ne doit tirer qu'à demi trait , c'eſt-à- dire , la moitié autant que les autres , parce qu'il porte fon homme : mais dans un beau chemin il fuffit que le cheval du Poftillon porte ſes traits. Les cinq autres doivent travailler également & enſemble , fans fouffrir qu'il y en ait qui lâchent pied , & faffent les pareffeux. Avantage d'avoir unfeptième cheval pour fuppléer en cas de befoin. Lorfqu'on fe met en route avec un ca roffe à fix chevaux , c'eft une précaution fort bonne d'en avoir un feptiéme , en cas qu'un des fix vienne à manquer , ou à être boiteux , ce qui obligeroit à n'aller qu'à cinq. Un Cocher doit foir & matin , & à la dînée vifiter les pieds de fes chevaux , jetter les yeux furtout fon équipage , & graiffer les rou es tous les jours ,s'il eft pof, fible. ¿ Să
< COCHE K. 113 Ce qui arrive quand les chevaux ne tirent pas également. Si de fix chevaux , qui font au caroffe , le Porteur ne tire pas , refte cinq ; fi un des cinq ne travaille pas refte quatre. Si un des quatre lâche encore pied , il ne s'en trouve que trois , qui mènent tout l'é quipage.Voilà ce qui caufe bien fouvent la perte des chevaux. L'excès du travail 9 qu'on leur fait faire , ou qu'ils font d'eux mêmes, les épuife ; ils en crévent , du moins ils deviennent gras fondus , cour battus , morfondus , ou fourbus ; en fuite ils ont la morve , le farcin , ou la galle , maux qui proviennent de l'ex cès du travail qu'on fait faire aux chevaux, ou qu'on leur laiffe faire. Précaution qu'un Cocher doit avoir pour faire tirer tous les chevaux enfemble. Un Cocher qui a de l'expérience , tant pour fa confervation , que pour celle de fes chevaux prévoit à tous les accidens , qui peuvent arriver , en les faifant tirer' également , & enſemble. Il ne leur fait jamais rien faire au-deffus de leur portée; il ne leur permet pas de prendre d'eux- mêmes tant de vivacité qu'ils voudroient ; il-a la K I. Partie. 1
114 LE PARFAIT précaution de mettre deux chevaux vifs enfemble devant à la volée , & des che vaux pefans , & pareffeux enfemble. En fin pour les obliger de travailler tous en femble , il les fçait affortir. De cette éga lité depend leur durée. Les chevaux d'un même attelage doi vent être égaux. Les chevaux d'un même attelage doivent être égaux autant qu'onle peut de la même taille , de la même hauteur,de la même épaif eur,& du même poil. Les chevaux inégaux au trot font toujours un très-mauvais effet. Il faut qu'il y en ait un, qui aille au grand pas , ou au petit galop , pour fournir fon camarade , ce qui le fatigue beaucoup , & même le créve. Des chevaux mal- appa. reillés caufent un grand dommage au Maître . Ainfi l'on doit, autant qu'on peut, les égaler , tant pour la nourriture , que pour l'attelage. Un Cocher, pour appareiller un attela ge de huit , de fix , ou de quatre chevaux , doit mettre les plus forts , les plus péfans & les plus pareffeux derriére, au timon , les plus jeunes , & les plus légers à la vo lée.Le plus fort des deux de la volée doit être hors la main derriére le Porteur, pour
COCHE R. IIS tenir la volée droite prefque toute feule , parce que le Porteur ne travaille prefque point. Si dans un attelage de fix ou de huit chevaux on en a trois de pareffeux . Il faut en mettre deux derriére les plus forts, & l'autre fous la main du Poftillon. Si on n'en a que deux , on les met au timon & les deux plus legers à la volée. On choi fit pour porteur un cheval rélévé du de )1 vant , qui trote légèrement , qui ne ſoit pas chargé d'épaules , ni d'encoulure , qui 1 porte bien fa tête , & qui ait les jambes déchargées. Défavantage pour les Maîtres ; & embarras pour les Cochers d'a voir des chevaux inégaux à con duire. Les Maîtres ne peuvent être bien fer vis ,fi à leurs équipages à deux , à quatre, à fix & à huit , ils n'ont des chevaux de même force , de même trot , & de même bouche. Un Cocher , quelque habile qu'il foit ne peut bien méner avec des chevaux inégaux. S'il y en a un plus fort,il faudra à tousmomens exciter l'un ,&rétenir l'autre ; ce qui n'eft pas poffible , & un pareil at telage ne peut fubfifter long-tems. Le cheval fort fera perir le cheval foible , qui Kij
116 LE PARFAIT voudra s'efforcer de l'égaler , & le cheval pareffeux ruinera le cheval vigoureux ,qui fera prefque tout l'ouvrage. Cependant un Cocher entendu , qui fçait brider des chevaux vigoureux & pa reffeux , c'eſt à-dire, qui les fçait embou cher , en pourra tirer du fervice. Il y a des chevaux violens , qui demandent beau coup de douceur & de prudence. Il les faut atteller au caroffe , un peu plus loin que leurs camarades , afin qu'ils ayent l'avan tage fur eux. Il y a de certains chevaux qu'on nomme pareffeux fans l'être. Ils ont les épaules tendres , le haut de la four chette de la poitrine élévé & pointu . Le poitrail venant à porter deffus, cette poin te de fourchette de la poitrine les bleffe confidérablement à l'épaule , n'ayant pour la plûpart , qu'une fimple peau par deffus, quoique fort gras du refte du corps . Pour donner à ces fortes de chevaux la facilité d'appuyer , & de tirer hardiment , il faut les mettre courts attelés au caroffe , & leur tenir le poitrail très élévé , pourvû que cela n'empêche pas la refpiration. Si un cheval tire plus fort que fon ca+ marade , on le gourme plus court , & on met en liberté celui qui ne preffe pas tant. Un bon cheval tire & s'appuye fur fon mois , quand il fent que le fardeau qu'il
COCHE R. 117 trafne , eft péſant , & il tire avec moins d'effort , quand le fardeau eft léger. Un cheval plus fort que l'autre eft d'ordinaire plus péfant à la main , & plus roide en bouche. Avec de pareils chevaux un Co cher a de la peine à méner un train réglé , s'il ne fçait les brider. Un cheval foible avec un cheval fort fouffre beaucoup , tant en routeque dans l'écurie , s'ils man gent enſemble ; car celu-ci mangeant len tement fon foin , & fon avoine , fon ca marade lui fera tort. Chaleurs contraires aux chevaux gras. Les chaleurs font contraires aux che vaux gras ; quand on eft obligé de s'en fervir pour de longs voyages , il ne faut pas trop les preffer.Si la füeur traverſe leur poil on doit aller doucement environ quarante ou cinquante pas ; fi le chemin dure plus d'un quart- de-lieuë , on les fait réprendre haleine, & dansles fables on ne va que le pas. En hyver dans les tems de gé lée ; il ne faut jamais arréter les chevaux gras furtout plus d'un quard'heure à moins qu'ils ne foient couverts ; finon ils font en danger d'être morfondus ; maladie qui leur fait venir la morve , & la morve les fait mourir..
118 LE PARFAIT Maniére de monter les montagnes & de les defcendre. Aux approches des montagnes un ha bile Cocher ne va que le pas . Si la monta gne eft longue & droite , au milieu il fait prendre haleine à fes chevaux , & quand elle eft montée , il ne leur fait aller que le pas pour leur rédonner des forces. Il a la même précaution , quand il ſe trouve à des defcentes ; & foit pour monter , foit pour defcendre il ne fe fie jamais trop à fes chevaux . Tout le monde de la voiture doit ,fi faire: fe peut , monter la montagne à pied : il en eft de même à une defcente , où les che vaux peineront beaucoup à rétenir la voi ture. On les foulage encore , en enrayant en core une roue de derriére , ce qui l'em pêche de tourner , & par conféquent rend la voiture moins roulante. C'eft leur donner la vie , que de les faire réprendre haleine au milieu des gran des chaleurs , quand ils font de longues routes , & dans les chemins poudreux , & fabloneux. Comme dans Paris , un embar ras, quelque petit qu'il foit, leur fait grand: bien ,› parce qu'ils fe répoſent , un défilé ,
37 CCCHE R. 119 Campagne fait leur en étroit chemin un autant de plaifir . Attention des Cochers à ménager leurs chevevaux fans défobéir aux Maîtres , qui veulent aller grand train. Si malgré les rémontrances du Cocher un Maître , dans le tems des grandes cha❤ leurs, veut toujours faire aller grand train, c'eft la faute,fi les chevaux crévent. Cepen dant un bon Cocher fans être défobéiffant, peut avoir quelques égards pour ſes che vaux, & leur épargner plus de fatigue qu'il pourra. Mais aujourd'hui il fe trouve peu de Cochers , qui fachent gouverner des chevaux , ou qui veuillent s'en dong ner la peine. Manière de faire boire les chevaux , dans les voyagesprécipités.. Il arrive dans les voyages précipités , qu'on n'a pas le tems d'attendre que les chevaux foient réfoidis pour les faire boi re, & que l'eau des puîts qu'on trouve eft trop fraiche. Afin d'y rémedier , un Co eher, dès en arrivant à l'Hôtelérie, où l'on doit dîner , doit faire mettre un grand
¥20 LE PARFAIT chaudron plein d'eau fur le feu , que l'on fait chauffer au premier bouillon , & l'on jette cette eau chaude dans l'eau de puît qu'on aura tirée. Si une chaudronnée ne fuffit pas , on en met une feconde , pour que l'eau que l'on doit donner aux che vaux un demi-quart- d'heure après leur arrivée , foit prefque tiéde. Enfuite on Les déharnache , on les frotte , & on les excite à uriner. Depuis le commencement d'Avril , juſ qu'au commencent d'Octobre , l'eau de puît eft trop fraiche pour la donner à des chevaux échauffés. Elle n'eft bonne que depuis la fin d'Octobre , juſqu'à la fin de Mars. L'eau de riviére leur convient dans les mois de chaleur, Pour celle des petites riviéres elle eft froide en tous tems, & caufe fouvent des tranchées aux che vaux, qui en boivent. Maniére de panfer des chevaux àla dinée , quand on eft en route. Il y a des méfures à garder fur la façon de ménager les chevaux , de les nourrir & de les faire travailler. On voit des che vaux manger trop , d'autres manger trop peu , quelques-uns manger beaucoup à Paris , & dès qu'ils ont fait quinze ou vingt 1
COCHER vingt lieuës ne vouloir manger ni avoine ni foin. Il s'en trouve auffi qui paroiffent " délicats , & qui en Campagne font d'un appetit devorant. Pour bien ménager des chevaux en route , quand on eft arrivé à la dînée , il faut , s'ils font en süeur , juſqu'à dégou ter , les mettre au plus vîte dans l'écurie , les déharnacher , prendre le couteau de chaleur pour les ratiffer par tout le corps, & les frotter enfuite avec un bouchon de paille neuve. On ne les débride qu'un quart - d'heure , ou qu'une demi - heure après. Quand ils le font , on leur donne à deux un demi -boiffeau de forde fro ment. Avant que de les faire boire , on tâche de leur faire manger un peu de foin , on les méne enfuite à la riviére , ou bien on leur donne de l'eau de puît , tirée dès le matin , ou du moinsfitôt qu'on eft arrivé. Le Cocher doit tremper fes mains dans cette eau , pour voir fi elle n'eft point trop fraiche. En ce cas on y jette trois ou quatre poignées de foin > ou un demi boiffeau de fon pour en corrompre la frai cheur , & pour empêcher , qu'ils ne la boivent trop âprement. Quand ils ont bien bû , on leur donne une demi-ordinaire d'avoine , de peur que I. Partie. I
122 LE PARFAIT la trop grande quantité ne les dégoûte S'ils mangent bien, on leur en donne à leur appetit , & unpeu de foin , que le Cocher doit choifir lui-même , car il ne fe doit pas fier à des garçons d'écurie, quand il ne les connoît pas. Quelques momens après on leur donne le refte de l'ordinaire. Quand ils l'ont mangée , on les laiffe en répos jufqu'au départ. Avantage d'arriver de bonne heure à la couchée. Quand on le peut on doit arriver de bonne heure à la couchée , afin de faire répofer les chevaux , & d'avoir tout le tems de les panfer , comme à la dînée. C'est le moyen de les conferver en rou te , car une heure de répos la nuit fait plus de bien que trois heures pendant le jour. On ne doit pas oublier furtout de vifiter les pieds des chevaux , pour en ôter avec un couteau , ou un cure pied les petites pierres & gravois , qui s'y rencon treroient , & de remplir les dedans de cro tin mouillé. S'il y a des chevaux , qui ayent les pieds chauds & douloureux , on doit les déferrer, pour voir fi le fer ne por te point fur la fole , ce qui fe réconnoît,
‫שר‬ leur Chet Cas COCHE R T23 lorfqu'on voit quelque endroit dedans du fer plus poli & plus luifant , que le refte › cet endroit liffé eft celui où le fer a porté. Ondoit faire parer le pied vis-à -vis de cet endroit , puis le fer étant rattaché , on fait fondre dans le pied de la poix noire ou du gaudron , afin de nourrir la fole d'ôter la douleur , & de raffermir le pied. Un Cocher " avant que de quitter fes chevaux le foir , doit avoir attention de 1 les attacher de façon , qu'ils puiffent fe coucher à leur aife , c'eft-à-dire , qu'il faut laiffer à leurs longes affez de longueur 3 pour qu'ils puiffent avoir la tête à bas. de Maintenant il eft queſtion de fonger à leur équipage, & d'enſeigner aux Appren tifs- Cochers la maniére d'ôter les harnois & d'en avoir foin. ' Maniére d'ôter le Harnois des che vaux . Soit en Ville , foit en Campagne fitôt que le caroffe eft fous la rémiſe , le Cocher doit déboucler la grande guide , & jetter le grand bout de travers fur le dos du cheval de deffous- main. On le plie de la longueur d'un pied & demi , afin que quand les deux mors des branches de bri de , & celles de dedans font jettées par Lij
PARFIT LE 124 deffus le col & la tête du cheval , on n'ait plus qu'à les prendre , & à les plier par la moitié , en les renverfant de travers fur le cheval , les bouts pendans en dedans. On prend le tout de la main gauche , ſça voir , le petit bout de la grande guide , & le corps , & les deux branches , qu'on a jettées deffus les couffinets. On met le tout également de travers fur les couffi nets du harnois au milieu d'une petite courroye de cuir , nommée pour cet effet trouffiére , & avec cette même couroye on les lie , on y fait deux demis-noeuds par-deffus , qui doivent être deux boucles, ou deux oeillets . C'eſt pour uneplus gran de facilité , car lorfqu'on met les chevaux. au caroffe , on n'a qu'à tenir un des bouts de cette courroye > & tout d'un coup on trouffe la grande guide. Maniére d'ôtér les traits. Quand la grande guide eft débouclée , le Cocher doit défaire les traits du mê me côté qu'il eft defcendu du fiége , ſoit à droit foit à gauche , cela eft indifférent, & c'eft felon la fituation de la rémiſe , ou la propre commodité du Cocher. Il en peut défaire jufqu'à trois. La meilleure ma niére de defcendre de caroffe eft toujours
COCHER. 125 dehors-main. Après les traits de côté du débouclés on vient à la branche de la petite guide , que l'on débride de la branche du e mors de bride ; En même- tems on dégour me le cheval de dehors- main : enfuite on déboucle les deux branches des deux mors de bride de la grande & petite guide, qu'on jette par-deffus le col & la tête des deux chevaux , qu'on ôte du caroffe. Maniére d'arranger la petite guide. Quand on a jetté la branche de guide du cheval de deffous- main , qui étoit bouclée à la branche du mors de bride du cheval de dehors-main , par-deffus la tê te du cheval de deffous-main , & qu'on 2 jette par-deffus la tête du cheval de dehors main , celle qui eft attachée à la branche du mors de bride du cheval de deffous main , on prend enfuite la petite guide 2 & les deux branches en une poignée , on la tourne autour de la main gauche , on en fait un noeud à oeillet , ce qui eft beau coup plus propre , que d'en faire un fagot. Maniere difaire les traits des Palon niers & les chainettes du timon. t ? Après la petite guide défaite , on dé L iij
*126 LE PARFAIT boucle quatre traits des palonniers , on les met dans les porte-traits , qui font at tachés aux courroyes des deux chevaux . On donne improprement le nom des por te-traits aux deux petits morceaux de cuir, dans lefquels on met les traits . Leur vé ritable nom eft trouffe-trait , & le porte trait eft au-deffus attaché au grand an neau du réculement.Il refte à ôter les chai nettes du bout du timon , c'eft un mor ceau de cuir attaché fous le couffinet , fendu par un bout , l'autre bout eft une efpéce de bouton , qu'onpaffe dans l'an neau de la chainette , & dans l'autre bout du cuir, qui eft fendu en façon de bouton niére. Manière de fe fervir du couteau de chaleur. Quand les chevaux font déharnachés , & qu'ils font rentrés tous en süeur. On fe fert du couteau de chaleur , qui n'eft au tre chofe qu'un morceau de vieille faux , on le tient à deux mains bien ferme, & on en ratiffe le chaval par-tout le corps , en paffant plufieurs fois par le même endroit. Il faut avoir l'attention d'effuyer de tems en tems le couteau de chaleur. Lorsqu'on a ceffé de s'en fervir , on prend l'épouffe 1
1 COCHER. 127 te , & chaque fois on doit effuyer le che val à couche-poil , en commençant par la tête & finiflant par la queue , & entre les jambes de devant " & de derriére. Puis prenant une poignée de paille dans chaque main , on frotte bien par- tout le corps , & particuliérement fous le ventre, jufqu'à ce que le cheval foit fec, ou du moins fi on ne peut pas le fecher totalement avec la pail le , on lui met fa couverture, & on le laiffe ainfi jufqu'à ce qu'il foit fec , puis on le panfe à fond. Ce qu'ilfautfaire après qu'on a paſſé le couteau de chaleur. Après qu'on a paffé le couteau de cha→ feur , le Cocher doit les faire approcher de l'endroit deftiné à leur laver les jam bes , mais auparavant il doit prendre gar de , s'il n'ont pas trop chaud g faire at tention à la ſaiſon , & connoître la quali té de l'eau , dont il fe fert. Si c'eft en hy ver celle de riviére ne vaut rien , mais l'eau de puît eft bonne pour leur laver' les jambes , & les faire boire. Si les che vaux font en sueur , il ne faut ni leur la ver les jambes , ni les faire boire , on les laiffe répofer un quart-d'heure avant que de leur faire l'un & l'autre. Liiij
728 LF PARFAIT Gouvernement des chevaux de Caroffe après une courfe. Les chevaux de caroffe ne font com munément guéres dérangés des heures du panfement , & des répas dans les Villes. Je dirai feulement à l'égard de la nour riture , que ceux qui font la plus grande partie du jour à travailler , doivent avoir la paille pendant le jour , & le foin pendant la nuit. D'ailleurs l'effentiel des foins qu'on doit apporter aux chevaux de caroffe eft celui des jambes:cette partie du corps étant la plus fatiguée d'être toujours. fur le pavé , & d'être le plus fouvent falie: d'une boue âcre & falée , qui corrodant le cuir , l'altére , & y faifant créver les vaiffeaux limphatiques , caufe tous ces maux de jambes & de pieds, comme eaux poireaux , fics , &c. C'eft pourquoi on doit avoir une extrême attention à leur bien nétoyer les jambes , quand ils revien nent da la Ville , afin d'ôter exactement la boue , qui fe foure dans le poil du pâtu ron , & dans le fanon , qui eft communé ment beaucoup plus garni à ces fortes de chevaux , qu'aux autres . La plupart des Cochers mouillent le balet de jonc , & le paffent plufieurs fois
3 COCHE R. 129 fur les jambes du fens du poil , ce qui ne nétoye que la fuperficie, & laiſſe la boue à la racine. Au lieu de cette méthode, qui eft très- mauvaiſe , il faut prendre une éponge mouillée d'une main , & de l'autre une petite broffe longue ; on place l'éponge au genoüil & au jaret , & à méfure qu'on preffe l'éponge , on broffe bien les jam bes en tout fens , & long-tems , jufqu'à ce que l'eau tombe à terre toute claire ; & quand même on auroit méné laver les chevaux à la riviére , il eft bon , s'il y a loin pour le rétour , de laver encore les jambes après en être revenû , pour ôter la boue , qu'ils auront pû prendre de la ri viére à la maiſon. Soin des Chevaux gras après une course. Il a des chevaux de caroffe fort gras, qui dans les grandes chaleurs de l'Eté , quoiqu'on les ait ménés très- doucement → battent du flanc à toute outrance , quel quefois pendant une heure après être en trés à l'écurie , pour s'être mis hors d'haleine , ou par ardeur , ou par foibleſ fe. Il faut les promener pendant une de mie-heure au petit pas , après quoi on les débride , on leur donne du fon mouillé ,
LE PARFAIT 130 puis on leur fait une bonne litière ; ils fe ront très-foulagés , auffi-tôt qu'ils au ront uriné , & il neleur arrivera aucun mal. Soins des Chevaux de Caroffe , outrés de travail après une longue courſe. Quand on a outré des chevaux de caroſſe par une longue courſe,il eft néceſſaire pour éviter la fourbure , ou même qu'ils n'en meurent , de commencer par bien leur ab battre la sueur avec le couteau de chaleur, en même tems de leur bien laver les jam bes,puis les bien frotter & bouchonnerpar tout le corps, enfuite les promener environ une demie-heure,pour leur laifferréprendre doucement haleine : après on leur fera ava lerune bonne pinte de vin rouge tiéde avec deux mufcades rapées , puis jettant deux poignées de fel dans deux pintes de vinai gre,on frottera bien les jambes à froid avec cette compofition : de plus on leur fondra dans les pieds , ( ce qui eft effentiel pour empêcher la fourbure , ) de l'huile de lau rier toute boüillante , ou à fon défaut de l'huile de noix , ou de navette , & par deffus des cendres chaudes , de la filaffe & des écliffes : on rémet le cheval à l'écurie, on le couvre bien , & on lui fait une bon
at Cut 3 GO CHE R. 131 ne litière : une heure après on lui donne un lavement , & une demie - heure après on le bride, & on lui donne du fon moüil lé. On doit avoir foin de tenir les embou chures bien nétes , de peur de dégoûter les chevaux , ce qui arrive lorſqu'on leur met un mors , où l'écume a croupi. Autre manière defoigner des Chevaux quand ils font fatigués. Si des Chevaux de Caroffe ne font pas crottés , quand ils font fatigués , pour leur laver les jambes , on peut fe fer vir du balet de jonc , ou de bouleau : il ne faut pas qu'il touche à terre , de peur de falir les jambes des chevaux. Quand les quatre jambes font lavées , & que la crotte , qui s'y attache eft inbibée , on commence par la premiere moüillée. La meilleure maniére de laver la jambe du cheval 1 eft de fe fervir d'un vieux balai ou d'un trognon de bouleau , on les lave mieux qu'avec un balet de jonc . Quand les chevaux ont fait une longue traite , fur tout fur le pavé, on prend un verre d'eau de-vie , autant de vinaigre , & une chopi ne d'urine , on mêle le tout enſemble , on en lave les jambes des chevaux , depuis le pliantjufqu'au boulet le long du nerf. On le frotte à rébruffe-poil avec la main , &
132 LE PARFAIT feulement aux jambes de devant. Plus on y met d'eau-de- vie , plus la fomentation fait fon effet. On y ajoûte plein la coque d'un oeufde fel en poudre, On le fait fon dre dans de l'eau - de-vie. On ne doit pas le faire chauffer , car l'efprit de l'eau- de vie s'évapore au feu. Cette fomentation conſerve les jambes des chevaux , mais on ne la fait que lorqu'on veut s'en fervir. I Après que les chevaux ont été lavés , on régarde s'ils ne manquent de rien fous les pieds, comme je l'ai dit ailleurs. On les fait enfuite entrer dans l'écurie , & l'on prend plein les deux mains de la litiérepour leur effuyer l'eau des jambes , furtout en hyver. Quand tout eft fait , on leur donne l'avoine , & une botte de foin ſelon la coûtume ordinaire. 1 Confervation des pieds . La meilleure de toutes les manie res , d'entretenir les pieds de devant bons ,felon ce que j'ai appris de plufieurs habiles Cochers , & ce que j'ai lu dans le nouveau Parfait-Maréchal , eft de pouffer 'du crotin à l'endroit où le cheval doit avoir les pieds de devant. On arroſe ſur le champ ce crotin , en jettant deffus avec la main de l'eau du ſeau , afin que tant que 1 ·
BS RS.3 500 101 COCHE R. 133 cheval fera en fa place , fes pieds pofent le fur ce crotin mouillé , ou bien avec une palette de bois on emplit le pied de cro tin mouillé. Cette méthode eft fondée fur ce que les pieds de derriére des chevaux ne font ja mais mauvais , c'eft- à-dire , ni mal nour ris , ni encaftelés , parce que leur fiante fur laquelle ils font prefque toujours po fés à l'écurie , les conferve en bonne con fiftence. Il en doit donc être de même des 88 pieds de devant : s'ils font toujours ſur le crotin mouillé; la fole fera humectée & la corne deviendra liante , ce que ne fait pas la fiante de vache , dont quelques- uns ſe fervent. Elle tient à la vérité la fole en bon état , mais elle altére & brûle la cor ne. La terre de glaife , que les Marchands furtout mettent dans les pieds , entretient le pied en bon état , mais pour peu qu'on ceffe d'en mettre , le pied fe défeche promptement , fi on n'y met pas du cro tin moüillé. Si le haut du pied de devant a beſoin d'être nourri , on prendra de l'onguent de pied , qu'on étendra de la largeur d'un doigt au-deffous de la couronne , en met tant davantage vers les talons que vers la pince cet onguent nourrit la corne , & T'aide à pouffer. Quand on a graiflé le pied
LE PARFAIT 734 avec cet onguent , il ne faut point méner le cheval à l'eau , car l'eau emporteroit ou bien on ne le graiffe , que l'onguent quand il eft revenu de l'eau : quand tout cela eft fait , on donne à chaque cheval fon foin bien fécoüé. Heure de faire boire les Chevaux. A dix , ou à huit heures du matin en Eté , on fait boire les chevaux , en pré fentant à chacun un feau d'eau : ou bien on les méne à l'abreuvoir à quelque gran de riviére , ou à quelque étang : cela leur fait du bien & les égaye. Si on les fait boi re au feau . & que l'on trouve que l'eau foit trop cruë , on en ôte la crudité , met tant la main dedans , en y broüillant du fon : il faut bien prendre garde que les chevauxne boivent de l'eau cruë , c'est- à dire de l'eau de fontaine , de petite rivié re , ou de l'eau de puît , en fortant du puît. Quand ils viennent de l'abreuvoir , on leur avale l'eau des quatre jambes avec les deuxmains , & on leur effuye enfuite avec de la paille. Si on ménoit les che vaux boire à quelque eau minerale , ils n'en voudroient pas boire d'abord , mais cette eau leur eft très- faine , & ils s'y ac Coûtumeroient par la fuite. Pour le foir
I ✓ COCHER. 35 on les fait boire fur les fix heures , de la même maniére , que je viens de le dire. t Heure defaire manger l'Avoine. J'ai déja dit , la quantité d'avoine qu'on doit donner à un cheval de caroffe , par chaque ordinaire. Le premier , fe donne: le matin dès qu'on eft entré dans l'écurie → &qu'on a nétoyé la mangeoire. Le fe cond fe donne vers le midi , au tour de l'abreuvoir , ou après qu'on a fait boire les chevaux dans un feau. Le troifiéme , qui eft la derniére fois , fe donne à ſept heure du foir. Dans une écurie , où il y a plufieurs attelages , & même des chevaux de felle , comme chez les Princes & Seigneurs , avant que de diftribuer les ordinaires d'a voine , foit le matin , le midi , ou le foir , an Palfrénier , vient faire nét tout le long de la mangoire , c'eft-à-dire , que pren nant à fa main un bouchon de foin " " il paffe par- deffous le col de chaque cheval , coulant fon bouchon tout le long de la mangeoire , pour raffembler tous les brins de paille & de foin , qui y font reftés & les jetter , afin que la mangeoirefoit néte, pour recevoir l'avoine. Pendant ce tems , le Délivreur , qui a
LE PARFAIT 136 la clef du coffre , après l'avoir ouvert ; prend la méfure , qui eft un petit pa nier , ou un petit ſeau , il puiſe dans l'a voine , & remplit ainfi fa méſure. Alors elle eft comble . Si on ne veut donner que méfure raſe , il paffe fa main à plat , raſant les bords de la méfure , & par ce moyen il rejette dans le coffre le trop plein. Le Palfrénier , en arrivant au coffre jet te fon épouffete de toile fous l'aiſelle droi te , de façon , qu'une moitié fort par- def fus fon bras ,& l'autre par- devant. Il étend avec ces deux mains, cette moitié d'épouf fete. Le Délivreur y verſe une méſure d'avoine , que le Palfrénier envéloppe , & met fous fon bras , rétournant fon épouffete , de façon , qu'il réçoit une au tre méfure , rapportant en devant la moi tié de l'épouffete , qui étoit derriére fon bras alors il va faire vaner , ou il vane lui- même fon avoine , en jettant chaque méfure , l'une après l'autre dans la vanet te , & les réprennant avec la même man oeuvre ; puis paffant entre deux chevaux il laiſſe tomber à droite & à gauche fes deux méfures d'avoine : on continuë ainfi, jufqu'à ce que tous les chevaux ayent l'a voine. Le Maître Palfrénier , s'il y en a un , ou le Cocher , qui fera préſent , doit Le trouver toujours derriére les deux che vaux 1
COCHER. 137 vaux , qui fuivent ceux qui viennent d'a voir l'avoine , afin de guider le Palfrénier, qui fait la diftribution. Quand l'avoine eſt donnée , les Palfré niers , & garçons d'écurie doivent fe ré tirer , & laiffer manger tranquillement les chevaux ; fans aller & venir dans l'écurie, afin qu'ils ne foient inquiétés de rien , & de peur que tournant la tête , à cauſe du bruit qu'ils entendroient , ils ne laiffaffent tomber une partie de leur avoine. Lorſque l'avoine eft mangée , on va voir s'il n'y en a point quelqu'un , qui ait laiffé partie , ou le tout de fon avoine. A celui- là , on Jui ôtera ce qui lui en refte, & on le mettra au maftigadour , pour lui rédonner appe tit , en cas qu'on ne lui découvre d'autre mal , que du dégoût : fi ce dégoût , pour l'avoine continue , on doit paffer un ou deux ordinaires fans lui en donner. こうし Nourritures accidentelles des Chevaux lub de caroffe & autres. J'ai déja dit , que l'avoine eft la nour riture ordinaire des chevaux , & celle qui convient mieux à ceux qui travaillent , · L c'eft pourquoi on dit , cheval d'avoine , cheval depeine. La paille eft auffi une nour şiture très-bonne , ainfi que le foin , que L. Parties M 4
T 138 I LE PARFA cependant l'on doit donner avec précau tion. Il y a d'autres nourritures acciden telles , féches qui font le fon , l'orge , le froment,le fénugrec,féveroles ou haricots, les coffas de poids gris , les lentilles, l'her be & le fruit , le ſain-foin ſec, ( j'en ai dé ja parlé , ) la luzerne féche , la lande ou le jonc marin , & la paille hachée. Je vais dire quelque nourritures. chofe de ces différentes Du fon. Le fon eft proprement la nourriture des chevaux malades , c'eft de tous les ali mens des chevaux le plus rafraichiffant , & le plus aifé à digérer. C'eft pourquoi il eft le plus en ufage après l'avoine. Plus un cheval eſt échauffé , plus il lui faut con tinuer l'ufage du fon. Un cheval qu'on met au fon , ne peut guéres travailler tout le tems qu'il en mange; c'eft pour lui une efpéce de dié:te, qui diminue les forces pour le travail > mais en même tems * elle lui réfraichit le fang & le rétablit : ainfi quand les chevaux font fort maigres , il eft bon , outre leur ordinaire d'avoine , de leur donner, avant de fe coucher deux picotins de fon mouillé. 1 11
COCHER. '139 De l'Orge. L'Orge en grain , concaffé , à demi broyé , ou la farine d'orge font rafraichif fans , & de plus très-nourriffant ; elles font bien avec l'avoine , pendant quel que tems aux chevaux échauffés & mai gres. Il y a l'orge encore , mais j'en par lerai plus bas. Du Fenugrec & de la paille hachée. Le Fénugrec eft un grain émolliant & nourriffant :. ainfi mêlé avec l'avoine , il fait un très-bon effet pour rafraichir & rédonner du corps à un cheval échauffé. La Paille hachée & mêlée avec l'avoine, eft une très bonne nourriture , moins échauffante que l'avoine pure, & qui con vient principalement mieux aux chevaux alterés du flanc , en mouillant le tout : la doze de paille hachée eft deux jointées de cette paille contre une d'avoine. IVA Du Froment. Le Froment eft un grain exceffivément chaud pour les chevaux , ainfi il n'en faut guéres faire ufage , car il leur met le feu Mije
LE PARFAIT 140 au corps , & leur cauſe la fourbure & le farcin : il fe trouve cependant des cas où on en peut uſer modérement : par exem ple une jointée de froment tous les ma tins , pendant quelques jours , avec un peu de paille , & beaucoup de foin , avant que de faire boire , rédonne du corps à un cheval étroit de boyaux : mais ce n'eft pas par où péchent ordinairement les chevaux de caroffe. La paille de froment , dans la quelle eft refté beaucoup de grain , peut être donnée au lieu de paille & d'avoine aux chevaux , pourvû qu'ils ne ceffent point de travailler.. Des Féveroles , Luzerne , Coffas de pois, Lentilles & Lande. Les Féveroles , ou Haricots de ma rais , n'échauffent pas tant quele froment, mais elles font encore très- chaudes , on: les donne par jointées , & avec modéra tion , & il faut faire travailler journelle ment le cheval, La Luzerne échauffe & engraiffe les chevaux. On donne les Coffas de pois gris , & les Lentilles avec le grain , & Therbe féche : tout cela doit être donné en moindre quantité, que le foin, & il faut faire travailler les chevaux qui en man
COCHER : 147 gent , car ces nourritures fucculentes ne feroient qu'accumuler des humeurs, fau te de diffipation : on en donne auffi pour rédonner du corps aux chevaux , mais auf C fi-tôt qu'ils ont répris corps , il faut les rémettre à la nourriture ordinaire , qui eft avoine , paille & foin. Dans les terrains maigres , on cultive e 3 3 1 une efpéce de génet , dont toutes les feuilles piquent , comme celle du genié vre , qui fe nomme de la Lande , de l'A jonc , du Jonc marain , on le donne aux chevaux en vert , ou en fec , après en avoir amortis les pointes avec des pilons : cette nourriture eft affez bonne ; mais on n'en fait point d'uſage pour les chevaux de caroffe. Du verr. Les nourritures, qu'on donne en vert aux hevaux , font deftinées à les rafraichir , en leur lâchant le ventre , & à leur don ner par ce moyen du corps. Le vert s'em ploye aux jeunes chevaux , & à ceux , qui font extrêmément échauffés de fatigue, ou autrement..Ce Vert s'entend des espéces d'herbes que les chevaux mangent dans Fécurie , & d'eft ce qui s'appelle mettre les chevaux au vert : car quand on les lâ Miii
142 LE PARFAIT che dans les herbages , on dit qu'on les met à l'herbe , & non au vert. L'Herbe & le Vert font bons à bien des maladies ; mais cette nourriture eft perni cieuſe aux chevaux pouffifs , morveux , & farcineux. Quand on met les chevaux au vert , ce qui arrive toujours au Prin tems. L'ufage eft de ne les point panfer du tout , & de leur laiffer leur litiére , fans l'ôter de deffous eux , de façon qu'ils cou chent dans la fange : on prétend que le vert leur profite mieux de cette façon. Ce n'eft pas le fentiment du nouveau Parfait Maréchal , qui penſe qu'il faut toujours tenir les chevaux propres , fans les trop tourmenter . Avant de donner le vert aux chevaux , on commence à les faire faigner , puis le fur lendemain , on lès met au vert. On coupe le vert à l'heure que la rofée eft def fus : il lâche mieux le ventre aux chevaux , puison le donne par poignée pendant toute la journée , tant qu'il en veulent manger , car fi on leur en jettoit une grande quantité devant eux , ils fou fleroient deffus , & s'en dégoûteroient ; ce qui n'arrive pas quand on leur donne pe tit à petit , & on ne dépenſe pas tant d'herbe . Quand le cheval eft maigre , on lui doit
COCHER 143 donner du fon deux fois par jour , fi non une fois fuffit : & toutes les fois qu'on lui en donne , on doit le moüiller , & y met tre deux onces defoye d'Antimoine. Cet te précaution empêche que le vert n'aga ce les dents , tue les vers à méfure que· cette nourriture les forme , & garantit de La fourbure , qui quelquefois prend dans ce tems-là , mais qui n'eft pas dangereuſe , & qu'une faignée , & un rémede pour la fourbure , guérit , fans difcontinuer le vert. Quand des chevaux font au vert, ils doivent être chaudement. De l'Orge en vert. 4 L'Orge en vert eft le meilleur vert , & le plus en réputation pour les chevaux. Il y en ade deux fortes , celui qu'on appelle Efcourgeon , & l'autre fimplement Orge. Ces deux Orges fe donnent , quand elles font en foureau , c'eft-à- dire , quand Pépy eft prêt à fortir du tuyau. On féme PEfcourgeon en Hyver , & il n'eft bon qu'à la fin d'Avril. L'Orge commune fe féme en Mars , & eft propre à donner à la fin de Mai. L'Efcourgeon engraiffe plû tôt , mais L'Orge purge mieux . On féme ces Orges , de façon qu'on en ait toujours au point de maturité , pendant tout le
LE PARFAIT 144 tems qu'on en donne , qui eft ordinaire ment un mois , ou fix femaines. On doit les fémer très- épais. A chaque fois qu'on donne l'orge , il faut toujours la moüiller. De toutes ces différentes nourritures ac cidenteles , on ne ſe ſert guéres pour les chevaux de caroffe , que du fon , de l'Or ge en vert, du Sainfoin , du grand Tréfle J en le coupant en pleinefleur , & de l'her be des prés , dans le tems qu'elle eft verte & tendre, & cela quand ils font malades , ou qu'on les a fait trop travailler. De la Boiffon des Chevaux de Caroffe: La feule Boiffon des chevux de caroffe , & autres eft l'eau. L'eau blanche ſe donne dans de certains cas on fait auffi avaler quelquefois du vin. Toutes efpéces d'eaux ne fe donnent pas indifféremment aux chevaux , car il y en a , qui leur font très-préjudiciables, & qui leur caufent des tranchées très- dan gereufes. Toutes les eaux vives & crües leur font contraires , comme l'eau de fon tainede puî mais l'eau des grandes riviéres d'étangs , de foffés , &c. en un mot l'eau féjournée, & même épaiffe leur eft bon ne. Quand on eft obligé de donner de l'eau de puit, on la tire bien avant de donner 29 & I
JON Lot DIRE 0 COCHER: 145 on lui laiffe prendre l'air dans des pier res , ou autres vaiffeaux , afin de lui ôter la crudité : fi on eft preffé on y met du fon , ou du moins on met la main dans le feau , & on l'y tient quelque minutes. Cet te façon en diminue un peu la mauvaiſe qualité. L'eau de la Riviére d'Effone, fur le che min de Fontainebleau eft pérnicieuſe aux chevaux , il faut abfolument y ajoûter du fon. L'eau blanche , qui n'eft autre chofe que du fon mêlé dans de l'eau , eft la boif fon des chevaux malades. Le vin s'employe pour fortifier & don ner du coeur aux chevaux de felle , quand on veut les méner plus loin que de cou tume ; furtout dans les chaleurs , on leur en foufle dans la bouche , ou leur en fait avaler une chopine avec la corne , quand ils ne veulent pas le boire d'eux- mêmes Situation des Rémiſes . Un Cocher doit faire attention que les Rémifes humides amolliffent les cuirs , & terniffent les clouds. Les bonnes Remifes ont le Soleil-levant en face > au moins 3 jufqu'à deux heures après midi. Les ca roffes s'y confervent , pour peu qu'ils foient entretenus. C'eft l'avantage du Maî are , & l'honneur du Cocher. N I. Partie.
146 LE PARFAIT Soin qu'un Cocher doit avoir de la bri de de fes Chevaux. Après qu'un Cocher a panfé fes chevaux, examiné leurs pieds , & ôté les harnois de la maniére qu'on l'a dit , il doit ſon ger à bien laver les mors de bride , pour en ôter toute l'écume , & les rendre bien nets , afin que les chevaux le lendemain n'ayent point dans la bouche cette écume croupie , ce qui feroit capable de les dé goûter. Pour cet effet on plonge à plufieurs répriſes ces mors dans un feau d'eau clai re, puis on les pend pour qu'ils féchent. Il doit auffi confidérer fi les porte mors font en bon état , & fi on s'aperçoit qu'une gourmette ait écorché un cheval, on n'ou blie pas de la garnir de cuir gras , ou feutre , dont un Cocher doit faire provi fion , pour s'en fervir en cas de befoin. Ce qu'un Cocher doit faire à des Che vaux écorchés par les harnois. Si un Cocher en panfant fes chevaux s'apperçoit que les harnois en frottant continuellement , ou contre le poitrail , ou ailleurs y .ont fait des écorchures , ou enlévures , ce qui arrive principalement
COCHER. br va RM OF On 147 dans les tems de pluye , il doit fe fervir d'eau-de-vie , fuif de chandelle & urine , Les chevaux de brancard des chaiſes de pofte s'écorchent quelquefois au poitrail , pour prévenir les écorchures , fur-tout à ceux qui ont le cuir fin , on doit ſe ſervir d'un faux poitrail , dont on voit la figure à la planche XV. Fig. 4. du nouveau Par fait-Maréchal. Ce faux poitrail eft de cuir noir mince , & c'eft un petit couffinet , au quel font attachées , & bouclées deux bar res , fçavoir , une de chaque côté ; il eft coufu lui-même à une efpéce de barre de bricole , ou furfaix , les barrés foutien nent le faux poitrail en fa place ; le furfaix eft féparé en deux , & fe boucle à deux boucles ; l'effet du faux poitrail eft d'être immobile en fa place , pendant que le vrai poitrail du harnois , qu'on mettra par - def fus frotte fur le faux poitrail , & non fur la peau de l'animal . Du rétour des voyages. Si le voyage a été long , & que les chevaux ayent beaucoup fatigué , ils ſe ront fûrement échauffés au rétour , & auront les jambes & les pieds laffés : c'eſt pourquoi afin de les rémettre de leurs fa tigues , & de rétablir toutes ces parties. Nij
148 LE PARFATT Le Cocher doit auffi-tôt qu'il eft arrivé ; leur faire ôter deux clous de chaque talon des quatre pieds; cela leur mettra les pieds à l'aife , & d'ailleurs comme les pieds en fent quelquefois après un long voyage , fi on n'ôtoit pas ces clous , le fer pour lors gêneroit trop ces pieds enflés. Il ſera bon auffi de remplir les pieds de fiante de vache pour ramolir la fole qui pourroit être défechée ; il ne faudra point alors déferrer les chevaux,ni leur parer les pieds de peur d'attirer la fluxion , mais on leur graiffera avec de l'onguent de pied , & quand ils feront délaffés , on leur parera les pieds , puis on les referrera. A l'égard des jambes , s'ils les ont fati guées , on les frottera plufieurs fois avec de l'eau-de-vie camphrée , ou avec une lefcive de cendres de farment , ou d'autres cendres , excepté celles de bois blanc & de bois flottés, jettées toutes rouges dans de l'eau bouillante , qu'on laiffera réduire de cette eau chaude on frotte au tiers toutes les parties fatiguées , on charge enfuite avec les cendres mêmes , & on continuëjufqu'à ce qu'on voie les jambes , &les épaules fouples; ou bien fi on les fait faigner peu de tems après être arrivés , on leur fait tout de fuite une charge de leur fang , mêlé avec une chopine d'efprit de vin .
COCHER. 149 Pour rafraichififfement intérieur 9 on A doit un ou deux jours après leur arrivée faire faigner les chevaux du col , on leur donne quelques lavemens,& on les met dix ou douze jours au fon mouillé,leur faifant 1 bonne litiére pendant la journée. Il eft bon encore de leur faire manger une livre 3 de foye d'antimoine à deux onces par jour : fi on leur trouve les flancs échauf fés , on leur donne de l'eau mielée ; s'it y avoit grande maigreur , on leur donne roit le vert quelques tems , ou l'orge en vert au Printems , ce qu'on ne feroit pas s'ils avoient les flancs altérés , mais en la place on mêleroit fur un boiffeau de paik on le coupée une poignée d'avoine moüilleroit un peu le tout , & on leur donneroit pendant quelques tenrs. Quand des chevaux fatigués , & qu'on veut rétablir , recommencent à bien boi re , c'eft un pronoftic qu'ils feront bien tôt remis. Ce que je viens de dire pour les chevaux de caroffe fatigués , fe pratique auffi pour les chevaux de felle , de chaiſe de pofte & autres. Manière de mettre & d'ôter les Cou t 1 I vertures. Quand unCocher ou Palfrénier a panfé Niij
250 LE PARFAIT fé fes chevaux , il doit les couvrir de leurs couvertures , qui eft une pièce de coutis quarrée , bordée & ourlée tout autour. On étend cette eſpéce de drap de coutis fur tout le dos , depuis le garrot juſques fur la croupe , & on le fait tenir fur le corps du cheval au moyen d'un furfaix avec fon couffinet ; quelques- uns ajoutent une croupiére de peur que la couverture ne tourne , & font joindre les deux coins de la couverture au poitrail avec des cour royes & des boucles. Les Marchands de chevaux & quelques Curieux ajoutent à la couverture une cri niére , c'eſt-à-dire , un étui de coutis qui envelope le col , les oreilles , la tête , à laquelle on ne voit alors que les yeux & le bout du nez , afin que la pouffiére ne tombe point fur ces parties. Cette crinié re ſe joint à la couverture avec courroyes, & boucles. Quelques amateurs du coup d'oeil de propreté couvrent leurs chevaux à la fa çon des Anglois . Cette maniére eft d'é tendre d'abord un drap de toile blanche de lefcive fur le corps du cheval , puis de mettre par- deffus une couverture de lai ne : cette couverture de laine s'ote pour la nuit , & on ne laiffe que le drap. Cette méthode eſt bonne , car ce drap maintient.
COCHE R. IST toujours le poil liffe & uni : le feul incon vénient qui s'y trouve eft , qu'il faut avoir plufieurs draps de réchange , & en mettre fouvent de blancs ; car ils font bien- tôt fales , & par conféquent mal-propres & défagréables à la vue. L'ufage de la couverture eft bon , & même néceffaire , pour deux raifons : la premiére , pour empêcher la pouffiére de l'écurie de s'amaffer fur le corps du che val , & de boucher les pores du cuir. La feconde , afin de maintenir le cheval dans une chaleur , qui laiffe un libre cours à la tranſpiration , fuppofé qu'il foit dans une écurie, telle qu'elle doit être , c'est- à- dire, ni trop chaude ni trop froide. Vers les neufheures du foir, après qu'on 8 a mis la paille dans les ratéliers , on ote les couvertures de cette façon. On dé fait les furfaix , on débouclé le poitrail , è puis on plie tout le devant de la couver ture de chaque cheval de Caroffe vers le tiers en deffus ; on plie de même le côté de la croupe , puis on la coule en arriére du fens du poil jufqu'à la queuë ; ST alors on l'enléve , & on la met ainfi pliée fur la tête du poteau , ou on la lie avec le furfaix N iiij
152 LE PAR. FAIT Manière de faire la Litière. Avant ou après avoir ôté les couver tures , on fait la litière de la façon qui fuit. La paille la plus propre de la veille ayant été pouffée le matin fous la man geoire , le Palfrenier pour faire la litiére, doit tirer avec fa fourche cette paille , l'é tendrejufqu'aux pieds de derriére des che vaux , puis défaiſant une botte de paille nouvelle pour chaque cheval , il en épar pille une couche fur l'ancienne , & la litié re eft faite. Si une des longes des licols a été attachée au ratélier , le Cocher ou le Palfrenier ne doit pas quitter fes chevaux, qu'il n'ait répaffé leurs longes dans les an neaux de la mangeoire , afin que les che vaux puiffent fe coucher. Ufage du Bouchon. Le Bouchon , dont les Cochers ou les Palfreniers fe fervent le matin après avoir quitté la broffe , pour les chevaux qui ont le poil fin , eft de paille tortillée ou de foin ; il doit être dur & gros comme le bras. On l'hume& te un peu , on le paffe & repaffe fur tout le corps , & particu liérement fur les jambes , qu'on doit s'ap
COCHER. 153 pliquer à frotter long- tems en tout fens le long des nerfs , & aux jointures , juf qu'à ce qu'elles foient bien nettes & le poil bien uni. Ce frottement ouvre leș pores , & contribue à maintenir les jam bes faines. On fe fert encore d'un autre Bouchon de foin , pour nétoyer le matin la man geoire des chevaux , fi mieux on n'aime à Te faire avec la main , avant que de leur donner à chacun leur meſure d'avoine. Un Cocher doit profiter des jours que fon Maître nefort point , pour aller chez le Charron , Bourlier , Set 대 1. lier , Epronnier & Maréchal. Un Cocher doit prendre le tems que fon Maître ne fort pas , pour aller chez les Ouvriers , dont il peut avoir befoin: Ces fortes d'affaires fe font fans que cel " les des Maîtres foient en rien rétardées . Ils doivent être promtement , & parfai→ tement fervis. Les Maîtres de leur côté , quelques affaires qu'ils puiffent avoir ? ‫ولی‬ doivent toujours donner le tems aux Co chers de faire ferrer les chevaux. ‫ܝܘ‬ 3 4.
154 LE PARFAIT Des Fers. Sans parler de la maniére , dont ſe for gent les fers , ce qui eft le fçavoir-faire du Maréchal ; je me contenterai d'appren dre aux jeunes Cochers , qui l'ignorent , que le tournant du fer s'appelle la pince, les côtés fe nomment branches , & les deux bouts s'appellent les éponges. Le meilleur fer , dont on puiffe fe fervir , eft celui de Berry. On doit faire les fers les plus legers que l'on peut : ceux qui font trop pefans fatiguent les chevaux . Il eſt parlé dans le nouveau parfait Maréchal du fer à patins qu'on emploie pour les efforts d'épaules : il peut fervir dans des cas d'accidens , où il faudroit contrain dre le cheval à fe fervir de fon autre jam be , pour foulager celle qui auroit été affectée. Des Clous. Les clous de Limoges excelloient au trefois ; depuis plus de quarante ans on n'en fait plus venir. C'eſt à préſent ceux de Berry : mais on fe fert communément de clous de façon faits à Paris , & de ceux de Normandie & de Liége. On ne
COCHER . 3 all re clous épais de lame : de plus ils font fu jets par leur épaiffeur à ferrer la veine , principalement fi la corne n'eft pas épaif nt 3 3 L & ۶۲۱ ISS doit employer que les clous les plus dé liés de lame , parce qu'ils font un moin dre trou dans la corne , & qu'ils ne font point fujets à s'éclater , comme font les fe. Il faut fe fervir de clous plus forts de lame aux pieds des chevaux de Caroffe , & aux gros pieds qu'aux pieds fins ; mais proportion gardée , les plus déliés de la me en chaque genre font les meilleurs . Dans les tems de gelée , quand on a peur que les chevaux ne tombent fur la glace,. on met à leurs fers des clous à glace , ou des clous à groffe tête , cela vaut mieux que des crampons. Maniére de tenir les pieds des chevaux. pour lesferrer , & d'y pofer lefer.. Quand le Maréchal eft prêt à parer le pied , le Cocher , Palfrenier ou Garçon . d'écurie léve le pied ; fi c'eft celui de de vant , il le tient fimplement avec les deux mains ; fi c'est celui de derriére , il ap puye le boulet & la jambe fur fa cuiffe " & paffe un bras par deffus le jarret. Alors le Maréchal , après avoir nétoyé la bouë ou fiante qui feroit dans le pied , coupe
(1 LE PARFAIT 156 en pouffant avec fon boutoir , ce qu'I faut de la corne & de la fourchéte , pour enfuite affeoir le fer : c'eft ce qui s'appelle parer le pied. Quand le pied eft bien paré , & que le Maréchal a préfenté le fer deffus , il voit s'il porte où il faut ; il broche en fuite deux clous , un de chaque côté , puis il fait pofer le pied à terre , pour voir fi le fer eft bien en fa place : enfuite celui qui a le foin de faire ferrer le cheval , reprenant le pied , le Maréchal continue à brocher tous les autres clous , il les fait entrer d'abord à petits coups , les foute nant droits de l'autre main , ayant précé demment graiffé la pointe avec du fuif , puis quand il fent que la corne eft percée, it achève de les faire entrer hardiment. L'affilure ou la pointe paroît alors en de hors à chaque clou qu'il pofe ; quand il eſt tout à fait broché , il donne un coup de brochoir à l'affilure , afin de faire baiffer cette portion de clou le long de la corne , la pointe en bas. Quand tous les clous font pofés , le Maréchal rompt avec les tricoifes chaque pointe de clou , qui excéde la corne , il coupe avec le taillant du rogne-pied à petits coups du brochoir toute la corne , qui excéde le fer tout au tour , ainfi que
7 4 =₁ 18 COCHER . 157 la corne éclatée par les clous à l'endroit où ils fortent ; il rive les clous en oppo fant à leur tête les tricoifes , pendant qu'il frappe fur ce qui paroît , quand la pointe du clou a été rompue , ce qui l'applatit en l'élargiffant , & maintient le clou en La place. Il eft utile d'ôter avec le rogne-pied un peu de la corne tout autour de chaque clou : c'eft une précaution , qui fait qu'on enfonce davantage les rivets , au moyen de quoi il ne fçauroit bleffer le cheval ; oe qui peut arriver quand ils débordent fur-tout au dedans du pied. De plus à mefure que le fer s'ufe , les clous s’élé vent davantage , & par conféquent les rivets. Ainfi même il faut prendre garde que les chevaux vieux ferrés ne fe cou pent avec les rivets : quand tout ceci eft fait , le Palfrenier met le pied à terre ; alors le Maréchal prend la rappe avec la quelle il unit le tour du pied près du fer, & en donne un coup fur les rivets, Danger de ferrer à chaud. On ne doit jamais appliquer le fer rou ge , ni trop chaud fur le pied , comme font plufieurs Garçons Maréchaux : ils trouvent un avantage à cette façon d'agir ;
LE PARFAIT 758 parce que le fer chaud brûlant l'excédent de la corne , qui empêche de porter le fer également par-tout , il épargne au Ma réchal le tems & le foin de reprendre à plu fieurs fois fon boutoir , pour couper éga lement par- tout; il fait lui-même fa place, fans tant de peine : mais en même tems confommant l'humidité naturelle de la corne , il la defféche , l'altére , la rend caf fante , & enfin la ruine totalement . Fort fouvent ce fer chaud échauffe la fole , & peut rendre le cheval boiteux dan gereuſement. Il y en a même quelque-fois qui en meurent. On peut cependant ap procher un inftant le fer chaud de l'en droit , où on doit le poſer , & le retirer fur le champ , parce que les inégalités ſe ront marquées par une petite couleur de grillé , qu'on emporte enfuite avec le boutoir. On appliquera auffi les pinçons chauds , s'il y en a au fer , afin de les faire porter en leur place. Pour prévenir que les Garçons Maré-, chaux ne brûlent le pied , & pour empê cher même qu'en pouffant le boutoir trop fort , ils ne coupent l'épaule du cheval ou le ventre du Palfrenier , on doit avoir foin des pieds dans l'écurie , en les fiantant , alors la corne fera aifée à couper, & d'eux mêmes ils ne brûleront point.
$ 159 Manière qu'un Fer doit être poſe. ' Il faut que le fer ne poſe en aucune fa çon fur la fole , il ne doit porter que fur la corne juftement , & également de la lar geur d'un demi doigt : l'épaiffeur de la cor ne étant tout au plus d'un doigt. Si le fer appuyoit fur la fole , le cheval boiteroit · 2 COCHER. à moins qu'elle ne fût très-forte. On re connoît file fer a porté ſur la fole, au fer -même car fi on déferre le cheval , on voit que la portion du fer qui aura porté fur la fole , eft plus liffe & luifante que le refte. Il eft cependant des occafions , où on fait porter les fers fur la fole ; mais on la laiffe forte , & le cheval en boite rare ment. A tous les pieds de devant il eft à pro pos que le fer porte en l'air , depuis le pre mier clou du talon en dedans , jufqu'au * bout de l'éponge , de façon qu'on puiffe y paffer la lame d'un couteau. Danger d'ouvrir les talons d'un cheval.. On ne doit jamais ouvrir les talons d'un cheval en parant le pied , c'eft-à-dire , ne point faire un creux , ou une efpéce de goutiére avec le boutoir , en emportant de la fole , entre la fourchéte & le quar tier jufqu'au duffous du talon , & dans le
LE PARFAIT 760 talon même. En évidant cet endroit , on l'affoiblit : de-là il arrive que la corne n'y ayant plus de foutien , elle ſe rapproche de la fourchete , & fait ferrer les talons , les contraignant de fe rapprocher l'un de l'autre. il faut parer à plat , pouffant le boutoir fans le pancher que très- peu . Manière de brocher. Pince devant , Talons derriére. Pour entendre ee dictum Maréchaux , il faut fçavoir que la pince des pieds de de vant d'un cheval eft garnie de plus d'é paiffeur de [corne , que le talon , vers lequel la corne va diminuant d'épaif feur ; de façon qu'il ne s'en trouve pas fuffifamment , pour qu'on puiffe brocher un clou , fans craindre de preffer la veine du pied : ou de toucher le vif, qui eft la chair d'entre le fabot & le petit pied : ainſi on n'y doit point brocher , au contraire la corne eft plus épaiffe aux talons des pieds de derriére , qu'à la pince. On peut donc y brocher, & non à la pince. Comme le quartier d'en-dedans eft plus foible de corne , que celui de dehors , les clous n'y doivent pas être brochés fi haut ; il ne faut pas auffi , pour parler le langage des Maréchaux , brocher en mu fique 2 1
COCHE R. 161 fique , c'est-à- dire qu'il ne faut pas brocher un clou haut , l'autre bas , le troifiéme haut , &c. Des Pinçons. Les Pinçons qui fe font ordinairement. à la pince , ne font autre chofe qu'un coup que le Maréchal donne au rebord de def fus du fer en pince , qui s'élève dans cet endroit en forme de petite plaque , qui monte fur la corne , quand le cheval eft ferré , & qui fert à rendre le fer plus fo lidement attaché. Des Crampons. S fi a S $ Les Crampons font proprement les ta lons des fers. Il s'en fait de deux fa çons ; fçavoir , de quarrés qui forment une épaiffeur d'environ un pouce en quar ré ,à l'extrêmité & deffous l'éponge. Les autres s'appellent en oreille de liévre , ils fe font en tournant , & renverfant l'épon ge fur le coin de l'enclume de toute fa largeur. Cette efpéce eft moins mauvaiſe que la premiére. Mais les inconvéniens des Crampons . en général , font qu'élévant le talon d'un cheval , plus qu'il ne doit l'être O I. Partie.
162 LE PARFAIT naturellement , ils l'obligent à marcher: fur la pince , le nerf ſe trouve racourci` , le cheval fe fatigue & eft ſujet à broncher : cependant dans les pays gliffans & ſur la glace , le cheval ferré à plat fatigue ex trêmement fans crampons , par la force qu'il emploie pour s'empêcher de gliſſer. Dans ces cas , où la néceffité contraint la loi , on doit fe fervir des crampons en oreille de liévre , en abattant un peu la corne aux talons , afin de lever peu le pied du cheval. Cette espéce ne fait pas dommage à beaucoup près comme les gros crampons quarrés , qui foutiennent extrê mement le pied , & font venir des bleimes . qui font quelque fois difficiles à guérir. Il a été imaginé , dit le Nouveau Par fait Marechal , une efpéce de crampons. 1 poftiches , qui fe met dans le moment qu'on en a befoin , & qu'on ôte quand on veut. On fait un trou à l'éponge , on le tarode , & on a un crampon , dont la vife H eft du pas de l'écrou ; on le viffe & le crampon eft en place. On peut quand le crampon n'y eft pas , mettre une vife dans l'écrou , qui ne déborde pas le fer , & qui conſerve l'écrou . Cela eft bon dans un cas preffé , & dans des endroits où il y auroit rifque de marcher fans crampon. Les chevaux , qui travaillent dans les
COCHE R. 163 pays fablonneux , dans les pelouzes , & les chevaux de manége ne doivent jamais avoir de crampons. Les crampons en de dans aux pieds de derriére , font plus uti les , de meilleur fervice , & de meilleure ex 99 grace qu'en dehors , excepté pour ceux qui ufent trop leurs fers en dehors , au quel cas les crampons en dedans ne vau droient rien. De la Ferrure . On ne doit point faire travailler un JAI cheval le jour de la ferrure , s'il eft poffi ble car il y a bien des chevaux qui fei gnent le jour qu'ils ont été ferrés . On doit le lendemain les faire trotter , pour voir s'ils ne boitent point. La premiére ferrure des chevaux eſt eſ fentielle pour la fuite : car le pied prend une bonne , ou une mauvaiſe forme , fui vant cette premiére ferrure. Il n'eft point néceffaire d'attendre le tems propre ; c'eft-à-dire , le croiffant de la lune , pour faire ferrer les chevaux , qui font parfaitement bons. Il y en a à qui la corne des pieds ne croît que trop ; il ne : 5 s'agit que de les bien ferrer , pour les en tretenir beaux & bons. S'ils tombent entre les mains d'un Ma O ij
LE PAR F ArT 164 réchal ignorant , ils deviendront bien-tốt mauvais, On n'a jamais tant vû de che vaux avoir de mauvais pieds qu'aujour◄ d'hui. Les Garçons Maréchaux , comme je l'ai déja dit , pour s'épargner la peine de parer un pied à froid , y appliquent un fer tout rouge , pour en amolir la corne, puis ils le parent fans peine ; mais le pied du cheval devient fec & dur comme du bois. Le feu fait rétirer le peu de nourri ture qu'il reçoit , & la corne en demeure altérée. Premiére Ferrure des Chevaux de Caroffe La premiére ferrure des Chevaux de Caroffe , principalement de ceux qui ont les pieds grands & amples , quoique hauts, eft d'une grande conféquence . Ceux - ci font plus fujets à fe gâter que les autres, fi on ne les refferre jufqu'à ce qu'ils ayent mué. Il ne faut donc point , comme il ſe pratique quelque-fois vouter un peu les fers , & les faire outrepaffer la forme du pied. On doit abattre la corne toute plate, blanchir feulement la fole , n'ouvrir point les talons du tout , ne point du tout cou per les mammelles , & ferrer jufte, fuivant
7W by COCHE R. 165 vant exactement la rondeur du pied tel qu'il eſt. On perce gras , mais on broche bas , de peur d'éclater la corne , qui a été trop affoiblie par le Marchand , qui n'a d'autre deffein que faire paroître le pied de fon cheval creux. On fait un pinçon au bout du fer , afin qu'il refte bîen en place , & long-tems fans s'ébranler. Ferrure des pieds fans défaut. Un pied fans défaut eft celui , dont le fabot eft d'une forme à peu prés ronde & nontrop longue , particuliérement vers le talon,qui doit être fort large ; c'est à dire, que les oignons des talons ne s'approchent point trop l'un de l'autre ; la corne doit être douce , unie , liante , haute , épaifle & brune , s'il le peut , fans aucun cercle , & affés ferme fans être caffante. Le pied doit être droit , creux en dedans , fans pourtant l'être par trop,la fourchéte étroi te , & point graffe. eft fans défaut, Un pied ainfi formé Pour le bien ferrer , il faut parer très uniment l'affiéte du fer , & l'aplanir bien par-tout , prenant garde en parant de ne pas ouvrir les talons. On doit diminuer moins de la corne aux pieds de devant , à
166 LE PARFAIT meſure qu'on approche des talons , & on laiffe la pince plus forte aux pieds de der riére. Pour un pied fans défaut ; on doit for ger un fer ni trop couvert , ni trop peu , qui accompagne juftement la rondeur de tout le pied. Cependant les éponges doi vent s'elargir un peu en dehors vers le ta lon ; en forte que le bout de l'éponge ait une moitié qui déborde le talon en côté. Si les éponges font trop longues , elles fa tiguent , & font forger , ou elles fe pren nent , & font déferrer le cheval : celles qui font trop courtes alongent le nerf, & fatiguent la jambe. Quand le fer eft pofé, on broche bas pour ne rien rifquer. Ferrure pour empêcher l'Encaftelure. On abbbat bien les talons fans creufer les quartiers : on pare à plat les talons & la fourchette : on laiffe la fole forte. Un cheval peut être encaftelé d'un quartier feulement , & c'eft prefque toujours en dedans , comme le plus foible , la corne y ayant moins d'épaiffeur. atc SAP
COCHE R : 167 1 Ferrure des chevaux encaftelés ou ta lons ferrés . . 227 W2 rse L'encaftelure n'eft autre chose que les talons ferrés , c'eſt- à- dire , trop étroits finiffant en pointe , & collés l'un contre l'autre , ils font plus étroits vers la four chette , qu'en haut vers le poil . Ce défaut fait boiter. Pour ferrer un cheval encaftelé , on laiffe la corne extrêmément forte , & on met unfer en pantoufle. S'il fe peut il faut que le quartier pofe fur le talon de fer dans le milieu , & que ce qui en excéde ne tou che point la fole , il n'en eft que mieux : mais comme cela eft difficile, il vaut mieux laiffer la fole forte , alors quand le fer y toucheroit , il n'y auroit pas grand in convenient. Ces fers pofés doivent fuivre juſtement la rondeur du pied aux talons , comme à la fole , ils poufleront en dehors le talon à méfure qu'il croîtra , & c'eft ce qu'on demande. Čes fers font très-fta bles. On graiffe les pieds avec de l'onguent de pied , & on les emplit de crotin moüil lé. Il faut laiffer répofer le cheval après cette ferrure , jufqu'à ce qu'il ait les pieds élargis. Quand l'habitude en eft priſe , un 1
$68 LE PARFAIT cheval fert fans boiter , comme à l'ordi naire. Lorfque l'encaftelure eft fi forte qu'elle refifte à tout ce que deffus , on décorne la fole , jufqu'à la rofée , on met une em miellure quatre jours après on défole , ce qui est toujours le plus prompt & le meilleur. Le cheval étant défolé on fend la fourchette avec un coup de biftouri jufques dans les paturons , en enfonçant d'abord le biftouri de ſon épaiffeur , & le foulageant en entrant dans la fourchette , de peur de toucher au petit pied : puis on met deux , trois , ou quatre rayes de feu , à un doigt de diftance l'une de l'au tre , depuis le talon , jufqu'au tiers du quartier de haut en bas. On forge un fer large , qui paffe les quartiers en élargiffant d'un doigt, & long 'éponge , qui convienne au pied élargi. Onmet le fer , on fourre des plumaceaux durs dans la fente du talon , qu'on imbibe. de thérebentine , & de très-peu d'hui le de laurier. On met l'appareil de même fur la fole , on compreffe fort les pluma geaux au talon : on met une rémolade au tour du pied pour le faire croître. La fole reviendra , remplira le vuide de l'élargif fure , elle appuyera les quartiers , fou tiendra les talons , & le pied en croif fant
COCHE R. 169 Tant réprendra la forme qu'il doit a voir. Ferrure des pieds plats. Pour ferrer des pieds plats , qui com 2222 & Bus D mencent à s'élargir , on pare un peu le pied, & on forge un fer,qui ait les branches nétes , depuis le premier ou le fecond trou de la pince jufqu'au bout de l'éponge. On eftampe fort maigre les quatre derniers clous des quartiers du côté des talons. Le fer ainfi forgé ne fuivra pas la forme des quartiers. Quand il eft pofé , on ôte avec le rogne- pied l'excédent de la corne aux quartiers , & à la pince. Il faut brocher haut l'affilure droite , & des clous fort dé liés de lame ; & on met fous le pied un ref trictif de fuif de chandelle fondu. Quand le cheval eft ferré , on le laiſſe deux ou trois jours , cinq ou fix ſuivant le cas fans le faire travailler , & on ré ferre toujours le cheval ainfi , jufqu'à ce que le pied ait par ce moyen acquis une belle forme. Ferrure des pieds combles. Le pied comble eft un pied dont toute la nourriture fe porte à la fole , ce qui Contraint non-feulement la corne à prêter, P I. Partie.
LE PARTÀIT 170 & à s'élargir , mais encore fait outre- pa fer la fole au-delà du niveau de la corne. Quand cet accident eft vieilli à un certain point , il eft impoffible d'y rémedier. On peut le prévenir dès qu'on y voit de la difpofition par de bonnes ferrures. Mais fi le mal eft commencé, & qu'on voie que le pied foit comble , voici comme ¡ on y doit rémedier Après avoir très-peu paré feulement de la pince , & n'avoir fait que blanchir les quartiers & les talons pour l'affiéte du fer , & avoir ferré de la même maniére , qu'on ferre les pieds plats , on y met du tarc , ou du reftrinctif, & une emmielure, ou onguent de pied au tour du pied. On rénouvelle pendant trois jours l'aftringent & l'emmielure , graiffant toujours la cou ronne , lailant le cheval cinq ou fix jours en répos , & réfferrant toujours ainfi juf qu'au rétabliffement du pied. Si le cheval a les pieds fort combles , on laiffe toute la fole fans en rien ôter : on fait des fers peu ou point voutés , fuivant le beſoin ; on les perce fort maigres , & on les laiffe porter près de la fole , ce qui n'eft pas dangereux , puis on ferre com me deflus avec l'aftringent , & l'emmié lure , tous les deux ou trois jours pendant un mois , & on continue ainfi jufqu'au rétabliſſement du pied.
COCHER. tre-p Com cert ier.C 171 Ferrure des chevaux qui fe coupent. Un cheval qui fe coupe , eft celui qui avec un pied fe froiffe l'autre au boulet en marchant. Les chevaux fe coupent plus J men ante me fouvent des pieds de derriére , que des pieds de devant. D'abord le poil fe coupe au dedans du boulet , puis l'endroit s'é corche à la fin jufqu'à l'os , & quelquefois le boulet enfle beaucoup . Cet inconvenient arrive , 1 ° . Aux che vaux , qui ne font pas encore habitués à à travailler : 2 ° . A ceux qui portent mal leurs jambes en marchant : 3 ° . Par laffitu de : 4 °. Par une vieille ou mauvaiſe fer rure , ou par les rivets qui débordent la corne. La ferrure eft l'unique moyen d'empêcher les chevaux de fe couper. Si un cheval fe coupe , parce qu'il n'a pas encore beaucoup travaillé , il n'y a qu'à le ménager , & l'accoutumer à mar cher petit à petit, laiffant plus d'épaiffeur au côté & à l'éponge du fer du quartier d'en dedans , qu'à celui de dehors. Si la façon ordinaire de laiffer la branche forte & le quartier haut ne réuffit pas , il faut effayer le contraire , qui réuffit quelque fois , .c'eft-à-dire , la branche forte en dé hors , avec un crampon large , & en de Pij
172 LE PARF AIT dans la branche mince , courte & droite i cela approche les jarets l'un de l'autre. Si la ferrure eft trop vieille ou mauvaiſe, il faut réferrer , & s'il y a quelque rivet , qui déborde il faut le couper On doit déferrer des deux pieds un che val , qui porte mal fes jambes par foiblef fe de reins , ou autrement , & qui fe cou pe aux jambes de derriére. On abbat fort le quartier de déhors à chaque pied , fans toucher à ceux de dedans.On ferre l'épon ge en dedans , afin qu'elle fuive le rond du pied , fans aller au-delà du talon , on lạ coupe auffi courte , que le talon , & on met des crampons en dedans. Si le cheval fe coupe aux jambes de devant , on doit faire la même chofe ' , excepté les cram pons qu'on ne met point. Si après cette ferrure le cheval fe cou pe toujours ; après avoir abbattu le quar tier de déhors jufqu'au vif , ſans toucher à celui de dedans , on groffit les éponges du dedans du double. Un fer ainfi forgéfe nom me fer àla Turque. On doit à ces ferrures river les clous dans la corne,fi près qu'ils ne paroiffent pointau dehors, & l'on peut pour les mieux river encore , brûler un peu avec un fer chaud , au deffous des trous , pour y loger le rivet , ou bien ne point mettre de clous en dedans , & ajoûter un pinçon , pour tenir le fer ferme,
TOS tre Tra COCHE R. 173 Si le cheval fe coupe de laffitude , il n'y a point de meilleur rémede que de le laif fer répoſer , & de le bien nourrir. ALI Ferrure des chevaux quiforgent. Muk Les chevaux qui forgent font ceux , qui avec le fer des pieds de derriére , attrapent ceux des pieds de devant. Les chevaux forgent de deux maniéres. Les uns don nent le coup dans la voute du fer , c'eſt- à dire , fous le pied de devant , les autres forgentfur le bout des éponges , & fe dé ferrent ainfi ce défaut vient ordinaire ment de foibleffe de reins , ou parce qu'un cheval eft ruiné. Si c'eft un cheval de felle fouvent c'eft auffi la faute du Cavalier , CO qui ne fait pas tenir fon cheval enſemble , & fous lui , en l'avertiffant de tems en tems. Si la faute vient du cheval , & qu'il forge aux talons , c'eft-à-dire , aux épon ges , il le faut ferrer fort court d'éponge. Elles doivent à peine paffer au-delà du ta lon , ou on genêtre les fers , qui eft rélé ver les éponges au talon. S'il forge dans la voute du fer , on étrecit le fer de devant à la pince en dedans , & on met deux pin çons aux deux côtés de la pince de der , qu'il faut rendre demi - quarrée riére , Piij
LE PARFAIT 174 ou fort camufe. Ces fortes de chevaux fujets à forger , forgent le plus , lorſqu'on les pouffe au grand trot , & en montant un pont , ou une montagne , mais lorf qu'on les méne au petit trot , ils ne for gent ni en montant , ni en defcendant. Les chevaux , qui font hauts fur leurs jambes font fujets à cet inconvenient , & fur tout les jeunes. Lorfqu'ils font vieux, c'eft-à - dire qu'ils ont atteint l'âge de neuf ou dix ans , ils ont les jambes rudes , & ne forgent plus. Quand un cheval forge , c'eft une marque , qu'il a les nerfs des jam bes fouples. Ceux qui font ferrés & étroits de devant font fort fujets a ce défaut , parce qu'ils ne lévent pas les pieds de de vant affés vite , pour faire place à ceux de derriére. Plus on pouffe ces fortes de che vaux au grand trot , plus ils forgent. On doit vifiter fouvent les pieds des chevaux, qui font fujets à forger. Pour l'ordinaire ils ont les pieds mauvais & ils fe déferrent. aifément. Des Chevaux qui ſe déferrent . Quand un cheval ſe déferre en route , & qu'on eft éloigné d'un endroit où on puifle trouver un Maréchal , fi on laiſſe marcher quelque tems ce cheval pied nud ,
COCHER. eva ÉES 3593 RAS BS Ontz sh for ITS s'ufera , & fe gâtera la corne , à propor tion qu'il fera délicat , ou qu'il marchera dans un païs dur , de façon qu'enfuite on ne pourra plus le réferrer. Mais un Cocher 1 attentif a dans fa fer riére des clous & der fers , fait brocher un clou , ratacher le fer , s'il le rétrouve , fi il ne le rétrouve pas , il a un fer brifé qu'on nomme auf fer à tous pieds , & il s'en fert. Ceux qui ne penfent pas à fe four nir de ce qu'il eft néceffaire , doivent en véloper le deffous du pied avec une piéce de chapeau , un linge , ou un mouchoir , & enfin ce qu'ils trouvent pour arriver à l'endroit où ils puiffent faire réfer rer. Le foulier de cuir nouvellement ima It giné, autant pour les chevaux de felle, que pour les chevaux de carofle , qui reffem ble à une bourſe , dont le fond eft une fémelle forte , & dans laquelle on fait ren trer tout le pied , eft felon le nouveau Parfait-Maréchal , d'une très-bonne ima. gination , & on devroit s'en munir, quand on entreprend un voyage. Des Chevaux difficiles à ferrer. E Quand on n'a pas accoutumé de bon ne heure des chevaux à lever les pieds , & Pij
176 LE e PARFAIT à frapper deffus , étant poulains , il s'ent trouve de très- difficiles à ferrer , c'eft- à dire , qui ne veulent pas fouffrir , qu'on leur leve les pieds , ou qu'on cogne le fer. Aux uns un torche-nés feul fuffit , pour les faire tenir tranquilles. D'autres ne veulent point être attachés , & fe laiffent ferrer , en les tenant fans gêne , par le bout du licol. D'autres fe laiffent ferrer , pour vû qu'ils foient dans leur place à l'écurie : d'autres s'il y a quelqu'un monté deffus. On met une bale dans l'oreille à quelques uns , ou le torche- nés à l'oreille. Il y en a qu'on ne peut ferrer qu'au travail . A d'autres on met une platte - longe , qui tient de la queue au pied de derriére , & pour le pied de devant , on met une plate-longe , qu'on paffe par-deffus le dos, & un homme tient le pied levé , en le ti rant à lui , & n'eft point en danger. Ou bien on fait trotter le cheval en rond avec des lunettes , dans un endroit raboteux , cela l'étourdit , il tombe & rétombe plu fieurs fois, & quand on le voit bien étourdi , on l'arrête , & on le ferre com me on veut. Ferrure contre les clous de rues ou chicots. On ne pare jamais ni la fole , ni la four
P COCHEK . 177 chette , & lorfqu'on voit qu'elle s'écaille par vieilleffe , & à caufe qu'il s'en forme une nouvelle fous la vieille , on pare le pied pour ôter fimplement ce qui fe fépa re ,& on ne pare jamais que la corne pour y ajufter le fer : cela fait que cette fole épaiffe défend le deffous. Cette ferrure , qui eft deſtinée à garan tir les chevaux des clous des rues , & des chicots , ou du moins à les rendre moins dangereux , n'eft pas fans incon venient , car elle peut caufer des bley mes , ou faire broncher le cheval , néan moins elle peut convenir à de certains chevaux. Commc les cloux des rues & les chicots caufent des plaies contufes , qui font plus ou moins dangereuſes ; j'en par lerai dans la troifiéme partie. T 1 Autres ferrures. Les chevaux rampins , ou juchés en vieilliflant deviennent incurables.Leur fer rure eft la même qu'aux pieds de devant boulétés . On laiffe la pince fort longue , on abbat les talons , on fait déborder le fer en pince , plus ou moins , & graiſſer le nerf de la jambe . Aux chevaux qui ont le pied gras , on "
PARFAIT LE 178 doit abbattre toute la mauvaiſe corne brocher le plus haut qu'il eft poffible , tenant l'affilure droite. Il faut brocher bas à un bon pied , pour ne rien rifquer, mais il faut rifquer à un pied foible ou gras , afin que le fer tienne affez long-tems, pour tui laiffer révenir le pied. En parant les pied de talons bas , on doit feulement abbattre la pince , fans toucher en aucune façon aux talons , & même ne point toucher à la fourchette , à moins qu'elle ne fe pouriffe ; alors on la pare toute platte. Si avec un talon bas un cheval a la fourchette graffe , il faut la laiffer forte & voilà tout. Aux chevaux , qui ont des feymes , ( ce font des fentes à la corne , ) on pare le pied , laiffant la fole forte aux talons , & on fait forger un fer , dont les éponges foient plus fortes qu'à l'ordinaire , & on les tourne de façon qu'elles imitent le ta lon des fers à pantoufle. On les ajuſte ſur le pied , de façon que le milieu du talon foit appliqué fur l'éponge. On doit pren dre garde que le dedans des éponges ne porte que peu ou point fur la fole. Cette efpéce de fer eft auffi bonne pour les talons , qui commencent à fe fer zer. On peut encore ferrer les chevaux 31
J COCHER. 179 qui ont des feymes avec des fers à pantou fe. Ces ferrures jettent en déhors le quar tier , ou eft la feyme & l'ouvrent. Aux chevaux , qui ont un côté des ta lons plus haut que l'autre , ce qui s'ap perçoit en regardant le haut des talons , paturon , il n'y a où ils fe joignent au paturon point d'autre rémede que de deffoler , & couper toute la fourchette jufqu'au fond afin de la tenir égale quand elle revien dra. Pour les chevaux , qui ont une fente ap pellée pied de boeuf, & qui arrive au train de derriére , comme à celui de devant , on pare le pied , de façon qne le fer ne porte point fur la corne , à un pouce autour de la fente , en faifant une entaille ou bizeau dans la corne. On fait deux pinçons au fer des deux côtés de la fente , & on graif Le par fois ce pied là. Pour prévenir les bleimes , on abbat le talon , fi le cheval en a trop , s'il a le quaf tier de dedans trop ferré. Pour empêcher les bleimes , après avoir paré le pied , on ferre à pantoufle de ce côté-là , laiſſant la fole forte. Pour ferrer un cheval qui bronche , il faut abattre la pince & la réléver. Si le cheval qui bronche a le nerf foulé , les jambes travaillées , ou les épaules foibles,
180 LE PARFAIT la feule ferrure n'eft pas fuffifante. Il faut là - deflus confulter le Nouveau Parfait Maréchal. Dans ce Livre que je cite , il y a enco re d'autres ferrures , pour d'autres incom modités. Celles dont je viens de parler ne font pas pour inftruire les Maréchaux, qui doivent fçavoir leur métier ; je ne veux qu'apprendre aux Cochers & Palfre miers , la maniére dont doit être ferré un cheval , qui a le pied bon ou mauvais afin de rémontrer dans le befoin au Maré chal , ou au Garçon Maréchal , qui par ignorance ou autrement , ne s'y prendroit pas bien. Ce qu'il faut faire aux Chevaux qui ont les pieds mauvais. Quand les chevaux ont les pieds mau vais , on les rend bons , en ne les ménant jamais à la riviére , en ne leur faifant point toucher le feu , & en leur faifant éviter le pavé , foit dans l'écurie , ou dans la cam pagne. Pour préferver un cheval du pavé dans Fécurie , on lui laiffe jour & nuit de la paille fous les pieds. Cette méthode eft très-bonne : car un cheval ; quand il eſt fatigué , le couche s'il a de la litiére fous
COCHE R. 181 lui ; & quand il ne refteroit qu'une heure en cet état , cela lui fait plus de plaifir , que s'il mangeoit une meſure d'avoine , plus que fon ordinaire , & il eſt toujours plus gras que les autres. Un Cocher en Campagne doit , autant qu'ilpeut, faire éviter le pavé àfes Chevaux, Quand un Cocher roule en campagne, il doit , autant qu'il peut , faire éviter le pavé à fes chevaux , tant pour leur confer ver les jambes & les pieds , que pour mé nager les fers , & éviter les pavés pointus. Généralement toute forte de pavé ronge & coupe les pieds des chevaux , leur laffe les jambes , rompt les bandes des rouës , brife les reins des Cochers par les fécouf fes , & fatiguent ceux qui font dans le Caroffe. Défaut des petits pieds. Il y a des chevaux , qui ont le corps beau & bon , & qui n'ont ni jambes ni pieds , & bien fouvent ils ont un grand corps , & de petits pieds. Ces fortes de pieds ne pouffent que très-peu de corne : Ils font altérés & arides , fi on ne les ra
182 LE PARFAIT fraîchit avec de la terre glaife en hivér , & de la bouze de vache en Eté. Ils pouffent une fuperficie de corne , qui croît plus le corps de la corne même ; &l'on s'en aperçoit , quand la corne déborde le fer des deux côtés du même pied. Manière de conferver la Corne. Comme tous les défauts , qu'un che val peut avoir aux pieds 2 font caufés par l'aridité & la féchereffe du pied 9 oc cafionnée par une chaleur , qui diminuë la fraicheur naturelle , qui doit s'entretenir dans lepied ; pour maintenir la corne en bon état , il faut avoir foin de fupléer au défaut de la nature , ou de réparer ce que la négligence & le peu de foin ont occa fionné. Car quelques uns de ces défauts s'augmentent , & même ſe produifent par la faute des hommes. Pour que le pied d'un cheval foit bon , quela corne foit douce, & liante, qu'elle foit affés épaiffe pour foutenir le corps du che val , & pour le pouvoir ferrer à demeure & enfin pour l'empêcher de boiter , il faut avoir attention de tenir les pieds gras , & quoique toutes graifles & huiles foient bonnes , on a imaginé plufieurs récettes d'onguent de pied , dont le meilleur eft le cambouis.
COCHER. 183 Ce n'eft pas affés que de fçavoir con ferver la corne de fes chevaux , il faut en core fçavoir leur enfaire venir de bonne , quand ils ne l'ont pas. Pour y réüffir , on prend une livre de lard gras du plus vieux, une demie livre de fuif de bouc , trois on ces de thérébentine , quatre onces de bon ne huile d'Olive , autant de cire neuve , un quarteron de miel. On fond le tout dans un pot de terre en l'ôtant du feu , ony mêle trois onces de graiffe de cheval, deux onces d'agrippa , deux onces de mar ciatou , qu'on brouille avec les autres drogues, jufqu'à ce que le tout s'épaiffiffe. Quand il eft encore tiéde , on en remplit plufieurs petits pots de terre. On en frotte de trois jours en trois jours la couronne du fabot du pied du cheval , deffous le poil, avec la groffeur d'une noilette à cha que pied. Maniére de couper la Corne. J'ai déja dit que quand on voit la corne au pied d'un cheval , qui déborde le fer on la doit couper avec le rogne-pied & le -brochoir , qui fert à fraper deffus le ro gne-pied. Pendant qu'on rogne le corps d'un pied , il faut faire lever l'autre par quelqu'un. Ces fortes de pieds ne doivent
LE PARFAIT 184 pas être ferrés juftes, Il eft bon que le fer déborde de l'épaifleur d'un écu . Quand la corne paffe le fer on la rogne, pour l'em pêcher de croître davantage , d'éclater , 4 de s'enlever par morceaux , & crainte qu'il ne s'engendre de la pourriture entre la bonne & la mauvaiſe corne. Maniere de dreffer des Chevaux de Caroffe. Il eft du devoir du Cocher de fçavoir dreffer , & accoutumer de jeunes chevaux, à l'exercice du Caroffe. Pour cet effet , il les faut mettre à un chariot leger , qu'on a foin de graiffer , pour le rendre plus facile à traîner. Quand on a attelé ces jeunes chevaux , le Cocher doit monter fur le fiége , ou marche- pied du chariot,afin d'é viter les coups de pied qu'il pourroit re cevoir. Il doit avoir une gaule à la main longue de cinq ou fix pieds pour pouvoir atteindre feulement au poitrail des che vaux. Il a befoin d'un homme pour le feconder , crainte que les chevaux , qui ne font pas accoutumés à l'attelage , ne réſiſ tent , & réfufent l'exercice qu'on leur de mande. Cette feconde perfonne doit pren dre les chevaux par les rênes des brides à un pied & demi, par les deux branches du mors
COCHER . 185 mors de bride. Il faut qu'il marche de vant les chevaux , afin de leur donner en vie de le fuivre , & de les mettre dans les traits , & le train d'obeïr. Pour exercer de jeunes chevaux à un chariot , on doit choifir une grande place, ou une ruë très large , & une terre ferme s'il eft poffible. Il ne leur faut la premiére fois faire faire que deux ou trois tours , les arrêter pour les careffer, leur faire connoître le métier, les faire réprendre haleine , & leur pré fenter à réculer un pas ou deux. Second , troifiéme & quatrième exer cice. Le lendemain on recommence la mê me leçon. On fe fert des mêmes mors de bride que la premiére fois . Ils doivent être vieux , & s'ils leur conviennent on leur en fait faire à peu près de ſemblables On les promene un peu plus long- tems que la première fois. S'ils ont récule deux pas , on les fait réculer quatre la feconde fois. En les ôtant du chariot , on les met dans l'écurie , & on les fait tourner autour des piliers avec un Machigadou dans la bouche l'efpace d'une heure. La troifiéme & quatrième fois , à l'heure que le Cocher le juge à propos, l'exercice I. Partie. Q
186 LE PARFAIT doit être le même que les deux premiéres fois , en arrêtant de tems en tems ces jeu nes chevaux , & les careffant pour les ren dre fouples & adroits. Il ne faut pas qu'ils foient gênés dans leur harnois , juſqu'à ce qu'ils foient faits au métier , auquel on les affujétit peu à peu . Si ces jeunes chevaux ont réculé à lafeconde fois quatre pas , à la troifiéme ils réculeront fix ou huit pas. Voilà la meilleure maniére de dreffer de jeunes chevaux au chariot. Si après ce travail ils écument , & font en füeur , on ne les doit pas méner à la ri viére , ni les laver avec de l'eau de puît , rien n'eft plus contraire à leur fanté. On attend qu'ils fe foient répofés l'efpa ce d'u ne demie heure , ou trois quarts d'heure , felon la courfe qu'ils ont faite. La fanté du cheval dépend de la façon de le gou verner , pour le travail & pour la nourri ture. Quand on la fçait , il eft plus aifé de prévenir, & d'empêcher que certains maux. n'arrivent aux chevaux , que de les guérir, quand ils en font attaqués. La füeur, quand on la fçait ménager, eft très-utile à la fan té des chevaux. Elle purifie le fang , pour vû qu'elle ne foit pas exceffive. C'eft au Cocher à fçavoir bien ménager la füeur de fes chevaux.
COCHER. · 187 Exercice du Caroffe. Après l'exercice du Chariot , qui fe doit faire trois , quatre , à cinq fois au tant que le Cocher le trouve bon , on fait faire à de jeunes chevaux l'exercice du caroffe , avant que de s'en fervir pour l'u fage ordinaire. Cet exercice eft le même que celui du chariot. Avec le caroffe on apprend auffi à de jeunes chevaux à ré culer , & à fe ranger fous la remife , & le tout avec douceur. Tout dépend des commencemens pour bien dreffer des Chevaux. ry Autant qu'il eft poffible , un Cocher ne doit pas brufquer fes chevaux. La ma niére de dreffer des chevaux au caroffe , dépend abfolument du premier Cocher qui en a foin. S'il eft doux & prudent , s'il a la main bonne , fes chevaux feront doux & maniables , pourvû qu'illes méne long -temps. Le malheur des chevaux eft le changement, d'une bonne main dans une mauvaife ; & leur avantage eft de tomber des mains d'un mauvais dans celle d'un ebon Cocher. Quand on amis trois ou quatre fois des Q ij
188 LE PARFAIT chevaux au chariot , il faudroit qu'ils fuf fent bien difficiles à dreffer , s'ils n'étoient pas capables d'être mis au caroffe. C'eft à un Cocher habile & expérimenté d'en décider. Si des chevaux font enclins à jetter du derrière , il faut continuer à les mettre au chariot pour les corriger douce ment en voici la manière. Maniere de corriger des Chevaux qui jettent du derriere. Pour corriger des chevaux , qui jettent du derriére , on leur donne des coups de fouet fur les épaules , au- deffus de la poi trine..On les furprend en frappant , afin qu'ils n'ayent pas le tems de lever le der rière. Il y a des Cochers qui font claquer leur fouet , & qui leur en donne fur les feffes , cette maniére n'eft pas bonne. Chevaux faciles à dreffer. I ya des chevaux fi faciles à dreffer , que dès la premiére leçon qu'on leur don ne au chariot & au caroffe , ils font ca→ pables de méner. Des chevaux fi faciles font ceux qui prennent fix ans , & qui ont déja travaillé dans leur pays natal. Plus les chevaux font jeunes , plus ils font difs
COCHER . 189 ficiles à dreffer , car leur inftin& t n'eft pas encore ouvert. Chevaux mal dreffés par l'ignorance des Cochers qu'on en a chargés. Il y a des Cochers fans expérience , qui veulent que des chevaux , qui n'ont quelquefois jamais vû ni caroffe ni cha riot , foient tout d'un coup propres à mé ner un équipage , & par leur manque de fçavoir - faire , il arrive qu'ils gâtent le naturel & la bonté des chevaux , qui ne veulent , & fur-tout les jeunes , que de la douceur. ByGT Maniere de corriger les Chevaux qui ont des défauts.. î Il fe trouve des Chevaux qui font d'un tempéramment fombre & fournois , & de peu d'entendement. Il eft à propos d'u fer de correction envers eux , mais ce ne doit jamais être fans fujet , & à contre temps. Il faut furprendre le cheval en fau te , & fur le champ le châtier , pour qu'il connoiffe le mal qu'il fait , & enfuite le flatter & careffer , pour le faire craindre & aimer. S'il rétombe dans les mêmes fau tes , on continue les châtimens & les mê
190 LE PARFAIT mes careffes. Un ou deux coups de foüet bien appliqués fuffifent dans le temps de la faute commife pour le rendre obéiffant. Un Cocher , pour bien gouverner un che val , eft obligé d'en connoître l'humeur & le tempéramment. S'il eft doux , il le doit manier doucement. S'il eft capricieux fournois , malicieux & pareffeux , il le faut corriger , mais toujours le furpren dreen faute. Maniére de faire réculer des Chevaux opiniâtres. Aux derniéres leçons , qu'on donne à de jeunes chevaux , on doit employer plus de temps qu'aux premieres , parce qu'il faut les faire réculer à droit & à gauche , & pour cet effet chercher un endroit commode pour le réculage. Il y a des chevaux qui réculent facilement , d'autres qui font opiniâtres. Pour rédui re ceux - ci on prend une gaule ou une baguette , fans fraper fur les jambes , on Fapproche , on lui fait peur en avan Cant toujours à méfure qu'il récule , & quand il a réculé deux ou trois fois } Farrêter , & le careffer , enfuite le fai re partir environ trente ou quarante pas dans un lieu favorable ou avantageux , &
COCHER. 191 le préſenter à réculer avec une baguette , en approchant toujours des jambes du che val. Après cet exercice , fi la cour du lo gis eft affez large , le Cocher doit peu-à peu eflayer de les faire réculer pour ran ger le caroffe fous la remife ; s'ils réfuſent de le faire par deux ou trois fois , il ne les faut pas rébuter , mais faire prendre par quelqu'un une petite baguette , qui faffe femblant de les frapper fur les genoux. La peur leur fera peut-être plus d'effet que les coups. En même temps on fera pouffer à Ja roue , pour faciliter le caroffe à réculer , fi les chevaux fe font rangés fans peine fous la remife , on doit les flatter pour les accoutumer à ſa main. 'Chevaux bons à mettre au Caroſſe après fix ou huitjours d'exercice. Il n'y a point de chevaux , après fix ou huit jours d'exercice au chariot , & au ca roffe , qui ne doivent être en état de ren dre fervice. Mais il eft d'un Cocher de connoître quand les chevaux peuvent être mis au caroffe , fans courir aucun rifque , ni expofer les Maîtres , qui fe fient fur un Cocher , qui lui- même n'eft pas en fureté, s'il n'eft expérimenté dans la maniére de conduire un équipage , & avant que de les
192 LE PARFAIT y mettre il doit en faire fon rapport à l'E cuyer s'il y en a un , ou à ſon Maître , & rendre compte de la capacité des chevaux, ce qui eft abfolument néceffaire pour qu'on ne s'expofe pas témérairement. Maniére de méner des Chaifes à Paris & aux environs. Outre les Caroffes , il y a encore d'au tres efpées d'équipage en grand nombre à Paris. Sans parler des Fiacres , que ceux qui les conduifent , ménent comme ils peuvent , & non comme ils veulent , & fur lefquels on ne peut donner d'avis , parce que les chevaux de Fiacre font des chevaux ruinés , & que l'équipage eft ún équipage délâbré , & les Cochers , fi on peut leur donner ce nom , des ignorans parfaits dans le métier qu'ils font : fans parler , dis-je , de ces mauvaiſes voitures publiques , il y a des Caléches , & Phae tons , qui fe ménent comme les Caroffes , & les Chaifes avec un feul cheval , que des particuliers ont , les uns pour leur plaifir , les autres pour leur utilité. Les Chaifes & le harnois du cheval , demandent la même attention qu'un plus grand équipage pour la propreté , & un cheval de Chaife , qui fouvent eft auffi un ‫ם‬
Coc HER . 193 un cheval de main , doit être foigné & demande le même ménagement que des chevaux de caroffe. Qui fait monter à cheval , le conduire , lui tenir la main , la lui lâcher , quand il faut , & le faire tourner à droit & à gau che , peut méner une chaife. Mais ceux qui fe plaifent dans ces petits équipages , foit qu'ils ayent un ou deux chevaux , doivent dans Paris éviter les embarras , prendre garde aux tournans des ruës , & ne pas approcher des bornes. Il faut peu de chofe pour faire verfer ces voitures légéres , qui , pour n'être pas fi fujetes aux fécouffes , & au cahotage , qu'un ca roffe , ne font pas moins d'angéreuſes , quand on les fait rouler avec impétuofi té , comme il n'arrive que trop fouvent. En un mot , toutes les petites voitures ne font commodes que quand on les conduit doucement. M anière de méner une Chaife de Pofte. ' J'ai dit ailleurs * la maniére qu'on doit monter des chaifes de pofte. Ici je vas parler de leur équipage , & dire comme on les doit conduire . Un Poftillon qui méne une chaife de *Page 50. 1. Partie. R
194 LE PARFAIT pofte , n'a communément que deux che vaux à conduire , fçavoir le cheval du brancard & celui fur lequel il eft. Il faut qu'unPoftillon foit à cheval de bonnegrace, c'eft pourquoi il feroit néceffaire qu'il eut appris à monter à cheval affez pour s'y bien tenir. Son cheval & lui en feroient plus à leur aife , & on ne verroit point de Poftillon de travers fur leurs chevaux , le donner bien du mouvement du corps , ou brandiller les jambes continuellement. Ordinairement , le Poftillon va au pe tit galop , & le cheval de brancard ne fait que trotter. Cela eft plus aifé à voir lorf qu'il ne s'agit que de faire trois ou qua tre lieuës , comme d'aller de Paris à Ver failles . Mais fi on veut voyager en chaiſe de Pofte avec les chevaux " aucun des deux ne doit galoper : il faut rénoncer à la grace en cette occafion , car le galop , quelque petit qu'il foit , fatigue toujours plus un cheval que le trot , qui eft fon al lure naturelle. Les Poftillons de la pofte galopent communément , mais leurs chevaux font en haleine , & ils n'ont tout au plus que cinq ou fix lieuës à faire : auffi voit- on que ces chevaux ſe mettent bien- tôt pour fe foulager à un efpéce de train rompu , qui tient du trot & du galop , & qu'on appelle ! Aubin.
COCHE R. 195 Le Poftillon n'a d'autre attention à avoir à l'égard de la voiture , que de bien con duire la roue droite : car comme le cheval de Brancard eft attelé entre les deux Bran -cards ,au milieu de la Chaife , & que le Po ftillon eft à fa gauche , la roue gauche eft derriére vis-à-vis de la croupe de fon che-. val ; ainfi cette roue fuivra par-tout où il aura paffé. Il n'en eft pas de même de la rouë droite , qui eft bien plus en dehors : C'eft-pourquoi quand il veut que la Chai fe tienne le milieu du chemin , il faut qu'il marche fur le côté du chemin à gauche. Quand il tourne à gauche , il peut tour ner court : mais à droite , il faut qu'il prenne fon tournant de très loin . Quand il s'agit de cartayer , le cheval de Brancard doit marcher fur le bord de l'orniére , à droite ou à gauche de ladite orniére. Quand il voudra réténirfon che val de Brancard , foit qu'il aille trop vite, ou dans une defcente , il lui foutiendra la tête , en levant la longe de main droite en haut , à côté de fa tête. En montant il faut qu'il faffe bander les traits de fon porteur, pour foulager le cheval de Brancard : mais en païs plat fon cheval doit tirer médio crement , fur-tout lorfqu'il galope. Il doit être adroit à éviter les pierres. Il fe trou ve des Poftillons , avec lefquels on ne Rij
196 IT LE PARFA perd pas la moindre petite pierre d'un che min. Ils traverſent auffi les ruiffeaux de pa vé , & autres pentes pareilles en biais , comme font auffi bien des Cochers , qui ne veulent pas méner avec attention. Ce n'eft pas une précaution fuperfluë dans les mauvais chemins , pour le foula gement du Poftillon , & la fûreté de celui qui eft dans la Chaife , d'avoir des guides , avec lefquels il puiffe conduire le cheval de Brancard , dans les cas où le Poftillon a de la peine à lui faire tenir la route fûre, ou dans d'autres occafions , qui peuvent ſe rencontrer le long du chemin. Maniére de charger & de méner une Charette. Après avoir parlé des devoirs d'un Co cher & d'un Poftillon , il me refte à dire deux mots de ceux du Chartier. Le métier de Chartier exige auffi une efpéce d'intelligence : il doit fe tenir tou jours à gauche en devant du limonier. Le nombre des chevaux , qu'on attéle à une Charette , n'eft pas fixe : il ne paffe guéres cependant dix ou douze. Il doit bien charger fa charette , de fa çon que le poids qu'il y mettra , foit en équilibre fur l'effieu , afin que les limons
COCHER . 197 ne péfent point fur le limonier , ni auffi que fa Charette ne ſe renverſe en arriére. Il ne doit point harceler fes chevaux en beau chemin , de peur de ne les plus trou ver dans le mauvais. Le limonier ne doit point, ou peu tirer. Il faut, pour tourner , réculer & foutenir dans la defcente . L'effentiel du Chartier eft de faire tirer tous fes chevaux égale ment , de choisir bien fon chemin , de fe fervir à propos du limonier , de prendre bien fes précautions , quand il a beaucoup de chevaux pour tourner , de ne jamais monter deffus , pour peu qu'il ait à gou verner fa charette , & de nejamais dormir dans fa charette en chemin , pour éviter bien des accidens , qui le ménacent alors. Je dois cet article & plufieurs autres au Nouveau Parfait Maréchal , qui m'a beau coup fervi , & que je ne cefferai point de confulter , fur les chofes qui font de mon fujet , pour donner à cet Ouvrage toute la perfection qui me fera poffible. C'eſt un Livre qui m'a été indiqué par les diffé rentes perfonnes , que j'ai eu beſoin d'al ler voir , à caufe des différentes Profef fions qu'elles exercent , & qui ont du rap port à tout ce qui régarde les devoirs d'un Cocher. Riij
198 LE PARFAIT Des Palfreniers. Si j'ai parlé au commencement de cet Ouvrage , des foins qu'un Cocher doit avoir de fes chevaux dans l'écurie , je n'ai. prétendu parler que de ces domeftiques qui font chez quelques Bourgeois , Co chers >, Palfreniers & Portiers tout enfem ble. On fçait que chez le Roi, les Princes & Seigneurs de la Cour , & Gens de la premiére condition " les Cochers n'ont d'autre occupation que de veiller au foin & à l'entretien de leurs Equipages , & de monter fur leur fiége , quand ils font com mandés. Ces Cochers diftingués parmi leurs pareils , à caufe des Maîtres qu'ils ont l'honneur de fervir , n'ont au- deffus d'eux que l'Ecuyer , & aux deffous les Palfreniers, & Garçons d'écurie. Ainſi je vas entrer dans les fonctions du Palfrénier, & les expliquer amplement , pour que les Palfréniers , & les Garçons d'écurie avec les Cochers & les Poftillons puiffent tous. profiter de ce qu'ils apprendront de nou veau dans ce Livre, qui ne paroît que pour leur utilité. Des Devoirs du Palfrénier. Dans les grandes écuries où il y a plu
COCHER. 199 fieurs attelages de chevaux de caroffe , & de plus des chevaux de felle , on voit plufieurs Palfréniers , qui en ont un à leur tête , dont le devoir eft d'avoir l'oeil fur tout ce qui fe paffe au tour des chevaux , tant pour le panfement , le boire , & le manger , que pour faire obferver par ceux qui lui font foumis l'ordre & la vigilance. Il eſt réponſable de la conduite des au tres Palfréniers , & du gouvernemeut des chevaux . Le métier de Palfrénier paroît ne de mander qu'une certaine routine. Cepen dant dans le nombre de ceux qui s'y em ploient , il s'en trouve peu , qui fachent le bien faire : car il y faut de l'activité, une S $ S I certaine adreffe , qui n'eft pas commune dans ces fortes de gens , de la vigueur & de la hardiefle auprès des chevaux , fans brutalité ; de la douceur , point d'yvrognerie & beaucoup d'attention pour ce qui régarde le panfement , & les foins qu'exige cet Animal . Le Palfrénier eft pour ainfi dire celui qui vit le plus avec les chevaux , qui les approche le plusfouvent , & qui doit con noître plûtôt leur état. C'eſt à lui d'aver tir fans tarder , ou le Maître de l'Ecurie , ou le Cocher ou l'Ecuyer, lorfque les che vaux ont befoin de quelque chofe , com Q iiij
200 LE PARFAIT me d'être médicamentés , ferrés , &c. Un Palfrénier , comme le Cocher doit avoir la propreté en récommandation , afin de tenir les chevaux nets .Il y a des pays af fectés pour les bons Palfréniers , comme pour les bons Cochers. Les Bas- Brétons font excellens Palfréniers , mais les An glois leur font fupérieurs. Un Palfrénier n'a guéres que quatre ou fax chevaux de caroffe à panfer. J'ai dit au commencement de cet ouvrage * l'heu re qu'on doit entrer dans l'écurie , & que la premiere chofe qu'on a à faire le matin , eft de bien de nétoyer la mangeoire devant chaque cheval. , ou avec la main , ou avec un bouchon de foin , après quoi on donne à chaque cheval fa méfure d'avoine. Après qu'il la mangée , le Palfrénier , ou le Cocher qui n'a point de Palfrénier fous lui , doit réléver la litière avec une fourche , & féparer la vieille d'avec la nouvelle , qu'il pouffe fous la mangeoire. Pour le crotin ou la vieille litière , il la doit porter dehors fur une civiére. C'eſt cette vieille litière amaffée & pourrie qui fait le fumier , dont on engraiffe les terres. Après avoir balayé les places de fes chevaux , & ôté la vieille litière , le Pal * Pag. II.
COCHE K. 201 frénierdoit mettre une caveffine ou un filet à ſes chevaux , qu'il fait fortir les uns après les autres de l'écurie , s'il fe peut , pour les panfer , comme je l'ai dit * : ce qui eft préférable àcaufe que la pouffiére , qui fort du cheval révole dans l'écurie fur les autres chevaux. Si on ne pouvoit pas les panfer déhors , foit à caufe du mau vais tems , ou de la fituation du lieu , qui ne le permettroit pas , du moins on doit faire fortir chaque cheval de ſa place , & l'attacher au poteau , après quoi on ſe met en devoir de l'étriller. Pour ne pas me répéter , je renvois au commencement de cet ouvrage , où j'en feigne la maniére d'étriller , ** debrof fer de bouchonner , de fe fervir de l'é pouffette , de peigner & laver , de trouf fer la queuë d'un cheval & de lui faire le crin. Mais outre la maniére ordinaire de panfer les chevaux , il y en a une parti culiére pour les chevaux , qui font fi fen fibles , & fi chatouilleux , que l'étrille & même la broffe les tourmente exceffivé ment. Cette façon eft de les panfer avec la main : elle confifte à tenir fa main un peu humide , & à s'en fervir comme on feroit * Pag. 12 . ** Pag. 13. Pag. 14. Pág. 15. Pag. 16.
202 LE PARFAIT dela broffe , la paffant à plat fur tout le corps en tout fens , la lavant quand elle eft craffeufe , & récommençant ainfi , juf qu'à ce qu'il ne paroiffe plus de craffe à la main. La premiere fois on y employe deux ou trois heures mais dans la fuite une heure tous les matins fuffit. Cette ma miére rend le cheval très-net. Pour faire les crins d'un cheval , on fe fert ordinairement de deux inftrumens , fçavoir , ou des cifeaux , ou du razoir. Quand un cheval a tous fes crins , comme un cheval de caroffe , c'eft- à dire , qu'on ne lui a pas coupé la queue , ni la criniére, lui faire les crins ou les oreilles , c'eft cou per ou razer une bordure d'un demi- pou ce au tour du bord des oreilles en dedans & en déhors. Pour faire le crin des oreil les , comme je n'en ai pas parlé en voici la maniére. On attacke le cheval à des anneaux , ou à fon genoüil , même de façon qu'il ait la tête baffe : puis le Palfrénier prenant les cifeaux, il coupe à petits coups , & le plus ras qu'il peut le poil de l'oreille , formant fa bordure bien égale en déhors : ou bien après avoir mouillé l'oreille avec du fa von , il emporte le poil de l'oreille avec un razoir. Les crins de l'encolure , & le toupet ne ſe coupent qu'avec des cifeaux ,
COCHER . 203 comme on ne les coupe point aux che vaux de caroffe je n'en parle point. Mais il y a des chevaux de caroffe de moyenne taille , aux quels on coupe or dinairemeut les crins & la queue,pour leur donner un air plus léger , & pour embellir leurs figures. Par exemple fi des chevaux ont la tête & le col gros , on coupe le toupet & plus de crin fur l'encolure , ce qui leur dégage le col & la tête. S'ils ont le col mince, on le dégarnit moins : s'ils l'ont court on l'allonge à la vûë en le rendant plus nud. Enfin on tache de faire en forte que cette opération leur donne une figu re plus avantageufe , que celle , qu'ils avoient auparavant. Il y a des chevaux , à qui le poil croit fort long , fous la ganache & au ventre. Quelques - uns allument un brandon de paille , & le paffent légerement fous ces parties, allant & venant fans s'arrêter , juſ qu'à ce que tous ces grands poils foient brûlés. J'ai dit , * comment on doit faire le poil des jambes . On fe fert pour cela de cizailles , ou pinces à poil , avec lef quels on arrache de ce poil ,M l'étageant , comme un Perruquier , qui coupe les che veux de façon, qu'il ne paroiffe pas qu'on en ait ôté. Cette opération eft bonne aux Pag. 20.
LE PARFAIT 204 chevaux de caroffe , car cette abondance de poil , eft un magazin de craffe & de bouë. Après qu'un Palfrénier a panfé fes che vaux , il les couvre chacun d'une couver * ture , j'ai dit ce que c'étoit que ces couvertures . Si les chevaux font trop gras, ou qu'ils ne faffent pas beaucoup d'exerci ce , il eft bon de les laiffer au filet fans manger , jufqu'à neuf heures. Les licols avec lefquels on les attache , doivent avoir deux longes de cuir ou de corde , ou bien deux chaines de fer , pour les chevaux qui ont pris l'habitude de ronger leurs lon ges. On paffe chaque longe dans l'anneau , attaché des deux côtés à la mangeoire , enfuite dans le trou d'une boule de bois percée , au-delà de laquelle on nouë le bout de la longe , afin d'arrêter la boule , qui doit être affez péfante , pour que la longe puiffe être entraînée par fon poids , de peur que le cheval ne s'encheveſtre c'eſt- à- dire , qu'il ne fe prenne le pied de derriére dans la longe du cheveftre ou li col , ce qui arrive quand il va fe gratter la tête avec le pied de derriére , car le pied Le trouvant pris dans la longe , le cheval à * Pag. 150.
COCHE R. 205 force de fe tourmenter pour le rétirer , ſe couperoit quelquefois le paturon très dangereufement , & s'y feroit une playe confidérable.. Mais il eft plus expedient pendant le jour d'attacher une des deux longes du li col en haut aux roulons , que de les mettre toutes deux en bas . Cette façon fait que les chevaux ne fçauroient baiſſer la tête pour manger leur litière, ce qui les échauf feroit & leur feroit mal. J'ai fait voir la maniére de conferver les pieds des chevaux , j'ai parlé de leur nourriture , & de leur boiffon , & de tout ce qu'un fimple Palfrénier , ou Palfrénier Cocher doit faire auprès de ſes chevaux depuis le matin jufqu'au foir , que fes oc cupations du jour finiffent , quand il a fait la litiére , & détaché une des longes du licol du ratelier , pour la répaſſer dans l'anneau de la mangeoire , afin que les che vaux puiffent fe coucher. Il ne me refte plus qu'à parler des inftrumens , dont le Palfrénier ne fauroit ſe paffer. Inftrumens du Palfrenier. Une Etrille de fer étamé, qui fert à ôter Ja premiére craffe. J'ai dit que celles d'An Page 24.
206 LE PARFAIT gleterre paffoient pour les meilleures. La Broffe ronde, qui fert enfuite à ôter la craffe la plus fine. , & à unir le poil. Elle doit être de poil de Sanglier. Le Peigne de corne à peigner la queuë & les crins , auquel il ne doit manquer aucune dent, & qu'on doit exactement né toyer. L'Eponge à laver les crins & à nétoyer les jambes. L'Epoufféte de drap ou de ferge , qui fert à effuyer les crins , & à rendre le poil luifant. Le Couteau de chaleur , avec lequel on abbat la fueur du cheval. J'ai parlé de tous ces Inftrumens. Voici les autres. Les Cifeaux ou le Razoir pour faire les crins : le Torche-nez pour empêcher le cheval de ſe tourmenter , qnand on lui fait les crins. Le Seau pour apporter toute l'eau né ceffaire au panfement, & pour faire boire. La Pelle pour nétoyer l'écurie , & met tre le crotin dans la civiére. , pour faire & re La Fourche de bois , muer la litière. Le Balet de bouleau , pour balayer l'u rine des chevaux . Le Balet de jonc , qui ne doit fervir qu'à laver les roues & le train des Carof
COCHE R. 207 fes , & autres Voitures ; parce que pour laver les jambes , il eſt mieux de fe fervir d'une petite broffe longue avec l'éponge. La Fourche de fer , qui fert à remuer le fumier. La Pince à poil , qui fert à arracher le poil dn fanon à un cheval qui en a trop. Le Bouchon de foin , qui fe fait fur le champ, pour frotter un cheval qui a chaud. Le Cure-pied , qui fert à nétoyer le def fous du pied. Un Cocher doit le porter encampagne, pour òter les gravois & pier res qui s'engageroient fous les pieds de fes chevaux . Il doit auffi toujours avoir dans fa po che un couteau à poinçon , tant pour cou per les cuirs , quand il en eft befoin , que pour faire des trous aux courroyes fuivant les befoins. De l'Ecurie. Avant que de finir cette premiére par tie, je crois qu'il eft à propos de parler des Ecuries , & des meubles qui doivent s'y trouver. Je vais faire cet extrait fur ce qu'en dit le Nouveau Parfait Maréchal. Les Ecuries pour les chevaux de Ca roffe , font les mêmes que pour les che vaux de felle. Leur grandeur doit être
208 LE PARFAIT conforme au nombre de chevaux qu'on y veut loger. On conftruit trois fortes d'Ecuries. La premiére , eft l'Ecurie à un feul rang de chevaux. La deuxième , eft l'Ecurie dou ble ou à deux rangs de chevaux , les crou pes des chevaux vis-à-vis les unes des au tres , & une efpace pour paffer entre les deux rangs. La troifiéme , eft une espéce d'Ecurie double féparée au milieu dans fa longueur par un mur , ou une forte cloi fon. Les têtes des chevaux regardent ce mur , ou cetteforte cloifon , & font vis-à vis l'une de l'autre fans fe voir. Entre les croupes & le gros mur , de chaque côté eft un paffage , & le mur ou la cloifon du mi lieu ceflent , avant lesbouts de l'Ecurie , pour laiffer la liberté de communiquer d'un côté à l'autre ; ou fi les bouts font fermés , on laifle une communication , ou porte au milieu. L'Ecurie fimple eft la plus commode > parce qu'on eft maître des embraſures des fenêtres , & de tout le mur qui regarde la croupe des chevaux , qui fert à loger les uftenciles , & le Palfrenier même , ou le Cocher , qui a fous ſa main , & à portée des chevaux qu'il panfe , tout ce qui lui faut. La premiére Ecurie double , dont les croupes
COCHER . 209 Groupes des chevaux ſe régardent , eft plus belle au coup d'oeil , puiſqu'on voit en même temps deux rangs de chevaux , mais elle eft plus incommode , parce que le Palfrenier n'a point derriére fes chevaux de quoi mettre les uftenciles ; qu'il faut al ler chercher au bout de cette Ecurie , où on pratique ordinairement une eſpace fans chevaux à cet effet. Plus ces Ecuries font longues , plus elles font incommodes. La deuxième Ecurie double , fçavoir , celle dont les têtes des chevaux font vis-à-vis l'une de l'autre , & féparées par un mur , n'eft autre chofe que deux Ecu ries fimples , accolées par un mur mi toyen , & ainfi elles ont chacune les mê mes commodités de l'Ecurie fimple , puif qu'il y a un mur derriére la croupe des chevaux de chacune. Une Ecurie , pour être faine , ne doit pas être conftruite dans des lieux humides & bas. On doit la placer , s'il eft poffible , fur un terrain ſec , & l'expofer au levant , d'où vient commnément un air tempéré en toutes faifons. J'ai dit ailleurs que Phu midité eft contraire aux chevaux. Par. conféquent les Ecuries fituées dans des fonds & dans des fouterrains caufent des maladies aux chevaux , comme eaux , poi I. Partie. S
210 LE PARFAIT reaux , fus , morfondures &c. parce que l'humidité bouche les pores , & inter rompt par conféquent la tranfpiration g qui réfluant dans le fang fe rejette fur quelque partie qu'elle affecte. Meubles d'une Ecurie. Toute Ecurie eft meublée d'une man geoire , d'un ratelier , de barres , & de poteaux. Elles doivent être pavées avec un ruiffeau pour écouler l'eau & les uri nes , & il faut efpacer les places des che vaux , de façon que les chevaux foient à leur aife , & qu'on ait affez de place pour paffer derriére eux fans crainte d'en être bleffé. On conftruit de deux efpèces de ra teliers , les uns panchés , & les autres droits. Lcs rateliers panchés ne prennent. rien fur l'Ecurie , parce que le bas du ra telier eft fcellé contre le mur , & le haut qui eft panché en devant eft foutenu dans cette fituation par des barres de fer , qui vont horizontalement du mur au haut du ratelier , alors la mangeoire eft contre le mur; mais le ratelier droit doit avancer de près d'un pied , & la mangeoire eſt ap
Tel ant aut acs el cet -20 211 COCHE R. puiée contre la cloiſon. Au bas des rou leaux de ce ratelier , entre fa cloifon & le mur , on pofe une grille de bois diago nalement , dont le haut s'accôte contre le mur , & qui laiffe paffer la pouffiére du foin . La mangeoire ou l'auge , eft un con duit d'environ un pied de creux qui pré fente le côté , & qui continue d'un bout à l'autre de l'Ecurie , foutenu en deffous de diftance en diftance par des morceaux de bois , qui fe nomment des racinaux. Le haut de la mangeoire eft ordinaire ment élévé de trois pieds & demi , & ſon bord eft garni de tôle , ou de cuivre , afin que les chevaux ne rongent point le bois ; c'eft dans le concave de ce conduit qu'on jette l'avoine qu'on donne au cheval. On attache à diftances égales aux parois de la mangeoire , au-deffous de fon rebord > trois anneaux , celui du milieu fert à fou tenir la barre , & par les autres paffent les longes du licol , qui attachent chaque cheval à fa place. Les places des chevaux font féparées par les barres & les poteaux. Les barres font des morceaux de bois ronds & longs, troués par les deux bouts , afin d'y met tre deux cordes , dont l'une attache la Sij
252 LE PARFAIT barre à l'anneau de fer de la mangeoire , & l'autre l'attache au poteau . Les poteaux font de gros morceaux de bois ronds , & hauts de quatre pieds , hors de terre , espacés de diftance en diftance 9 & placés de bout , lefquels terminent la place de chaque cheval. Chaque poteau eft percé par le haut d'un trou , dans le quel on paffe une des cordes de chaque barre pour la foutenir par un des bouts pendant que l'anneau de la mangeoire la foutient par l'autre. On met au haut , & aux deux côtés des poteaux un anneau de fer de chaque côté , qui fert à atta cher les longes de la caveffine , l'une à un poteau , l'autre à l'autre quand on veut retourner le cheval dans fa place. On met encore au-devant du poteau en devant un crochet pour y pendre la caveffine , la bride , ou le filet. Chaque poteau eft en foncé de deux pieds & demi au moins dans terre , & bien folidement fondé afin qu'il foit ftable. I1 y a des Ecuries où on met un cof fre à l'Avoine , dans l'endroit le plus commode , foit au bout ou dans une em brafure de fenêtres . Ce coffre doit avoir en dedans une féparation pour le Son , & s'il le faut une autre pour l'Orge . Les
1 COCHER. 213 Lanternes font néceffaires dans les Ecu ries . Les meilleurs font à peu- près faites comme les lampes des Eglifes , & on n'y que la lumiere brûle que de l'huile ,, parce que qui eft dans la Lanterne ne doit jamais en être ôtée de peur du feu. Mais quand le Palfrénier a befoin de lumière , il faut qu'il ait une petite lanterne de corne or dinaire avec une chandelle dedans qu'il allume à la lanterne d'écurie. Il y a auffi des écuries , au bout def quelles eft un garde- meuble pour y ferrer les brides & les harnois, ce qui eft fort com mode pour que l'humidité de l'écurie ne moififfe pas les cuirs. Il eft encore mieux qu'il y ait une cheminée pour y faire de tems en tems du feu , afin de tenir cet en droit fec. Il y a ordinairement dans les écuries des fufpentes à chaque bout , ou font dreffés les lits des Palfréniers. Proportions des Places de chaque che val dans une écurie. Chaque place doit avoir fept pieds & demi , à huit pieds de longueur , depuis la mangeoire jufqu'aux poteaux , & qua tre pieds de large avec des barres . Cha que place doit être pavée , elle en eft plus
LE PARFAIT 214 propre , & plus ailée à nétoyer. Elle doit avoir une pente douce depuis la mangeoi re jufqu'au poteau , afin de donner écou lement à l'urine , & pour que le devant du cheval étant un peu plus haut que le derriére , il ne péſe pas tant fur les épau les , & ait plus de grace à la vûë. Le mur qui fait face aux croupes des chevaux , doit être percé de croiſées pour donner du jour. On garnit ce mur de plan ches en tablettes de taffeau , & de porte manteau pour y mettre & pendre tous les uftencilles du Palfrénier , & de l'écurie. J'ai donné la lifte des premiers , voici les autres. Uftencilles néceffaires dans une écurie. On doit avoir des entraves , qu'on met aux pieds des chevaux accoûtumés à met tre leurs pieds dans la mangeoire. Des boules pour faire defcendre les longes du licol. La vanette ou le crible pour ôter la pouffiére de l'avoine quand on la donne . La méfure dans laquelle on méfure l'a voine , qu'on donne aux chevaux , elle doit être de bois plein , ou d'ozier.
COCHER. 215 La civiére , qui fert à tranſporter le fu mier hors de l'écurie. Le tablier de Palfrénier , ou l'épouffete • de toile , qui fert au Palfrénier à mettre au tour de la ceinture , quand il panfe le cheval , & c. Les lunettes , qui fe mettent au cheval en plufieurs occafions , où on ne veut pas qu'il voie clair. La caveffine à deux longes , qui ſert à paffer par- deffus la bride d'un cheval, pour le tenir quand on le méne en main. La muzeliére de fer , ou le panier de fer , qui fert quand on veut empêcher le cheval de manger , ou de mordre fon A S compagnon. Le chapelet , qui fe met au col du che val , quand on veut l'empêcher de porter la dent fur quelque mal qu'il a , de peur qu'il ne l'envenime. Le coupe-paille , qui fert à couper la paille par petits fétus , de façon que le cheval puiffe la manger en guiſe d'avoi ne > en y mettant cependant moitié avoine. Cette machine a été inventée en Alle magne , & les Allemans en font beaucoup d'ufage . Je penſe n'avoir rien oublié des devoirs
216 LE PARFAIT du Cocher , du Poftillon, des Palfréniers, & Garçons d'écurie. Comme la connoif fance des chevaux de caroffe eft néceſſaire aux uns & aux autres; j'en vais parler dans la feconde partie de cet ouvrage. Fin de lapremiere Partie LA
LE PARFAIT COCHER ; Ou L'art d'entretenir & de conduire un Equipage à Paris & en Campagne. SECONDE PARTIE. Inftruction aux Cochers fur les Che vaux de Caroffe. Connoiffance des Chevaux de Caroffe néceffaire à un Cocher. Out Cocher fe doit connoître en T Chevaux. Combien qui ne fça vent pas même les panfer ? Il faut qu'ilétudie leur temperament , qu'il fache II. Partie T
218 AIT LE PARF quand ils font en fanté , qu'il diftingue leurs maladies , qu'il n'ignore pas les ré médes , qui leur conviennent , ni de quel le maniére on les doit gouverner tant pour la nourriture , que pour le travail. Il faut encore que pour bien méner il ait de l'ex perience , une bonne main , du jugement , debons chevaux.Il en eftfpeu, qui ayent au jourd'hui toutes ces qualités. On voit au jourd'hui des équipages entre les mains de jeunes gens , & autrefois les moins âgés a voient trente ans, quandils commençoient à méner.Mais fi un Cocher fe doit connoître en chevaux , il eft bon que les Maîtres en ayentauffi du moins une légére connoiffan ce.Il leur en coute moins : & la dépenſe eft double pour eux , s'ils ne les fçavent pas choifir , & plus grande encore , quand le Cocher ne s'y connoît pas. Maniére de connoître un beau Cheval. Un Cheval eft beau , quand il a les feſſes amples , pleines , & rondes , les cuiffes poitelées. Il eft court de corps , bas de jambes , rond de croupe , épais de ventre quarré du poitrail , fin d'encolure , fa cri niére eft mediocrement garnie , fes oreil 1. les bien placées petites & droites , ſa tête féche mediocrément petite , & bien pro
COCHER. 219 portionnée au corps , fes yeux à fleur de tête, le barbouchet menu, les nafeaux bien ouverts , les pieds fournis d'un bon fabot, bâtis de bonne corne noirâtre. Il faut en core qu'il foit bien en talons , en jambes qu'il ait les jarrets plats,élévés du devant, la queue médiocrément toufuë , & longue à demi-pied de terre. Enfin il doit bien porter la tête , & pour être parfait il faut qu'il tienne de quatre animaux différens , de la Licorne pour le poitrail , & la belle encolure ; du Rénard pour les belles oreil les ; du Taurreau pour les yeux beaux 9 & à fleur de tête ; du Cerf pour la jambefine , féche , mediocrément haute , mais un peu chargée de poil, avec un beau pied bien rélévé du devant. Voilà en ab 11 bregé un Cheval parfait. Figure des Chevaux de Caroffe. Les chevaux que l'on choifit pour le ca rofle ne doivent prendre que cinq , ou fix ans ; ilfaut tacher de les égaler le plus qu'on peut. La taille eft à la volonté de ceux qui les achetent. Mais on doit les choifir courts , & ronds , élévés du de vant, la côte bien rélévée, la croupe & le poitrail quarrés, dégagés de l'épaule, c'eſt à dire , les épaules plattes du haut, & ron Tij
LE PARFAIT 220 des du bas , les genoux petits , la jambe platte & courte , peu de poil & de chair , de gros nerfs bien détachés des os , courts en jointure , un pied large , rond en haut , l'encolure platte , & mediocrément char gée de crin , la tête féche , des oreilles moyennes , bien piquées , & droites , des yeux à fleur de tête , le tour de la prunel le noirâtre ? & les narines fort ouver tes. Manière d'appareiller les Chevaux de Caroffe, Quoique j'aye déja parlé de la maniére d'appareiller des chevaux, à l'article des at telages de campagne de quatre, de fix, & de huit chevaux,je dois encore répéter ici que deux chevaux de caroffe doivent être égaux , c'eft-à-dire de même taille , de même poil , de même couleur , de même hauteur , de même épaiffeur , & de même force. Ils doivent autant qu'il eft poffible être égaux du trot , du pas, & de la bou che. Il eft même de conféquence que des chevaux de caroffe , qui font obligés de travailler enſemble , ayent la bouche éga le : car fi l'un des deux avoit la bouche mauvaiſe , & l'autre bonne , celui qui l'au roit mauvaife travaillroit feul , à moing
I 228 CÓ CHE K que le Cocher , qui les gourme , ne les fache brider , comme il faut. 1 1 Effay des Chevaux de Caroffe. 3 On effaye des chevaux de caroffe au charriot , ou au Diable , qui eft une ma chine faite exprès pour cet ufage, afin que fi un cheval ruë, il ne puiffe pas bleffer ce lui , qui mène les deux chevaux . Etant attelés, on commence par les méner le trot, cette allure étant la principale , qu'on de mande aux chevaux de caroffe. Alors on examine , s'ils trottent bien , c'eft- à-dire , les hanches baffes fans dandiner de la crou pe , & la tête haute. Ils trottent & tirent également , quand le trot de l'un n'eft pas plus racourci , que celui de l'autre , ce qui les empêche de tirer également, aufſi-bien que la vivacité de l'un des deux , car fou vent il y en a un vif, & l'autre pareſſeux , le pareffeux ruine le vif, car il le laiffe ti rer feul. On fe doit bien garder de l'ache ter: mais s'il n'eft qu'un peu moins vif, & un peu plus lourd que fon camarade , on y rémedie en l'attelant fous la main du Cocher , c'est-à- dire , à droit , afin que le Cocher l'avertiffe du foüet , lorfqu'il fe ralentira . Il eſt de la grace de l'attelage que les deux chevaux attelés à côté l'un de Tiij
222 LE PARFAIT l'autre , portent également , c'eft-à-dire , qu'en trottant ils tiennent leurs têtes éga . lement hautes , & en même fituation , il eft auffi plus agréable qu'ils foient tous deux marqués en tête ,foit par l'étoile ou par le chanfrain ; mais il eft effentiel qu'ils ayent la bouche bonne , ce qu'on voit en les faiſant réculer au caroffe , après avoir précédemment examiné les barres , & qu'ils ayent des pieds excellents , & des jambes de fer , c'est-à- dire , beaucoup de jambes & des jambes très- nerveuses. Des Chevaux de Chaife. Les Chevaux qui fervent aux Chaifes de Pofle , & qui ne font point chevaux de pofte , font d'une eſpéce toute différente des chevaux de caroffe. Une Chaife de Pofte eft attelée de deux chevaux , qui font auffi très- différens l'un de l'autre comme je l'ai dit ailleurs. L'un s'appelle cheval de brancard , & l'autre cheval de côté ou bricolier. Le cheval de brancard doit être choifi de bonne taille , étoffé , allongé , trottant vite , & aifément : le bricolier , qui porte le Poftillon , n'eft pas fi étoffé , tirant plus fur le cheval de fel le. Il doit avoir un galop racourci , & aifé.
COCHER 223 Autres Chevaux de tirage. Les autres chevaux de tirage , comme Chevaux de Charette › de Charuë , de Coche , font ordinairement des rouffins ou chevaux entiers , attelés avec un co lier. Il ne leur faut de qualités , que celle de tirer bien & fort , qu'ils foient bien étoffés de par-tout , le poitrail large , & les épaules nourries , car la péfanteur feu le de ces parties leur aide beacoup à en traîner les fardeaux , qu'ils doivent voi turer. Les chevaux de bats , ou de bagage , qui fervent à la guerre , à porter des far deaux " font dans le genre des chevaux communs. Il doivent être bien traverſés ? & avoir furtout des reins bons & forts. Les chevaux de Meffager , qui font def tinés à porter des balots d'un endroit à un autre , font d'une eſpéce plus mince , afin qu'ils foient plus légers , car ils vont fou vent au trot. Ils doivent d'ailleurs avoir les qualités des précédens à proportion de leur eſpéce . REA Je ne parlerai point des chevaux de fel 2 Je le , qui font à différens ufages , pour les voyages , la guerre, & la chaffe. Les che vaux de voyage comprennent les chevaux Tiiij
224 LE PARFAIT de Maître & de Domeftique. Les chevaux de guerre, comprennent ceux que le Roi les Princes , les Officiers Généraux mon tent , ceux des fimples Officiers , des Ca valiers ,Dragons, & Timbaliers. Comme il y a la chaffe aux chiens courans , & au chiens couchans , il y a pour la premiere les chevaux de Maître , & de Piqueurs , & pour la derniére les chevaux d'Arque bufe. Tous ces différens ufages exigent dif férentes qualités aux chevaux , qui font détaillées dans le nouveau Parfait- Maré chal , & dont je ne parle point ici , parce que ces inftructions font peu néceffaires à un Cocher. Difficulté de méner un Chevalfort en bouche , avec un autre qui ne l'eft pas. Un cheval fort en bouche , & un che val foible ne peuvent travailler enſemble. Le cheval fort traîne feul le caroffe , & il arrive que travaillant toujours feul , il dé perit à méfure que l'autre augmente. Il eft rare qu'un cheval fort en • bouche ne foit très-vif , mais fa vivacité ne dure pas. Ces fortes de chevaux en moins de deux ans pe giffent par les jambes , quand ils tombent
COCHER. B & 225 entre les mains d'un Cocher , qui ne fçait pas les gouverner. Parmi les chevaux forts en bouche, il y en a quila portent au vent, d'autres qui fe ramènent trop. Il faut aux premiers de longues branches à leur mors de bride , & aux autres de fort courtes > parce qu'ils appuyent les branches de leur mors de bride contre leur poitrail. Car jamais un cheval ne prend le mors de bri de avec les dents , & lorfqu'il eft armé , il vaudroit autant le tirer par le bout de la queue , que de le rétenir par les raînes de la bride. Les chevaux , qui portent la bou che au vent , ne font pas moins dangereux,, file Cocher qui les méne , ne les fçait bri der , & bien emboucher. Quand il fe ren contre que deux chevaux attelés au caroffe $ font fujets à l'un ou à l'autre de ces défauts, c'eft un très-mauvais équipage. S'il n'y en a qu'un des deux , on eft pas expoſé à tant de dangers. Inconvenient des Chevaux , qui ont la Languegroffe & longue. Quand un cheval a le barbouchet me nu , ou étroit , & la bouche fort fenduë e'eftune marque qu'il eft fort en bouche. Il y a des chevaux , qui ont de groffes Jangues , & fort longues ; ils font fujets à
226 LE PARFAIT la tirer , quand ils travaillent : cela eft di forme, ils en font même incommodés dans les chaleurs. La pouffiére s'amaffant fur leur langue , & s'y féchant , leur ôte la ref piration & entrant jufques dans le gozier, leur cauſe une altération fi grande , qu'el le leur déféche les poulmons , s'ils font long - tems fans boire. Le réméde qu'il y faut apporter eft de leur couper autant de langue , qu'il en paffe dehors de la bouche au-delà de la lévre inférieure, Fineffe de ceux qui contremarquent les Chevaux. Il y a des perfonnes,qui contremarquent les chevaux , en leur limant les dents avec une lime douce , pour les faire toujours paroître à huit ans, quoiqu'ils ayent dou ze ou quatorze ans. Ces fineffes ne fer vent qu'à tromper ceux , qui ne s'y con noiffent pas. Les bons Connoiffeurs ne s'y trompent jamais . Il y a plufieurs façons de contremar quer , c'est-à -dire , d'ajufter la dent de maniére qu'elle paroiffe noire & creule. La plus commune eft le burin. Ils creu fent la dent avec unburin , puis ils noircif
COCHER . 227 fent ce creux avec de l'ancre double Ils le noirciffent encore avec un grain de feigle, qu'ils mettent dans le creux , & qu'ils brûlent enfuite avec un fer rouge. Mais il eft bon d'avertir ici que la marque noire à la dent, s'il n'y a point de creux, nefignifie rien pour l'âge , quelque chofe que dife un Maquignon, pour perfuader que le che val marque encore. Il faut un peu de pratique , & d'exa men pour connoître les creux naturels des chevaux , qui marquent , & alors on n'eft guéres trompé à la contremarque : car on trouve ordinairement la dent rayée à côté du creux , parce que fouvent le cheval re muëpendant l'opération,ce qui fait gliffer le burin fur la dent: on trouve auffi le noir de la dent plus noir que la naturelle. D'ail leurs pour les chevaux on a récours aux crochets. Autres fineffes & tromperies des Ma quignons. Si les chevaux font vieux , les Maqui gnons maladroits leur ſcient ou leur li ment les dents de devant en deffus , d'au tres plus avifés les liment par devant en bec de flûte , afin d'effacer l'avance des
228 LE PARFAIT dents , & n'y touchent point par- deffus. A l'égard des premiers , la trompérie eft facile à connoître , quand le cheval a la bouche fermée , car les dents de devant ne ſe joindront plus , à cauſe que les ma cheliéres les en empêchent. Aux autres il eft aifé de voir que le noyau , ou le coeur de la dent paroît plus brun. Ce noyau a été découvert en limant " de plus la dent paroît voutée , comme fi elle rétournoit en dedans. Lorfque le cheval eft fillé , c'eft-à-dire, qu'il lui eft venu des poils blancs au- def fus des yeux, qui font une marque de vieil leffe , s'il a peu de ces poils , ils les lui ar rachent. En y regardant de près , on peut découvrir qu'il y a en cet endroit du poil arraché;fi ces poils blancs font en quantité, ils leur donnent la couleur bay ou noire , fuivant le poil du cheval, Les Maquignons peignent auffi les che vaux en bay , en bay brun , ou en noir pour les empêcher d'être réconnus, ou pour en accommoder celui qui aime mieux ces fortes de poils ; mais lorsque le cheval muë, il rédevient de fa couleur naturelle, & quelquefois quinze jours après qu'il a été peint , fi on a épargné la couleur. On tait auffi des étoiles , ou pelotes ar
5 COCHE R. 220 tificielles , pour que le cheval ne foit pas fain , ou pour appareiller des chevaux de caroffe. On les connoît en ce que les poils blancs font beaucoup plus longs que les autres , & que communément au milieu de la pélote , il fe trouve une eſpace ſans pol . Les fauffes queues leur fervent > lorfqu'ils ont des chevaux,qui ont la queuë coupée , & qu'on leur demande des che vaux → qui ayent toute leur queuë. On fent aisément la fauffe queue avec la main, car elle eft liée fous le crin de la queuë coupée. Aux bouches féches , ils frottent les mors avec des drogues qui font venir l'é cume , & aux bouches péfantes , ils met tent dans les lévres une petite chaînette attachée à la bride & à la gourmette : cette chaînette eft difficile à apperce voir. Ils favent arrêter la pouffe , & il eſt bien difficile de s'en appercevoir : ils ar rêtent auffi la morve pendant douze heu res : on peut le découvrir pour peu qu'on en ait defoupçon en ferrantlegozier,ce qui fait touffer le cheval. Si après avoir touf fé , il femble qu'il ravale quelque chofe on doit fe méfier de la morve. - Ils refferrent les molettes pendant un tems , mais on voit le poil plus uni dans
LE PARFAIT 230 la place des molettes qu'ailleurs. Ils délé chent les eaux du foir au matin. Lorſque la jambe n'eft pas gorgée , on ne peut gué res s'en appercevoir , finon qu'on ne fent pas le paturon bien net ; mais ils ne peu vent guéres cacher une jambe gorgée , & quelque chofe qu'ils difent alors , on ne doit point s'y laiffer aller. Comme les Maquignons font attentifs à tout ce qui peut faire valoir leurs che vaux , s'ils en ont qui foient lourds & pa reffeux , ils leur donnent tant de coups de foüet dehors & dedans l'écurie , qu'à la feule vue du foüet , quand le Maquignon le tient ils font toujours en l'air. C'eft pourquoi plus on verra le cheval fouetté ou fe tourmenter à la vûë de Maquignon, plus il faut fe méfier de fa légereté & de fa bonté. On doit alors régarder aux yeux du cheval , fi on les voit triftes & immo biles , quoiqu'il foit toujours inquiet & en mouvement > on doit être perfuadé que c'eft une Roffe. Il y a encore d'autres trompéries , dont les Maquignons fe fervent particuliere ment pour les chevaux de felle , mais com me ils ne font point de mon ſujet , je n'en parle point. On ne peut limiter toutes les fourberies de ces Meffieurs , car ils en in ventent à méſure qu'ils en ont besoin
0 114 W COCHE R. 237 Les Marchands à Paris , doivent garan tir leurschevaux , depouffe , morve , cour bature , & boiteux d'un vieux mal, le tout pendant neufjours , pendant lequel tem's on les peut contraindre en juftice à répren dre leur cheval. Après les neufjours ils n'y font plus obligés . Maniére d'examiner un Cheval de Caroffe avant que de l'acheter. Quand on veut acheter un cheval de quelque efpéce qu'il foit , il faut tâcher d'abord de pouvoir l'examiner dans l'écu rie tranquillement, afin de voir s'il fe fou Jage tantôt fur un pied , tantôt fur l'autre ,2 ou s'il avance un pied de devant : ce qui dénote qu'il a les jambes fatiguées. On examine fes yeux , le faifant arrêter à la porte de l'écurie. Quand il eſt ſorti , la premiere chofe qu'on doit faire , eft de Jui régarder dans la bouche pour connoître fon âge , puis on confidére fa figure en général on lui manie enfuite la gana che, pour fçavoir s'il n'a point de glandes, & fi elle eftbien ouverte . On régarde dans les nazeaux pour voir s'il n'eft point chan cré , ce qui pourroit être un figne de morve. On régarde & on parcourt avec la main
232 LEPARFAIT le garrot , les épaules , les jambes , les jär rets , pour voir fi le tout eft bien condi tionné , bien fain , & bien nét de tous dé fauts. On régarde le flanc pour voir s'il n'eft point alteré ; les pieds deffus , deffous & dedans. On fait lever le pied , & on fait frapper avec le gros du foüet , ou autre chofe deffus le fer , pour connoître fi le cheval eft aifé à ferrer , c'eft- à-dire , s'il ne retire pas le pied quand on frappe deffus. On le fait trotter pour voir s'il ne boite pas , & s'il trotte bien. Après quoi on l'effaye à l'emploi pour lequel il eft defti né , c'est-à-dire au caroffe , en le mettant à un chariot , ou à la charette. S'il doit fervir à la felle on monte deffus , & on voit s'il eft difficile à ſeller & à brider. Toutes ces cérémonies faites , file che val convient , on en fait le prix , puis on le méne à l'écurie , on lui jette un peu d'avoine , pour voir s'il mange bien fans tiquer , & fans inquiétude , & on finit le marché. De la méfure , & de la taille des che vaux de caroffe & autres. Il y en a qui connoiffent à vue d'oeil la hauteur d'un cheval. Pour en être plus sûr
COCHER. 233 Il faut le méfurer avec la chaîne , ou avec la potence. On fe fert plus communément dela chaîne,parce qu'elle eft plus portative: mais la méfure avec la potence eft la plus exacte. "J La chaîne eft faite de petits chaînons de fer , où de laiton haute de fix pieds , marquée de pied en pied par un fil de lai ton tortillé , & depuis le quatrième , juf qu'au fixieme pied , d'autres petits fils de fer, où de laiton marquent les pouces : au bas de la chaîne eft un plomb. Lorfqu'on veut méſurer un cheval , on laiffe tomber le plomb au bas du fabot de la jambe de devant à côté , puis coulant la chaîne le long de l'épaule , on s'arrête au haut de la pointe du garrot , puis on compte fur la chaîne les pieds & les pou ces , jufqu'à l'endroit , où on s'eft arrêté , & on a la hauteur du cheval ſuivant cette S JV 4 1 méfure , qui n'eft pas parfaitement exacte, parce qu'elle peut être altérée par l'épaule, plus ou moins charnuë de deux chevaux de taille égale , ce qui fait quelque fois jufqu'à un pouce & demi de diffé rence. La potence n'eft autre chofe qu'une ré gle platte de fix pieds de haut , féparée par pieds & par pouces , le long de la quelle coule par le moyen d'une mortoi 11. Partie V
LE PARFAIT 234 fe , une autre régle placée d'équerre avec la toiſe ou la régle de fix pieds , faiſant la figure d'une potence .On place la premie re régle de fix pieds , faiſant la figure d'une potence , toute droite , & touchant à terre près du bas du fabot à côté , & on hauffe , ou on laiffe l'autre régle , jufqu'à ce qu'elle touche fur le milieu du tran chant du garot , puis comptant fur la toi fe , jufqu'à l'endroit où cette régle eft de meurée , on connoît préciſement la hau teur du cheval. Un cheval de caroffe ordinaire eft de cinq pieds ; un très grand cheval de carof fe ou de voiture eft de cinq pieds , cinq à fix pouces. Un cheval ordinaire eft de quatre pieds , huit à neuf pouces. Un double Bidet de quatre pieds , cinq à fix pouces ; & un Bidet eft d'environ de qua tre pieds. Il fe trouve des Bidets de trois pieds de haut , mais ils font rares , & de peu d'utilité. Des allures des chevaux de caroffe & autres. Les allures des chevaux font le pas , le trot , l'ambl , le galop , & les trains e rompus , qui tiennent de deux Allures en
COCHE R. 235 femble , qui font l'entrepas ou le traque nard , & l'aubin. Le trot eft l'allure , qu'on examine à tout cheval , qu'on veut ache ter en le faiſant trotter en main , & c'eſt celle que l'on confidére le plus aux che vaux de caroffe , parce qu'ils font prin cipalement deſtinés à celle- ci. C'eft par el le que je vais commencer. Lorſqu'un cheval trotte en main , il faut examiner, s'il trotte franc & vigou reuſement , c'eft-à-dire , fi le derriére chaf fe bien le devant , fi le trot eft vîte & file cheval trotte la tête haute , & égal les reins droits , c'eſt- à-dire , s'il ne berce point , & ne dandine point. On dit que le cheval berce & daudine , lorfqu'on voit la croupe balancer , parce qu'alors les han ches baiffent altérnativement à chaque tems de trot , ce qui marque un cheval mol & fans force. Pour voir fi un cheval trotte bien de> vant lui , on fe place préciſement derrié re le cheval , quand il jette les jambes de i devant en dehors , elles paroiffent au-de là de la ligne du corps à chaque tems de trot , s'il trotte mal : mais s'il trotte bien devant lui , les jambes de derriére cachent entierement celles de devant. Le pas eft la plus lente , & la plus po fée des allures des chevaux , & en même V ij
LE PARFAIT 236 tems celle qui fatigue moins un cheval Le pas eft auffi une des allures des che vaux de caroffe , quand des Maîtres veu lent faire ménager leurs chevaux. Les qualités du pas font d'être doux , prompt, ou léger , ou sûr. Ilfaut pour que des che vaux de caroffe ayent le pas doux , qu'ils ayent les mouvemens des épaules , des hanches , & de reins fort lians , de façon qu'on ne les reffente prefque pas. Ils doivent avoir un grand pas , c'eſt-à dire , avancer au pas le plus qu'il eft pof fible fans dandiner , tenant toujours leur tête haute & en même fituation , qu'ils ne levent pas trop les jambes, car ilsfe les fati guent, & les ruinent plus ailément ; qu'ils ne les levent pas auffi trop peu , car alors ils ont , ce qui s'appelle des allures froi des , & font fujets à broncher : que le der riére fuive bien le devant , c'eft à-dire * qu'ils pofent leur pied de derriére à la pla ce où étoit celui de devant , & non au delà J ce qui marqueroit foibleffe de reins. Les chevaux qui paffent leurs pieds de derriére au- delà de celui de devant , ont les hanches trop longues , font fûr leurs épaules , dandinent , ce qui leur donne un pas dégingandé ; & de plus font fujets à forger. Il faut que les chevaux qui vont le
COCHE R. 237 pas ayent la jambe sûre , qu'ils ne croiſent point leurs jambes de devant , qu'ils ne portent leurs jarrets ni en dehors ni en de dans , qu'ils ne piaffent point , ni ne tré pignent , & qu'ils n'ayent point d'ar deur. Le pas rédoublé eft un pas plus vite que l'ordinaire , moyennant un mouvement plus prompt des jambes du cheval. On peut faire faire ce pas aux chevaux de caroffe quand il eft néceffaire , & pour les reveil ler , lorſqu'on les a fait aller long- tems le pas , & qu'on ne veut fimplement que ſe. promener , ou les faire fortir pour leur fai reprendre l'air. S'il y a des Cochers , qui pour obeïr à leurs jeunes Maîtres font aller leurs che vaux au galop , parce qu'ils ont une voi ture fort légere & des chevaux fort vifs . ce n'eft pas un exemple à fuivre pour les autres Cochers . Le galop n'a jamais été &ne doitjamais être l'allure des chevaux de caroffe, fur-tout dans Paris,à moins qu'on ne veuille faire périr les chevaux , briſer la voiture , eftropier les Maîtres , c'eft le moins. Mais s'il y a des occafions preſſan tes où l'on doit faire aller en Campagne des chevaux de caroffe plus que le trot , cela fe doit faire avec précaution . Les che uaux de caroffe font ordinairement trop
LE PARFAIT péfans pour courir le galop . Cependant 238 en voici les régles. Des chevaux doivent courir aifément , & très-légerement , fans faire un mouve ment trop élévé des jambes de devant , ce qui marque que les chevaux peinent au galop, parce que les épaules ne répondent pas. Il faut qu'ils fe tiennent toujours dans une belle fituation, la tête haute & les han ches baffes , que le derriére chaffe le de vant , de façon qu'on ne voie point le de vant ſe poſer , & enfuite le derriére " ce qui s'appelle courir à deux tems : mais il faut que les quatre jambes foient,pour ain fi dire , toujours en l'air. Les chevaux , qui ont les hanches trop longues , ne peuvent pas aller au petit ga lop, ils ne galoppent que vite , parce qu'ils ne faurroient ployer les jarrets , & mettre les jambes fous eux. Quand les chevaux qui galoppent , levent trop le devant , cet te façon leur fait perdre de leur viteffe , & marque même qu'ils ont peu d'haleine . L'amble eft à- peu- près égal en viteſſe au trot , c'eft une allure naturelle à quel ques chevaux , & forcée à d'autres , c'eft à dire , qu'on apprend à ceux - ci à aller l'amble. Cette allure a fon agrément, quand elle eft naturelle , car elle ne ſe fécouë pas comme le trot , & elle avance autant. Elle
. ‫ا‬ COCHER . 239 mainti fe ent auffi davantage que l'artifi cielle : car celle-ci remue d'une façon, qui n'eft pas fort agréable . Tout cheval d'amble n'a jamais les épaules bien li bres. On connoît à l'œil les beaux Chevaux: & les bonsfe connoiffent par le travail. On ne fe trompe guéres à la beauté d'un cheval , pour peu qu'on en fache l'affem blage ; mais la bonté ne fe peut connoître que par l'ufage qu'on en fait , c'eſt-à- dire , le faifant travailler , & même ſouvent. Les Ecuyers & les Maréchaux s'y trompent , & pour s'y bien connoître , un Cocher doit être experimenté. Manière de connoître l'âge des Che vaux par le nombre de leurs dents. On connoît l'âge des chevaux à la dent. Quand un Poulain a atteint l'âge de qua tre ans , les dents de lait tombent . Il en re vient d'autres. A cinq ans les dents à cro chet tombent , il en revient d'autres plus fortes , & les dents de pince ſe fortifient.
LE PARFAIT 240 Sur la tête des dents de pince au milieu il refte un petit creux , lequel eft noirâtre en dedans. Ces trous ou creufets fe rem pliffent à méfure que le cheval avance en âge. A fix ou fept ans les dents de pince font prefqu'égales de hauteur . A huit ans elles le font toutes. Elles demeureut dan's le même état jufqu'à neuf. Après neuf ans les dents de pince de deffus , commencent à dérazer celles de deffous , & alors on connoît que le chevala neuf ans paffés. F'on peut dire de Voilà en général ce que l'âge des chevaux. Mais pour entrer dans un plus grand détail , il faut fçavoir que les chevaux ont douze dents , de devant , fçavoir , fix à l'a machoire fupérieure , couvertes par la lé vre fupérieure , & fix à la machoire in férieure . Il vient au Poulain peu après fa naiffance douze dents de lait , qui font courtes , fort blanches & nullement creu fes ; celles d'en bas font marquées , il gar de ces dents de lait jufqu'à environ trente mois ou deux ans & demi. A deux ans & demi , & quelquefois à trois ans il tombe deux dents du milieu de chaque machoire , qu'on nomme les pin ces , parce que c'eft avec ces dents que le il cheval pince l'herbe , & en quinze jours en revientd'autres à leurs places moins blanches ,
DS i COCHE R. 241 blanches , plus fortes , noires & creuſes en deffus , & alors le cheval n'a que deux ans & demi ou trois ans tout au plus , & il a encore huit dents de lait. A trois ans & demi , & rarement à qua tre ans , les deux dents de lait , qui font à côté des deux pinces de chaque machoire & qui fe nomment les mitoyennes , parce qu'elles font entre les pinces & les dents du coin, tombent, & environ quinze jours après en vient d'autres de la confiftance de pinces alors le cheval n'a que trois ans & demi , ou quatre ans. Il a encore qua tre dents de lait ›, deux en haut & deux en bas ; & alors le creux des pinces eft à demi ufé. ·A quatre ans & demi on environ , les deux dernieres dents de lait à chaque machoire , qui fe nomment les coins , ou les dents des coins , parce qu'elles terminent de chaque côté les dents de devant , tombent , & il en vient d'autres à leurs places. Les coins pouffent à la machoire d'en haut , bien avant ceux de la machoire d'en bas. Ces derniéres dents ne font pas parvenuës à la longueur qu'elles doivent avoir dans quin 1 zejours , comme les pinces & les mitoyen nes . Elles ont cependant autant de largeur dès leur naiffance , & font tranchantes. S Elles viennent après les crochets d'en bas , II. Partie. X
242 LE PARFAIT quelquefois en même-tems , quelquefois avant. Lorfque les coins pouffent , il femble que la dent ne faffe que border la gencive par dehors , & le dedans eft garni de chair jufqu'à cinq ans . Alors la chair du dedans eft toute retirée , & la dent fort de la gen cive de l'épaiffeur d'un écu blanc. C'eft vers ce tems que les crochets d'en haut pouffent affez ordinairement . De cinq ans à cinq ans & demi , la dent du coin reſtant tou jours creuſe en dedans , eft fortie de l'é paiffeur de deux écus. De cinq ans & demi a fix ans , elle eft fortie de l'épaiffeur du petit doigt , & le creux s'étant effacé au tour de la dent , il n'y refte qu'un petit creux noir dans le milieu qu'on nomme le germe de féve , parce qu'il a la figure du germe d'une féve. Alors le creux des pin ces eft totalement ufé , & celui des mi toyennes l'eft à demi. Ainfi depuis que le cheval eft parvenu à fix ans , on ne ré garde qu'aux coins › aux mitoyennes & aux crochets , attendu que lá marque des pinces eft ufée. A fix ans complets , le germe de féve des coins eft diminué , & les crochets ac querent toute leur longueur. A fept ans la dent eft longue , environ le travers du troifiéme doigt , & le germe de féve , ou
me C O C H E R: 243 le creux eft beaucoup diminué. A huit ans la dent eft longue comme le deuxième doigt , & le cheval eft razé & ne marque plus , ce qui fignifie que la dent n'a plus de , creux noir , & eft toute unie. Il y a des chevaux , qui confervent une marque noire aux coins après les huit ou neuf ans , mais elle n'eft pas creufe , ainſi par là on reconnoît qu'elle ne fait rien à l'âge. Il eft affez rare que les jumens ayent des crochets , lorfqu'elles en ont , ils font beaucoup plus petits , que ceux des che vaux " & ne fervent qu'à faire connoître l'âge. Les crochets d'en bas pouffent , & font hors de la gencive avant ceux de def fus. Les chevaux font quelquefois mala des avant que les crochets d'en haut leur. percent , mais ils ne le font jamais pour les crochets d'en bas. Il y a des chevaux , qui n'ont plus de dents de lait , & qui n'ont pas encore per cé leurs crochets d'en haut , quoiqu'ils ayent mis les coins. Cependant les cro chets viennent ordinairement avant les coins. Quand on fe connoît au crochet , & à la dent du coin , on fe trompe rare ment fur l'âge. Si le cheval n'a quefix ans, le crochet d'en haut eft un peu canelé , & creux par- dedans . X ij
244 LE PARFAIT Lorfque le cheval arazé , c'eft-à- dire , à huit ans une rémarque des meilleures eft celle du crochet , principalement de celui d'en haut. S'il fe trouve tout ufé , & arrondi , le cheval a au moins dix ans. Le crochet d'en bas eft auffi une fort bonne rémarque. Les jeunes chevaux l'ont pointu , médiocrement grand , tranchant des deux côtés & fans aucune craffe. A méfure que les crochets avancent en âge ? les crochets d'en bas grandiffent, s'émouſ fent , s'arrondiffent , & deviennent craf feux , puis ils deviennent fort gros & ronds , & enfin dans la vieilleffe ils pa roiffent jaunes & tout ulés. On connoît auffi la vieilleffe à la lon gueur des dents . Plus la langue eft longue & décharnée , plus elle a amaffé de roüil le " & plus elle eft jaune , plus le cheval eft vieux. De plus à méſure que le cheval vieillit , les pinces avancent , comme pour fortir de la bouche,& dans l'extrême vieil leffe elles vont quafi tout droit en avant. Quelquefois ce font les dents d'en haut , & quelquefois ce font les dents d'en bas qui avancent , & quelquefois auffi tous les deux rangs enſemble : alors le cheval eft dit faire les forces , à caufe de la reffem blance que fes dents ont dans cette ſitua
COCHER M 245 tion avec une espéce de tenaille , qu'on appelle des forces. Maniére de connoître l'âge des chevaux quand ils ne marquent plus. Quand des chevaux ne marquent plus , il y a d'autres indices que ceux des dents pour connoître leur âge mais plufieurs de ces rémarques ne font pas abfolument sûres. Le poil blanc à l'endroit du fourcil , lorfque le cheval n'eft ni gris , ni blanc , eft une marque quafi affûrée que le che val a paffé fa quinze ou fa feizième année. On appelle un cheval ainfi marqué , un cheval qui a fillé. Le palais décharné indique la vieilleffe , car à méfure que les chevaux avancent en âge , les fillons de leurs palais , qui dans la jeunefle étoient élévés & charnus , s'ab baiffent peu à peu : & enfin le palais fe dé féche de façon , qu'aux vieux chevaux les C fillons font totalement éffacés. 1 Lorfqu'en maniant l'os de la ganache quatre doigts plus haut que la barbe , on fent qu'il eft rond , c'eft une marque de jeuneffe : fi on le trouve aigu & tranchant, le cheval eft vieux. Si on tire à foi la peau fur la ganache , X iij
246 LE PARFAIT ou fur l'épaule , & qu'elle ne fe remette pas vite en fa place , c'eft figne de vieil leffe. Comme il eft fort rare de trouver des Poulains,& de jeunes chevaux tout blancs , & que les chevaux gris blanchiffent en vieilliffant , il arrive fouvent qu'un che " val blanc n'eft tel qu'à cauſe qu'il eft vieux. Chevaux qui marquent toute leur vie. Il y a des chevaux, qui confervent leurs · avan 'dents jufque dans un âge très cé , belles , blanches & courtes . Ils font : bons à contremarquer , les Maquignons ne manquent pas de lefaire. Les chevaux qui marquent toute leur vie font appellés Béguts. A ces chevaux le creux noir des dents s'ufe peu , de fa çon qu'ils paroîtroient toujours n'avoir que fix ans. Les chevaux hongres y font. plus fujets que les chevaux entiers. Il y a deux fortes de chevaux Béguts » fçavoir , ceux qui marquent de toutes mais ils n'en font que plus. les dents aifés à diftinguer , car à trois ans & demi , lorfque les mitoyennes viennent, la marque des pinces eft à demi uſée. A fix ans le creux des pinces eft ufé a & les
COCHER . th 2+7 mitoyennes à demi ufées ; ainfi lorſqu'on voit que les pinces & les mitoyennes marquent également , le cheval eft sûre ment Bégut ; & l'on peut diftinguer for âge aux autres fignes que j'ai ci- devant ex pliqués à l'article de connoître l'âge des chevaux . La deuxième forte des chevaux Béguts, eft ceux qui ne marquent pas à toutes les dents , mais qui marquent toute leur vie. A ceux -là on reconnoît l'âge à la longueur des dents , aux crochets & aux autres fuf dites marques . Des Poils. Lorfqu'on veut diftinguer la couleur d'un cheval , on fe fert du terme de Poil au lieu de celui de couleur. Ainfi au lieu de dire un cheval eft d'une telle couleur " on doit dire il eft d'un tel Poil. Un homme qui fe connoît à la beauté , & la bonté des chevaux , doit encore fçavoir , qu'il y a des poils dont on fait plus de cas que les autres , & par lefquels même on juge de la bonté des chevaux. Tous les Poils différens ne proviennent que d'un mêlange , qui fe fait de divers 8 Poils , qui croiffent naturellement fur les chevaux, & qui n'ont pris leur noms , que X iiij
LE PARFAIT 248 par rapport aux couleurs , qui dominent le plus , & felon qu'il a plû aux hom mes de les leur impofer , d'autant que la plupart de ces noms ne font qu'arbi traires. Différens Poils des Chevaux. II y a par rapport aux chevaux trois fortes de Poils appellés fimples ,parce qu'ils ne font mêlés d'aucun autre . Ce font le blanc , le noir , & le bay. Les compofés font en plus grand nombre . On les nom me ainfi à caufe de leur mélange avec les premiers. Il y a des chevaux de caroffe de toutes fortes de Poils . On en voit , mais ce n'eft qu'aux équipages de quelques Prin ces , Princeſſes , & Seigneurs de la Cour à Poil blanc , blanc pâle , blanc luifant , blanc mêlé de noir , gris , gris fâle , gris brun , gris -fanguin , gris argenté , gris moucheté , gris pommelé , gris charbon né , auber , poil étourneau- pie , tygres , fabelle , & porcelaine . Les attelages de ces différentes couleurs font rares , & d'un très grand prix . La couleur ordinaire des chevaux de caroffe eft poil noir , noir mo re , noir mal éteint , poil rubican . Plu fieurs jeunes gens de condition ont à leurs équipages des chevaux à poil bay , bay
1 呵 COCHER. 249 brun , bay clair , bay doré , bay mirouet te ; alezan clair , alezan brun , louvet , cerf, rouan , rouan vineux , rouan caveffe de more. Entre tous ces poils , il y en a de plus eftimés les uns que les autres. On juge même de la bonne ou mauvaiſe qualité d'un cheval par fon poil. Ceux qui voudront en fçavoir davantage fur cet ar ticle , peuvent confulter le livre de la con noiffance des chevaux , & le nouveau Parfait-Maréchal. Ils y trouveront de quoi fatisfaire entierement leur curiofité fur cette matiére. Explication de toutes les parties exté rieures du corps d'un Cheval. Tête. J'ai déja fait en général le portrait d'un cheval beau & parfait. Examinons à pré fent toutes les parties. La tête d'un cheval doit être petite & féche. Quand les nerfs , & les veines y paroiffent , c'eſt un très-bon figne. Un cheval a groffe tête n'a point d'agrément. Il eſt péfant à la main. Ce pendant on fouffre des chevaux à groffe tête à un caroffe & au trait , quand ils ont la tête groffe d'offemens feulement , & non de chair. Celles- ci font fujettes aux maux des yeux.
250 LE PARFAIT Cou , Langue , Barres. Uncheval de felle & de caroffe doit avoir le Cou long & bien garni , les machoires petites & maigres , la bouche médiocre ment fendue. Une bouche , qui écume eft la marque qu'un cheval eft de bonne conf titution. La langue doit être déliée , ni trop grande , ni trop courte. Les chevaux , qui l'ont groffe font lourds ordinairement à la bride , on a de la peine à les bien em boucher 2 mais on n'y regarde pas de fr près pour des chevaux de tirage. Il n'en font pas même moins eftimés , quand ils font bons d'ailleurs. Pour qu'un cheval obéiffe au mors , il faut qu'il ait les barres petites , & féches & les levres déliées , & tournées en dehors. Mais cela n'eft bon que pour les chevaux de parade . Oreilles , Front. On cherche dans un cheval les oreilles petites , droites , pointues , très - peu épaiffes , bien éveillées , placées avanta geufement au plus haut de la tête . Un che val qui lesporte bien , les porte en avant ,
COCHER. 251 foit qu'il galope , ou qu'il aille au pas. Quoique les Oreillards n'ayent pas tant de grace , on en fait cas pour le caroffe. Un Front médiocrement large , le de vant de la tête étroit , avec un épi , & mar quée d'une étoile , eft un beau front de cheval. Ceux qui n'ont pas d'étoile paffent pour défectueux. Yeux. On cherche dans un cheval des yeux beaux , bien nets , & bien clairs. Ceux qui ont de la vivacité & du feu dans les yeux font très- eftimés. La fierté , la réfolution font d'excellentes qualités dans l'oeil d'un cheval. On veut dans cet animal un régard fuperbe , mais fixe , & non hagard. Les yeux médiocrement gros font les meil leurs. On mépriſe les yeux petits , qu'on appelle yeux de cochon . Les yeux enfon cés , accompagnés de fourcils élévés ſont la marque d'un cheval malicieux , dont il faut fe défier. Les plus gros ne font pas eftimés. Quand ils fortent trop , ils déno tent un cheval , dont les défauts font dangereux , mais ils font fiers , & coura geux , & bons pour le caroffe. Les yeux doivent être à fleur de tête , & la prunel le en doit être grande. Les yeux noirs dans
252 LE PARFAIT un cheval marquent un tempèrament doux Les yeux blancs , qu'on appelle yeux de chat ne font pas fi bons. Les premiers voyent mieux pendant le jour , les autres font plus affûrés pendant la nuit. Maniére d'examiner les Yeux des Chevaux. Pour confidérer les yeux d'un cheval , on cherche l'ombre ; on les examine au travers , & non vis- à-vis , & on porte la main au-deffus de l'oeil , pour en rabattre le grand jour. On prend garde fil'œil du cheval eft clair. Cette netteté fe rémarque fur la vitre , qui eft le criftal tranſparent , qui enferme toute la fubftance de l'oeil. Ön confidére cette partie avec attention , pour voirs'iln'y a point quelques tâches de blanc tout au tour , quelque nuage , ou obfcurité qui la couvre. Chevaux lunatiques. Les Chevaux lunatiques ont les yeux de couleur feüille morte , ils font enflés & jettent une eau claire plus chaude qu'el le ne doit être naturellement . Il y defcend une fluxion , fi la fluxion eft paffée , il eft difficile de connoître , fi un cheval eſt lu
COCHER. 253 natique ; mais un cheval lunatique à l'oeil , où il a fouffert la fluxion , plus petit que l'autre , trouble , noir , & brun dans le fond. Chevaux qui ont un Dragon. Les Chevaux font auffi fujets à avoir une tache blanche fur la prunelle , qu'on appelle Dragon. Ce mal dans fon com mencement eft difficile à cauſe de ſa peti-. teffe , mais il eft dangereux , puiſque tôt ou tard un cheval en devient borgne. Les chevaux qui ont la prunelle d'un blanc verdâtre , quoique affez tranſparen te , nefont pas bons. Telles vûës font fu jettes a tomber. Un œil trouble fort brun , plus petit que l'autre eft un mauvais figne: c'eft un oeil perdu , qui préfage la perte de l'autre. Maniére de connoître un cheval aveu ' gle. Pour voir fi un cheval n'eft pas aveu gle , on fait attention s'il marche d'un pas affûré. S'il craint c'eft une marque qu'il eft aveugle. De plus un cheval aveugle dans l'écurie dreffe les oreilles , tourne de côté , & d'autre , quand il entend
254 LE PARFAIT quelqu'un derrière lui , & il eſt crain tif Chevaux qui ont des fluxions. Quand les chevaux ont les yeux humi des , ou enflés deffous , & que cette humi dité eft chaude , c'eft une marque qu'ils ont des fluxions , & il ne fe faut pas char ger de tels chevaux . Il y en a qui pour examiner les yeux d'un cheval paffent la main , ou le doigt devant , & s'ils les fer ment, en jugent avantageuſement , & fort mal s'ils les tiennent ouverts. Chevaux ombrageux : Les Chevaux deviennent ombrageux par une debilité de vûë , qui leur fait ju ger des objets autrement qu'ils ne font. Il y en a qui attribuent ce défaut à des poils qu'ils ont fous les paupières qui leur offu quent la vûë , & leur rendent les objets plus difformes. D'autres avec plus de rai fon croyent que c'eft une humeur grof fiére , qui tombe fur les yeux des chevaux, leur obfcurcit la vûë , la leur rend fortin certaine , & par-là font peu capables de difcerner ce qu'ils voyent. On connoît un cheval ombrageux par fa démarche , il A
vil COCHE R. 255 ne va qu'en tremblant , par caprice , de cô té , où d'autre , comme s'il avoit peur. On ne doitfaire aucun cas de ces fortes de chevaux. Ils font autant dangereux à un caroffe , qu'à être des chevaux de felle. Nazeaux , Bouche. Pour qu'un cheval reſpire facilement , il doit avoir les nazeaux fendus & larges. Plus ils font vermeils en dedans , plus ils marquent de chaleur & de vivacité. On n'embouche pas aifément un cheval qui n'a pas la bouche grande ; le mors le bleffe. Une bonne bouche de cheval s'ap puye également , eft ferme & légére , obéit aifément , s'arrête fans branler , & eft faine. La bonne bouche fait l'excellen te qualité, foit d'un cheval de caroffe, foit d'un cheval de felle . Une bouche écuman te eſt un bon préfage. L'écume en doit être blanche , non fluide , ni pâle , ni jau nâtre , ni rouge. Encolure , Crin. Une belle Encolure eft décharnée monte droit en haut , part du garot , va en diminuant jufqu'à la tête. Les plus lon gues font les plus eftimées , & celles qui
PARFAIT LE 256 rélévent davantage que les autres. On ne cherche pas une fi belle Encolure dans les chevaux de caroffe , on fait même cas d'u ne Encolure charnuë & épaiſſe , ainſi que dans les barbes , les Chevaux d'Eſpagne , & les Jumens. Le Crin de la queue pour un cheval de felle doit être en petite quan tité. Une criniére trop épaiffe gâte la bel le encolure d'un cheval. Poitrine. C'eft un ornement pour un cheval d'avoir le garot rélévé , & affez long. Les chevaux de felle , & les chevaux de caroffe doivent avoir la Poitrine large , & on ne doit pas faire de cas d'un cheval , qui a la Poitrine ferrée & étroite. Epaules. Les chevaux de caroffe , & de toute autre voiture ont befoin d'Epaules larges pour tirer. Pour les chevaux de monture , elles ne doivent être ni petites , ni groffes. Il faut prendre garde , que les chevaux , qui font trop chargés d'épaules ne les ayent chevillées , c'eft-à-dire , qu'elles ne foient pas agiffantes. Reins
Соснев . 257 Reins , Côtés , Echine , Croupe , Queuë. Les Reins bas dans un cheval le rendent 1 " mou. On eftime ceux qui ont les reins doubles. Un cheval qui a les côtés amples en eft plus robufte , moins fujet aux mala dies du flanc , & les chevaux de caroffe en ont l'haleine meilleure. Un cheval qui a beaucoup de poil fur l'échine , paffe pour avoir de lavigueur. On ne fait cas que des A chevaux qui ont les flancs pleins. Une croupe de cheval large , ronde , non aval lée ni coupée , mais ronde juſqu'au haut de la queuë , divifée en deux parties par un canal , qui regne tout du long , juſqu'à l'endroit où touche la croupiére , eft une 2 ĵ belle croupe. Le tronc de la queue d'un cheval doit être gros , court & fort . Il faut que la queue foit garnie de crin , ferme , forte , & fans mouvement , & placée rai fonnablement haut. 1 Jambes de devant. Si l'on doit faire attention à toutes les parties qui compofent le corps d'un cheval, on doit encore plus confidérer les jambes , que toutes les autres. Les Jambes de de II. Partie. Y
LE PARFAIT 258 vant , qui font charnuës , arrondies , & qu'on appelleJambes de bœuf ; comme ſu jettes à des humeurs , ne font pas eftimées. On ne fait cas que de celles , qui font lar ges, plates, & nerveufes. Il faut que le ge nou foit plat & large , le canon de même. Le boulet doit être conforme en groffeur à la taille du cheval , & jamais rond. Il ſuf fit , comme je l'ai déja dit , que le fanon foit accompagné d'un petit toupet de poil. Les chevaux fins ont le paturon court , les chevaux d'une groffe corpulence l'ont plus long. Le fabot , & la couronne doi vent être d'égale groffeur. La corne lui fante, grifâtre, & pleine eft la marque d'un bon pied, la corne blanche celle d'un mau vais pied. On doit chercher dans un che val des talons ni trop hauts , ni trop bas Les talons hauts font que les chevaux n'ont pas de pas. Les talons bas font que les chevaux font ſujets à ſe blefler dans les lieux pierreux , & raboteux. Les quartiers des talons ne doivent • pas s'exceder l'un l'autre. La fourchette doit être menuë fans être alterée , & la ſole forte & épaif fe , avec une petite cavité au milieu du pied. Quand les bras font nerveux , lar ges & longs , les chevaux ſe laſſent moins, que quand ils font courts , excepté aux chevaux de manége auxquels il convient de les avoir courts ,
COCHE R. 259 Jambes de derrière. 32 Un cheval doit avoir les Jambes de derriére , comme les Jambes de devant . larges & plates. Elles doivent deſcendre à plomb du jarret au boulet. Quand elles font autrement , c'eft une marque que le che val a les jarrets , ou les reins foibles. Pour ce qui régarde les autres parties , qui com poſent les jambes , elles demandent la mê me attention que celles de devant. Cuiffes. Un cheval qui a les Cuiffes féches , eft un cheval mal gigoté , d'autant qu'il eft ferré du derriére. Mais on doit faire cas de ceux , qui les ont groffes , longues charnues dedans & dehors , & beaucoup chargées de mufcles & de nerfs . Plus les chevaux ont les cuiffes entre- ouvertes fous la queue , plus les hanches s'élargif fent. Ils en vont plus grand pas , & ils marchent plus ferme. Jarrets. Les Jarrets doivent être grands , lar ges , mufculeux & nerveux. S'ils ne font Yij
260 LE PARFAIT ni ferrés , ni pliéz , & qu'ils ayent beau coup de foupleffe , ce font des Jarrets parfaits. Défauts qui fe trouvent aux Jambes des Chevaux. Les Jambes des chevaux ſont ſujettes à bien des inconveniens. Il y a des che vaux qui font bouletés , ou qui ont les Jambes ufées , c'eft-à- dire, quife tiennent droits fur leurs jambes. Cela arrive aux chevaux qui font vieux, ou pouffés de travail. Pour connoître ce défaut on fait marcher un cheval à petit pas. Un cheval qui a la jointe longue & flexible eft auffi un cheval défectueux , & n'eft pas propre pour le travail. Ce défaut eft confidérable tant aux jambes de devant que de derriére. Les jambes argnées ſont des jambes entierement ruinées par le tra vail , & qu'on ne peut rétablir. On ne fait aucun état des chevaux brafficourts , qui naiflent les jambes courbées en arc. Il ne durent pas long - tems , & ne peuvent fer vir qu'au tirage d'une charette.
COCHER. 5 コス 261 aniére de tâter les Jambes des Che ' M vaux. Quand on manie les Jambes d'un che val , on paſſe la main le long du nerfau L derriére de la jambe de devant , depuis le pli du genou , jufqu'au boulet. On prend garde fi le nerfeft gros , ferme & détaché de l'os. Si en coulant la main tout du long on ne fent point de dureté qui arrête , fi entre le nerf & l'os on ne trouve point de glaires mouvantes. Quand tout cela fe rémarque , c'eſt un mauvais ſigne. Différens maux qui viennent auxJam bes des Chevaux . Les molettes font mettre un cheval au rébut. Les Maquignons ont l'adreffe de réferrer les molettes pour un tems. On ré connoît cette fraude en remarquant fi en cet endroit le poil eft plus uni qu'ailleurs , & fila jambe n'eft pas travaillée. On ne ſe charge pas de chevaux , qui ont des offe lets aux genoux. Ce défaut n'eft pas facile à connoître , parce que le genou & les petits os ne femblent être que la même chofe , & il n'y a que les connoiffeurs , qui foient capables de démêler ces deux
262 LE PARFAIT fubftances. Les furos ne font pas plus faciles à découvrir. Il y a trois fortes de furos : le furos fimple , qui tient ſeulement à l'os , fans adhérer aux nerfs , c'eſt le moins dangereux. Le furos chevillé , c'eft un calus qui croît en dehors , & en dedans le genou , il eft mauvais : & le furos dans le genou , dont le cheval devient eftropié , il eft le pire de tous. Les Malandres , ( ce font des crevaſſes ) ruinent les jambes d'un cheval , les rendent roides , & douloureuſes , & le font boiter, fur tout " quand il eft vieux. Le boulet couronné eft un amas de mauvaiſes hu meurs endurcies , & prouve une jambe ufée. Les Formes font un mal dangereux , & capable d'eftropier en peu de tems un che val. Ce font des groffeurs dures & caleu fes , qui croiffent fur le paturon , entre la couronne & le boulet , fur l'un des deux tendons , qui font en cet endroit. Un che val arrêté, qui ne peut demeurer planté ſur fes jambes,fait voir qu'il a les jambes uſées. Quelquefois c'est par laffitude , ou par trop de vivacité , comme s'inquiétant de refter en place. Mais s'il ne fe contente pas de s'appuyer fur la pince pour le fou lager , & s'il a une des jambes de devant en l'air , c'eft marque de jambes uſées. On
par 0 COCHER. 263 ne fait pas de cas d'un cheval mal planté ; & un cheval , qui a de mauvais pieds eft peu propre à quelque uſage , qu'on veuil le l'employer , à moins que ce ne ſoit à labourer la terre. Les pieds qui ont peu de cornes font de peu de durée , & un che val , qui a la corne ufée, n'eft pas capable d'un bon travail. Les cercles aux pieds des chevaux démontrent qu'ils font alterés. On rébute les chevaux , qui ont les pieds gras. Les avalures proviennent de plufieurs caufes , les unes plus dangereufes que les autres , & font fort préjudiciables aux chevaux. Une fourchette petite , & trop féche eft un défaut. Une fole plus haute que la corne en eft un autre. Un pied com ble , & écailleux , eft une difformité : on ne le ferre que difficilement. Un cheval encaftelé eft toujours foible, & fujet aux feimes. Les chevaux feimés n'appuyent que légérement leurs pieds. Les chevaux , qui ont la corne de der riére baffe font moux au travail . Une cor ne féche , écailleuſe , & grande avec un petit creux eft la marque d'un cheval qui a de la foibleffe. La crapaudine eft une eſpé ce de poireau , qui croît au - deffus de la Couronne. Les petits pieds font fujets à bien des inconvéniens ; & les gros pieds rendent
LE PAR FAIT 264 les chevaux péfans , peu laborieux , & les font fouvent broncher. Les pieds larges font la même choſe , & fe déferrent faci lement. Autres maux de Jambes , qui ren dent des Chevaux peu propres au caroffe. On ne doit pas faire cas des chevaux de caroffe , qui ont des calus fur les jambes. Les poireaux font dangereux ; ils croif fent fur le boulet , & fur le paturon. Ce font des humeurs mauvaiſes &puantes.Les Fics reffemblent à des poireaux , mais il n'en découle point de mauvaiſe humeur. Uncheval qui a un pied plus grand que les autres , prouve qu'il a été guéri de quel f ques fics. En quelque endroit que les fics viennent , ils rendent un cheval fort dé fectueux. Les mules traverfiéres , autre ment crevaſſes naiffent autour du derriére du boulet à l'endroit du pli. C'eſt une mauvaiſe marque , quand en tâtant le pa turon d'un cheval , on y trouve une hu midité puante fous le poil. Tous ces maux font dangereux pour des " chevaux de caroffe , parce qu'ils travail lent dans les Villes , où il y a de la bouë , qui eft corrofive. Quand on examine un cheval
COCHE R. 265 cheval il faut faire attention que les jar rets foient fecs , & qu'il n'y ait ni vefigons, ni varices. Les vefigons font une enflure molle , qui vient à droit & à gauche du jarret du cheval. La varice eft une grof feur au dedans du jarret , près de l'endroit où eft fituée la courbe. Les chevaux qui ont des boulets enflés , ou couronnés, s'il y a deffus quelque moleffe qui tienne du nerf, font à rejetter , ainfi que ceux , qui ont des rampins. Le rampin fe dit d'un cheval , qui ne pofe pas également fes ‫با‬ pieds de derriére fur tout le fer , qui leve le talon , & marche fur la pince. Maniére de connoître quand un cheval boite. Pour voir fi un cheval ne boite point ; on le fait marcher fur le pavé au pas , & c au trot , en le tenant en main , c'eſt le moyen de n'être pas trompé. Outre les défauts , que les chevaux peuvent avoir aux yeux , & aux jambes , & dont je viens de parler , ils peuvent en avoir aux autres parties du corps , qui ne font pas moins confidérables. II. Partie . Z
2669 'LE PARFAIT Défauts que peuvent avoir des Che vaux à différentes parties du corps. Il vient des glandes aux chevaux fous la ganache dans le premier âge , c'eſt une preuve , qu'ils n'ont pas jetté leur gour me , ou qu'ils l'ont jettée imparfaitement. Ces glandes font mauvaiſes : s'il découle des nazeaux des chevaux quelque humeur glaireufe , & en petite quantité , ce n'eſt pas une affaire : s'il en fort une matiére vilaine , comme celle d'un abcès , c'eft un mauvais figne. 발 Les épaules groffes & charnuës ne con viennent qu'à des chevaux de tirage. La poſture d'un cheval confifte à être bien ou mal planté. Un cheval mal fitué fur fes membres , dont les jambes font écartées également en haut comme en bas , dont les genoux font ferrés , dont les pieds font tournés en dedans , comme en dehors , eft un très mauvais cheval. Un cheval , qui a les jarrets ferrés , eft un cheval cro chu. S'il a la jambe de dérriére en avant fous le ventre , cela ne vaut rien , non plus quand le boulet paroît déboité en dehors comme en dedans. C'eſt auffi une mauvaiſe fituation , quand il ne poſe ſes pieds que fur les pinces. On n'eftime pas
COTCH EAR 267 um cheval , dont la marche eft degingan dée , qui n'a pas le hauffer , ou le lever de "4 la jambe bon , & qui a l'appui mauvais. Un cheval qui croife fes jambes en mar a chant a l'alure dangereufe. Un cheval de S. félle,qui a le pas péfant,n'eft pas eftimé .On ' n'y régarde pas de fi près pour un cheval de tirage & de caroffe. Il fuffit qu'il ait de la vigueur & de la force. Il ne faut pas dans un cheval de caroffe des jambes , qui 20 plient. Les côtés trop ferrés d'un cheval mar .quent qu'il manque de flanc : ces fortes de 200 e.La eno chevaux font fujets à avoir un ventre de vache , & font peu laborieux. Ils ne font bons que pour être au harnois . Un cheval férré du flanc n'eft bon ni pour le caroffe,ni pour le tirage. Un cheval trop avalé déno te une pouffe prochaine , s'il eft un peu âgé. Un cheval pouffif eft à rejetter. On connoît ce mal quand le flanc lui rédouble, & qu'ayant refpiré , & tiré fon flanc à lui , il fe relâche tout à coup. La pouffe ſe connoît encore , quand le cheval tire fon haleine à lui , & que le mouvement pa roît aux deux côtés. Pour voir fi un che nc é t e Ti u Le le val eft pouffif, on l'examine à l'écurie après qu'il a bû 9 ou en mangeant fon 质 RECE ur arté do Asfor hom neva cr avan пер avoine. La courbature diminuë du prix d'un cheval. On connoît un cheval fou Zij
1 AIT 268 LE PARF fleur d'avec un pouffif , en ce que le pre- mier n'a pas le flanc agité , & qu'en tro tant , ou en galopant il fouffle jufqu'à fai re peur. Le trait & le caroffe fatigue les chevaux fouffleurs. Un cheval de caroffe 1 eft bon tireur , lorfqu'il baiffe les hanches eņ tirant , & qu'il leve l'encolure , & la tête. Quand il léve les hanches ,‫ & ܂‬baiſſe la tête, c'eft mauvais figne, Défauts qui rendent la bouche d'un Cheval mauvaife. 1 Un cheval, qui a les barres hautes , a la bouche mauvaiſe. Quelquefois les che vaux n'ont pas la bouche bonne pour l'a voir trop petite, ou pour avoir les lévres groffes , & répliées fur les dents , ou par ce que les barres ne font pas affez fenfi bles , ou parce que la barre eft trop baffe & qu'elle empêche que la gourmette ne joigne bien. L'inftabilité de la langue , qui fuit la fujetion du mors , peut encore en être caufe , comme la grande ardeur du cheval , qui n'écoute pas ce qu'on lui de mande , & qui veut aller où fa fougue l'en traîne. Quand un cheval faigne de la bou che , & qu'il l'a écorchée , c'eft un mau vais figne. En général un cheval qui a la bouche mauvaiſe n'eft bon ni pour la felle, ni pour le caroffe.
COCHEK; 269 Défautsgénéraux quipeuvent fe trou verfur toutes lesparties du corps d'un cheval. On n'eftime pas un cheval , qui a la tête groffe & charnuë , les oreilles gran des & pendantes , les nazeaux étroits & abbaiffés , les yeux petits & enfoncés , le cou gros & long avec un peu de crin , la poitrine étroite , les épaules abbattuës , les côtés maigres , les flancs ferrés , les jambes tortuës , les genoux durs , la cor ne baffe & déliée. Marques qui font ' juger de la bonté des chevaux. Ceux qui veulent rendre la connoiffan ce des marques des chevaux une affaire ferieufe & effentielle , difent que comme les chevaux ont des marques par où l'on peut juger qu'ils font mauvais , ils en ont auffi par où l'on peut juger de leur bonté comme les épis , & les balfanes la pelo te , le chanfrain blanc , le bout du nez blanc , le coup de lance , les chateignés. L'épi eft une espéce de frifure naturel le du poil , qui fe réléve fur un poil cou ché , & qui forme une marque approchan Z iij
270 LE PARFAIT te de la figure d'un épi de blé. Les épis pour être de bonne augure, doivent être hors du point de vue du cheval , fur des parties où il ne les puiffe voir , comme à la hanche , auprès de la queue , au front , à la gorge , & au col du crin. Quand un cheval en a plufieurs c'eft un avantage.. On eftime les épis , qui naiffent aux par ties fupérieures des chevaux. On ne fait pas de cas des épis mêlés , comme blancs, & alezans , bais & auberes. On eſtime des épis petits , & blancs , qui naiffent fur les paturons , & fur les jointures. Ceux qui font aux jambes de derriére valent mieux que les taches , qu'on voit à celles de de vant. En général les épis font de très-bons fignes. L'épée romaine eft un épi qui s'allonge le long du haut de l'encolure. Lorfqu'un cheval a ce même épi de cha que côté du col , il ne doit pas , felon ceux qui croyent ces marques de conféquence , exifter dans le monde de meilleur cheval. Les Balfanes font de certaines marques de poil blanc , qui viennent aux pieds de plufieurs chevaux depuis le boulet , juf qu'au fabot devant & derriére , & les bal fanes font les marques les plus avantageu -fes , qu'un cheval puiffe avoir. Un cheval halzan des deux pieds , & de la main droi te du côté du montoir eft eftimé.
COCHER. " 1 さい "I 271 Un cheval , qui a la pelote , ou l'étoile au front , fi elle eft véritable, & non fauf fe eft un bon cheval. L'étoile où la pelote eft une efpéce de poil blanc , plus ou moins grand , placé au milieu du front au- deffus des yeux. Le chanfrain blanc eft une bande de poil blanc , qui occupe plus ou moins d'efpace le long de l'os du devant de la tête entre les yeux & les nazeaux . Le bout du nez blanc , s'entend affez. Le poil blanc alors ſe trouve entre les nazeaux , & defcend plus ou moins fur la lévre fupérieure. Il le coup de lance , qui eft un creux af ya fez profond , qu'on voit à quelques che vaux Turcs & d'Espagne , à la jonction du col à l'épaule , tantôt plus haut , tantôt plus bas. Ceci paffe pour une très- bonne marque dont le fondement eft une fa ble. Tous les chevaux ont naturellement aux quatre jambes , quatre durillons ou éleva tions fans poil , de confiftence de corne molle. Ceux de devant font au-deffus du pli du genoüil , & ceux de derrière au deffous du pli du jarret , tous quatre en dedans. On les nomme Lichefnes , Chatei gnes ou Ergots : plus elles font petites & étroites , plus elles marquent une jambe féche , & déchargée d'humeur : quand Z iiij
2 LE PARFAIT elles croiffent trop, on les coupe , il ne faut jamais les arracher , car il y reſteroit une playe. Les chevaux ont auffi à l'extrêmité du derriére de chaque boulet , une petite élevation de corne, tendre , plus ou moins groffe , récouverte par le fanon , on appel le auffi cette corne ergots. Différentes efpéces des Chevaux. On voit en France des chevau Alle mans , des chevaux Anglois , Danois d'Espagne , de Flandre , de Frife , Hol landois , Hongrois , Napolitains , Piéd montois , Polonois , Suiffe & Turcs. Ex cepté ceux d'Espagne , d'Angletterre & de Turquie , qui à caufe de leur fineſſe & leur beauté font des chevaux de felle & de parade , toutes ces efpéces de chevaux font propres aux caroffe. La magnifi cence des équipages eft même aujourd'hui portée au dernier point. On voit dans Pa ris grand nombre d'attelages fuperbes. Je vais dire quelque chofe de toutes ces eſpe ces de chevaux. Chevaux Allemans. Les chevaux dans la haute Allemangne font meilleurs , & beaucoup plus beaux
COCHE R. 273 que ceux de la baffe Allemagne. On en voit quelques attelages à Paris. Mais les trois quarts des chevaux Allemans font plus propres pour l'Artillerie & la Cavale rie que pour le Caroffe. Ils font fort char gés de poil principalement aux jambes , à caufe du pays qui eft froid , & des patura ges qui ne font pas des meilleurs. Car l'Allemagne eft un pays couvert. Les chevaux Allemans font propres au travail, boivent & mangent bien par-tout. Il n'ont pas la taille grande.Ils font courts, ramaffés , trapus , forts de deffous , & ils ont la corne du pied tendre. Le climat & la nourriture de France leur conviennent. Ils font pour la plupart affez mal-faits, bas du devant. Ils ont l'encolure droite ,1 & fort garnie du crin , la tête de vache , la queue touffuë, & courte , ce qui eft une marque de bonté. Ils font fujets aux mala dies , & très- difficiles à ferrer. Chevaux Anglois. Les chevaux Anglois ne font point propres pour le Caroffe , mais bons pour un Cavalier. Ils ont affez de gentilleffe , mais ils font mal tournés. Leur tête eft groffe & longue , le nez en bec de per roquet , les oreilles longues & penchan
274 LE " PARFAIT tes. Hors de leurs pays ils font difficiles pour la nourriture. Leurs jambes font fi nes , le pied beau & bon , peu chargé de poil. Ils ont l'encolure , & la queue peu garnies de crin. Ils font rélévés du de vant. Ils font étroits , & ont la tête de vache . Pour la plûpart ils font d'un poil bay. Enfin les chevaux Anglois font fort vifs , très- charnus , légers , portant bien leur tête , mais ils font fujets à la porter au vent. f Chevaux Barbes. Les chevaux barbes viennent de Bar barie. Ils ont les jambes déchargées , & la taille menuë. On dit que les Barbes meurent , & ne vieilliffent jamais , parce qu'ils confervent leur vigueur jufqu'à la * fin. On en fait des étalons , qui font les meilleurs du monde . Ces chevaux , quand ils font bien choifis , vont merveilleufe ment à toutes fortes d'airs , pourvû qu'ils foient courts & jointés. Il y a des Bar bes en Afrique, qui attrappent les Autru ches à la courfe , on les vend dix mille livres. On en a vû à Paris de cette eſpéce. Ces chevaux vont vîte , & font fi coura -geux à la guerre , qu'ils agiffent toujours , -tant qu'ils ont une goute de fang dans les
5 COCHER. 275 veines. Ils font très - propres au manége mais ils ne valent rien pour voyager , & font trop rares en France pour qu'on en voie à des caroffes. Chevaux Danois. Les chevaux Danois font affez bien faits. Ils ont la taille baffe & le corps -court , ne font pas beaucoup rélévés du devant , font quarrés , courts d'encolure , ont la tête belle , le poil rais , & font un peu camus. Les chevaux Danois ne font bons que dans leur pays. On en voit ce -pendant à Paris , & quelques Seigneurs en ont à leurs équipages. Ils font d'un temperament froid. Un climat chaud leur eft contraire à caufe des mouches. Ils boi <vent & mangent bien par- tout. Ils ont le pied bon , ainfi que tous les chevaux , qui naiffent dans les Pays -bas , froids & hu mides , & ils ont la corne des pieds ex traordinairement 3 longue. Si l'on étoit dans l'ufage de les ferrer , auffi -bien que l'on ferre à Paris , les chevaux Danois auroient les plus beaux pieds , & les mieux conditionnés de l'Europe .
276 LE PARFAIT Chevaux d'Espagne . Les chevaux d'Efpagne font très-fins ; beaux & bienfaits , de belle taille , & lé gers. Ils ont la jambe belle , & bonne , les yeux excellens , la tête belle , un peu longue, la bouche bonne. Ils font adroits, aiſés à manier , fins , fantaſques , & diffi ciles à monter. Ils font bons pour la cour fe , faciles à nourrir , pourvû que la nour riture foit bonne. Depuis l'Espagne , juf qu'au milieu de la France ils vivent aſſez bien. Mais dès qu'ils approchent du Nord, ou qu'ils font en pays froid , ils font mé connoiffables. Comme la France eft un pays temperé , toutes fortes de chevaux s'y accommodent. C'eft dommage que l'Eſpagne ne fourniffe pas beaucoup de chevaux le peu qu'elle en donne font beaux & bons. Leur couleur eftfous poil noir de taupe , alezans bruns , iſabelle T & pelure d'oignon. Ils ont les épaules , & le poitrail trop dégagés de chair , ne font pas francs du collier , & peu propres au caroffe. La Bifcaye & la Galice donnent de très-beaux chevaux. Les Genets d'Ef pagne ont la marche grave & hardie , le trot rélévél, le galop admirable , & la car riére très - vîte. Ils font ordinairement
COCHE K: 277 blancs alezans , ou fauves , avec les crins pendans jufques à terre. On en trouve par mi eux , qui font fi fiers qu'on de , a la peine à les dompter. L'Andaloufie eft la Contrée , qui fournit les meilleurs che vaux. Ceux de Cordoue font plus grands, & plus nombreux , & l'on s'en fert pour la guerre, Chevaux de Flandres ; & de Frife: Les chevaux , dont on fe fert le plus en France pour les caroffes , font ceux de Flandres , d'Hollande , & de Weftfrife. Les chevaux de Flandres, & de Frife font meilleurs que ceux d'Hollande , parce que le paturage de ces Provinces eft meilleur que celui d'Hollande. Les chevaux nez en ces Cantons ont le corps plus ferme , & font moins fujets aux maux de jambes , que les autres. Ils font beaucoup plus vifs, & n'ont jamais le poil fi long , que ceux d'Hollande. Ils font plus faciles à manier, ils boivent & mangent mieux. Ils n'ont pas la taille fi grande , & s'accoutument plus facilement à la nourriture de France que ceux d'Hollande. C**
278. LE PARFAIT Chevaux Hollandois . Les Chevaux Hollandois font hauts fur leurs jambes , fouvent flafques , & long- tems à fe faire à la nourriture de Pa ris. Le pavé & les bouës leur font contrai res. Ils s'accoutument volontiers au travail. Ils ne font bons qu'à fept ans : mais il faut fçavoir les ménager , & les gou- ) verner fur la nourriture. Pour un caroffe ce font les plus beaux chevaux de l'Euro pe , quand ils font bien choifis. La Hol lande eft un pay's plat & marécageux . Les chevaux tiennent beaucoup du naturel de "leurpays , & font fort ſujets à la füeur. Chevaux Hongrois. Les Chevaux Hongrois font d'excel lens chevaux. On s'en fert au Caroffe , au Chariot , à monter , & pour l'Artillerie. Ils font gros , bien proportionnés . Il y en a de toutes les couleurs . Principalement des grifails , gris pommelés , alezans bays , alezans brutes. Ils font peu chargés de poil. Ils travaillent beaucoup , deviennent infatigables dans les voyages , & ſouf frent très-bien la faim , le froid , fans que leur vigueur diminuë . Ils ont la tête quar
COCHE R. 279 grand e , les nazeaux un peu étroits, rée & les machoires étenduës , le cou gros & robuſte , la criniére grande , les côtés de même , le fil de l'échine courbé , la queuë . bien fournie , le pied bon , la jambe belle, la corne bien étendüe , les flancs creux , & tout le corps fort en Angle. Leur crou pe eft fans raze , leur taille plus longue , que haute , leur ventre eft plat & réſerré. Ils ont les os grands , & font d'une eſpéce de maigreur , qui leur convient affez. En fin les chevaux Hongrois font adroits & bons coureurs , & leur laideur les fait fou vent paroître beaux. Chevaux Napolitains. Les chevaux Napolitains , & Italiens font pour la plûpart mal bâtis , déchar gés de chair , mais ils font bons , & dili gens. Ils ont le pied beau , la jambe belle, & l'oeil. Ils font légers, propres à la cour fe , quand elle n'eft pas longue. Ils ont de la vivacité , mais elle ne dure pas. Ils font fougueux , fantafques , opiniâtres , ont la bouche mauvaife , les oreilles longues , & mal placées , de beaux yeux à fleur de tête , le corps fec , & difficile à atteler au caroffe. Ils font plus propres à tirer , qu'à monter. Les Chevaux Napolitains ne font
280 LE PARFAIT point fujets à des maladies , comme ceux de Flandres , d'Hollande , d'Allemagne , & de Suiffe. Mais ils ne s'accommodent pas d'un climat plus froid que le leur. La la plus commune ces fortes de chevaux eft fous poil noir , alezan-brun , brulé & bay, pelure d'oignon & ifabelle . Il y en a peu de noirs , grifailles , & gris pommélés . Hors leur pays les Che vaux Napolitains font difficiles à la nourriture , vû que les foins y fontfort fins , & d'une odeur admirable à cauſe des herbes aromatiques , qui y croiffent en abondance. Les eaux y font auffi meil leures , que par - tout ailleurs ? & plus claires. Chevaux Piedmontois: Les Chevaux Piédmontois font ardans, pleins de feu , & de moyenne taille. Il y en a de toutes fortes de couleurs . N'étant fujets à aucune maladie , ils font propres à tout ce que l'on veut. Il n'y a point de chevaux qui boivent & mangent mieux que les Piedmontois , ni qui refiftent da vantage au travail. Ils ont le corps beau , les yeux les jambes bonnes & belles beaux , la tête bien proportionnée , de petites
COCHE R. 281 petites oreilles bien piquées , & bien pla cées. Ils ont la bouche un peu ferme , la tête péfante , ils ne la portent pas bien. Il arrive auffi à tous les chevaux , qui ont la tête péfante , de broncher. Chevaux Polonnois: ... Les Chevaux Polonnois font de même taille , que les Chevaux Danois , de mê me temparement , & ont le même pied " mais ils n'ont pas l'encolure fi fine. Ils font ordinairement fous poil bay clair , & pe lure d'oignon. Les chevaux Polonnois font fougeux , obſtinés , malicieux , trai tres , & très-vigoureux. Les chevaux en tiers font très- difficiles à dreffer. Soit que -les chevaux Polonnois foient fatigués , ou non , ils boivent & mangent par- tout. Et l'on s'en fert tant pour le caroffe , que pour être des chevaux de felle. Win Chevaux Rouffins. A Les Chevaux Rouffins viennent d'Al lemagne , & de Hollande. Il y en a qui font très-beaux de taille , qui vont à tou tes fortes d'air. Ils plient naturellement les bras en fautant , ce qui n'eft pas na II. Partie. Aa
LE PARFAIT 282 turel aux autres chevaux. On trouve peu de Rouffins qui foient parfaits au manége: On en voit plus qui s'accommodent au caroffe. Ces chevaux vieilliffent bientôt བྱ་ c'eft ce qui fait , qu'on eft fouvent obli gé de les garder long-tems à l'écurie. Chevaux Suiffes. Les Chevaux Suiffes reffemblent fou vent à ceux d'Allemagne. Ils font fous poil noir & gris. Les Suifles font trafic de leurs chevaux . Les Allemans en achettent beaucoup ils font meilleurs que les leurs, ont plus de vigueur , font plus propres à la Cavalerie, & marchent mieux que ceux de toutes les autres Nations. Les chevaux Suiffes , & d'Allemagne font excellens pour l'artillerie , les chariots , les cha rettes , & les charrues , ainfi que ceux de Normandie & de Bretagne. De tous les chevauxSuiffes on en choifit les plus fins & les plus légers pour la monture. Ils fça vent naturellement monter les montagnes, parce que la Suiffe eft un pays de monta gne. Iln'en eft pas de même des chevaux de Beauffe , Brie , Champagne , & de Pi cardie.
T COCHER. 283 Chevaux Turcs Les chevaux Turcs font d'une taille inéga le ; ilsfont beaux , de bonne haleine & vont vîte. Tels font ceux que l'on a vu au com mencement de l'année derniére à l'entrée de l'Ambaffeur Turc , & dont les plus beaux ont été préſentés à Sa Majefté de la part du Grand Seigneur. Pour l'ordinaire les chevaux Turcs n'ont point de bouche , n'élévent quetrès-peu les jambes. Ils vivent long-tems , font fort vigoureux , fains & nets de tous leurs membres , qui font des qualités très - bonnes pour un che val. Parmi les chevaux Turcs il y en a de blancs , c'eft le poil le plus ordinaire. On en voit d'alezans , de bays , fort peu de moreaux.Les meilleurs viennent deMédie, qui eft une Province de Perfe. Ces che vaux font grands , hardis , larges de crou pe , très-vigoureux , vont fort vîte , & travaillent beaucoup. Ils font rares en France. Il n'y a qu'à la Cour & chez les Princes , qu'on en peut voir. Ils vient auffi des chevaux d'Arabie bons pour la courfe. Les Cavales y font en fi grand ufage , & de fi bonne haleine "' qu'elles font bien du chemin en peu de Aa ij
LE PARFAIT 284 tems , fans s'incommoder. Ces chevaux font de race de Perfe , ainfi que ceux d'Ar ménie. Les premiers font plus petits , & n'ont pas la taille fi noble. Ils font plus larges des épaules , d'une encolure moins fiére , & moins fujets à fe mettre en co lére. On voit en France des chevaux Mau refques, qui font excellens & propres pour les longues courfes. Ils font de corpulen ce médiocre , & grands travailleurs. Il ne leur manque qu'un peu de fiérté pour être parfaits. Les chevaux Perfans font des chevaux eftimés . Ils vivent long - tems. On s'enfert beaucoup en Turquie.Au ref te tous les chevaux,dont je viens de parler, ne font que des espéces différentes , ran gées fous le genre des chevaux Turcs. Chevaux de France. On pourroit ſe paffer en France des chevaux étrangers. Plufieurs de nos Pro vinces en fourniffent , dont les uns font des chevaux de main , les autres de beaux , & bons chevaux de caroffe. Enfin les che vaux François peuvent être employés à toutes fortes de travaux ; mais il y en a de plus eftimés les uns que les autres. Je
COCHER. 285 vais dire quelque chofe , de ceux qui font les plus connus , & dont on fait le plus d'ufage . Chevaux Bretons; Les chevaux Brétons font courts, ronds, ramaffés , chargés d'épaule. Ils ont la tête courte & charnue , les yeux moyens. Ils font forts du deffous , bas de terre , peufujets aux maladies , excepté le farcin , que quelques uns ont à caufe de leur ple nitude. Ily en a qui ont la gale. Ils ont la bouche ferme , & ne fe ramènent guéres. On s'en fert pour l'Artillerie , pour leTi rage , & pour le Caroffe. Il y en a même que l'on monte : mais ils font fort peu pro pres à la courfe. Les Chevaux Brétons font mutins. Ils approchent des chevaux Poitvins pour la fermété du corps , & de la taille. La plupart font poil noir , bay brun ; il y en a peu de gris. Les chevaux entiers font mauvais en Bretagne , mais ils ont bonne jambe , & bon pied. Chevaux de Franche-Comté. Tous les chevaux de Franche- Comté font courts , trapus , de moyenne taille , plus propres à monter qu'à tirer. Leur
286 LE PARFAIT couleur eft fous poil ifabelle , fouris , pe lure doignon , alezans noirs & gris. Il y en a auffi de pies , de tigrés , ventre de biche , pommelés. Mais tous les chevaux Fran -Comtois ne font pas également bons. Chevaux Gafcons. Les chevaux Gafcons font d'une taille femblable à ceux d'Efpagne. Ils ne font pas fi beaux. Ils font plus lourds , mais propres au Caroffe , au Chariot , & à des Charettes. Il y en a beaucoup qui con viennent à la Cavalerie. Ils ne font pas forts de deffous , leurs jambes font me nuës. Ils ont les jointures hautes , & le pied de mulet. Ils les imitent auffi beau coup de la croupe & de la jambe. Ils font d'un affez bon tempéramment , & ne font point fujets à des maladies. Ils ont la vue & la bouche bonnes : ils font fa ciles à emboucher , & par conféquent à gouverner. Mais les chevaux entiers font très-vicieux en Gaſcogne. Ils font traî & ennemis de l'homme ›, c'eft ce qui fait qu'on ne voit gueres d'étalons.
COCHER. 287 Chevaux Limofins. Les chevaux Limofins tiennent des chevaux d'Eſpagne & de Gaſcogne , par ce qu'on a dans les pays des étalons d'Espagne pour couvrir leur cavales , & qu'en Gascogne on fe fert d'étalons Li . mofins . Ainfi les chevaux Elpagnols , Limofins , & Gafcons tiennent les uns des autres. Il y a encore dans les haras de Limoge des étalons d'Italie , & des jumens d'Allemagne , afin d'avoir des chevaux naturellement groffiers. On choifit dans le haras une jument d'une taille légére pour la mettre avec un che val d'Allemagne , afin que les chevaux qui en fortent foyent plus chargés de -chair que ceux d'Italie. Ils font grands L & forts , mais fujets aux mêmes maladies que les chevaux d'Allemagne , parce que le pays eft humide & couvert de bois. On tire tard du haras les chevaux Limc fins . Ils font vicieux , & ne font jamais bons , qu'ils n'ayent atteint l'âge de fix à fept ans. Leur couleur , pour la plû part , eft fous poil bay , bay brun , bay biche , bay cendrin , tout à fait biche , • ou pommélé. Ceux qui tiennent d'Efpa gne , & d'Italie font bons. Ceux qui tien
288 LE PARFAIT nent des cheveaux d'Allemagne en ont les défauts. Chevaux Normans. Les chevaux Normans font à peu près de la même taille que les chevaux Bre tons. En Normandie , on garnit les ha ras de jumens de Bretagne. Elles font mieux faites que celles d'Allemagne , plus trapuës , & plus vigoureuſes. Les étalons pour la plûpart , font d'Efpagne : c'eft ce qui fait que les chevaux Normans ne font pas fi forts que les chevaux Poit-vins. Cependant il s'en trouve de très- bons & peu de mauvais. Ils boivent à tout gué. Ils mangent à tout ratelier. Ils font vi goureux , bons chevaux de Caroffe , de Cavalerie , propres à toutes fortes d'exer cices , & d'une nature meilleure que les chevaux d'Auvergne & les Limofins.. Chevaux Poitvins. Les chevaux Poitvins font de la même taille que ceux qui naiffent dans le Li mofin. Les Poitvins " dans leurs haras , ont la même méthode que les Limofins Mais ils élévent différemment leurs che. vaux. Dans le Limofin , on laiffe les ju mens
COCHER. 289 mens dans les paturages , où ils mangent des herbes fraîches , de mauvais accabi , & épaiffie. Dans le Poitou , on les nourrit avec debon foin , & de bonne avoine; on les fait marcher doucement fans les faire troter. Quand les poulains font en âge de manger , on les rétire de bonne heure du haras : on leur fait manger de la paille fraîche , ce qui leur rend un corps fi fer me , qu'ils font propres à toutes fortes d'exercices . On les accoutume , tous jeu nes qu'ils font , à avoir dans l'écurie les pieds fur la dure. En général , les che vaux Poitvins font bons de corps & de jambes . Ils ont bon pied , bon oeil , & bon appetit . Mais ils ne font ni beaux ni bien faits , quoique prompts , on les gou verne aifément. Chevaux Picards, Les chevaux de Picardie , Champagne , Bourgogne , Beauffe , & Brie , ne font fi bons pas que ceux dont je viens de par ler. Il n'y a point de haras dans ces Pro vinces , ni perfonnes d'affez curieuſes pour en avoir. Il y faudroit des jumens , & des étalons , beaux & de belle taille : c'est ce qui ne s'y trouve pas. On n'y éléve prefque point de poulains. Le peu Bb II. Partie,
LE PARFAIT 290 qu'il y en a eft pour l'ufage des particu liers , & encore de cette Province , vient on à Paris pour en acheter au Marché aux Chevaux, Chevaux Bourguignons. Les chevaux Bonrguignons ne font pas d'une grande taille. Leur couleur la plus commune eft fous poil bay clair. Le fer vice en eft bon. Les chevaux entiers de Bourgogne ne font point fujets à de mau→ vais vices , comme ceux de Bretagne & de Normandie . Les jumens de Bour gogne font affez fécondes. Mais les Bour guignons ne font pas curieux. Ils n'ont que des étalons du pays , & quelques-uns de Franche- Comté. Endroits d'où l'on tire les Chevaux de Caroffe. 30 J Voilà en abrégé ce que l'on peut dire fur les différentes efpèces de chevaux françois & étrangers. Il n'eft point né ceffaire de courir chez les Etrangers pour trouver des chevaux propres à la Cava lerie & au Caroffe. Le Royaume en four hit affez. Pour ce qui regarde les chevaux de Caroffe , on les tire de Normandie , de
" COCHE R. 201 Bretagne , & de plufieurs autres de nos Provinces. Si on les veut de groffe & de grande taille , on les fait venir de Flan dres , de Hollande , de Weftfriſe , & d'Hongrie. Si on les veut d'une taille plus fine , on choifit des chevaux Piedmon tois , Napolitains , & Italiens , & quel ques-uns d'Allemagne & de Suiffe , mais des mieux faits , parce que prefque tous font trop matériels , & ne peuvent fer vir qu'au labourage. En un mot , les plus beaux chevaux de Caroffe font , fans con tredit , les chevaux d'Italie , enfuite les Danois & Allemans , puis les chevaux de Frife , & du Nord de la Hollande . En France , les plus eftimés , font les che vaux Normans . Les chevaux Flamans font les moindres de tous , à cauſe de leur groffe tête , & de leurs pieds plats. Pour les chevaux qui viennent d'Ef pagne & d'Angleterre , ce font des fins coureurs , & rien autre chofe ; les che vaux d'Eſpagne ont les épaules plus li bres , & les mouvemens plus fouples que les autres chevaux fins étrangers. Il eft rare de voir de grands chevaux d'Eſpa gne. Les chevaux Anglois ne font pas généralement bons. Il en vient beaucoup de mauvais de ce Royaume. Ils ne font pas de race du pays . Ils viennent de race de Bbij Barbes.
LE PARFAIT 292 Mais malgré cette différence des che vaux François & étrangers , il ſe trouve -cependant tant de variété dans ceux d'un même pays , foit pour la qualité , foit pour la figure , qu'il faut avouer qu'on n'en peut déduire toutes les circonſtances , car il y en a de bons , de médiocres , de mauvais , de beaux , & de laids de tous les pays. Fin de la feconde Partie, last
2 LE PARFAIT COCHER , Ότι L'art d'entretenir & de conduire un Equipage à Paris & en Campagne. TROISIE ' ME PARTIE. Inftruction aux Cochers fur les mala dies des Chevaux. ) E n'eft pas affez qu'un Cocher fache entretenir & conduire un Equipage à Paris & en Campa gne. Sa foience confifte encore à connoître la beauté , & la bonté d'un Bb iij
294 LE PARFAIT cheval de caroffe . Dans les deux pre mieres parties de cet ouvrage , je crois en avoir dit affez pour qu'il n'ignore rien fur toutes ces chofes. Il ne me refte plus qu'à parler dans cette troifiéme des prin-... cipales maladies aux quelles les chevaux fontfujets. Mais je pafferai légerement fur celles , où la préſence d'un habile Maré chal eft abfolument néceffaire. Pour les autres qui font de peu de conféquence , & aufquelles un Cocher peut rémedier de lui-même & fur le champ , je vais lui en in diquer les rémedes , pour qu'il puiſſe y avoir récours, dans les cas preffans , com me quand il fe trouve en route , ou en Campagne , loin d'un habile Maréchal. Un autre avantage que je compte que les Maîtres , comme les Cochers trouve ront dans ce petit traité , c'eft qu'en leur expliquant les Symptômes des différentes maladies , qui peuvent arriver aux che vaux , ils pourront les uns & les autres s'y connoître , & être en état de veiller à leur guériſon , & de s'appercevoir fi le Maréchal, qui en entreprend la cure , s'en acquitte , comme il faut. Ceux qui ne ſe ront pas content de cet Abrégé peuvent avoir récours à la Connoiffance des Che vaux , au Parfait - Maréchal , au Nouveau Parfait - Maréchal , & à plufieurs autres
COCHE R. 295 Livres. Je n'écris que pour les Maîtres , qui ont des Equipages ; & pour leurs Cochers , Palfréniers Poftillons , & Gar çons d'écurie , qui auront affez de cet in douze ( fur-tout les Cochers , Poftillons , Palfréniers & Garçons d'Ecurie , ) pour ſe mettre chacun au fait de ce qui régarde leur métier . Abcès , ou Apoftêmes. Un Abcès , ou Apoftême n'eft autre chofe que le mélange de la lymphe & du fang , accompagné d'une fermentation d'humeurs puantes ; & le pûs & la ma tiére de la fupuration n'eft autre choſe que lefang corrompu & tourné. Lorſque cette matiére eft blanche 9 elle eft loüa ble :c'eft-à-dire , que le fang qui la forme n'a aucun vice de corruption. Si elle pa roît jaune , rouſſe , ou puante , elle mar que un fang vicié, & qu'elle a acquis de la malignité par fon féjour.. C'eft au Maréchal à guérir un Abcès & à l'ouvrir dans fa maturité , & au Co cher à faire vivre fon cheval de régime , -pendant cette cure. Bb iij
296 LE PAR FÄIT Arrêtes. Les Arrêtes , grappes , ou queue de rat font des gales , & tumeurs fur les nerfs des jambes de derriére entre le jar ret & le paturon , il en vient rarement fur le nerf du canon. Les Arrêtes le dénotent de deux fa çons , & proviennent de deux differentes cauſes. Ily a les Arrêtes féches , & les Arrêtes humides. Les féches font une ef péce de mauvaiſes eaux. Elles fe guériffent comme les enflures de boulet . Les humi des n'ont point de calus , ni d'enflure. El les coulent tout le long d'une partie du tendon de la jambe , depuis la naiſſance duboulet. Elles fuintent une tumeur âcre & mordiçante , qui fait tomber le poil. C'eft une espéce de dartre coulante , qu'il faut traiter comme les demangaifons. Atteinte. Un cheval ſe donne une Atteinte , lorf qu'avec la pince du fer de derriére , il fe donne un coup fur le talon du pied de de vant. Mais plus communément les Attein tes , proviennent de ce qu'un cheval , qui en fuit un autre, lui donnera un coup ,
COCHER. 297 foit au pied de devant , foit au pied de derriére , en marchant trop près de lui. Il y a Atteinte fimple , & Atteinte en cornée. Celle-ci eft très-dangereuſe. Dans le moment qu'on s'apperçoit de l'Atteinte, c'eft-à-dire , auffi- tôt qu'elle a été donnée , il faut mettre du poivre deffus , ce qui la guérit ordinairement. Pour l'Atteinte en cornée , on la guérit comme le Javart encorné. Avant-Cœur. L'Avant- Coeur eft une tumeur contre nature , de figure ronde , groffe à peu près comme la moitié du poing , qui fe forme à la poitrine du cheval vis- àvis du Coeur. -Si l'Avant-Coeur ne vient à fuppuration , c'eft pour le cheval une maladie mortelle. On connoît quele cheval a l'Avant- Coeur, lorfqu'il paroît avoir le ventre réſerré qu'il tient fa tête baffe , qu'il a l'oeil triſte, que le coeur lui bat fortement , que les épaules lui tremblent , qu'il tombe com me en fyncope , & qu'il a de la peine à fe réléver. L'Affaire d'un Cocher pendant cette maladie , eft de lui donner du fon moüil lé avec une once de fouffre d'Antimoine
298 LE PARFAIT mêlé parmi. S'il eft fi dégoûté , qu'il faffe difficulté de le manger , on prend environ un verre de vinaigre , ou de verjus , dans lequel on fait diffoudre deux onces de thériaque , qu'on donne au cheval. Ce dégoût ne peut pas durer long - tems , d'autant plus qu'il faut que le cheval gué riffe bien-tôt , ou qu'il meure. Avives. Les Chevaux , comme les hommes ont des glandes à la machoire , au-deſſus des oreilles , qu'on appelle Parotides aux hommes , & Avives aux chevaux. A voir la maniére dont la plûpart des Maréchaux , fur-tout ceux des Villes de Province , & des Campagnes , panſent les avives , on croiroit qu'elles font douloureufes. Cependant elles font in fenfibles , & les fignes des avives font les mêmes que les fignes des tran chées. Il n'y a point d'avives fans tranchées , & ce qu'on appelle avives " n'eft autre choſe que mal au ventre , car le cheval fe tourmente exceffivement par la douleur qu'il fouffre. Il fe couche , il fe roule par terre , il ſe réléve fouvent , il s'agite , il fe débat fortement. Un Maréchal ignorant , qui trouve un cheval dans cette agitation , preffe les
COCHE R. 299 avives , les pique , les bat , & les croit affez douloureuſes pour tourmenter un cheval. Par-là il excite une inflammation beaucoup plus violente , il rend le cheval comme fol , & par fon ignorance , il en fait plus mourir qu'il n'en guérit. C'eft ce que j'ai appris d'un Maréchal ordinaire du Roi , un des plus habiles que nous ayons à Paris. Il traite les avives comme les tran chées , & felon le Nouveau Parfait Maréchal " on ne doit pas faire autre ment. Bleymes. Les Bleymes font une maladie , ou une inflammation de la partie intérieure du fabot vers le talon entre la fole & le petit pied. Elles viennent - aux chevaux, qui ont le talon bas , & encaftelé , qui craignent le travail , parce qu'ils ont coutume d'avoir le talon moux , & trou vant le pavé trop rude , il s'engendre une corruption en cette partie , qui eft proche de la fole. Il y a trois efpéces de Bleymes : Bley mes féches , Bleymes encornées , & Bley mes foulées. Les bleymes féches font nommées ainfi à raifon de leur caufe , la quelle eft intérieure , provenant de grande
LE PARFAIT 300 féchereffe de pied. Les pieds cercles , & les 1 talons encaftelés > comme je l'ai dit plus haut , font fujets à cette efpéce de' Bleyme. Un Cocher prévient ce mal en tenant les pieds bien nets , en les garnif fant d'onguent de pied , & en leur met tant fous les pieds de la fiente mouillée . La ferrure en rémediant aux talons ? & aux quartiers de dedans ferrés , s'oppo fe auffi à la naiffance de ces Bleymes. La Bleyme encornée eft communément une fuite de la Bleyme féche , négligée & vieillie. Il eft néceffaire dans cette occa fion de traiter le cheval intérieurement avec ſaignées , diétes &lavemens ; du ref te on fuit le procédé du Javart 。 ,,, encorné. Les Bleymes foulées ont une caufe ex térieure. Elles proviennent de ce qu'il fe fera enfermé de petites pierres , ou du gravier entre le fer & la fole , ou bien que lefer aura porté fur la fole qu'il aura foulée , & meurtrie en quelque endroit. Les pieds plats font fujets à ces fortes de Bleymes , car le gravier & le fable s'en ferment facilement à ces pieds , entre le fer & la fole. Cette efpéce de Bleyme eft aiſée à gué." rir dans le commencément , & n'eft pas dangereufe , à moins qu'on ne la laiffe vieillir ; car alors elle ne laifferoit pas
no 1 I COCHER . 301 d'avoir des fuites fâcheufes. On découvre la Bleyme jufqu'au vif : on tient la fole & le fabot gras , avec du cambouis du côté de la Bleyme , & en rémettant le fer, on doit avoir attention , qu'il ne porte point depuis le premier trou. Bouton fous la Sole.. Il vient fous la Sole du cheval quelque fois une efpéce de cerife , ou bouillon de chair accidentelle , lorfqu'ayant deffolé un cheval pour quelque mal de pied , le Ma } réchal n'a pas également compreffé par tout. L'endroit,qui ne l'aura pas été,bour fouflera, la fole ne laiffera pas de revenir par-deffus , mais quand on croira le che val en état de marcher , cette groffeur , qui fe trouvera fous la fole , le fera boiter. Il n'y a d'autre rémede à cela , que de def foler une feconde fois , couper la cerife , mieux compreffer , & laiffer venir la ſole. 1 Breuvages , Armand , Gargariſme , & Billots. Les préparations des médicamens des chevaux confifte en infufion, ou en décoc tions , qu'on leur fait avaler ou par la bouche, ou par le nez , quand il y a quel
302 LE PARFAIT que empêchement dans le gozier , qui s'oppofe à l'entrée du breuvage par la bouche. Il vaut mieux donner des breu vages , que des pilules , parce que la graif fe qui forme les pilules , eft contraire au temparement du cheval. Si on en donne , il faut les former avec le miel. L'Armand eft une drogue , dont on graiffe le bout d'un nerf de boeuf bien amoli , & fourrant le nerf de boeufjuf qu'au fond du gozier , on y porte la dro gue , pour adoncir quelque inflammation du gozier. On fe fert ordinairement de miel pour l'Amand . Le Gargarifme fe fait au moyen d'u ne feringue à injection. On emplit la feringue de la compofition du Garga rifme , & on la pouffe après l'avoir miſe au coin de la bouche du cheval , cette mé thode eft plus douce que l'Armand. Le Billot eft un mors de bois joint à fa têtiére 2 on met autour de ce mors la drogue qu'on veut que le cheval fuce , & on l'entoure de linge , ce qui s'appelle un noüet. Quand le cheval a ce billot & le noüet dans la bouche , il ne peut s'em pêcher de mâcher , & la drogue fe mêlant par la chaleur de la bouche avec la falive fa fat auBil On lot commué ment l'Af fuce. il laida pour fortifier Feftomac,
y COCHER : 303 & donner appetit. Cela eft bon dans un dégoût fimple , qui ne provient que de quelque nourriture defagréable au cheval, & qui l'a dégoûté. Brûlure; Il arrive rarement qu'un cheval foit brûlé mais en tout cas on le traite com me les hommes peuvent fe traiter en pa reil cas , qui eft, lorfqu'on y rémedie ſur le champ , d'y appliquer l'encre ou l'eſprit de vin. Si on n'y a pas apporté rémede dans le moment , on fe fert donguent de fureau • ou d'eau-de-chaux , ou decoc tion d'écorces d'orme. Cancers ou Chancres , & Cancer à l'œil. Les Cancers ou Chancres font caufés par une liqueur lymphatique qui s'extra 1 vafe , & qui eft fi cauftique , qu'elle ron ge petit à petit les parties dans lesquelles elle s'eft arrêtée. Tout Cancer commence par un ou plufieurs boutons , qui fe déchi rant enfuite deviennent chancreux , & d'une couleur livide ou cendrée . Pour guérir les Chancres , ou Cancers,il faut premierement la faignee & la diéte, en
LE PARFAIT 304 même tems donner intérieurement les Dia phorétiques , principalement ceux , qui émouffent l'âcreté de la Lymphe : telles font les racines fudorifiques d'efquine, &c. l'acier & le foye d'Antimoine , & pour la cure extérieure on appliquera deffus , ou on les baffinera avec les cauftiques , com me le vitriol , &c. Le Cancer dans l'oeil fe réconnoît à des bourgeons rouges , les uns petits , & les autres plus grands , vers le grand coin de l'oeil près du nez. On en voit tant en dé hors , qu'en dedans de l'œil , même fur les paupières ; l'oeil paroît rouge. Ces ex croiffances viennent à l'occafion de l'acre té des larmes , qui écorchent la caronacle lacrymale , & les paupières , & y produi fent de petits Champignons. Pour guérir ce mal,il faut mettre le che val , au fon & eau blanche , lui donner de l'acier quelque tems , & enfuite du foye d'antimoine on lavera ces Cancers avec la decoction de la graine de fenoüil , & on les faupoudrera avec de la rutie , ou de la poudre de cloportes paffée fur le por phire , ou de la couperofe blanche , fucre candi , & tutie, partie égale,
COCHER. 305 Capelet. Le Capelet eft une tumeur en forme de loupe , & fouvent indolente , c'eft-à dire fans douleur , qui croît à la pointe du jarret. Cette tumeur eft ordinairement de la groffeur de la moitié d'une pomme de reinette , & on la fent mobile & détachée de l'os. Cette groffeur eft occafionée par des coups , ou parce que le cheval ſe fera couché fur la pointe des jarrets. Le Capelet n'eft proprement qu'une loupe , à laquelle on a raiſon le plus fou vent de ne pas faire attention. Cependant il eft arrivé , qu'il eft devenu douloureux , gros & endurci , caufant alors une fi gran de douleur au cheval , qu'elle le faifoit maigrir , & à la fin de venir boiteux. Si cela farrive il faut le traiter avec ſavon noir & fel , ou efprit de vin camphré. On peut auffi le garnir de pointes de feu , puis un ciroüene après avoir mis un morceau de poix de Bourgogne , en forme de ge rofle dans chaque trou.. Carie. La Carie eft pour ainfi-dire la gangrene des os , ayant la même cauſe par rapport Co 111. Partie.
LE PARFAIT 306 alos , & y faifant le même effet que la gangrene , à l'égard des chairs , & des autres organes folides : puifque fi on n'y rémedie , elle avance toujours , ~& gagne de proche en proche. Un os peut être carié par une fuite de maladies , comme gourme , &c. Les os peuvent être auffi cariés par des accidens , comme des coups, ou des chûtes , quifou lent l'os , & par conféquent obftruent les " vaiffeaux , & la matiére , qui fe forme par ce moyen , ronge l'os , & caufe la carie. La ' carie donne plus de tems que la gan grene , pour y apporter des rémedes, par ce que l'os fur lequel elle travaille , eft plus dur à ronger que les chairs. Pour guérir un os carié , fi c'eft une dent', on l'arrache : fi c'eft quelqu'autre os carié affez découvert , pour fe fervir de la rugine , on emporte la carie jufqu'au vif avec cet inftrument , raclant l'os juf qu'à ce qu'il faigne : enfuite on panſe avec des chofes féches , comme l'eau vul néraire , l'efprit de Vin , teinture d'A loës , poudre d'uforbe , &c. On ne ſe fert de la rugine , que lorfque la carie n'eft pas profonde , & n'occupe que la fuperficie de l'os. Pour peu qu'elle foit enfoncée dans le corps de l'os , & qu'elle
COCHER. 307 pénétre jufqu'à la moëlle , il n'y a pas d'autre reméde que le fer rouge . Cerifes. Les Cerifes font un mal de la four chette. Elles fe dénotent par des tumeurs , ou bouillons de chaire vive , reffemblant à de petits Fics. Ces Cerifes viennent à côté de la fourchette , rarement " aux pieds de devant , prefque toujours aux pieds de derriere , ou on en voit auffi quelque fois au bout de la fourchette , leur grof feur eſt celle d'une noix , & quelquefois plus :de ces Cerifes , il y en a de très dou loureuſes , fur tout aux pieds de derriere , celles-là font boiter le cheval tout bas. Ce mal provient de la lymphe nourriciere de la fourchette , qui s'arrêtant pár ob ftructions , & s'épaiffiffant , bourfoufle la chair après l'avoir ufée. La différence qu'il y a entre les Ce rifes & les Fics , eft la malignité de l'hu meur plus grande aux Fics , qu'à ce mal. Il eſt meme aſſez aifé de guérir cette tu meur. Cependant fi on négligeoit d'y donner ordre , elle pourroit dégénérer en Fics. C'eft pourquoi il faut couper la Ce rife avec le feu. Enfuite l'efcarre tombé on defléche la playe. Quelquefois on les extirpe avec un peu de vitriol en pou Cc ij
LE PARFAIT 308 dre , ou de fublimé , qu'on continue a mettre jufqu'à ce que la place foit unie puis on finit par mettre deffus de l'E giptiac. Charges ou Cataplafmes , Emmielures, Emplâtres blanches ou Rémolades. i Ces quatre noms font à peu près le même reméde : c'eft-à- dire , un re méde qui fert à adoucir les douleurs des parties où on l'applique , à en ôter la chaleur , & à détendre , ou à amolir. Les petites différences qu'il y a entre ces noms , confiftent en ce qu'on met du miel dans l'Emmielure , du lait dans les Em plâtres blanches , & qu'une Charge our Cataplafme , quand il eft employé au pied prend le nom de Rémolade.. Clous de rues & Chicots. Un cheval de Caroffe , & tout autre "7 cheval , peut trouver , plus à Paris qu'ail leurs , fous fon pied en marchant un clou la pointe en haut , qui lui entrera dans le pied : alors on dit qu'il a un clou de rue , parce que cette accident arrive plus fouvent dans les rues des Villes , que par tout ailleurs. De même , fi des che
COCHER . 309 vaux marchent , ou courent dans des tail les nouvelles , ils peuvent rencontrer fous leurs pieds des éclats de bois cou pés , qui fe terminent en pointe , & qui leur entreront dans le pied , on appelle ces brins de bois des chicots. Les clous de rue & les chicots étant de forme mal unie , & non tranchante , cauſent des playes contufes , qui devien nent plus ou moins dangéreufes , felon l'endroit du pied qu'elles ont ouvert , & fuivant qu'elles ont pénétré plus ou moins avant. Par exemple , fi les clous & chichots font entrés de biais ou en gliffant, ils n'auront bleffé que la folle ou la four chette , s'ils entrent de bout , il s'agit de leur longueur , car s'ils font affez longs pour pénétrer au- delà de la folle , ils of fenferont la pince , ou le corps de l'os du petit pied , ou le quartier , le talon , ou le tendon du profond , qui tapiffe une partie du deffous du petit pied. Leur fituation la plus dangereufe eft celle qui a attaqué l'os du petit pied ou le ten don. Le talon eft moins à craindre que les quartiers . Comme il s'agit de guérir ce mal , à quelque dégré qu'il foit , au défaut d'un Maréchal , un Cocher entendu , s'il eft en campagne , & éloigné des Villes ,
LEPARFAIT 310 peut employer les rémédes fuivans. Lorfqu'un cheval boite fubitement eff chemin , il faut lui lever d'abord le pied boiteux , & fi on lui trouve un clou ou un chicot , on commencera par l'arracher, puis on fondra d'abord de la cire d'Ef pagne dans le trou , ou on y verfera de l'huile bouillante , & on bouchera le trou avec de la cire d'Efpagne ; fi l'en droit n'eſt pas dangereux , le cheval ſe trouvera , par ce moyen , tout à fait guéri , ou du moins s'il y a du danger , on pourra le mener à l'écurie , fans crain dre qu'il y entre aucun corps étranger comme boue ou gravois. Si au bout de dix jours la douleur continue , & même qu'elle augmente , on doit commencer par mettre le cheval au fon & à l'eau blanche . On fonde pour connoître jufqu'où le clou ou le chicot pénétre. S'il a été dans les attaches , qui font entre la corne & le petit pied , alors on ouvre le trou en rond avec la petite gouge , & on y verfe de l'huile de Pé trole , ou l'eflence de Thérébantine ; en fin les réfolutifs les plus forts , & en cas que la douleur continue , il faut faigner pour éviter la fluxion & deffoler. Si la matiére eft abondante , on met au tour du pied un cataplaſme émolient : on ſe
COCHE R. 311 ringue dans le trou de l'huile de Théré bantine , puis on met par deffus de la. Thérébantine. Quand on néglige ce mal , ou qu'il a été mal panfé , la matiere fe forme , & fait un ravage proportionné à fon abon-" dance , à ſa malignité , & à l'endroit où & fi elle ne trouve pas elle féjourne affez d'écoulement , elle refluëra , & fe fera jour par en haut vers le poil à la cou ronne , ou aux talons. Le réméde eft de deffoler fur le champ , de faire une bonne ouverture , & de feringuer dans les deux trous des réfolutifs forts. Si on voit fortir des eaux rouffes , qui proviennent toujours des tendons atta qués , on fe fert des mêmes réfolutifs , & on ajoute des cataplafmes réfolutifs fur le pied & fur la jambe : car il eft à craindre pour lors , que le tendon ne ſe relâche , & que le petit pied ne defcende par la ſuite. La matiére fe promene quelquefois vers la fourchette , de façon qu'il fe forme deux ou trois trous au talon , qui auront communication entre eux , & jufqu'au paturon , il faut couper tout jufqu'au. fond. Si l'os du petit pied eft piqué , il faut -i qu'il en tombe une ou plufieurs efquil les , que l'on panfe , comme on panfe
312 LE PARFAIT roit uue playe. Mais fi le pied eft éclaté le cheval eft en grand danger. Cirons. Star On remarque qu'un cheval a des ci rons deffus , deffous & au-dedans des lé vres , quand il fe frotte continuellement les lévres contre la mangeoire , parce qu'elles lui demangent. Ce qu'un Cocher ou Palfrenier doit faire en cette occafion eft de couper la premiere peau au- dedans des lévres , à l'endroit où font les cirons avec un rafoir, ou un inftrument bien tran chant. Après cette légére incifion onfrot te la playe avec du vinaigre & du fel, & le cheval auffi -tôt recouvre l'appétit. Conftipation. Cette maladie n'en eft fouvent pas une par elle- même , mais elle eft l'avant cou reur , ou la fuite de quelque autre , dans laquelle le cheval aura le fang échauffé & dont la bile par conféquent ne coule ra pas affez dans les inteftins , à caufe de fa confiftence , comme dans la fatigue & fortraiture , dans la pouffe phtyfique , &c. Si le cheval eft conftipé , fans avoir d'ailleurs aucun figne de quelques autres maladies jointes à cet accident , c'est- à dire qu'il paroiffe fe porter affez bien du refte ,
COCHER : 312 refte , le Cocher doit toujours le faire traiter , pour prévenir un plus grand mal , fur le pied d'une bille engagée dans le foye. C'eft pourquoi il peut le faire fai gner , ne lui donner que de la paille & du fon , & de l'eau blanche , ou autre boiffon rafraichiffante , comme auffi des lavemens. Le miel dans le fon eft bon dans cette occafion. Cors. Le Cors eft une efpece d'ulcere , ou plutôt de callofité provenant de foulure , ou de meurtriffure , caufées toujours par le harnois ou par la felle. Ce durillon fe trouve ordinairement au haut de l'épaule. Quelquefois le mal n'eft pas fi confidé rable , quand il n'y a qu'une, enflure , qui n'eft pas dure , alors les réfolutifs l'ô teront , comme l'eau de vie , le favon noir , ou autre favon , ou efprit de vin , y mettant le feu. Si le durillon eft for mé , le Cocher le frottera de vieux oing , ou y fera tomber deffus le fuif d'une chan delle allumée en la panchant au-deffus : cela fait tomber le durillon , après quoi le cors étant détaché , on panfe la playe avec de l'eau de vie & du favon noir " ou même de l'eau commune avec du fa yon , ou du vin chaud , &c. Dd III. Partie.
114 PARFAIT · LE Coups fur les yeux. Les coups fur les yeux , étant des maux qui ont beaucoup de rapport avec les Auxions fur les yeux , à l'égard de leurs vue ë , le panfe effets fur l'organe de la vu ment , quant aux remedes extérieurs , en doit être le même. Mais il eft bon qu'un Cocher fache diftinguer un coup fur les yeux d'avec les fluxions . Les coups fe font connoître , lorfque l'on voit les yeux rouges , enflés , pleu rans , & qu'on les trouve chauds. C'eft cette chaleur principalement , qui diftin gue le coup de la fluxion , outre qu'il peut y avoir écorchure & contufion . Le mal qui provient d'un coup eft prefque au plus haut point où il puiffe aller bien tôt après l'accident arrivé. Il n'en eft pas de même de la fluxion , qui augmente petit à petit , & par dégrés : mais le coup n'eft pas ordinairement fi dangereux que la fluxion , à caufe que la mauvaiſe difpo fition intérieure ne s'y rencontre pas. Un cheval malade d'un coup fur les yeux ou d'une fluxion , doit être mis entre les mains d'un habile Maréchal pour le panſement,
Сосник 3TЯ Courbature. La Courbature vient aux chevaux , ou pour avoir trop travaillé , ou par les mauvais alimens , qu'on leur donne. La cauſe interne d'une courbature eft le vice du poulmon , ou des fucs groffiers , vif queux , & mucilagineux fe font ramaffés , & qui s'attachant aux branchies de cette partie , empêchent l'entrée & la fortie de l'air , & interrompent par ce moyen la dilation & la conftraction du poulmon . La courbature peut être divifée en deux eſpèces , fçavoir, courbature fimple, & courbature avec la fiévre. La courbature fimple eft un rhume , ou morfondement , plus fort que le morfon ment ordinaire , provenant des mêmes le traite comme cauſes que le rhume. Elle fe la morfondure. La courbature avec fiévre , & la four bure ne font , pour ainfi dire , qu'une même maladie , puifqu'on appelle cour bature la fiévre , qui furvient à un cheval fourbu. On appelle auffi courbarure , la fiévre qui accompagne la gras-fondure , comme auffi cellequi furvient , quand on a fait fouffrir au cheval quelque douleurs for Dd ij
LE PARFAIT $16 tes , comme le feu mis trop violemment ; ou qu'on a appliqué de trop violens cauf tiques , ou bien qu'on a fait quelques opé rations douloureufes au cheval pour de grands maux, de pied. La courbature qui vient de la fiévre de douleur , s'appaife avec une faignée , & un ou deux lavemens de polycrete. C Pour guérir la vraie courbature , c'eſt à-dire celle qui accompagne la fourbure , il faut faigner trois ou quatre fois en un jour , donner force lavemens , ôter le foin & l'avoine , nourrir avec fon ou orge mondé en petite quantité , que le cheval ne boive que de l'eau blanche , & enfin le traiter comme un cheval , qui a une fiévre très -dangéreufe , qui ménace in flammation au poulmon. Courbe. La courbe eft un amas d'humeurs fleg matiques , qui forment une tumeur grofle & dure dans la jointure du jarret. Les chevaux de caroffe & de trait font plus fujets aux courbes que les autres , à cauſe de l'effort que les jarrets font en tirant. Lorfque les courbes font récentes , on peut , fi l'on veut , appliquer deffus un ré toire , compofé de verd de gris , dụ
COCHE R. 3·17 mercure , du fouffre , de chacun trois gros de deux gros de cantarides , & au tant d'euphorbe. On met le tout en pou dre incorporé avec de l'huile de laurier ; on fait du tout un onguent. On doit bien bander le jarret , crainte que l'emplâtre ne tombe. Si le feu , & d'autres remédes que je n'indique pas , mais qu'un bon Ma réchal n'ignore point , ne font rien à la courbe ; le cheval court rifque d'avoir cette tumeur toute la vie. Crampe.. La crampe des chevaux ne fe dénote qu'au jaret. Il y a des chevaux qui y font fujets. Le jaret leur devient rude pendant une minute , & cela leur recommence fou vent. Cette incommodité vient d'un fang épais , qui fait que les efprits animaux s'embaraffent & s'arrêtent dans le corps des muſcles. Cela n'eft incommode qu'au Cocher , ou au Cavalier , & nullement dangereux pour le cheval. Quand un Coher a dans fon attelage un cheval ſujet à la crampe , il doit faire faigner ce cheval de tems en tems pour diminuer cet accident. Il n'y a point d'au tre reméde. C** Dd iij
318 LE PARFAIT Crapaudines. Il y a deux eſpèces de crapaudines affez différentes l'une de l'autre. La premiere eft une tumeur , qui vient un peu au.def fus de la couronne ; la feconde ne vient: jamais feule. Elle accompagne quelque fois une efpèce de playe , ou fente qui fe fait dans le fabot , qu'on appelle fei me. La premiere crapaudine fe reconnoît par un poireau , ou petit ulcere , qui vient au-devant des pieds , de la largeur d'un petit pouce plus haut que la couronne: au milieu du pied. Cette tumeur vient également aux pieds de devant , & à ceux de derriere. Il fort de cet ulcere une humeur , qui par fon acreté defféche la corne , de façon qu'au-deffous de la cra-. paudine il fe fait un canal le long de la corne jufqu'au fer. Ce mal eft plus dif forme que dangereux : fa caufe eft la même que celle des eaux , & il faut la def fécher comme les muſcles traverfieres & les crévaffes. Crévalles: Les crévaffes fe reconnoiffent en ce qu'elles viennent aux plis des paturons
COCHE R. 310 en forme de fentes , dont il découle des eaux puantes. Il y a quelquefois enflure à la crévaffe. Comme les crévaffes & les mules traverfieres font toutes deux des des fentes abreuvées d'une lymphe puante, il n'y a point de différence entr'elles , fi-non que la crévaffe vient au paturon dans le milieu par derriere , & que la mule traverfiere vient au pli de la join ture du paturon avec le boulet. L'une A & l'autre , provenant de la même cauſe , doivent être traitées de la même façon. Mais à la fcience du Maréchal , il faut que le Cocher joigne une grande propre té , fur tout dans les villes où la boue croupit , & eft par conféquent corrofive. Cette propreté confifte à avoir grand foin de nétoyer les jambes toutes les fois que les chevaux rentrent. Elle eft feule capable de faire que tous ces maux ne pa roiffent point. On peut appeller cette fa çon d'agir , un reméde préfervatif. Mais pour qu'il ait de l'efficace , ce n'eft pas de la façon dont les Cochers lavent les jambes de leurs chevaux , que le mal fera détourné , puifque fe contentant de trem per un balet de jonc dans un feau d'eau , & de le paffer ainfi mouillé fur les jam bes de devant , & de derriere de leurs chevaux de haut en bas , c'est-à - dire du D'd iiij
320 LE PARFAIT fens du poil , la boue la plus intérieure , c'est-à-dire celle qui fe trouvera dans le pli du boulet , & au paturon , ne fera que s'enfoncer plus avant dans le poil , où elle caterifera petit à petit le cuir. Il faut donc ufer d'une autre méthode , • qui ne fera agréée que des gens attentifs à la confervation de leurs chevaux , & dont les Cochers ne feront pas les maîtres. Cette méthode (j'en ai déja parlé dans la premiere partie ) eft d'imbiber une épon ge d'eau , & la tenant d'une main au pli du genouil pour les jambes de devant , & la pointe du jaret pour celle de derriere, on la preffe , & à meſure que l'eau tombe le long de la jambe , on broffera bien , & principalement à rebroffe poil , avec une broffe de la grandeur à peu près d'une broffe à foulier , afin d'ôter la craffe & la boue la plus enfoncée Dartres. Toutes les maladies , qui viennent fur la peau des chevaux , & qui viennent dé cauſes intérieures , peuvent être rangées fous le nom général de dartres. On réconnoît de trois fortes de dar tres : dartres farineufes, dartres coulantes, & dartres à groffes croutes , ou galles.
COCHER: Toutes ces dartres dépendent 327 du vice plus ou moins fort de la bile , & ne font occafionnées que par le féjour de la bile dans les vaiffeaux , & fuivant que cette bile eft plus ou moins âcre & épaiſſe , elle produit fur la peau les différens accidens , dont nous venons de parler. Voilà tout ce qu'un Cocher peut fça voir ſur cette matiére. Quant à l'origine de ces dartres , & la maniére de les guérir, elles fe trouvent dans les livres que j'ai indiqués plufieurs fois, & qu'on peut con fulter , s'il eft befoin. Dégoût des Chevaux. Un Cocher doit connoître qu'un che val eft dégoûté , quand il mange moins qu'à l'ordinaire , ou qu'il mange plus mo lement , ou qu'il refufe abfolument de manger fon avoine. Les caufes du dégoût font quelquefois légéres. Il fe trouve des chevaux déli cats , qui fe dégoûtent pour une ordure 9. qu'ils auront trouvée dans leur nourritu re : alors en ôtant cette nourriture , & leur en donnant la premiére fois de nette, ils ſe rémettront à manger. Si ce font des élevûres ou cirons qui les dégoûtent , j'ai
322 LE PARFAIT ditce qu'il faloit faire à l'article de Cirons pour leur redonner de l'appetit. Demangaifons. Le Cheval eft fujet à avoir des demans geaifons à différentes parties du corps , comme à la tête , au col, aux cuiffes , aux jambes, & même à la queue,quelquefois à tout le corps en entier. On réconnoît ce mal , en ce que les chevaux fe grattent perpetuellement. L'endroit gratté fe de nue de poil , & l'on voit à la place une farine blanche , qui couvre la partie. Ils vont quelquefois jufqu'à s'écorcher . Plus la demangaiſon eft vive , plus le cheval ſe tourmente 9. & s'échauffe , ce qui irrite fon mal à tel point , que quelquefois Ja toux s'y joint , & quelquefois la fié vre. Les caufes extérieures de ce mal font ou un travail trop violent , ouune nour riture trop chaude , ou d'être trop gras , ou enfin d'un tempérament trop ardent & bilieux. Quant aux caufes intérieures , toute efpéce de demangaifon n'eft autre chofe qu'une humeur dartreuſe , qui ſe fait ſen tir à différentes parties du corps. Pen
COCHER. 323 dant qu'un Maréchal les guérit , le Co cher doit mettre fon cheval à l'eau blan- 1 che & au fon , à la paille mouluë , ou à la farine d'orge . Defcente ou Hernie. 1 La Defcente ou Hernie eft une mala die , qui provient de quelque effort qu'au ra fait le cheval , au moyen de quoi les tendons des muſcles du bas- ventre fe fe ront trop étendus, & par conféquent trop relâchés , ce qui aura laiffé affez d'efpace aux boyaux pour tomber dans les bour fes. A cela il n'y a de réméde , que de répouffer le boyau , fi faire ſe peut , enſuite Fempêcher de retomber , au moyen d'un bandage , qui le contiendroit dans fa pla ce , & donneroit le tems aux muſcles de fe rafermir,& réprendre leur place.Quand cette maladie arrive aux chevaux de Rou liers , & autres , qui font des chevaux en tiers , le réméde le plus fûr , & le plus ufité eft de faire rentrer le boyau , & de châtrer enfuite le cheval.. Deffoler. Deffoler un cheval eft une grande Opé ration qui regarde entiérement le Maré
324 LE PARFAIT chal. Quand un Cocher a dans fon écu rie un cheval au quel cette opération a été faite , il ne doit point lui mouiller le pied deffolé , ni le méner à l'eau , & il faut qu'il le laiffe dans l'écurie jufqu'à parfaite guérifon. Quant à ce que doit faire un Maréchal pour bien deffoler un cheval & lui faire révenir la fole , on peut con fulter le Nouveau Parfait-Maréchal ch. XXV. pag. 397. où la maniére de fai · re cette opération , eft rrès bien expli quée. Devoyement. Le devoyement eft un écoulement fré quent & liquide de gros excremens du cheval. On diftingue le devoyement en trois efpéces , fçavoir le devoyement pi tuiteux , le devoyement bilieux , & le flux diffenterique. Les fignes généraux detou te espéce de devoyement , font que le cheval fe vuide beaucoup plus ſouvent qu'à l'ordinaire , & que les matiéres , qu'il rend , n'ont plus la même confiftence qu'elles doivent avoir naturellement. Le devoyement pituteux eft moins dangereux que les autres , & plus aiſé à guérir. On traite ce devoyement par une diéte fevére. On donne au cheval de l'eau
COCHER. 325 blanche ferrée , on le met au fon pendant -vingt-quatre heures , & enfuite de l'orge moulu , & on lui fait avaler pendant trois jours un breuvage fait avec une once & demie de thériaque, deux gros de fafran de mars aperitif , le tout mêlé dans une pinte de vin. Le devoyement bilieux eft plus dange reux que le premier , & l'effet en eft quel quefois fiprompt , que fi le cheval l'a très violent pendant vingt- quatre heures , il eft en danger d'une inflammation d'entrail les , qui pourroit lui caufer la mort. Le plus prompt réméde que peut y apporter un Cocher , eft d'ôter d'abord le foin & l'avoine , de nourrir le cheval avec de la paille , fon & orge mondé , de lui don ner pour boiffon de l'eau blanche ferrée , avec deux gros de nitre purifié par ſeau d'eau. Pour le devoyement diffenterique , il doit auffi mettre un cheval au même ré gime , lui donner des lavemens adoucif Lans en quantité , comme avec du lait , où l'on met 6. grains d'opium , & quatre onces de fucre rofat. 3 Diflocation . Pour guérir toutes diflocations , il faut Commencer par remettre l'os dans fa place
LE PARFAIT 326 ordinaire , ce qui ne fe peut faire qu'en ré nouvellant l'extenfion des muſcles , au moyen d'une opération appellée exten fion , & contre extenfion. Un cheval dif loqué n'eft d'aucun ufage. Il faut que l'os foit parfaitement remis , qu'outre les ré médes extérieurs , il ait été faigné , pur gé , rafraichi , avant que de le faire tra vailler. Dragon. Le Dragon eft une petite tache blan che , ou excroiffance charnuë , qui croît dans l'humeur acqueuſe , ou bien elle vient fur la cornée au-devant de l'oeil. Elle n'eft pas au commencement plus groffe que la tête d'une épingle , mais elle croît petit à petit fi fort , qu'à la fin elle couvre toute la prunelle. Le dragon vient d'obf truction , & de l'engorgement d'une lym phe trop épaiffe. Cemal eft incurable. Eaux. Les eaux qu'on appelle les mauvaiſes eaux , font des maux qui proviennent du vice de la lymphe , ainfi que les poireaux , crevaffes , & mules traverſiéres. Leur feu le différence eft dans les fignes extérieurs
COCHER. 327 qui diftinguent ces maux à proportion de la malignité de l'humeur. Les chevaux épais , comme les che vaux de charette , les chevaux d'Hollan de , & de Flandre , qui fervent au Ca roffe , & qui ont beaucoup de poil aux jambes , font plus fujets aux eaux , fur tout ceux d'entr'eux , qui ont les jarets gras , & pleins. Quand les eaux font nou velles , on en arréte aifément le cours. 2 niais quand elles font vieilles , & les jam bes fort enflées la cure en eft très- diffi cile. Les eaux fe guériffent comme les cré yaffes. Eaux rouffes. Les eauxrouffes de la queue fe recon noiffent en ce qu'il fort du tronçon de la queue , une humidité , qui fuit le poil , & le rend roux à deux doigts de fa racine, quoiqu'il refte à fa racine de la couleur ordinaire. Ce mal fe rémarque mieux aux chevaux gris , qu'aux autres : qnand on touche à ce poilroux , il fe cafle très-aifé ment. Ce mal eft une dartre coulante qu''on traite par les rémédes des démangai fons. I1 y a des eaux rouffes , qui fuintent dans les playes , où les tendons font atta
T 328 LE PARFAI qués. Elles font une très-mauvaiſe marque pour la playe. Ebulition. L'ébulition dénote un cheval échauffé. Il faut à ce mal un régime rafraichiflant , comme boiſſon avec criftal mineral , des lavemens , & bien couvrirle cheval , pour le faire tranſpirer. Il y a trois efpéces d'ébulitions de fang: L'une fe demontre par de petites tumeurs, qui viennent de tous côtés , & cela très promptement , par exemple en une nuit. L'autre le rémarque par de petits boutons de la groffeur d'un demi-pois. Ces bou tons viennent de tems en tems en plufieurs endroits du corps , & cette ébulition eft un éréfipelle bilieux boutonné. La troi fiéme efpéce d'ébulition eft de petite con féquence , quoiqu'elle puiffe effrayer par fes fignes , car la tête enfle fubitement très-fort , & en fort peu de tems , de façon qu'on la voit enfler à vued'oeil. En même tems de petits boutons fe répandent par tout le corps. Deux ou trois faignées de fuite , des lavemens , & de l'eau blanche diffipe cemal en très-peu de tems. Ecart
COCHER. 329 Ecart ou effort d'épaule. L'écart eft affez difficile à connoître , quand on n'a pas été témoin de l'accident, fur-tout quand il n'a pas été confidérable , attendu que fouvent l'on voit boiter un un cheval également d'un mal de pied , comme d'un mal d'épaule. Mais fi après avoir examiné le pied , on n'y découvre rien , la façon la plus fûre pour s'éclaircir eft de faire marcher le cheval pendant une efpace de tems. S'il boite d'abord , & qu'apès quelques momens , quand il fera un peu échauffé à marcher , il boite moins, il eſt ſur que fon mal eft dans l'épaule , car un cheval , qui a mal au pied , boite da vantage à méfure qu'il s'échauffe. Auffi-tôt qu'on s'apperçoit qu'un che val a pris un écart , le Cocher doit faite commencer par la faignée plus ou moins réiterée , & principalement , fuivant la conféquence du mal. Alors on fe fert de réfolutifs , & non de graiſſes ni d'émol liens , car il faut raffermir & faire tranf pirer les fucs épanchés. Il faut du repos à un cheval , qui a un effort d'épaule , & du féjour pour le rétablir. Quand l'effort n'eft pas grand , & qu'il ne fait pas froid , un Cocher peut méner Ee III. Partie.
LE PARFAIT 330 le cheval nager dans l'eau un quart-d'heu re le matin , & autant le foir , & au ré tourfrotter l'épaule avec de l'efprit de vin, & du favond'Eſpagne. Les réfolutifs qu'on employe font l'ef fence de thérebentine , la thérebentine avec la poix-réfine , leseffences qu'on ap pelle huiles d'afpic , de pétrale , avec l'ef prit de thérebentine . Pour un violent effort d'épaule , qu'on appelle entre- ouverture , ou pour un ef fort envieilli , on fait plufieurs opérations, fçavoir , une qui s'appelle mettre des plumes , d'autres qu'on appelle feton & or tie : enfin le feu. Ces opérations ſe liffent au traité des opérations du Nouveau Par fait-Maréchal. Si c'eft un cheval de carof fe, qui ait fait un violent effort , le meil leur pour l'en guérir eft la douge avec les eaux minerales chaudes , pourvû que le cheval en vaille la peine. Ecorchure des Harnois. Quand on voyage en caròffe , il arri÷ ve que les harnois des chevaux , en frot tant continuellement , ou contre le poi trail , ou ailleurs , y font des écorchures, ou enlevures . ce qui arrive principale ment dans les tems de pluye. A cela il
COCHER. 3°31 faut fe fervir d'eau-de-vie , fuif de chan delle , & urine. C'eft-ce que j'ai déja dit dans la premiere Partie , pag. 147 . Si la croupiére écorche fous la queue , on graiffera le culeron , ou on fera cou dre dedans une groffe chandelle , laquel le fe fondant petit à petit , tiendra le cu leron gras , & empêchera d'écorcher , & dans le féjour , on lavera fouvent le mal avec l'eau-de-vie & fel. Si le cheval ne' vouloit pas fouffrir l'eau-de-vie , on né toye le mal avec du vin chaud , mêlé d'un' quart-d'huile d'olive, & on faupoudre par deffus du charbon pilé : ou enfin fi le che val ne peut plus fouffrir de croupiére , on fe fert de la croupiére baffe , dont quel · ques uns fe fervent pour monter les mules. Efforts de reins. Les chevaux vigoureux , ou ceux qui font chargés trop péfamment , font fujets à fe donner des efforts de reins, foit qu'ils veüillent ſe retirer de quelque mauvais pas , foit en fe rélevant après une chu te. Il peut arriver auffi qu'un cheval fe peut donner un tour de reins dans l'écu rie. Si dans le moment qu'il fe léve il vient à gliſſer dans fa place : alors voulant E e ij,
IT 332 A LE PARF s'empêcher de retomber , il employera la force de fes reins , ce qui occafionnera une extenfion confidérable des tendons qui attachent chaque vertebre l'une à l'au tre. Bien des Cochers en entrant dans l'écu rie le matin font peur à leurs chevaux , & les font rélever fi précipitamment , qu'il y en a qui fe donnent des efforts de reins. C'eft donc un devoir indifpenfable pour un Cocher , que d'entrer le matin fans fai te beaucoup de bruit dans l'écurie , & de faire réléver doucement fes chevaux , s'il font couchés. Outre les efforts de reins qu'un Co ther peut empêcher , en traitant & me nant fes chevaux avec douceur , il y a encore les efforts à la hanche , & du che val épointé , l'effort à la noix , les efforts des jarets & d'un muſcle du dedans de la cuiffe , dont je ne parle point. Je ren vois aux livres qui en traitent. Encaftelure. L'encaftelure eft le ferrement des ta→ lons des pieds de devant. Voyés ferrure des chevaux encaftelés. Page 167. ***
Ad Coc HER. 33 Encheveftrure. Le terme d'encheveftrure tire fon ori gine du mot de cheveftre , qui fignifie , en vieux langage , un licol. C'eft un acci dent qui arrive au cheval , lorſqu'en vou lant fe grater l'oreille , ou le côté de la tête avec le pied de derriere , il ſe prend la jambe à l'endroit du pli du pâturon dans la longe de fon licol ; alors ne pou vant le débaraffer , & retirer fon pied , il ſe débat extrêmement : cette longe lui écorche le pli du pâturon , & y fait une playe plus ou moins confidérable , fi on ne dégage promptement les chevaux , ils peuvent fe faire des playes très -dange reufes , & plus il font vigoureux , plus aifément il s'eftropient , quelquefois mê me l'os paroît tout à découvert , & l'in flammation s'y mettant , peut cauſer en Alure à la jambe & à la couronne , de fa çon qu'un cheval en refte quelquefois eftropié. On previent prefque toujours cet ac cident dans les Ecuries bien ordonnées , en mettant des boules de bois attachées au bas des longes du licol , afin qu'elles coulent dans les anneaux , & qu'elles ref tent toujours tenduës. J'ai parlé de ces
LE PARFAIT $34 boules de bois * ; mais quand l'accident eft arrivé , & qu'il n'eft pas confidérable , on joindra des réfolutifs avec des déter gens. Si la playe eft grande , & de plus grande conféquence , on faigne pour évi ter l'inflammation , & on applique deffus le cataplafme de miel,farine & oeufs blancs & jaunes , qu'on renouvelle tous les jours jufqu'a guériſon. Encloueure , & Retraites. L'Encloueure eft une bleffure faite au pied d'un cheval , lorfque celui qui le ferre a broché un clou , de façon qu'au lieu de traverſer la corne feulement , il la fait entrer dans la chair vive , c'eſt ce qui s'appelle enclouer , ou piquer un che val. La retraite n'eft autre chofe qu'une por tion de clou reftée dans le pied d'un che val ; le clou s'étant caffé dans le tems que le Maréchal le tiroit en déferrant le che val ou autrement , & quand on vient à pofer un clou au même endroit où fe trouve la retraite ; ce nouveau clou en paffant la preffe & la pouffe contre le vif, ou contre la veine , ce qui fait boiter le cheval. * Page 204.
THE [V Po I ‫رو‬ COCHE R. 335 Tout cheval qui a été ferré de neuf & qui boite , n'eft pas pour cela toujours encloué car fouvent les chevaux qui ont le pied charnu , c'eft- à- dire , la corne du fabot déliée , ou le talon foible ou ferré , boitent fi fort le jour qu'ils ont été ferrés , qu'ils ont peine à fe foutenir ; mais ils fe rafermiffent d'eux- mêmes avec un ou deux jours de repos . Souvent auffi un clou qui fe fera coudé, c'eft- à- dire , un peu plié dans un pied gras , fera boiter un cheval , quoiqu'on ne puiffe pas dire: qu'il foit encloué. Si l'on tarde quelque tems à ôter ce clou , qui ne fait que preffer le vif fans entrer dedans , la matiére : pourroit bien s'y former , ce qui oblige roit à le panfer , comme une encloueure.. Les chevaux qui ont les talons ferrés pour peu qu'ils ayent des clous brochés haut , boitent , ce n'eft pas qu'ils foient encloués. ; mais les clous étant trop près du vif, & le preffant , caufent de la dou leur. Le repos peut les rétablir.. Entorfe. L'Entorfe ou Mémarchure fe connoît premierement à l'avoir vû prendre au che val. Elle le fait boiter plus ou moins con fidérable. On la connoît encore àla cha
LE PARFAIT 3.36 leur & au traînement du boulet. La caufe en eft un effort , que les tendons auront reçu dans cette partie , lorfque le cheval aura mis le pied à faux . Dans le moment de l'entorfe on peut fe fervir de reftrictifs , c'eſt à-dire , re ferrer la partie , en jettant de l'eau froide deffus pendant une heure , ou bien faire entrer le cheval fur le champ dans de l'eau froide , & l'y laiffer une heure. Lorf qu'on ne s'eft pas apperçu de l'entorſe , & qu'on ne la reconnoît que quelque tems après qu'elle a été prife , on doit commencer par faire faigner plus ou moins , felon la force de l'entorſe , afin d'éviter l'inflammation. On fait obſerver la diéte par la même raifon , & on met fur la partie des cataplafmes réfolutifs , " les huiles chaudes , & envelopper le bou let . Si l'entorſe eft vieille on applique deffus la thérébentine , ou de la poix noi re ,fitous ces remédes ne réuffiffent pas , on deffole , on met le feu fur la partie en flée ; on y applique un ciroine : on jette le cheval à l'herbe , on le fait labourer jufqu'à ce que la partie en foit rafermie. Epilepfie. L'Elpilepfie ou mal caduc eft une pa mɔiſon ,
COCHER . 337 mbifon , & convulfion non continuée de tout le corps , qui fait que le cheval fe laifle tomber tout à coup, avec des mou vemens convulfifs , tremblant, friffonnant, & écumant par la bouche , mais lorsqu'il femble mort , il feréléve , & recommence à manger. Quand ce mal eft tout-à-fait déclaré , il eft difficile à guérir. Le gui de chaîne , de poirier , de pomier , d'épine , &c. paſſe pour un fpecifique à cette maladie : mais il faut nourrir le cheval avec de bonnes nourritures > comme bon foin , bonne avoine , qu'un Cocher doit donner avec précaution, car il ne doit pas le laiffer man ger jufqu'à fe raffaffier ; il doit lui rétran cher une partie de fon ordinaire . Si un cheval a quelque difpofition à tomber de mal caduc , on lui fait prendre des extraits amers avec de l'acier pendant des années entiéres. Erefipelle. L'Erefipelle plat , l'Erefipelle bouton né provient comme le farcin de l'arrêt de P'humeur de la tranſpiration , laquelle fe gonflant entre la premiere peau, & la vraie peau , & fe trouvant arrêtée par l'air ex térieur , forme cette humeur , dont une III. Partie. Ff
338 LE " AIT PARF partie fe créve , & fe deféche enfuite , & l'autre fe diffipe par tranſpiration , il y a toujours de la bile mêlée avec cette hu meur. Voyez Ebulition. Efparvin . L'Efparvin eft le nom de l'os même , fur lequel le forme une groffeur ou plus petite , ou plus groffe. Il y a deux fortes d'Efparvins , Elparvin fec & Elparvin de boeuf. L'Efparvin fait quelquefois boi ter , mais il y a des chevaux > qui ne boitent jamais , quand l'Efparvin eft tota lement déclaré & forti. L'Efparvin de boeuf eft bien plus dangereux que le pre mier , car il fait prefque toujours boiter , & refte douloureux . Il devient ſouvent, gros à peu près comme la moitié d'un oeuf. Il eft auffi dur que l'os , & ne fait } point harper. Il n'y a de rémede que le feu : car les plus forts réfolutifs feroient trop foibles pour diffiper cette groffeur. Etonnement de Sabot. L'Etonnement de fabot n'eft autre cho fe qu'une meurtriffe , que la corne du fa bot aura faite fur la chair , qui eft entre lui, & le petit pied. Quand on s'appercoit de
IVA COCHER . 339 l'étonnement , on pa e bien le pied , en fuite on décerne la pince , comme fi on vouloit défoler le cheval , afin qu'il reſte aflez peu de corne en cet endroit , pour que la vertu des médicamens puifle y pé nétrer. Etranguillon. L'Etranguillon eft aux chevaux la mê me chofe que l'Efquinencie des hommes. C'eft une maladie réelle. Les glandes du gofier s'enflent plus ou moins . Les fignes de cette maladie font premierement l'en flure. Le cheval tient la tête levée. Les temples, la tête & les yeux s'enflent : il a de la peine à boire & à manger : il ne reſpire que difficilement. Quand le mal devient plus confidérable , la langue lui fort de la bouche , il ne peut plus ni manger , ni boire , il rejette la boiffon par les naſeaux , & quand l'enflure comprime la tranchée artére, elle ôte la refpiration, & étouffe le cheval . D'abord qu'on s'apperçoit de cet te maladie , on doit faire faigner le che val coup fur coup , trois ou quatre fois. S'il peut manger on lui fait manger du chenevis ; on lui fait un armand , on lui donne des billots , cordiaux & œemol liens , & on le met au maftigadour . Ff ijl
LE PARFAIT 340 Faim canine. LaFaim canine fe marque par une fair outrée , de laquelle il s'enfuit , que plus l'animal mange , moins il fe raffafie. Ce pendant il maigrit de jour en jour , & fi nit par mourir, étique. Cette incommodité provient d'un fermentaire dans l'eftomac, caufé par des mauvaiſes digeftions. On ne peut ruiner ce fermentaire , que par des amers, mais cette maladie eft rare à l'égard des chevaux, Faim-vale. La Faim-vale a quelque rapport à l'E pilepfie; ce mal prend au cheval ordinai rement trois ou quatre heures après qu'il a mangé. S'il eft en chemin , il demeure tout à coup immobile , de façon qu'il eft infenfible aux coups , qu'on lui donne dans ce tems , & il ne repart pas qu'il n'ait mangé ainfi il faut abfolument le Jaiffer manger ce qu'il trouve fur le lieu même , après il remarche comme à l'ordi naire. Ces fortes de chevaux mangent trois fois plus que les autres, fans pouvoir s'engraiffer. Il n'y a point d'autres fignes à cemal que le moment de l'accès , la faim,
4 GOCHER. 347 & la maigreur . Il faut à ce mal compli qué des rémédes apéritifs , & délayans quantité d'acier; le foye d'antimoine y eft bon. De pareils chevaux ne font pas pro pres à un carofſe. Farcin. Le Farcin n'eft autre chofe que des dar tres encroutées , & la plus confidérable des maladies de la peau. Les Maréchaux diftinguent jufqu'à cinq fortes de Farcins. Le Nouveau Parfait-Maréchal n'en veut que deux efpéces , fçavoir , le Farcin gué riffable , & le Farcin incurable. Les che vaux du pays de bled qui ne mangent que du froment au lieu d'avoine , ont preſque tous le farcin. Le Farcin fe gagne , & fe communique comme la galle. Les chevaux qui font plus difficiles à traiter , font ceux qui font de licats au manger , parce que les rémédes les dégoutent , & leur font perdre abfolu ment l'appetit. Hors ce cas un cheval qui a le farcin eft communement affez gai , boit & mange à l'ordinaire. Il ne faut pas mettre à l'herbe un cheval qui a le farcin , car cette nourriture augmente fûrement fon mal au lieu de le diminuer. Pour la guérifon du farcin , je n'en parle point ; Ff iij
LEPARFAIT 342 cette maladie eft affez de conféquence pour ·être traitée par un habile Maréchal , & un Cocher qui a un cheval attaqué du farcin n'a rien à faire que de le féparer de fes au tres chevaux , & de fuivre les ordonnan ces du Maréchal. Fatigue & Fortraiture. Un cheval fatigué, & fortrait eft à peu près la même chofe , car les fignes en font prefque pareils. Un cheval fatigué a un ca nal qui fe forme le long des côtés , lorf qu'il refpire , dans lequel on pourroit lo ger une corde. Il a le poil heriffé & mal teint ; fa fiente eft féche & noire. Outre que la Fortraiture a les mêmes fignes , ce qu'on appelle la corde au cheval fatigué , eft retiré , dur , fec & douloureux. On faigne pour ces deux maladies : on fait faire diéte au cheval dégoûté ou non. On lui ôte le foin ; on ne lui donne que la paille & l'orge mondé , ou le feigle échaudé , ou l'orge écrafé au moulin. On donne de frequens lavemens , émolliens & purgatifs , & pour boiffon le policrefte , ou le miel délayé dans fon eau. A meſure que des chevaux fe remettent de fatigue , on doit leur faire faire un exercice moderé , leur redonner petit-à-petit de la nourri
СоснËR. 343 sture , & les rémettre de cette façon à man ger comme à leur ordinaire. Plus le che val eft délicat, plus il a de peine à ſe rémet -tre. Fic. Le Fic eft une excroiffance de chair fpongieufe & fibreuſe , en forme de poi reau , ou de veruë , qui vient preſque tou -jours à la fourchette du cheval , au haut , ou à côté. Il en vient encore fous la fole , & quelquefois par tout le corps du cheval en grand nombre. Le Fic d'abord n'eft pas douloureux , & ne fait pas boiter le cheval ; mais fi on le laiffe vieillir , ou qu'on le panfe mal , il coulera jufqu'aux talons , à la fole , aux quartiers , ou à la pince , & gagnant le tendon ou le petit pied , il deviendra très dangereux & douloureux : alors il pourra paffer jufques fous le quartier , foufler au poil , & paroître à la couronne , enfin il pourrira le pied , & rendra le cheval inutile. Fiévre. La Fiévre eft un bouillonnement ex traordinaire du fang , qui fait battre le cœur & les artéres plus fréquemment que dans l'état ordinaire. Les chevaux ne font Ff üij
LE PARFAIT 344 guéres fujets qu'à la fiévre continue plus ou moins forte , & à la fiévre lente. Les fiévres continues fe diviſent en fié vrefimple , fiévre putride , fiévre peftilen tielle , &c. La fiévre de quelque efpéce qu'elle foit,provient,ou du trop de travail , ou des mauvaiſes nourritures , ou de l'in temperie de l'air. La maxime génerale pour guérir tout cheval qui a la fiévre , eft de le faire beau coup jeuner , c'eſt-à- dire , de le nourrir très- peu . Le grand réméde à la fiévre , & pref que le feul , qu'il faille faire , eft la fai gnée. On fait enfuite grand uſage de la vemens émolliens. A un cheval guéri de la fiévre , il ne faut redonner de la nourri ture , que petit-à- petit , augmentant tout doucement jufqu'à ce qu'il foit en état de manger comme à fon ordinaire. Fiente. Ily a des chevaux dont la Fiente eft molle , & qui fe vuident trop ſouvent cela dénote obftruction : car tant qu'ils font en cet état , ils ont beau manger ils ne fçauroient engraiffer.Les defobftruans , comme l'acier , & le foye d'antimoine pendant quelque tems , ôteront cette in
• CoCHE Kẻ . 345 difpofition. Lorfque la fiente eft dure noire ou verdâtre , c'eft figne d'une bile échauffée. Si outre cela le cheval eft refer ré à outrance , ou fujet à avoir fouvent un flux de ventre, c'eft une marque que la bile ne fe fépare pas dans le foye. Les defobf truans , ou aperitifs conviennent dans cette occafion , auffi-bien , que les her bes ameres. Fiftule. La Fiftule eft un canal qui fe forme dans les chairs , & même dans les os, lorſque la matiére ayant corrodé par fon acreté quelque partie , dans laquelle elle étoit contenuë , a fait un trou à cette par tie , au moyen duquel fortant de fon lieu propre , & mangeant petit à petit les chairs par fon acreté , elle fe fait chemin , & étant parvenue à la fuperficie de la peau , elle fort en y faifant une ouverture non naturelle. Ainfi il ſe peut faire des fiftules en plufieurs endroits , comme aux yeux , à la ganache au fondement , &c. Je ren vois aux livres , qui enfeignent la ma niére de les guérir. J
346 T LE PARFAI Flux d'Urine. Le Flux d'Urine eft une maladie qu'on connoît en voyant rendre au cheval une grande quantité d'urine claire comme de l'eau. Les pluies froides du commence -ment de l'hiver , l'avoine marinée , avoir fait travailler un jeune cheval trop tôt , ou trop outrément , peuvent donner le flux d'Urine. Pour guérir cette incommodité , on faigne , on met le cheval au fon & au miel , on le fait boire chaud , on le nour rit avec la paille feule , & on lui donne très-peu de foin. Les herbes rafraichif -fantes en nourriture , comme la chicorée , les melons , &c. font propre à ce mal. On donne encore des extraits amers pen dant quelques jours , puis le foie d'An timoine , & la décoction de falfe-pareille. Fluxions & Enflures . Les fluxions & enflures ne fçauroient arriver que par deux raifons : ou par un accident extérieur , qui aura meurtri , contus , ou forcé la chair , ou les muf cles , ou par une caufe intérieure , qui vient des difpofitions défectueufes des hu
COCHE R. 347 meurs ou du fang. Ainfi il y a enflures provenantes de caufes intérieures , en flures accidentelles , & qui viennent à fup puration , & enflures rébelles envieillies ‫ون‬ 1‫ן‬ & qui ne fuppurent point. Il y a des pré cautions à prendre pour empêcher que les parties du corps d'un cheval n'enflent , ou par trop de repos , ou par une fati gue exceffive. Ces moyens font d'avoir grand foin des jambes des chevaux , de les tenir bien nettes , de ne pas trop nourrir un che val , qu'il ne mange pas de mauvais ali mens , qu'il faffe un exercice modéré , qu'il ne fatigue & ne repoſe pas trop. Forme. La forme eft une groffeur qui croît fur le côté du boulet , ou en dedans , ou en dehors , & quelquefois fur tous les deux côtés. Cette tumeur eft dure , & ne plie point fous le doigt. Les formes occupent les côtés de la réunion du ten don , qui paffe en devant fous le cartil lage de la couronue. Elles ne font point mobiles ni douloureuſes. Elles commen cent quelquefois à n'être pas plus groffes qu'une febve , mais en vieilliffant elles s'approchent de la couronne , ôtent la
LE PARFAIT 348 nourriture du pied & deffechent le fabot Ce mal eft héréditaire , mais fouvent il vient des efforts que font les chevaux en travaillant , comme auffi d'avoir eû trop de fatigues étant jeunes , ou d'avoir fait des courfes outrées. Comme ce mal preffe les tendons & les ligamens qui font fur le paturon , il fait boiter le cheval , ôte la nourriture du pied , & deffeche le fabot. Le véritable reméde à ce mal eft d'y donner le feu très fort , c'est- à- dire , en perçant la peau avec des rayes de feu , ou avec des boutons. Fourbure. La fourbure eft une fluxion , ou unë eſpéce de rhumatifme univerfel , qui tom be fur les nerfs des jambes du cheval , & les lui rend fi roides , qu'elle leur ôte le mouvement. La fourbure vient au cheval qu'on a fait boire trop tôt pour avoir eû chaud , qu'on a trop fatigué , & quelque fois pour trop manger & ne point faire affez d'exercice. Si la courbature ne fe joint point à la fourbure , le cheval eſt aiſé à guérir , mais on ne le rechape pas aifément , quand il eft en même tems , fourbu , courbatu & grasfondu. Pour guérir un cheval fourbu
COCHER . 349 faut d'abord le faigner au cou , met tre fon fang dans une térine , y mêler une chopine d'eau de vie , & puis en frotter les jambes juſqu'au - deſſus du genou. Fracture. L'Auteur du nouveau Parfait Maré chal dit qu'il eft fingulier , que fans au cune raiſon apparente , il foit pteſque généralement reçû que les chevaux n'ont point de moile dans les os , & qu'on croye qu'auffi-tôt que la jambe d'un che val eft caffée , il n'y a point de reffource , & que les os ne fçauroient jamais fe join dre. Rien n'eft fi faux , dit - il , les chevaux ont de la moile comme les au tres animaux. Il donne le moyen de remettre les os , & de guérir un cheval qui auroit la jambe caflée. J'y renvois le lecteur. Fufée. L'offelet ou fufée , n'eft autre choſe qu'un fur-os long , qui prend du boulet & monte jufqu'à la moitié de la jambe. Quelques- uns diftinguent l'offelet de la fufée , en difant que c'eft un gros fur- os , qui vient auprès du genou en dedans , & ;
LE PARFAIT 350 la fufée eft deux fur os au- deffus l'un que de l'autre. Quoiqu'il en foit , tous ces maux étant fur l'os doivent ſe ranger dans le genre des fur-os , & le traiter de même. Galle. Il y deux fortes de galles : galle fari❤ neufe & galle ulcerée. Toute gal'e épaif, fit le cuir. Elle fe communique par la fréquentation des chevaux > & par les étrilles & uftencilles , qui fervent au che val galleux. C'eft pourquoi , il faut le féparer des autres , & lui donner des uf tencilles à part. Ce mal eft beaucoup plus difficile à déraciner en hiver , & dans les tems froids , qu'en toute autre ſaiſon. Les deux eſpèces de galles ci - deffus , fe guériflent par les mêmes remédes , en les Continuant plus ou moins long-tems. On commence par les faignées : on purge , on rafraichit. On met le cheval · galleux au fon mouillé , & à l'eau blan che , , on lui donne un peu de foin & de paille. Quand il a été faigné & bien pré paré , on con mence par l'étriller jufqu'au fang aux endroits où il a de la galle. On prend enfuite une chopine de fort vinaigre qu'on verfe dans un pot de terre
1 Сосне R. 351 neuf. On y mêle deux onces & demi d'el lebore blanc , deux onces & demi de mouches cantaride , quatre onces d'eu phorbe , une once de couperole verte. On fait bouillir le tout enfemble environ l'ef pace d'un quart- d'heure, & on en applique tout chand fur les endroits galleux . Quand l'escarre eft détachée , on lave la playe avec de l'urine de vache , & du favon de Bonnetier. On continue jufqu'à parfaite guérifon. On faigne deux ou trois fois 2 & l'on purge de même. Gangrene. La gangrene eſt une perte de mou-. vement , fentiment & chaleur , par l'in- {, terruption des eſprits & du fang , occa fionnée toujours dans les chevaux par le dérangement des folides , c'eft- à- dire des vaiffeaux & conduits. Plufieurs cauſes peuvent caufer la gan grene à une playe. La négligence , l'im preffion de l'air & des mouches , accom pagnées de la chaleur de l'été , la mau vaiſe qualité de la playe par elle- même : une ligature trop ferrée , qui aura inter rompu le cours des liqueurs. La gan grene dans une plaie , fi on n'y remédie promptememt , gagne en peu d'heures de
LE PARFAIT 352 proche en proche , & corrompt le fang Pour remédier à la gangrene , on faigne , on ſcarifie , on coupe tout l'endroit gans grene , on dégorge la partie , & on fair fortir les fucs pernicieux. Gourme. La gourme eft un écoulement de mas tiére par les nazeaux , qui arrive aux poulains une fois en différens tems depuis feur naiffance , jufqu'à l'âge de cinq ans. Un cheval qui a la gourme doit être fé paré de tous les autres , attendu que fi un cheval qui fera proche de celui qui jette ſa gourme , la leche , peut ganer la morve. Par cette même raiſon , aucun des uftencilles qui lui fervent , comme le feau , l'étrille , &c. ne doivent pas fer vir à d'autres. Le Palfrenier même qui en a foin ne doit point approcher des au tres chevaux. Lorfqu'on veut mettre d'autres chevaux dans une écurie où un poulain a jetté fa gourme , on doit avoir l'attention de la bien nettoyer , d'ôter la vielle litiére , de laver la mangeoire , de frotter les murailles & le ratelier d'eau mêlée avec de la chaux, Gras
H COCHER. . $33 Gras-Fondure. La gras-fondure vient par les mêmes raifons que la fourbure & la courbature , c'est-à- dire par un trop long travail , ou diffipation d'efprits , ou par un trop long féjour fans faire d'exercice. Ainfi on peut diftinguer la gras- fondure de travail , qui eft la plus dangereuſe & la plus difficile à guérir , & la gras-fondure d'écurie , qui fe guérit avec un peu moins de peine. On guérit prefque tous les chevaux gras- fondus , fi on y donne reméde au commencement , mais fi on rétarde , on a de la peine à les tirer d'affaire , fur tout à l'égard des chevaux gras- fondus à force de travail. Cette maladie ne veut ni chaud ni froid. Elle vient de chaleur mais on la doit traiter avec des remédes un peu tiedes. Hémoragie . L'Hémoragie eft un écoulement de fang par la bouche & par les nafeaux. Cet écoulement peut devenir quelque . fois fi confidérable , que la fièvre s'y joint mais cela eft très-rare. La faignée & une très - grande abftinence arrêtent III. Partie. Gg
354 LE PARFA T l'hémoragie , le tout ménagé fuivant la grandeur du mal. Si l'hémoragie eft de conféquence, on fait faire deux ou trois faignées au moins dans un jour. On rétranche prefque la nourriture du cheval pendant deux ou trois jours , & on ne lui donne à boire que de la décoction de plantin ou de renouée , vulgairement appellée trainaſſe, & des lavemens rafraichiflans. C'eft prin cipalement fur les grandes faignées , & une diéte plus auftére qu'en toute autre maladie qu'il faut tabler. L'hémoragie arrive plutôt en été qu'en toute autre faifon par l'excès du travail. C'eſt à quoi un Cocher doit prendre garde. Hydrocelle. L'Hydrocelle provient d'obſtructions intérieures , qui embaraffant les vaiſſeaux des tefticules , font répandre la lymphe épaiffie dans la tunique vaginale. Voilà la feule hydropifie à laquelle les che vaux foient fujets. Le danger de l'hy drocelle eft , que fi l'eau féjourne trop long-tems , elle peut ulcerer & corrom pre le tefticule , y amener la gangrene , & faire mourir le cheval. Pour cette maladie on eft obligé d'en venir à la ponction,
COCHE R. 355 Jardon. Le Jardon eft une groffeur calleufe auffi dure que l'os. Elle croît au- dehors du jaret , au-deffous de la place du veſ figon , fur l'os du jaret même. Ce mal n'eft pas ordinaire aux chevaux . Il fait rarement boiter. Il peut être héréditaire mais très-fouvent il provient des coups. Si on apperçoit que c'eft un coup qui a occafionné le jardon , il faut le frotter plufieurs fois avec l'efprit de vin camphré. Il peut refter une groffeur , mais le che val n'en eft pas moins droit. ‫أنه‬ do ! Javard. 1 Le Javard eft une petite tumeur qui fe réfout en apoftumes ou bourbillon , & fe forme au paturon fur le boulet , & quel quefois fous la corne. Un Javard nerveux eft celui qui vient fur le nerf. Le Javard encorné eft celui qui vient ſous la corne . Il faut deffoler le plus fouvent un cheval , quand il a un javard encorné , & lui cou per le tendon. Pour panfer un javard , on met deffus de la thérebantine froide avec un quart d'huile de laurier pour faire for tir le bourbillon.
T 356 LE FAI PAR Jauniffe. La jauniffe , qu'on appelle mal de tête improprement , eft une maladie de la bîle Le cheval qui en eft attaqué , eft dégou té , digére mal les alimens , eft foible trifte & abattu . Il a l'oreille baffe , l'oeil trifte , les nazeaux ouverts . Il chancelle en marchant , fes levres font jaunes en dedans . Les yeux auffi font teints de la même couleur , & fi cette bîle qui regor ge dans le fang , vient à s'échauffer à for ce d'y rouler , elle caufe quelquefois la fievre , pour lors la maladie devient très dangereufe , & emporte quelquefois le cheval , fi on n'y remedie promptement, Il faut à ce mal faigner plus ou moins , s'il fievre , donner des lavemens , met ya tre à l'eau blanche , & ufer d'un grand régime .. Lampas. Le lampas eft une tumeur ou enflure , qui vient dans la partie de la bouche du cheval , derriere les pinces de la machoire fupérieure . On brûle le lampas , qu'on ap pelle auffi la fêve.
2 COCHER. 357 Létargie. & On appelle létargie un fommeil pref que continuel. Un cheval , qui en eft atta qué , dort tout de bout , a les yeux char gés , perd abfolument la mémoire , & eft dans une fi grande indifférence , qu'il ne fonge pas à fermer la bouche , quand il l'a ouverte , ni même à boire & à man ger. Ce mal vient de nourritures mauvai fes , ou trop abondantes , qui auront ren 1 du le fang très-flegmatique & fort lent. 1 " 1 ire Morfondure. La morfondure eft , à proprement par fer , dans le cheval , ce que le rhume eft dans l'homme. Elle a bien des dégrés , puiſqu'il peut y en avoir de peu de con féquence , de plus confidérables par dé grés , & de très- dangereuſes & même mortelles. Les chevaux deviennent morfondus , lorfqu'on les fait paffer tout d'un coup d'une grande chaleur à un grand froid après un travail exceffif , ou pour les avoir fatigués ; fi on laiffe boire un che val qui a chaud fans lui faire faire aucun exercice , après qu'il a bu , ou s'il boit
T FAI LE PAR 358 en été des eaux trop vives , & trop avi dement , ou de l'eau de neige fonduë tout cela lui caufera un rhume plus ou moins fort , ou une courbature fimple qui eft la même chofe. Voilà des chofes aux quelles un Cocher doit faire attention . Morfure de bêtes vénimeuſes. Quand on s'apperçoit qu'un cheval a été mordu de quelques bêtes vénimeuſes, il faut mettre vîte un bouton de feu fur la morfure , ou bien lier , fi on peut au deffus de la morfure , pour empêcher le venin de monter. On bat enſuite la partie avec une branche de grozeilles épineux , jufqu'à ce que le fang forte ; on frotte en fuite l'endroit avec du thériaque , de l'or vietan. Mules traverfieres . Les mules traverfieres viennent au-def fus de l'endroit des crevaffes , c'eft-à- di re , qu'elles entourent le boulet à l'en droit du pli ; & fouvent au-deffus de ce pli , dans laquelle a paru la premiere mule traverfiere , il s'en forme quelques autres. Elles font toutes douloureufes , & font boiter le cheval , par la douleur qu'elles
C S 1. COCHER. 359 lui caufent , attendu qu'en marchant , il eft obligé d'étendre , & de plier fucceffi vement cette jointure , quelquefois mê me le boulet enfle , c'eft alors que le mal eft plus difficile à guérir. Voyez crevaffes. Nerferrure. Le terme de nerferrure fignifie bleſſure faite au nerf de la jambe. Cette bleſſure provient de ce qu'un cheval fe fera don né un coup avec le fer du pied au ten don de la jambe de devant , ou même avec un des pieds de devant. Cet accident arrive d'ordinaire aux che. vaux dans des courfes violentes , & dans les mouvemens précipités qu'on leur fait faire , comme dans les chemins pleins de cailloux , ou dans les ornieres , lorfqu'on les preffe trop , car alors ils peuvent s'y attraper les tendons des jambes de devant. 5 Quand la nerferrure eft récente , & qu'elle n'eft pas confidérable , il la faut traiter d'abord avec de l'eau de vie , & la traiter comme une entorfe. Quand elle eſt plus forte , on la frotte avec l'huile d'o live fort chaude , puis on préfente une pelle rouge vis-à- vis , pour faire pénétrer Î'huile. On continue à remettre de l'huile , & à repréſenter la pelle pendant une de
LE • PARFAIT 360 mi-heure , au bout du quel tems la ner ferrure eft presque toujours guérie. Si la nerferrure n'eft pas récente , & qu'il y ait du tems que le coup ait été donné. On met un linge en cinq ou fix doubles , on le mouille , & on en enve loppe le mal. On préfente enfuite un fer vis-à-vis & fort près du linge mouillé. Quand le linge eft fec , on le remouille on approche le fer rouge , on continue ee procedé pendant une demie heure ; après quoi on facrifie la peau fur l'enflu re , c'eft-à-dire , on la découpe légere ment en travers & non en long , pour faire fortir le fang extravafé , puis on frotte avec de l'eau de vie , de l'efprit de vin , de la thérébantine , ou de l'huile de thérébantine. Si la nerferrure eft confidérable , & qu'il y ait grandes douleurs , on faigne , on met le cheval à la diete , & on le laiffe en répos. Si le tendon eft découvert , on applique la teinture d'aloës , ou l'onguent de fcarabeus. Si après tous ces rémédes , il refte de l'enflure , pour la refferrer , le plus fur eft de donner fur la nerferrure cinq ou fix rayes de feu de haut en bas, Palpitation
COCHE R.. 361 Palpitation de cœur. La palpitation eft un mouvement du coeur plus vif qu'à l'ordinaire , qui arrive comme par fécouffes d'intervalle en in tervalle. Ce mal peut être occafionné par de mauvaiſes digeftions , par un travail trop rude , par une courfe trop rapide , par un leger refroidiffement , ou par de mauvaiſes nourritures . Ce mal n'eft pas mortel , à moins que la fievre ne s'y joi gne. On trouve la maniere de la guérir dans les livres que j'ai cité plufieurs fois. Peignes & mal d'âne. 11 Il y a deux fortes de peignes ; peignes fecs , qui font des dartres farineufes , & peignes humides , qui font des dartres coulantes. Le mal d'âne eft une espece de peigne humide , ou un ulcére dartreux. Les peignesfecs fe dénotent par une craf fe farineufe , qui paroît fur la couronne , fur laquelle le poil devient heriſſé : la cou ronne enfle , & par fucceffion de tems , ce mal monte au paturon , au boulet , & quelquefois jufqu'auprès du genoüil & du jarret. Les peignes humides ont les mêmes ſi Hh III. Partie.
362 IT LE PARFA gnes que les fecs , excepté qu'au lieu de craffe farineufe , ils font abreuvés d'eau puante. Ces maux ne font jamais doulou reux , mais ils font très difficiles à guérir radicalement , fur-tout quand ils font en vieillis. Les peignes humides fe fechent pendant l'Eté & reviennent l'Hyver. Les vieux chevaux de caroffe font fujets à ce mal,qui n'arrive que rarement aux jeunes. Pouffe. La Pouffe eft une oppreffion de poitri ne , qui empêche le cheval de refpirer. On diftingue ce mal en deux eſpeces bien dif férentes l'une de l'autre. L'une peut fe gué rir , qui eft la Pouffe flegmatique , l'autre eft incurable , qui eft la pouffe phtifique, ou phtifie même. Quand un cheval a cel le-ci, c'eft que par des efforts violens dans des courfes outrées , il s'eft rompu quel ques vaiffeaux dans la poitrine. L'autre eft auffi occafionnée par un travail outré , par morfondure , ou par des alimens trop abondans , ou trop nourriffans. Les grands chevaux , & les chevaux qui ont le ventre avalé , auffi-bien que les vieux chevaux font fujets à devenir pouffifs. Il faut fe prendre de bonne heure pour guérir cette maladie , car quand on laiffe vieillir la
L СоснE R. 363 pouffe , on a bien de la peine à en venir à bout. Retention d'Urine. La Retention d'urine provient d'une difpofition inflammatoire du col de la vef fie , ou des reins , caufée par l'âcreté de l'urine , après de grandes fatigues , qui auront échauffé le cheval , & auront ren du la matiére de la tranſpiration trop fa lée , & trop corrofive . Ce mal a plufieurs degrés. Quand la rétention eſt légére , elle eft aifée à gué rir. Pour peu que le mal augmente , les tranchées s'y joignent quelquefois , & font fi violentes , que le cheval eſt en danger. Le cheval qui n'a que la rétention fans douleur , ne montre pas d'autres fignes > finon que de fe prefenter fouvent pour uriner , & n'urine que peu , & avec diffi culté. On donne au cheval qui a la réten tion " une pinte de vin blanc , qu'on lui fait avaler. On fait rougir des cailloux , puis on les éteint dans le vin blanc , & on donne ce breuvage au cheval. Il y a des rémedes extérieurs experimentés , pour animer , & piquoter le conduit de l'urine. enfeignés par ceux qui ont écrit fur les maladies des chevaux. Hh ij
364 LE PARFAIT Seime. Ce qu'on appelle feime ou quarre eft une fente de la corne , depuis la couronne jufqu'au fer, qui coupe le quartier en deux, en ligne droite de haut en bas. Quand on a un cheval , dont les pieds marquent de la difpofition pour ce mal , il ne faut pour cet effet , qu'avoir une grande attention à lui tenir les pieds gras & humides , lui mettre longuent de pied & du crotin mouillé. Solbature. La Solbature eft une foulure & meur triffure à la fole . On connoît la folbature, en ce qu'on trouve la ſole chaude & noi re , feche & douloureuſe. Il y a des fol batures , qui cauſent tant de mal au che val , qu'il néglige fouvent fa nourriture , & refte couché de peur de s'appuyer fur fa fole. Ce mal peut avoir plufieurs cauſes , comme d'avoir marché pendant les cha leurs dans un pays fabloneux , d'avoir long-tems cheminé, & déferréfur un terrain dur. Quand la folbature provient du fer › qui a porté , on pare le pied jufqu'au vif , puis on met fur la fo le de l'effence de thé
" COCHE R. 365 rebentine avec du tarc. Si la folbature eft légere , &qu'elle ne vienne que d'une fo le qui fe feche , pour la ramollir , toutes les graiffes & huiles font bonnes . Si la fol bature fait des grandes douleurs au che val , & que la fole foit extrêmement fé chée , & meurtrie , le meilleur rémede eft de faigner une fois , puis de deffoler. Suros. Le furos eft une tumeur calleuſe , dure & fans douleur , qui vient fur l'os du ca non de la jambe. J'en ai parlé dans la fe conde Partie , page 262. La caufe la plus ordinaire des Suros , eft l'effet des coups & heurts que les che vaux fe donnent eux-mêmes dans les patu rages , ou de ceux qu'ils reçoivent des autres chevaux. Le Suros fe diffipe à me fure qu'un cheval vieillit. Il y a pluſieurs façons de faire paffer un furos , uſités parmi les Maquignons & d'autres. Tayes. Il y a deux fortes de Tayes , ou blan cheurs. L'une eft une espéce de nuage , qui couvre tout l'oeil : l'autre eft une tâ Hh iij
IT 366 A LE PARF che ronde épaiffe & blanche , qui eft fur la prunelle. On appelle cette taye la perle, parce qu'elle reffemble en quelque façon à une perle. Ces maux peuvent venir d'un coup , ou d'une fluxion , & ne font autre chofe que des concretions d'une lymphe épaiffe fur la cornée. On diffipe ces maux , en mettant ſur la taye de la poudre de fiente de lézard jufqu'à guérifon , ou de la couperofe blanche , fucre candi , rutie partie égale , ou du fucre. Teignes. Les Teignes ne font autre chose que la corruption de la fourchette , qui tombe par morceaux jufqu'au vif , ayant une odeur de fromage pourri très- forte. Il s'y joint une demangaifon , qui oblige le che val à frapper precipitamment & fréquem ment du pied contre terre. Ce mal eft quel quefois affez douloureux pour faire boiter le cheval. Il eft auffi quelquefois l'avant coureur du fic , qui pourroit en provenir, fi on le néglige , ou qu'il s'obftine. Tenefme. Tenefme eft une eſpèce de tranchée très dangereuſe , caufée par une grande
COCHER . 367 âcrété du fang. Si la fiévre ſurvient avec ce mal , le cheval eft en grand peril : il y faut apporter de prompts rémedes , com me de grandes faignées. Mais qu'il y ait fiévre ou non , il faut toujours faigner beaucoup , deux ou trois fois , coup fur coup , faire garder une diéte auftére , en ne donnant que de l'eau blanche & des lavemens , compofés de fon & graine de lin , de chacun une poignée , de dix onces d'huile commune de deux ou trois jaunes d'oeufs. On délaye les jaunes d'oeufs avec l'huile , & on mêle le tout. Si le mal con tinueon peut donner un breuvage fait avec de l'huile commune , & de l'huile roſat , de chacun quatre onces. D'un feptier & demi d'eau rofe , & de quatre onces de fu cre fin. On ne purge point pour cette ma ladie. Tiq. Le Tiq eft une mauvaiſe habitude , que contractent quelques chevaux. Plufieurs tiquent en appuyant les dents fur la longe du licol , ou contre la mangeoire , ou au fond , ou fur le timon. D'autres tiquent en l'air , ou furla bride. Cette incommodité peut nuire à la vente du cheval. Il y a à cette incommodité plufieurs palliatifs . Le plus effectif de tous eft de donner l'avoi Hh iiij
T FAI 368 LE PAR ne dans un havrefac , pendu à la tête du cheval , & qu'il n'ait point de mangeoire. Toux. La Toux n'a qu'un figne , qui eft aiſé à diftinguer , c'eft la toux même. Il y a deux fortes de toux , la toux feche , & la toux graffe. La toux feche ſe joint communement à la pouffe, à la morve ou phtifie , &c. L'au tre toux eft fans accident , & n'eft propre ment qu'un morfondement. Elle ne con duit guéres à la pouffe , qu'au cas qu'elle s'invetére. A Lorfqu'un cheval a la toux , pour avoir avalé une plume , qui lui eft reftée dans la gorge , on le guérit en fourant un nerf de boeuf enduit de miel dans le fond du go zier , pour faire couler la plume. Lorfque la toux prend à un cheval , pour avoir marché en Eté dans les endroits , où il a refpiré , pendant quelque tems la pouffie · re , on peut le guérir aifément en le ra fraichiffant pendant quelques jours , avec dufon & de l'eau blanche. Tranchées. Les chevaux font fujets comme les hom 1
Сосне R. 369 mes , à des douleurs dans les inteftins. Ce mal s'appelle tranchées aux chevaux &col lique aux hommes. Plufieurs cauſes pro duifent les tranchées , & en font plufieurs efpéces. Il y a tranchées d'indigeftion & de vent , tranchées , qu'on appelle tenef me , tranchées de rétention d'urine , & de teſticules retirés ; tranchées rouges ou bilieuſes , & tranchées cauſées par les vers. Les tranchées de quelque efpece qu'el les foient , caufant beaucoup de douleur aux chevaux , donnent à peu-près les mê mes fignes , c'eſt- à-dire , que tout cheval, qui eft attaqué des tranchées , fe débat , fe couche , & fe releve fouvent ; il regarde fon flanc , & lafüeur lui prend. Voilà les fignes géneraux. Mais il s'en joint d'au tres à chaque efpece , qui peuvent donner quelque connoiffance de leur nature , & dont parlent les Livres que j'ai cités plu fieurs fois. Variffe. La Variffe eft une enflure toujours mol le & fans douleur , & n'eft qu'une dilata tion , ou un relachement de la veine , qui paffe au pli du jarret en dedans. Ce mal n'en eft quafi pas un , car il ne fait jamais boiter le cheval. Les chevaux de caroffe y
370 LE PARFAIT font plus fujets que les autres. Le meilleur rémede , felon le Nouveau Parfait- Maré chal , eft de n'y rien faire " & c'eſt cette maladie qui a le plus befoin du barrement de veine , puifque la variffe n'eft que l'en flure de la veine qu'on barre. Verrues. Les Verruës font de petites tumeurs écrouelleufes. Il eft aifé de les extirper avec de la foye cramoifi , qu'on ferre tous les jours un peu , jufqu'à ce qu'elle ait coupé cette racine. Si on ne peut lier la verruë , ou le poireau , on n'a qu'à les couper avec le fer & le feu. Vertigo. On appelle Vertigo deux efpeces de maladies , parce qu'elles ont quelques fi gnes communs à l'une & à l'autre. Cepen dant elles font fort éloignées de la même origine , car l'une vient du fang, & l'autre de vapeurs , caufées par une palpitation de cœur affez forte. Le grand travail dans les chaleurs peut caufer le vertigo de fang, pour lequel ,foit qu'il y ait fiévre ou non , il faut toujours faigner du train de derriere. Pour le ver
COCHER . 371 tigo de vapeurs il faut les mêmes rémedes, que pour la palpitation de coeur. Voyez le Nouveau Parfait-Maréchal fur ces deux ‫ז‬ j $ maladies. Veffigons. Les Veffigons font fimples , ou dou bles. Le fimple eft une enflure molle fans douleurs , & groffe comme la moitié d'une petite pomme , ou environ , croiffant entre cuir & chair , au- deffus des os du jarret , entre le gros tendon , & l'os du bas de la cuiffe du cheval. Il vient en dehors , ou en dedans du jartet. Le double n'eft autre chofe que deux veffigons , dont l'un eft en dedans, & l'autre en dehors. Cette tumeur eft roulante , & ce mal eft hereditaire. Les Veffigons groffiffent en vieilliffant, & la cure en eft fort difficile . Ils ne font pas toujours boiter un cheval , mais ils groffiflent par le tems , & empêchent le jarret de fe mouvoir facilement. Ce mal eft à peu-près de la nature du capelet , c'eft-à- dire , de la nature de la loupe. Ulceres. t I L'Ulcere n'eft autre chofe qu'une playe, qui jette de la matiere . L'ulcere eft fimple, ou compofé. Quand il jette un pus blanc,
LE PARFAIT 372 . il eft confidérable , & la guériſon en eft aifée. Il s'appelle fimple. Si le pus tourne fur la couleur du fang épais , & fentant mauvais, c'eſt un ulcere qu'on appelle for dide. Celui- ci eft plus confidérable. On appelle ulceres compofés ceux , qui font accompagnés de gangrene & de carie , parce qu'ils attaquent les chairs , les vaif feaux , & les os. Il y a auffi des ulceres fecs , qui ne rendent point de pus , lef quels font très- difficiles à guérir. Un ulcere peut venir par accident c'eft-à-dire , d'une playe négligée , qui dégenere en ulcere. Pour guérir un ulce re on commence par la diéte : on fait uſa ge de decoctions fudorifiques , & ame res , à-peu près , comme à la galle , & on fonge à la guériffon externe , c'eft- à- dire, à la réunion des ulceres. Urine. Quand on voit au cheval une urine claire & cruë , cela denote crudités dans le fang , & par confequent de mauvaiſes digeftions qu'il faut corriger, fans échauf fer le fang. Les amers font cet effet. Si l'urine eft rouge & enflamée , cela dénote que le cheval eft échauffé , & a befoin de rafraîchiffement.
COCHER . 373 Je n'irai pas plus loin fur les maladies des chevaux . Je n'ai parlé que de celles , qui font les plus connues , & dont il eft neceffaire qu'un Cocher ait connoiflan ce. Il y en a plufieurs , aufquelles , s'il fe trouve en Campagne,il peut rémedier fans le fecours d'un Maréchal. Ce font ces ma ladies accidentelles , qui ont befoin d'un prompt fecours , fur lesquelles je me ſuis le plus arrêté. Pour les autres que j'ai paf fées fous filence , il y a affez de livres qui en traitent , & je n'ai point eu defſein , comme je l'ai déja dit , de donner des le çons aux Maréchaux , mais feulement d'inftruire les Cochers , fur ce qu'ils doi vent fçavoir , fur-tout ce qui regarde leur métier. Troifiéme & derniére Partie.
***********:*:************ APPROBATION. 'Ai lûpar l'Ordre de Monfeigneur le Chancel" Jlier un Manufcrit intitulé le Parfait - Cocher ; dont j'ai crû l'impreflion utile au Public ; à Paris ce 20. Juin 1742. SIMON. PRIVILEGE GENERAL. deFrance Dieu, la:grace , LOU &IS de Navarre A nosdeAmés & féaux Confeil lers les Gens tenans nos Cours de Parlement, Maî tres desRequêtes ordinaires de notre Hôtel,Grand Confeil, Prevôt de Paris, Baillifs,Sénéchaux, leurs Lieutenans Civils , & autres nos Jufticiers qu'il appartiendra. SALUT ; notre bien-amé FRANÇOIS GABRIEL MIRIGOT , nous a fait expofer qu'il defiroit faire imprimer & donner au Public un Manulcrit intitulé Le Parfait-Cocher , ou l'Art d'entretenir & de conduire un Caroffe, avec la ma niere de panfer , de dreffer , de nourrir les Che vaux & les mettre au Caroffe, s'il Nous plaifoit lui accorder nos Lettres de Privilege pour ce neceflai res. A ces caufes , voulant favorablement trai ter l'Expofant , Nous lui avons permis & permettons par ces Prefentes de faire impri mer ledit Manufcrit en un ou plufieurs Volumes , & autant de fois que bon lui femblera , & de le faire vendre & débiter par tout notre Royaume pendant le temps de neuf années confécutives , à compter du jour de la datte desdites Prefentes. Faifons défenfes à toutes fortes de perſonnes , de quelque qualité & condition qu'elles foient , d'en introduire d'impreffion étrangere dans aucun lieu
S . de notre obéiffance ; comme auffi à tous Librai res ;Imprimeurs & autres, d'imprimer , faire im primer > vendre > faire vendre , ni contre faire le Livre ci-deſſus pecifié , ni d'en faire aucun extrait , fous quelque prétexte que ce foit d'augmentation , correction, changement ou au trement , fans la permiffion exprelle & par écrit dudit Expolant , ou de ceux qui auront droit de lui , à peine de confifcation des Exemplaires con trefaits , & de trois mille livres d'amende contre chacun des contrevenans , dont un tiers à Nous , un tiers à l'Hôtel- Dieu de Paris ,& l'autre tiers au dit Expofant , de tous dépens , dommages & interêts ; à la charge que ces Préfentes fe ront enregistrées tout au long fur le Regiſtre de la Communauté des Libraires & Im-primeurs de Paris , dans trois mois de la date d'icelles ; que l'impreffion dudit Livre fera faite dans notre Royaume & non ailleurs, en bon papier & beaux caracteres , conformément à la feuille imprimée & attachée pour modele fous le contrelcel def dites Préfentes ; que l'impétrant fe conformera en tout aux Réglemens de la Librairie, & notam ment à celui du dix Avril mil fept cens vingt cinq , qu'avant que de les expofer en vente le Manufcrit ou Imprimé , qui aura fervi de copie à l'impreffion dudit Livre, fera remis dans le mê me état où l'Approbation y aura été donnée ès main de notre très- cher & féal Chancelier le Sr. Dagueffeau , Chancelier de France , Comman deur de nos Ordres , & qu'il en fera enfuite re mis deux Exemplaires dans notre Bibliotheque publique , un dans celle de notre Château du Louvre , & un dans celle de notredit très- cher & féal Chancelier le St. Dagueffeau , Chancelier de France , le tout à peine de nullité des Préfentes ;
du contenu defquelles , vous mandons & en joignons de faire jouir ledit Expofant , & fes ayans caufes pleinement & paifiblement , fans fouffrir qu'il leur foit fait aucun trouble , ou em pêchement , Voulons que la Copie defdites Pré fentes , qui fera imprimée tout au long au com mencement , ou à la fin dudit Livre , foit tenuë pour dûement fignifiée , & qu'aux Copies colla tionnées par l'un de nos amés & féaux Confeil lers & Sécretaires foi foit aujoutée comme à l'ori ginal, COMMANDONS au premier notre Huiffier ou Sergent fur ce requisde faire pour l'execution d'icel les tou A& tes requis & necefiaires, fans demander autre permiffion, & nonobftant clameur deHaro , Chartre Normande & Lettres à ce contraires: CAR tel eft notre plaifir. DONNE' à Verfailles le vingt-quatrième jour du mois d'Août , l'an de grace mil fept cent quarante-deux , & de notre Regne le vingt-feptiéme. Par le Roi , en fon Con feil. SAINSON. I J'ai donné main levée à Monfieur Merigot, de l'oppofition que j'avois formée à l'enregistrement du prefent Privilege , fuivant l'accord fait entre nous. A Paris ce 2 3. Janvier 1743 . MESNIER. { Regifré fur le Registre XI. de la Chambre Royale des Libraires Imprimeurs de Paris Nº. 220. fol. 103. conformément aux anciens Régle mens confirmés par celui du 28. Fevrier 1723 Ce Privilege a étéregistré nonobftant le termepref crit > à cause d'une oppofition formée par le Sr. Mefnier , dont l'original de la main levée eft ci derriere , & la copie fur le Regiftre XI .fol. 103 . A Paris le 28. Janvier 17431 Signé. SAUGRAIN. Syndic. A 1
& en & les , fans ouem sPré com trenue scolla onfeil 17 . alon ferou dicel der H₂to CAR P les le de notre Con , de ment Carre Combien il faut de tours de grandes & de petites roues pour faire une lieuë. Le Diametre des grandes roues font de cinq pieds trois pouces , & par conféquent elles ont de circonférence feize pieds fix pouces. Cela pofé la lieuë commune de France d'une heure de chemin , ayant 3000 pas Géometrique , c'eft-à- dire > 15000 pieds , donnera 968 tours de roüe , trois quarts. Pour une petite lieuë de 2000 pas , qui vaut 10000 pieds , elle donnera 645 tours de roue, cinq fixiéme, & par conféquent le mille d'Italie ; qui contient 1000 pas , ou 5000 pieds , don nera 322 tours de roue , onze-douzième. Le Diamétre des petites roües de de vant ont 28 pouces de haut , par confé quent elles ont de circonférence 7 pieds quatre pouces. Cela pofé la lieuë commu ne de France d'une heure de chemin de 15000 pieds , donnera 2045 tours de bre No. roue , cinq - onzième. Pour la petite de 10000 pieds , elle donnera 1363 tours de roue , huit- onziéme de tours ; & le mille d'Italie de 5000 pieds , 68 neuf-onziéme de tours. U O Y •